Lee a écrit :Bingo, une mission terminée ! J'adore et je n'avais pas écouté (ou j'avais raté) cet ouverture, merci Eds.

.
Mais de rien! Je suis heureux d'avoir pu partager un plaisir venant de ce compositeur...et je suis très fier de moi d'avoir fait découvrir quelques petites choses à deux membres si éminents de ce forum.
Okay a écrit :Je me souviens très bien du passage sur Prokofiev et Rachmaninov dans le documentaire, où Richter montre leur influence réciproque. L'oeuvre où ça me frappe le plus, c'est le premier mouvement de la 4e sonate, qui parfois sonne comme du Rachmaninov tout craché.
C'est amusant,j'aime beaucoup cette sonate et je ne l'ai jamais vue comme ça....A l'écoute, j'ai l'impression de voir peut être certains procédés techniques de Rachmaninov, mais je ne suis pas sûre comprendre où se trouve le caractère de Rachmaninov au milieu de tous les jeux et ruptures.
Je suis tout à fait d'accord avec la part d'enfance dans la musique de Prokofiev. Je n'ai pas les outils pour analyser les thèmes que j'ai en tête, dont certains me font penser à des comptines "détournées". Je le rapprocherais peut être, pour faire une comparaison un peu lointaine, avec Michel Tournier. A la fois dans sa vision de l'enfance, et dans son obsession avec les motifs, qu'il triture et déstructure pour leur faire dire une chose et son contraire, pour le dire vite.
Dans le monde musical, ça me rappelle un peu Schubert d'une façon très particulière : une amie à qui j'avais fait découvrir sa musique ne supportait pas sa tendance qu'elle disait "schizophrène" à faire des allers-retours entre motifs majeurs et mineurs très expressifs, parfois en utilisant la même mélodie, et à constamment changer l'ambiance du tout au tout.
J'ai l'impression que Prokofiev fait la même chose, mais de façon plus radicale, particulièrement dans ses œuvres orchestrales (je pense en particulier aux concertos pour piano). Au point qu'il semblerait se moquer lui même des élans sentimentaux qu'il pourrait créer. Comme un espèce de "That's all folks", ou "la musique, c'est ça" ni plus ni moins (dans le sens du "Es ist so" de Hegel...je vais peut être trop loin). Je trouve le mouvement final du 5ème concerto extrêmement fort de ce point de vue...
Par conséquent, plutôt que juste l'innocence de l'enfance dans cette musique, j'y vois l'enfance de façon complète : avec sa cruauté, ses vérités nues, et ses jeux ambigus (il me semble que certaines nouvelles de Tournier évoquent ces thèmes, peut être Buzzati aussi).
Encore une fois, j'extrapole peut être beaucoup pour l'état de mes connaissances et outils d'analyse....et pour l'instant je n'ai joué que quelques visions fugitives...j'attends avec impatience de pouvoir m'essayer à une sonate, la 4ème, 7ème ou 8ème par exemple...aaaaah...doux rêves...