Réflexions & questions: relations "compliquées" profs/élèves adultes

Théorie, jeu, répertoire, enseignement, partitions
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Cadenza
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Re: Réflexions & questions: relations "compliquées" profs/élèves adultes

Message par Cadenza »

En fait, c'est d'être capable de remarquer lorsqu'un problème d'ordre communicationnel semble émerger (via, comme tu le mentionnes, notamment la réaction de l'élève - ou du prof, donc, car il me semble pertinent que l'élève soit capable d'évaluer aussi si son attitude met son prof sur la défensive) pour se questionner alors sur les causes. Donc ce n'est pas tant un autoquestionnement de chaque seconde que d'arriver à se questionner au moment opportun. Mais encore faut-il identifier le moment opportun, ce qui n'est pas simple lorsque l'on n'a pas l'habitude d'y porter attention. D'où cette question d'habitude à prendre.

Ça peut simplement commencer par une réflexion après le cours : repasser le fil des événements et se demander s'il y a pu y avoir de tels problèmes. Se forcer à le faire a posteriori facilitera le fait de le percevoir de plus en plus «sur le coup».

C'est un peu comme travailler un passage : au début, on réfléchit à tout consciemment, puis on le travaille jusqu'à ce que tout vienne naturellement.
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Lee
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Re: Réflexions & questions: relations "compliquées" profs/élèves adultes

Message par Lee »

Jouishy a écrit : lun. 19 mars, 2018 19:13 Et comme dans toute relation, les deux parties ont leur part de responsabilité, bien que la relation prof/élève soit asymétrique et que la responsabilité est plus importante du côté du prof. Ce n'est pas pour autant qu'il faut se dégager de tout en tant qu'apprenant.
Ah ça explique mon décalage avec la grande partie entre vous, pourquoi je trouve que les profs sont défavorisés dans ce fil...je trouve surtout l'élève plus responsable. Les Chinois ont un proverbe, simplifié c'est "la prof ouvre la porte, c'est l'élève qui entre."
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Re: Réflexions & questions: relations "compliquées" profs/élèves adultes

Message par Cadenza »

Je parle ici de la responsabilité «relationnelle».

Après, l'élève a une plus grosse responsabilité dans le travail à faire.

Je pense que l'on peut grandement comparer avec la relation avec un psy : si la personne qui consulte ne fait aucun travail sur lui-même à l'issue des consultations, ça ne servira probablement à rien (bon, ça dépend des approches thérapeutiques, mais grossissons le trait un peu, à des fins de compréhension). Mais c'est le psy qui a le rôle de mettre la personne en confiance et de la guider en fonction de ses besoins particuliers, de ses demandes, de dénouer les impasses, etc.

Dans une relation de prof à élève, le prof est en position d'«autorité» (bien que cette «autorité» se manifeste différemment selon l'âge de l'apprenant. Face à un adulte, ce sera plutôt l'«autorité du savoir». Le prof est l'expert qui a donc une certaine autorité dans son champ d'expertise qui le rend apte à donner des conseils, notamment). Cela fait en sorte, à mon avis, qu'il est beaucoup plus important qu'il soit attentif au fonctionnement de l'élève, aux techniques qui fonctionnent bien avec une personne donnée, etc. Dans ce contexte, le rôle de l'élève en est simplement un d'ouverture, de réceptivité (ne pas se braquer ou se mettre sur la défensive face aux critiques ou aux idées nouvelles).

Espérant que cela éclaircisse ma pensée. :)
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Re: Réflexions & questions: relations "compliquées" profs/élèves adultes

Message par jazzy »

Jouishy a écrit : lun. 19 mars, 2018 20:12
Ça peut simplement commencer par une réflexion après le cours : repasser le fil des événements et se demander s'il y a pu y avoir de tels problèmes. Se forcer à le faire a posteriori facilitera le fait de le percevoir de plus en plus «sur le coup».
C'est exactement ce que je faisais dans mon travail: prendre quelques minutes une fois l'élève parti pour noter les choses importantes de la séance et mes questionnements. Ce temps était prévu dans le cadre de mon travail.
Bien sûr ce n'est pas transposable tel quel pour un cours de piano, mais ce que tu dis est intéressant.
Les profs de musique ont-ils accès dans leur formation à quelque chose qui ressemble à de la psychopédagogie, comme l'ont, en principe, les enseignants des écoles?

