Thrond a écrit : mer. 22 déc., 2021 9:06
En fait ton lien m'aide à mettre le doigt sur ce que je n'aime pas chez Bach: le rythme. Evidemment il faut mettre ça en regard de son époque, mais à chaque fois que j'écoute du Bach, bahhhh... j'entends du Bach, pas de doute. Il y a toujours un aspect très "carré", rigoureux, mathématique, et un peu monotone. (Pas taper!)
Je reconnais son génie dans la construction, dans la maîtrise de l'harmonie, je reconnais évidemment son apport immense à la musique, mais il me manque la "folie".
Sinon, magnifique interprétation.
C'est l'art du contrepoint.
Bach construit une architecture qui paraît linéaire, sans surprises, alors que son génie crée justement l'inverse, les modulations et le choix des harmonies me glissent dans une extase que les autres compositeurs ont du mal à produire, mis à part Mozart et Beethoven.
Et l'émotion surgit à ces moments.
Telemann ou Haendel sont de la même époque, composaient de façon assez proche de façon linéaire, mais les mélodies, l'harmonisation, le contrepoint, les développements, sont d'une inspiration et d'une portée inégalables chez Bach.
L'aspect « carré » est à considérer comme une sorte de
continuum dans lequel se construisent et s'entrelacent les formes mélodiques, elles sont intriquées, et c'est ce que font tous les compositeurs dans leurs compositions à un moment ou à un autre, Chopin dans ses développements, Beethoven également (cf l'Adagio cantabile où pas un seul arrêt n'est présent).
Mozart n'y échappe pas, mais ce dernier a suivi l'influence italienne et une mode plus légère de la musique, où la mélodie est détachée de l'accompagnement.
Ravel, dans son Concerto, crée son mouvement lent à la Bach : aucun arrêt, le continuum se poursuit pendant plusieurs minutes.
Le romantisme a institué une musique expressive, où c'est l'
émotion qui dirige et inspire.
Pour ma part, c'est justement l'émotion que je trouve plus triviale que la
transcendance.
L'émotion personnelle d'un compositeur, ses états d'âme, je m'en fiche un peu, comme celui de mon voisin

.
Mais si au-delà, la transcendance conduit à une élévation de l'esprit, là ça m'intéresse, car c'est une forme d'universalité qui est produite.
Beethoven était un romantique de première génération, il ne se laissait pas emporter par l'émotion pure, il gardait une forme d'intellectualisme à la Bach, d'ailleurs il admirait ce dernier.
La forme musicale a certes évolué, pourtant à l'époque dite baroque, tout le monde ne composait pas exactement comme Bach, cf les Français et les Italiens, qui produisaient des segments mélodiques plus courts, avec des développements de contrepoint bien plus courts également.
Ce que tu reproches à la forme musicale de Bach, souvent très linéaire, c'est toujours, justement, ce que ses détracteurs lui reprochent.
Et moi, c'est justement cela que je trouve puissant et efficace.
Point d'artifices : c'est l'architecture elle-même qui s'exprime, comme une cathédrale aux proportions symétriques.
Finalement, c'est une conception de la
beauté différente entre les compositeurs, mais les modes entrent largement en jeu.
Les heures passées à travailler et jouer Bach ne me lassent jamais, tant les harmonies sont inattendues, alors qu'avec les autres compositeurs j'ai moins ce sentiment de surprise, et l'ennui me gagne avec bon nombre de pièces de compositeurs à cause d'une architecture moins rigoureuse, en fait, le contrepoint me manque

!
Comme je le disais plus haut, et si je le dis c'est que beaucoup ici sont de mon avis, Bach a été mon inspirateur, comme un père spirituel, et même si j'écoute et je joue d'autres compositeurs avec délice, je reviens toujours à Bach, comme une source et un aboutissement, comme s'il avait déjà tout dit.
Sur mon lit de mort, si possible c'est un morceau de Bach que je voudrais entendre !
C'était juste une réflexion, je ne cherche évidemment pas à te convaincre, mais juste exprimer ce que je ressens avec Bach et que je ressens moins ailleurs.
