comment utilisez-vous votre poids?

[bach_addict]

En particulier, utilisez vous l'inclinaison de votre torse par rapport à la verticale pour faire des nuances ?

j'ai (re)découvert ça lors de mon dernier cours, et j'ai l'impression d'avoir découvert une nouvelle dimension dans le contrôle du son. Comme il est beaucoup plus facile de doser l'inclinaison du torse que la force à mettre dans les doigts, je trouve que le contrôle des nuances "basses fréquence", comme les crescendo et decrescendo devient beaucoup plus simple.
En plus je commence à associer nuances et orientation et le réflexe se prend très vite : je vois un "ff" et je pense immédiatement à "rentrer dans le piano", alors que si je vois un "pp" instictivement je "recule", et j'obtiens bien les effets voulus.

Sinon physiquement ça s'explique très bien : plus ou moins de poids donne plus ou moins d'accélération à la touche (F = m x gamma n'est ce pas... ) donc plus ou moins de vitesse à l'impact.

Je ne sais pas si c'est évident pour tout le monde, mais en tous cas pour moi c'est nouveau (je le faisais un peu instinctivement sans trop savoir pourquoi, mais maintenant grâce à ma prof je le fais consciemment et je trouve que c'est un outil formidable)....

Ca ne remplace pas les autres technique comme mettre du poids dans les doigts ou la main que l'on veut faire ressortir, bien sûr, mais ça vient en complément.

[alphareg]

Bonjour,

En fait, idéalement (je dis bien idéalement), tout le bras, de l'épaule jusqu'au bout des doigts devrait être relâché et les variations de poids imprimé aux notes devrait provenir de cette variation d'inclinaison du torse : on s'appuie simplement plus ou moins fort sur le piano. En réalité c'est évidemment plus complexe, le relâchement complet du bras et de la main est à la fois impossible et ne permettrait pas de jouer, déjà il faut bien opposer une résistance à la pression du clavier (sinon on tomberait sous le piano...) et d'autre part il faut bel un bien une action musculaire pour faire bouger les doigts.
Mais c'est effectivement la base de tout technique moderne et physiologiquement "correcte" : il faut essayer, même si cela relève parfois plus d'une vue de l'esprit que d'une réalité physique, de transférer le poids du torse dans son jeu. C'est généralement ce qui différencie les pianistes à la sonorité ample de ceux à la sonorité plus, comment dire, aigrelette
Je crois que ça vient assez naturellement passé certain niveau technique, pas avant car il y a probablement un cap à passer avant d'arriver vraiment à se détendre en jouant.
Pour ma part ce n'est pas quelque-chose auquel j'accède immédiatement ni systématiquement : lorsque je n'ai pas joué depuis longtemps, je suis un peu crispé des épaules et je sens une distance comme un mur invisible entre l'instrument et moi. Mes mains ont alors beaucoup plus de travail et ont tendance à faire mal rapidement si je cherche à jouer trop vite ou trop fort. Par contre au bout d'une heure, je ne pense plus à mes épaules, mes bras ou mes mains, tout semble beaucoup plus facile, je peux jouer fort et vite sans me fatiguer autant, et effectivement je constate que "j'appuie" sans m'en rendre compte contre le piano.

@+

PS : ne pas essayer la même technique sur une clavecin

[bach_addict]

en tous cas celà rend définitivement certains problèmes complètement triviaux...

à la fin du nocturne 1 (si b min), par exemple, la descente en tierces démarre "ff" et on doit terminer "ppp" en une douzaine d'étapes. Pour faire ça avec les doigts, bon courage, mais faire ça avec le poids du corps...c'est les doigts dans le nez (enfin, ceux de la main gauche vu qu'on a une pause à la MG).

Et le plus fort, je trouve, c'est qu'il n'y a pas besoin de "réviser" cette technique, une fois qu'on la comprise, hop, on l'utilise...

[bigrounours]

Pour faire les fff, mon prof a utilisé l'image de 'repousser le piano'. Et effectivement pour réaliser cette image, inconsciemment on se penche le buste en avant et on se relève, on n'utilise donc tout le poids de son corps.

[JPS1827]

J'ai tendance à penser que toutes ces images sont très utiles à chacun (leur utilité varie d'ailleurs beaucoup au fur et à mesure que le temps passe, chaque progrès suscitant de nouvelles association d'idées utiles à un nouveau progrès) mais qu'elles ne correspondent pas vraiment à la réalité. La notion de jeu par le poids est d'ailleurs assez ambiguë : une fois qu'on a appris à "laisser tomber" l'avant bras et le bras sur le clavier sans crispation, on s'aperçois que le son obtenu avec un accord de trois notes par exemple joué par un membre supérieur de 4 à 5 kilos tombant librement d'une hauteur de 10 à 20 cm correspond à un fortissimo par spécialement agréable à l'oreille. Il est sûr qu'on modifie le son qu'on obtient en se rapprochant ou en s'éloignant du clavier, mais je ne suis pas convaincu que le "poids" y soit pour grand-chose. Enfin, c'est mon impression, mais je me trompe peut-être complètement…

[alphareg]

@JPS1827
Je partage ton point de vue, c'est pourquoi j'avais glissé (quoique discrètement )

...même si cela relève parfois plus d'une vue de l'esprit que d'une réalité physique...