Lee, tu as raison. Une relation ça se fait à 2 et chacun à une responsabilité dans le cadre de la relation
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Lee
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Re: Réflexions & questions: relations "compliquées" profs/élèves adultes

Message par Lee »

:mrgreen: En fait ça me rappelle une blague pour les parents :

"Comment être un parent aujourd'hui :
Assurer que leurs besoins académique, emotionnels, psychologiques, mentaux, spirituels, physiques, et sociaux sont remplis en veillant de ne pas surstimuler, sous-estimer, trop medicaliser, être trop par dessus son épaule, négliger, mais dans un environnement socialement engagé, égalitaire mais autoritaire, cultivant mais encourageant pour l'autonomie, doux mais pas trop laisser faire...etc. etc.

Comment être un parent dans toute génération avant la nôtre :
Donnez à manger quelques fois.
Voilà pourquoi nous sommes fous."

Et voilà, je ne sais pas comment les profs d'aujourd'hui gèrent, je trouve que les attentes rendent leur travail trop compliqué ! Chapeau bas à ceux qui font toujours bien leur travail !
Modifié en dernier par Lee le mar. 20 mars, 2018 9:26, modifié 1 fois.
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Message par N'est-ce pas »

Lee a écrit : mar. 20 mars, 2018 9:21 "Comment être un parent aujourd'hui :
Assurer leurs besoins spiritueux,
Lee a écrit : mer. 07 mars, 2018 23:33
Czerny a écrit :He was a pale, sickly-looking child, who, while playing, swayed about on the stool as if drunk..
Ce serait ça le secret du talent... les parents qui procurent la bibine !!! :wink:
Modifié en dernier par N'est-ce pas le mar. 20 mars, 2018 9:27, modifié 1 fois.
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Re: Réflexions & questions: relations "compliquées" profs/élèves adultes

Message par Lee »

merci, je l'ai corrigé :wink:
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Re: Réflexions & questions: relations "compliquées" profs/élèves adultes

Message par Abegg63 »

J’espère que dans le futur les profs d’instrument pourront avoir accès à un peu de psychologie, bien utile dans certaines situations.
L’an dernier je mesuis trouvée confrontée à la maladie et au décès d’une de mes élèves de 10 ans.
J’avais en cours sa soeur et son cousin.
Que leur dire? En fait je$’ai attendu qu’ils me parlent;
Le jour où ils l’ont fait ça a été plus que difficile. Je me demandent s’ils ne m’ont pas posé des questions qu’ils n’avaient pas osé poser à leur famille.
Je sais que les instituteurs ont accès àcette discipline mais certains n’ont pas dû tout comprendre!
Ainsi à la rentrée l’instituteur de CM2 qui avait eu la petite fille encours ainsi que ses cousins a trouvé malin de donner comme sujet de rédaction:
« Qu’avez-vous fait pendant les grandes vacances? »
Pour ces enfants c’était l’enterrement de leur cousine et soeure!
Et en plus il y était à l’enterrement ce balourd!
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Cadenza
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Re: Réflexions & questions: relations "compliquées" profs/élèves adultes

Message par Cadenza »

Le fait d'avoir fait les démarches avec l'école préparatoire de l'université Laval a fait en sorte que je sais qu'ils ont un sacré système en place et, justement, notamment de formation de leurs enseignants affiliés (ils font un colloque de formation annuel et il semble y avoir d'autres activités de formation ici et là). Considérant à quel point matière X est différent de enseignement de matière X, je trouve ça vraiment intéressant que cette structure existe pour apporter des outils aux professeurs de musique qui le désirent!
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Re: Réflexions & questions: relations "compliquées" profs/élèves adultes

Message par P&MV »

