Parlons-en Prokofiev ? Je transfère quelques mots ici pour ne pas polluer le fil concours.
nox a écrit :Pourquoi ajouter la polonaise, au lieu de compléter la sonate de Prokofiev ?
mllevinet a écrit :Parce que je la retravaillerais pas cette année, et que le public n'est pas trop fan de ce genre de musique quand c'est une première écoute.
Lee a écrit :Ou troisième, quatrième...
Okay a écrit :Après Scriabine, on va aussi te convertir à Prokofiev. Juste une question de temps
Je veux bien, je t'écoute.
davsad a écrit :
Ha Lee, on se comprends
(pardon d'avance à tous les fans, je ne dis bien-sûr pas que Prokofiev est un mauvais compositeur, tout simplement je ne parviens pas à apprécier son esthétique...)
Je signale sur le fil "pièces qui détonnent" Okay et Nox avaient cité quelques œuvres sympas (parce que ça ne sonnait pas comme Prokofiev) :
Sonate n°1 en fa mineur ; voire la n°4 en ut mineur, 1er mouvement
10 pièces op.12 ou l'étude op.2 n°1
“Wrong doesn't become right just because it's accepted by a majority.” - Booker Washington
Si mes souvenirs sont bons, la première chose (autre que Pierre et le Loup ) que j'ai réussi à écouter de Prokofiev, c'est ceci, les 10 Morceaux de Roméo et Juliette, arrangés pour piano par Prokofiev himself (j'adorais Mercutio). Puis il y a eu le Concerto n°3. Un jour, j'ai découvert à un concert le 4ème mouvement de sa 2ème sonate op.14, ça a été le coup de foudre immédiat ! Maintenant il m'arrive d'écouter quelques-unes de ses sonates (la 7ème par Sokolov ! ) et concertos... même si certains m'ennuient un peu, encore.
Prokofiev est l'un de mes compositeurs préférés. On ne peut pas forcément aimer toutes ses facettes, j'ai moi-même mes préférences, mais je doute qu'il puisse vraiment laisser indifférent. Ce que je préfère chez lui, c'est peut-être son don pour le sarcasme et l'humour noir (il y a un cahier qui s'appelle comme ça, d'ailleurs), ainsi que son lyrisme. C'est un immense mélodiste, un génial inventeur de thèmes, ne l'oublions pas.
Je crois qu'il y a peu de compositeurs qui ont autant de visages aussi individuellement affirmés, c'est une vraie boule à facettes. Il y a des oeuvres qui parlent très directement et des choses beaucoup plus abstraites.
Roméo et Juliette est l'une de ses oeuvres emblématiques, il vaut mieux l'écouter à l'orchestre d'ailleurs. La plupart des pièces du cahier pour piano sont extrêmement difficiles. En tout cas c'est une très bonne suggestion d'écoute.
Les visions fugitives sont un bon résumé de son 1er style, on y trouve à peu près tout ce qu'il sait faire, un peu comme Chopin dans les préludes. Ce sont vraiment des instantanés.
Dans les concertos, le plus célébré est et restera le 3e, pour son équilibre et son inspiration. On est en plein dans sa période néo-classique, où il fréquente le Paris des années folles. Personnellement, je lui préfère de loin le 2e concerto, c'est d'ailleurs l'oeuvre par laquelle je suis rentré dans son univers et elle reste spéciale pour moi. Il y a énormément de passages très puissants, et on comprend d'un coup tout ce que la musique de films jusqu'à aujourd'hui doit au génie de Prokofiev (il en a d'ailleurs aussi composé).
La 2e sonate est la meilleure recommendation d'écoute dans les sonates. Elle a une forme parfaitement classique, et comporte beaucoup de moments irresistibles. Le 2e thème du premier mouvement est magnifique, plein de larmes je dois dire. Le scherzo est assez génial, une toccata pleine d'energie. Le mouvement lent est une sombre méditation, très fine harmoniquement, et le finale est un rondo vertigineux (voilà le sarcasme que j'adore chez lui).
On parle beaucoup des sonates de guerre (les 6-7-8), mais je ne pense pas que ce soit le point d'entrée le plus directemenet séduisant de Prokofiev. Voilà en résumé ce qu'on y trouve.
La 6e est un condensé de barbarie dans le 1er mouvement, le Scherzo et la Valse forment 2 ballets de fantomes d'un genre très différent, et les spectres ne sont pas très loin dans le vertigineux finale (je le trouve vriament très réussi). La 7e est la plus jouée car elle est courte (moins de 20 minutes contre une demi heure pour les 2 autres). Elle n'est pourtant pas très facile d'accès : le 1er mouvement est un autre visage de la barbarie (celui de la panique dans les parties rapides, et de l'aberration dans les moments lents), le second alterne lyrisme et futurisme de belle manière, et le finale n'est ni plus ni moins qu'une bataille de chars. Ma préférée est la 8e, beaucoup plus introvertie est mystérieuse que les 2 précédentes (il faut écouter Egoroff ou Gravilov dans cette sonate, que je préfère presque à Richter, trop contrôlé à mon goût). Deux mouvement monstrueux encadrent une petite boite à musique qui carillonne (tu vas aimer ce mouvement lent je pense). Le permier mouvement est quasi philosophique, certains motifs sont posés comme de véritables questions. Et on a aussi des tourbillons où la raison se perd. D'un point de vue sonore, c'est assez extraordinaire. Le finale retrouve un peu les accents futuristes du jeune Prokofiev, bourré d'effets de brio, offrant un peu la face lumineuse de celui de la 2e sonate, et il y a cette page étonnante avant la reexposition où Prokofiev semble vouloir convoquer Scriabine ...