Cette question de poids est surtout une "image mentale" à acquérir, qui permet ensuite de faire corps avec l'instrument et d'améliorer l'action de l'ensemble du tronc (dos, bras, mains), dans l'optique d'une production sonore optimale et d'une technique fluide et "facile".

[bach_addict]

physiquement je pense que ça s'explique assez bien quand meme.
Ce qui compte c'est la vitesse d'impact du marteau sur la corde, donc la vitesse d'impact de la touche sur le petit levier qui activera le marteau au bout d'une chaine assez complexe de pièces en bois.
Cette vitesse d'impact étant liée à la force appliquée sur la touche (car accélération = masse x force et la vitesse finale est l'intégrale de cette accélération...) donc selon que l'on fait porter le poids de son corps plus ou moins sur ses mains ou ses ...fesses, le volume sonore obtenu est bien fortement modulé. Ce n'est pas une vue de l'esprit, ça s'explique réellement. Et le raisonnement est valable même dans le cas d'un départ doigt posé sur la touche, donc vitesse initiale nulle (je précise parceque dans le post précédent JPS parlait de "chute libre de 10 à 20cm", ce qui ne produit pas un résultat particulièrement musical).
Si on part "doigts aux clavier", à vitesse nulle on aura simplement : vitesse d'impact Vi = 1/m x (Force appliquée sur le doigt - "Résistance du mécanisme") x durée d'enfoncement dT
ou simplement Vi = 1/m x (F -R) x dT
Le volume sonore sera une fonction croissante de dV
F la force appliquée sur le doigt est une fonction de notre position au piano, donc une fonction de plusieurs paramètres, dont l'un d'entre eux est l'axe du torse (mais il y en a d'autres...).
Notez que dans cette exemple, je pars doigt sur le clavier donc à vitesse initiale nulle, si je partais de plus haut (1cm) j'aurais simplement une vitesse initiale V0 et on modifierai l'équation plus haut en : Vi = V0 + 1/m x (F -R) x dT
Un détail intéressant :la vraie vitesse initiale (au moment où la touche se met en mouvement) sera en fait plus faible que la vitesse initiale juste avant que le doigt entre en contact avec la touche, car le doigt est mou (plus ou moins selon que l'on attaque de la pulpe ou verticalement) donc il y aura une dissipation d'énergie, petite mais au résultat audible (on entend bien la différence entre une attaque verticale et une attaque de la pulpe). Si on avait des doigts complètement indéformables (comme le scientifique allemand dans "Docteur Folamour" avec son bras en fer, et bien, ça sonnerait plus fort )

Bon, ça part un peu en vrille et ça ne nous aide pas énormément en pratique, mais bon ce sont des notions utiles, je trouve, comme ça on sait qu'on creuse dans la bonne direction. Mais après, à votre niveau, vous devez le faire complètement intuitivement...

Ps: on m'a demandé dans un autre fil comment je pouvais comparer le piano aux maths...heu bin...comme ça par exemple

[André Quesne]

Tu devrais suggérer tes formules à la nouvelle génération de pianistes Je ne pense pas que les Richter, Rubinstein, Arrau, Argerich ou autres... se soient posés autant de questions mais je reconnais que ta démonstration reste valable sur le plan théorique; elle permet au moins de faire comprendre certains phénomènes.

Avant de commencer à enfoncer la moindre touche, la respiration, l'équilibre et la détente du corps sont primordiaux; c'est le point zéro. Ensuite, ce n'est que l'oreille qui a son importance et nous renseigne sur ce qui ne va pas; elle peut nous obliger à changer nos mauvaises positions.
En cours d'exécution cet équilibre qui part de l'instant zéro va changer afin d'apporter l'interprétation souhaitée. Equilibre du corps, des bras, des mains... Et puis le pied gauche dont on ne parle jamais sauf pour la pédale una corda n'a-t-il pas aussi son importance dans l'équilibre du corps ? Et puis en fonction de sa mobilité, n'apporte-t-il pas plus ou moins de poids sur le clavier en complément de la position du corps

Le réglage de la hauteur du tabouret semble avoir une certaine importance, je pense qu'il faut trouver sa position; celle qui semble procurer le plus d'aisance.
Cependant, il est curieux de voir certains anciens pianistes jouer très bas et le plus souvent avec une certaine immobilité