Bonjour à toutes et à tous,

J'ai lu ce fil avec intérêt et amusement. Prof à la retraite, j'ai enseigné le piano pendant 35 ans à des multitudes de gamins et d'adultes de tous âges, depuis la mère de famille qui voulait "s'y remettre" lorsque, les enfants ayant grandi, elle disposait enfin d'un peu de temps libre, jusqu'au retraité qui se lançait dans l'aventure afin de réaliser un rêve de jeunesse, bref, tous les cas de figure. Ça n'a pas marché à tous les coups. Parfois, les résultats ont été bons, d'autres fois cela s'est soldé par des échecs complets, et parfois aussi, j'ai lié des amitiés qui dépassaient largement le domaine de la musique.

J'ai souri en lisant les tribulations d'élèves qui recherchaient - parfois sans jamais le trouver - le prof idéal, celui qui saurait allier compréhension, bienveillance, mais aussi exigence et rigueur, affectivité, compétence, autorité mais pas trop, indulgence mais pas trop, etc. Les élèves qui discutent entre eux des qualités ou des défauts de leurs profs seraient surpris - amusés, et peut-être choqués - d'entendre les profs entre eux discuter de leurs élèves. Car s'il est difficile pour l'élève de rencontrer le prof idéal, il est tout aussi difficile pour le prof de trouver l'élève idéal.

C'est une évidence, mais il est toujours bon de le répéter, quel que soit le domaine d'étude, un adulte apprend moins vite qu'un enfant. Et lorsqu'il s'agit d'une discipline sollicitant des aptitudes physiques, demandant agilité et souplesse, l'âge est toujours un handicap. Pas facile d'expliquer à un élève qu'en commençant le piano à 50 ans, et même en travaillant comme un malade, il ne sera jamais Sviatoslav Richter ni Vladimir Horowitz. Et lorsque l'élève arrive avec une partition sous le bras en disant : "j'aimerais bien jouer ça", et montrant la Campanella de Liszt ou de l'étude Révolutionnaire de Chopin, il faut déployer des trésors de diplomatie pour expliquer que, bon, peut-être plus tard, mais pour le moment, ce serait prématuré...

L'adulte n'a plus la souplesse des doigts, ce qui est un handicap, mais souvent aussi, hélas, il n'a plus non plus la souplesse du caractère. Ce n'est plus un gamin, il a son libre-arbitre, on "ne la lui fait pas", et il sait qu'en toute chose, il y a "à prendre et à laisser", et en piano comme en tout, et effectivement, il en prend et il en laisse. Lorsque je donne un exercice à travailler à l'enfant, il le fait sans discuter, et s'il ne l'a pas fait pas, je m'en aperçois immédiatement et le mouflet se fait remonter les bretelles. L'adulte devancera les reproches (de surcroît, pas facile de remonter les bretelles à une vieille dame plus âgée de soi) et il dira : "Je préfère vous prévenir tout de suite, cette semaine, j'ai été complètement débordé, je n'ai pas pu trouver cinq minutes pour travailler". Une semaine, ça passe. Deux semaines, à la rigueur. Trois semaines, il faut crever l'abcès et trouver une solution. Soit la séance de piano est un divertissement, un moment d'agréable détente où l'on peut papoter, discuter de tout et de rien en buvant une tasse de thé, et dans ce cas, pourquoi pas ? Soit le but est d'apprendre quelque chose et il faut bien convenir que ça ne fonctionne pas, qu'on n'apprend rien sans un travail quotidien, qu'on perd son temps, le prof perd son énergie et l'élève perd son argent.

La condition pour apprendre un instrument, qu'on le veuille ou non, c'est de s'y mettre TOUS LES JOURS au moins une demi-heure, c'est un minimum - et pas 5 heures le dimanche pour rattraper les jours où l'on n'a pas joué. C'est le travail quotidien - sérieux -, et lui seul, qui paye. Il faut donc s'interroger avant de franchir le pas : Ai-je cette disponibilité ? Puis-je assumer cette contrainte ? Si la réponse est négative, les risques d'échec sont grands. On ne progressera pas, ou très peu, on aura l'impression de faire du sur-place, on se découragera, et on laissera tomber.