Les sonates 5 et 9 sont plus compliquées à saisir, je ne les conseille pas en première intention. La 1ère n'est pas du Prokofiev, la 3e j'arrête de vous bassiner avec. Les mouvements 2 et 3 de la 4e sont de vraies réussites.
Si tu peux, écoute le 2e concerto pour violon, c'est de la très très grande musique.
Merci beaucoup pour vos conseils et suggestions, quelqu'uns seraient de bonne musique de Halloween ! Bons bonbons !
Ce qui me dérange le plus chez Prokofiev est la dissonance, souvent ça me fait l'arrêter nette, je ne sais pas si en écoutant de moins dissonant à plus dissonant on prend plus facilement goût, mais j'ai l'impression les plus tardives ne sont pas forcement les plus dissonants, si ?
rachmaninoff a écrit :(Bach ✓, Scriabine ✓, Mozart ✗, Prokofiev ? )
Correction : Mozart ✓*
*en mineur ou opéra
“Wrong doesn't become right just because it's accepted by a majority.” - Booker Washington
Lee a écrit :j'ai l'impression les plus tardives ne sont pas forcement les plus dissonants, si ?
Il n'y a pas de lien entre l'époque et la dissonnance chez lui, ça alterne.
Même à l'intérieur d'une seule oeuvre, tu peux avoir des passages très euphoniques et d'autres où le piano est presque traité comme un instrument à percussions.
Sa dernière sonate est en do majeur et sa fin fait terriblement penser à celle de l'opus 111 (tu vois Beethoven a même influencé un siècle plus loin), se doutait-il que ce serait également sa dernière ? ... et pourtant elle abrite de sacrés dissonances. La 2e sonate a certains passages quasiment post-romantiques et d'autres d'une grande violence pleine de frottements dissonants.
Le dernier style de Prokofiev (celui de la 9e sonate et de la sonate pour violoncelle) semble "assagi", mais c'est surtout une conséquence de la pression politique qui ne lui a pas trop laissé le choix. D'ailleurs à ce propos, si tu as encore envie d'écouter du Prokofiev, il faut écouter sa 5e symphonie, qui est peut-être une des plus grandes réussites de la musique "soviétique".
Personnellement, je ne pense pas connaître de musique plus mélodique et âpre à la fois, mais c'est plutôt vers sa musique symphonique (les ballets, la symphonie concertante, la sonate pour violoncelle) et le 2e concerto que je me tournerais pour entrer dedans.
Je plussoie le tableau de Prokofiev que dépeint Okay. C'est en effet l'un des compositeurs les plus imaginatifs du XXe siècle. Et il faut en particulier mentionner son habileté dans les danses et les musiques rythmées en général, qui le rendent attrayant même pour ceux qui n'aiment pas l'âpreté habituelle de son écriture (personnellement, j'aime les deux). Sans parler de ses concertos pour pianos, beaucoup moins connus que ceux de Rachmaninov, et pourtant plus révolutionnaires. Sa sonate pour violon et piano est l'une des plus populaires du XXe.
C'est plutôt l'inverse, c'est celle pour violon et piano qui est détournée par les flûtistes.
Je ne sais pas si on parle de la même, mais moi, c'est celle-là: https://www.youtube.com/watch?v=wC4MHBW5mlI
Euh.... Non sonate écrite pour flûte et piano puis revue pour le violon, demande de Oistrakh. C'est une sonate que je connais bien pour l'avoir beaucoup jouée.
Et le second mouvement sonne vraiment mieux à la flûte ( pour une fois que c'est dans ce sens !).
Tiens, Lee, peut-être que cette lecture de la fameuse 7ème sonate, faite par Cassard sur France Musique aujourd'hui même (les coïncidences parfois !), t'aidera dans ton exploration (même si je ne suis pas du tout d'accord avec lui quant à l'interprétation de Sokolov !).
De mon côté j'ai du mal avec Prokoviev, je n'arrive pas à comprendre sa musique, je la perçois mal... C'est un style un peu ambiguë, souvent dissonnant qui ne m'attire pas... Bien sûr je mets en exception quelques oeuvres citées au dessus (je viens de découvrir sa deuxième sonate qu'Okey a cité, et elle ne me déplait pas...). Enfin bref ce n'est pas trop mon style musical, Prokoviev .
(Ne me détestez pas s'il vous plait :p )
Prokofiev est l'exemple type du compositeur que j'adore entendre en concert, mais qu'il ne me vient pas trop à l'esprit d'écouter chez moi. J'aime voir le côté physique de sa musique en même temps que je l'écoute.
Je transfère quelques mots ici pour ne pas polluer le fil concours.
