J'ai acheté dès sa sortie et bien écouté ce cd, j'en avais même parlé dans un autre fil, second paragraphe:
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C'est drôle, le présent fil semble s'orienter davantage vers une discussion de la modification du piano que de l'interprétation... sans doute parce que, pour la plupart, vous n'avez pas écouté le cd ? Il a été assez mal reçu par la critique en France (c'est ce dont je parlais dans cet autre fil), mais beaucoup plus à cause des choix interprétatifs que de la froideur ! Pour ma part, même si je comprends très bien qu'on trouve 'froid' le jeu de Zimerman, j'aime quand même ce disque (peut-être à cause de mon préjugé favorable à l'artiste, qui m'a fait découvrir et aimer Chopin au début des années '90, dans mon cas fallait le faire !). Néanmoins...
J'avais lu le livret avant d'écouter le cd, sans d'ailleurs m'arrêter le moindrement du monde à l'aspect 'piano modifié' - oui, c'est son obsession, mais pas la mienne, et ses tripatouillages ne nuisent pas, c'est tout ce qui compte. On ne va pas évaluer le cd sur cette base, quand même ?! Ce qui m'a plutôt intéressée, c'est la justification par Zimerman de sa vision de Schubert comme un jeune homme encore heureux, qui, selon lui, ne se voyait pas 'en train de mourir'. À l'écoute, j'ai été immédiatement convaincue par sa vision de la D.959, habituellement jouée de façon tragique ('composée par un mourant'). Ici, elle est joyeuse, légère, magnifiquement chantante et même dansante; j'y entends un jeune homme heureux qui se promène dans la campagne. Certes, le jeu de Zimerman n'est jamais complètement passionné, mais il est vivant, expressif - on l'entend même chanter dans le dernier mouvement ! - et à aucun moment de l'écoute je n'ai eu envie de l'entendre la jouer autrement. Pourtant, c'est précisément cette vision 'optimiste' de la sonate qu'on attaque chez messieurs les critiques.
Pour la D.960... là j'ai décroché, et les écoutes successives ne m'ont pas complètement convaincue. J'y entends de très belles choses, mais tout ça me paraît bien souvent statique et même ennuyant, en particulier dans le second mouvement. Il le joue très lentement, mais Richter aussi le joue très lentement et pourtant chez ce dernier, non seulement on ne s'ennuie pas, mais c'est même magique ! Chez Zimerman, il n'y a pas d'
andante; il fait des pauses mais ces pauses ne créent pas l'attente comme elles le devraient, elles ne nous laissent pas dans l'expectative, dans l'espérance de la suite... il s'arrête, tout simplement. Et repart. Et s'arrête. C'est comme si, au lieu de marcher lentement, il mettait un pied devant, ramenait l'autre, puis s'arrêtait pour réfléchir avant de faire... un autre pas suivi d'un autre arrêt. J'entends une série de pas très délibérés. Chez Richter on entend ces pauses, ces respirations, comme des
hésitations, on
désire la suite. On entend toujours un
andante. C'est aussi ce que j'entends chez Arrau, d'ailleurs, ou chez Paul Lewis, deux autres interprétations de cette sonate que j'aime beaucoup.
Bon, j'ajoute que j'aime quand même ici le
scherzo, tout comme le dernier mouvement, que Zimerman joue d'une manière un peu juvénile et bien chantante, plus proche de ce qu'il fait dans la D.959. Côté son, c'est assez sec, comme toujours - mais je dirais, comme toujours chez DG. Il semble que ce soit ce qu'on aime chez les ingénieurs du son de DG. Et faut croire que ça convient à Zimerman, car son obsession ne s'arrête pas à l'instrument. Il supervise et contrôle aussi toutes les étapes de l'enregistrement, soyez-en assurés !
Jacques, quand tu auras bien écouté le cd, j'aimerais savoir ce que tu en penses finalement.