Les principales difficultés auxquelles j'ai été confronté avec les adultes ont porté sur la méthode de travail. À la différence des enfants, les adultes conceptualisent très vite, ils comprennent très vite "comment il faut faire". L'ennui, c'est que comprendre "en théorie" n'est pas suffisant, encore faut-il faire, et refaire, et refaire encore "en pratique". C'est un réflexe classique chez beaucoup d'adultes : on joue l'exercice une fois et on ferme le livre en disant : "Ça va, j'ai compris !", sous-entendu, "Ça va, je sais le faire". Ben non, on ne sait pas le faire, on a simplement compris comment on le faisait. L'adulte est souvent impatient, il voudrait aller vite, voir vite des résultats, le côté répétitif, le rabâchage indispensable à l'apprentissage d'un instrument l'irrite, l'agace. Il ne comprend pas la nécessité de refaire encore, dix fois, vingt fois, cent fois, jusqu'à ce que ça coule parfaitement, que ce soit "entré dans les doigts", ce qui est bien plus long que "d'entrer dans la tête". Je pense que la plupart des adultes sous-estiment grandement la somme de travail - souvent ingrat - que représente l'apprentissage d'un instrument. Ce n'est pas l'affaire de quelques semaines, ni même de quelques mois. Ce sont des années et des années de travail. Est-ce à dire qu'on doit se décourager et renoncer ? Bien évidemment non, mais il faut être lucide quant aux buts à atteindre. Et les publicités tapageuses : "Apprenez le piano en trois mois sans effort et sans solfège" ne sont que des attrape-gogos.

Une autre difficulté portait sur le répertoire : Quand on commence un instrument, on ne joue pas forcément d''emblée des choses passionnantes. Souvent, il faut en passer par des mélodies un peu enfantines, un peu simplettes, sans grand intérêt musical (mais avec un intérêt technique). Il existe des méthodes pour adultes débutants proposant des morceaux plus élaborés, plus attrayants. Cela peut être un peu plus motivant, certes, mais quelle que soit la méthode utilisée, on n'échappera pas à ce travail répétitif que beaucoup considèrent comme un peu fastidieux. Et là encore, il faut s'interroger sur la finalité de l'enseignement : est-ce d'apprendre à jouer un morceau, ou est-ce d'apprendre à jouer du piano ? Arriver à jouer un morceau est stimulant, valorisant, certes, mais un peu décevant tout de même si c'est pour s'arrêter là. J'ai connu des élèves qui arrivaient à jouer tout à fait correctement des morceaux pas très faciles. Mais lorsque je les arrêtais et demandais : "Stop ! Ne bougez plus ! Quelle note se trouve sous votre pouce ?" ils étaient incapables de répondre. Le morceau n'était pour eux qu'une succession de gestes mécaniques, j'appuie là, puis là, un peu comme on apprendrait phonétiquement un texte dans une langue qu'on ne parlerait pas. On pourrait reproduire le texte sans en comprendre un mot. Il existe des claviers électroniques dotés d'une fonction "apprentissage". On choisit le morceau qu'on veut apprendre, et des petites loupiotes clignotent successivement devant les touches qu'il faut jouer pour reproduire la mélodie. On apprend ainsi de la même façon qu'on progresse dans les étapes d'un jeu vidéo. On est très loin de la mission du professeur de piano, qui n'est pas d'apprendre à jouer un morceau en particulier, mais d'apprendre à jouer tous les morceaux, et à se passer un jour de professeur. Le prof a gagné lorsque l'élève peut déchiffrer seul une partition inconnue, en repérer les difficultés, trouver les bons doigtés et appliquer les bonnes techniques pour l'étudier.

Quelques anecdotes, pour rire, parce que pendant toutes ces années, j'ai rencontré pas mal de situations cocasses. Mme X venait à la leçon après être passée au marché. Elle s'asseyait sur le tabouret et posait à côté d'elle le cabas d'où souvent dépassaient des poireaux. C'était une maîtresse-femme, solide, au verbe haut. Mauvais doigté. Je corrigeais : "Ici, vous devriez mettre le troisième, ce serait beaucoup plus facile." Réponse sèche et sans réplique : "- Oui, mais moi je mets le deuxième !" Qu'est-ce qu'on fait dans ce cas-là ?

