Manifestement le titre du fil n'a pas découragé loin de là les contributions.
Je dirais d'abord que je déteste ce titre de "mauvais pianiste". Nous sommes tous des pianistes, plus ou moins expérimentés, plus ou moins libres techniquement, plus ou moins conscient de nos réalisations et de nos limites mais de là à se mettre d'emblée dans une posture "je suis un mauvais pianiste" c'est de l'auto dévalorisation destructrice qui ne fait pas avancer les choses. Ca n'a pas plus de sens que si je disais je ne sais pas courir le 100m en moins de 5s ou je n'ai pas découvert la relativité générale avant Einstein. Oui et alors ou est le problème ? Et d'ailleurs quand un professeur dit à un élève qu'il est mauvais vous vous insurgez bien contre ça non ?
Bon c'était le côté ronchon du matin. Mais relativisons, le sujet en dehors du titre c'était plutôt sur comment nous arrivions à évaluer notre pratique ce qui en soit n'est pas inintéressant.
Comment juge-t-on son réel niveau ? Mais qu'est ce que ça veut dire le "niveau" ? Oui pour m'interroger sur mes difficultés, oui pour m'interroger sur mes capacités à jouer telle ou telle œuvre, ça n'est pas très compliqué il suffit de l'écouter attentivement et de comparer avec lucidité à ce qu'on est capable de faire aujourd'hui techniquement et musicalement. Mais dire que mon niveau c'est 5 ou 6 sur l'échelle de Richter je ne sais pas faire. J'ai une bonne idée sur ce que j'arrive à faire sur le plan de la technique pure, par exemple gammes, arpèges, octaves, trilles et que sais-je, il me suffit de m'écouter attentivement et d'entendre le rendu musical à différents tempos. Ca me suffit pour me dire que ce morceau est à ma portée, va nécessiter un travail long ou est totalement en dehors de mes possibilités actuelles. Mais à la fin ce qui compte vraiment dans un morceau ce n'est quand même pas exclusivement le nombre de pains à la minute, c'est quand même la musique non ? Et ça c'est plus difficile à quantifier en niveau. Certaines pièces peuvent être techniquement à ma portée mais musicalement encore trop difficiles pour tout un tas de raisons.
De mon côté, le point principal à améliorer, celui qui me ferait sans doute le plus progresser c'est d'arriver à plus d'objectivité de l'écoute. Quand je joue je suis un peu dans un autre monde et plus vraiment conscient de la réalité. Peut-être est-ce aussi cela que j'aime finalement

Mais avoir une écoute plus fine, plus objective, bien entendre les nuances, la régularité, le phrasé, dès le début du travail, je pense que ça m'aiderait à avancer plus vite. En revanche certainement pas à jouer scarbo demain, ni jamais peut-être ce qui ne veut absolument pas dire que je me considère comme un mauvais pianiste, je refuse obstinément de rentrer dans cette attitude.
Un deuxième point qui me limite aussi je pense c'est d'arriver à saisir rapidement une œuvre, sa structure, son esprit, ce que je veux en faire à tel ou tel endroit, les nuances, le son, etc. C'est quelque chose qui je trouve lentement, dans la pratique, quand le morceau commence à se monter, avec des allers et retours. Mais arriver à comprendre tôt ce qu'il faut faire et ce que je veux faire, et ce avant de pouvoir le faire, doublé avec une écoute plus critique me permettrait je pense d'avancer plus rapidement, de cibler peut-être plus mon travail. Autrement dit, réfléchir un peu plus avant de jouer. Finalement ce ne sont pas exclusivement le nombre d'heures passées au piano qui comptent. Mais bon ce n'est pas parce que je vais plus ou moins lentement dans l'apprentissage que je suis mauvais. Et en plus, j'ose l'avouer, je prends du plaisir à jouer.
Je rejoins un certain nombre d'entre vous sur l'utilité de l'enregistrement. J'ai découvert cette pratique assez récemment et c'est vraiment utile.
Dans la catégorie remède, jouer en public aussi chose que je n'avais pas fait depuis très longtemps est aussi utile. Ca m'aide à ne pas me disperser et à chercher un peu plus.
Enfin une autre chose qui me ferait progresser mais c'est moins facile en tant que pianiste isolé, c'est la pratique collective par exemple la musique de chambre.
Après savoir s'il faut se mettre sur un divan car on n'aime pas Bach c'est une autre question. Et savoir si en jouer fait progresser la réponse me parait évidente. Oui tout autant que de jouer du Mozart, du Bartok, du Prokofiev ou du Chopin. Chaque compositeur s'inscrit à la fois dans un environnement technique de son époque avec ses particularités et ses difficultés propres qu'on ne va pas retrouver dans d'autres, dans l'environnement musical de son époque aussi, on peut aimer ou pas le baroque. Et donc en jouer fait progresser sur certains plans techniques et musicaux que l'on ne retrouve pas "à l'état pur" chez d'autres. Mais si on n'aime pas, on peut sans doute trouver des chemins détournés qui seront peut-être moins directs mais aussi porteurs de plaisir.