Mme Y, qui avait travaillé dans sa jeunesse avec un excellent professeur, par ailleurs grand virtuose - mais c'était une trentaine d'années auparavant, elle avait à peu près tout oublié -, ne vivait que dans le souvenir du grand maître et de ses réussites passées. Elle voulait absolument reprendre les morceaux qu'elle maîtrisait jadis, répertoire riche et ambitieux qui honorerait bien des pianistes accomplis. Las ! Trente ans sans aucune pratique, il ne restait rien du Sospiro de Liszt, de la Polonaise de Chopin, de la sonate de Beethoven. Il aurait fallu tout reprendre à un niveau bien inférieur, regravir péniblement les marches, car le piano, ce n'est pas comme le vélo, ça s'oublie. Mme Y n'a jamais pu s'y résoudre. Elle s'est obstinée à massacrer coûte que coûte des œuvres devenues infiniment trop difficiles pour elle, mais qui peut-être, dans son souvenir, gardait le brillant éclat de ses vingt ans...

M. Z fait toujours la même faute de rythme en jouant son morceau. Leçon après leçon, la faute revient. Pour la dixième fois, nous reprenons la mesure, nous la décomposons, nous la solfions, nous la jouons, une fois, deux fois, trois fois, sans faute. Vous avez compris ? - Oui, oui, j'ai bien compris. - Rejouez-la une fois, pour être sûr... C'est ça, c'est parfait. Mais la semaine prochaine, M. Z refera la même faute au même endroit, il n'y a même pas de suspense, c'est une certitude. On reprendra la mesure, on la décomposera, on la solfiera, on la jouera une fois, deux fois, trois fois sans faute. - Oui, oui, j'ai bien compris, cette fois. Mais la leçon suivante...

Et je revois le gamin de j'étais, arrivant chez sa professeur de piano - un hommage ici à cette grande dame qui a posé pour la première fois mes didis sur le clavier et m'a appris la rigueur, l'exigence, l'amour de la musique et son respect infini - s'asseyant sur le tabouret et ânonnant péniblement le morceau qu'il devait étudier. "- Tu as travaillé, cette semaine ?" Comment mentir ? Les hésitations, les bredouillements, les erreurs disaient assez que je n'avais rien fichu. "- Non, madame." Alors Madame fermait le livre, me le rendait en disant : "- Eh bien, tu reviendras quand tu auras travaillé." Et elle me mettait à la porte. L'histoire ne s'arrête pas là, car rentrant à la maison trop tôt, ma mère n'aurait pas manqué de me demander pourquoi j'étais tellement en avance. Je tournais donc dans le quartier en ruminant ma honte jusqu'à ce que je juge que le temps raisonnable de la leçon devait être écoulé. Et je rentrais chez moi comme si de rien n'était. Ça m'est arrivé deux fois, et cela a été plus bénéfique que toutes les remontrances ou toutes les punitions. Ah, comme j'aurais aimé dire à Mme V, mère de famille un peu fofolle qui n'en fichait pas une secousse : "- Reprenez votre partition, vous reviendrez quand vous aurez travaillé !".

Cordialement.
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Arabesque44
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Re: Réflexions & questions: relations "compliquées" profs/élèves adultes

Message par Arabesque44 »

Très bon texte P&MV, vous devriez publier vos mémoires! 8)
Je me retrouve un peu dans certains de vos portraits d'élèves ( une surtout...et moi c'était 40 ans sans piano! :oops: )
P&MV a écrit : mer. 21 mars, 2018 12:37 À la différence des enfants, les adultes conceptualisent très vite, ils comprennent très vite "comment il faut faire". L'ennui, c'est que comprendre "en théorie" n'est pas suffisant, encore faut-il faire, et refaire, et refaire encore "en pratique
Voilà...Et j'imagine que le prof est lui aussi un peu trop pressé parfois, il insiste lourdement pour 'obtenir un résultat immédiat que l'élève adulte, à sa grande honte, est incapable de reproduire alors même "qu'il a compris", que "c'est tout bête" et qu'il préfèrerait travailler tout seul chez lui. Et parfois, en effet ça va marcher chez lui... mais pas forcément définitivement, et surtout, pas devant le prof le cours suivant! :evil:
L'enfant lui va reproduire tout de suite ce qu'il faut faire...mais il n'aura pas forcément compris, et placé devant une situation similaire, il fera peut-être moins vite le rapprochement que l'adulte.
Erin

Re: Réflexions & questions: relations "compliquées" profs/élèves adultes

Message par Erin »

Bonjour et merci pour votre témoignage :)
P&MV a écrit : mer. 21 mars, 2018 12:37 C'est une évidence, mais il est toujours bon de le répéter, quel que soit le domaine d'étude, un adulte apprend moins vite qu'un enfant. Et lorsqu'il s'agit d'une discipline sollicitant des aptitudes physiques, demandant agilité et souplesse, l'âge est toujours un handicap. Pas facile d'expliquer à un élève qu'en commençant le piano à 50 ans, et même en travaillant comme un malade, il ne sera jamais Sviatoslav Richter ni Vladimir Horowitz.

C'est un fait, la souplesse est une des grandes difficultés parfois, mais pas toujours (en travaillant bien entendu). Pour ce qui est d'atteindre le niveau prestigieux de Richter ou d'Horowitz, je crois que c'est même superflu d'en faire la remarque, nous adultes (pour ma part ayant repris le piano après une bonne trentaine d'années d'arrêt) n'en demandons pas tant mais je persiste à penser que nous pouvons si nous en avons la volonté, la passion et la discipline arriver à de très bons résultats et atteindre un niveau pas trop mal....enfin c'est mon opinion, qu'on m'arrête si je me trompe....
P&MV a écrit : mer. 21 mars, 2018 12:37 L'adulte n'a plus la souplesse des doigts, ce qui est un handicap, mais souvent aussi, hélas, il n'a plus non plus la souplesse du caractère. Ce n'est plus un gamin, il a son libre-arbitre, on "ne la lui fait pas", et il sait qu'en toute chose, il y a "à prendre et à laisser", et en piano comme en tout, et effectivement, il en prend et il en laisse. Lorsque je donne un exercice à travailler à l'enfant, il le fait sans discuter, et s'il ne l'a pas fait pas, je m'en aperçois immédiatement et le mouflet se fait remonter les bretelles. L'adulte devancera les reproches (de surcroît, pas facile de remonter les bretelles à une vieille dame plus âgée de soi) et il dira : "Je préfère vous prévenir tout de suite, cette semaine, j'ai été complètement débordé, je n'ai pas pu trouver cinq minutes pour travailler". Une semaine, ça passe. Deux semaines, à la rigueur. Trois semaines, il faut crever l'abcès et trouver une solution. Soit la séance de piano est un divertissement, un moment d'agréable détente où l'on peut papoter, discuter de tout et de rien en buvant une tasse de thé, et dans ce cas, pourquoi pas ? Soit le but est d'apprendre quelque chose et il faut bien convenir que ça ne fonctionne pas, qu'on n'apprend rien sans un travail quotidien, qu'on perd son temps, le prof perd son énergie et l'élève perd son argent.
J'ai le sentiment que vous mettez un peu tous les adultes dans le même sac, non ?.......(loin de moi l'intention de vous critiquer cela dit, des élèves tels que vous les décrivez doivent être vraiment pénibles parfois et je vous félicite de les supporter sans broncher))
Parce qu'il y a ici sur le forum une multitude d'adultes qui travaillent et qui travaillent dur figurez-vous. Perso c'est entre une et quatre hrs/jour. (bien souvent de l'ordre de 2hrs30' par là) J'aimerais aussi beaucoup que ma prof me donne des exercices à faire et me les fasse répéter jusqu'à ce que ça rentre je vous assure. Malheureusement je déplore une certaine précipitation de sa part à passer relativement vite à autre chose sans approfondir comme je le souhaiterais (travail que je fais donc seule chez moi).
En ce qui me concerne je suis avide d'apprendre, d'apprendre et de comprendre les choses, de savoir le pourquoi du comment....je suis une passionnée et une acharnée de travail (du moins au piano).
Pour les personnes qui vont en cours pour "papoter", c'est leur problème à eux, s'il préfèrent payer pour cela plutôt que de payer un psy, c'est leur affaire. Je concède que ça existe, j'en connais comme ça. :mrgreen:
P&MV a écrit : mer. 21 mars, 2018 12:37 Les principales difficultés auxquelles j'ai été confronté avec les adultes ont porté sur la méthode de travail. À la différence des enfants, les adultes conceptualisent très vite, ils comprennent très vite "comment il faut faire". L'ennui, c'est que comprendre "en théorie" n'est pas suffisant, encore faut-il faire, et refaire, et refaire encore "en pratique". C'est un réflexe classique chez beaucoup d'adultes : on joue l'exercice une fois et on ferme le livre en disant : "Ça va, j'ai compris !", sous-entendu, "Ça va, je sais le faire". Ben non, on ne sait pas le faire, on a simplement compris comment on le faisait. L'adulte est souvent impatient, il voudrait aller vite, voir vite des résultats, le côté répétitif, le rabâchage indispensable à l'apprentissage d'un instrument l'irrite, l'agace. Il ne comprend pas la nécessité de refaire encore, dix fois, vingt fois, cent fois, jusqu'à ce que ça coule parfaitement, que ce soit "entré dans les doigts", ce qui est bien plus long que "d'entrer dans la tête".
Oui c'est vrai, cela m'arrive bien souvent d'ailleurs d'avoir l'impression que je connais alors que non...c'est même loin, très loin d'être intégré.
Justement moi je rêve que ma prof me fasse répéter autant de fois qu'il le faut...
Vouloir allez vite, OUI je plaide coupable, mais je veux allez vite et BIEN, je suis prête à faire tous les exercices et les répétitions qu'il faut d'ailleurs....encore faudrait-t-il qu'on m'indique comment faire....en prenant le temps et non me faire la remarque que ça...ou encore ça c'est pas bon sans montrer et re-montrer avec patience comment faire.
P&MV a écrit : mer. 21 mars, 2018 12:37 Je pense que la plupart des adultes sous-estiment grandement la somme de travail - souvent ingrat - que représente l'apprentissage d'un instrument. Ce n'est pas l'affaire de quelques semaines, ni même de quelques mois. Ce sont des années et des années de travail. Est-ce à dire qu'on doit se décourager et renoncer ? Bien évidemment non, mais il faut être lucide quant aux buts à atteindre. Et les publicités tapageuses : "Apprenez le piano en trois mois sans effort et sans solfège" ne sont que des attrape-gogos.
Oh mais non détrompez-vous c'est loin le cas de tous. Nous sommes conscients pour la plupart d'entre-nous que le cheminement est long et...semé d'embûches. Pour les pubs tapageuses, euh....il faut être naïf pour y croire. (autant on pourrait y croire tout au début, autant si on a un gramme de bon sens, on aura vite compris l'arnaque).
P&MV a écrit : mer. 21 mars, 2018 12:37 Quelques anecdotes, pour rire, parce que pendant toutes ces années, j'ai rencontré pas mal de situations cocasses. Mme X venait à la leçon après être passée au marché. Elle s'asseyait sur le tabouret et posait à côté d'elle le cabas d'où souvent dépassaient des poireaux. C'était une maîtresse-femme, solide, au verbe haut. Mauvais doigté. Je corrigeais : "Ici, vous devriez mettre le troisième, ce serait beaucoup plus facile." Réponse sèche et sans réplique : "- Oui, mais moi je mets le deuxième !" Qu'est-ce qu'on fait dans ce cas-là ?

Mme Y, qui avait travaillé dans sa jeunesse avec un excellent professeur, par ailleurs grand virtuose - mais c'était une trentaine d'années auparavant, elle avait à peu près tout oublié -, ne vivait que dans le souvenir du grand maître et de ses réussites passées. Elle voulait absolument reprendre les morceaux qu'elle maîtrisait jadis, répertoire riche et ambitieux qui honorerait bien des pianistes accomplis. Las ! Trente ans sans aucune pratique, il ne restait rien du Sospiro de Liszt, de la Polonaise de Chopin, de la sonate de Beethoven. Il aurait fallu tout reprendre à un niveau bien inférieur, regravir péniblement les marches, car le piano, ce n'est pas comme le vélo, ça s'oublie. Mme Y n'a jamais pu s'y résoudre. Elle s'est obstinée à massacrer coûte que coûte des œuvres devenues infiniment trop difficiles pour elle, mais qui peut-être, dans son souvenir, gardait le brillant éclat de ses vingt ans...

M. Z fait toujours la même faute de rythme en jouant son morceau. Leçon après leçon, la faute revient. Pour la dixième fois, nous reprenons la mesure, nous la décomposons, nous la solfions, nous la jouons, une fois, deux fois, trois fois, sans faute. Vous avez compris ? - Oui, oui, j'ai bien compris. - Rejouez-la une fois, pour être sûr... C'est ça, c'est parfait. Mais la semaine prochaine, M. Z refera la même faute au même endroit, il n'y a même pas de suspense, c'est une certitude. On reprendra la mesure, on la décomposera, on la solfiera, on la jouera une fois, deux fois, trois fois sans faute. - Oui, oui, j'ai bien compris, cette fois. Mais la leçon suivante...
Je comprends mieux le sens de votre post en lisant ça. :mrgreen: =D>
Je me demande même si finalement ce genre d'élèves ne sont pas plus nombreux que je ne le pensais...ce qui ferait renoncer certains profs (dont la mienne d'ailleurs j'ai l'impression) à insister, et insister encore ...et à voir les choses à fond. Et ce sont les pauvres élèves motivé(e)s comme moi par ex.qui en font les frais... #-o :oops: :lol:
P&MV a écrit : mer. 21 mars, 2018 12:37 Et je revois le gamin de j'étais, arrivant chez sa professeur de piano - un hommage ici à cette grande dame qui a posé pour la première fois mes didis sur le clavier et m'a appris la rigueur, l'exigence, l'amour de la musique et son respect infini - s'asseyant sur le tabouret et ânonnant péniblement le morceau qu'il devait étudier. "- Tu as travaillé, cette semaine ?" Comment mentir ? Les hésitations, les bredouillements, les erreurs disaient assez que je n'avais rien fichu. "- Non, madame." Alors Madame fermait le livre, me le rendait en disant : "- Eh bien, tu reviendras quand tu auras travaillé." Et elle me mettait à la porte. L'histoire ne s'arrête pas là, car rentrant à la maison trop tôt, ma mère n'aurait pas manqué de me demander pourquoi j'étais tellement en avance. Je tournais donc dans le quartier en ruminant ma honte jusqu'à ce que je juge que le temps raisonnable de la leçon devait être écoulé. Et je rentrais chez moi comme si de rien n'était. Ça m'est arrivé deux fois, et cela a été plus bénéfique que toutes les remontrances ou toutes les punitions. Ah, comme j'aurais aimé dire à Mme V, mère de famille un peu fofolle qui n'en fichait pas une secousse : "- Reprenez votre partition, vous reviendrez quand vous aurez travaillé !".
Et je comprends cet hommage ! Excellente façon de faire je trouve. Pas de punitions, ni de colère, ni d'énervements intempestifs: le "tu reviendras quand tu auras travaillé", vraiment j'adore !!! J'ai l'impression que c'est bien ce qu'il faut faire. 8)
Et pourquoi donc ne pas avoir agi de la sorte avec certains de vos élèves adultes ? Parce qu'ils sont adultes justement et doivent comprendre qu'on n'obtient rien sans rien... alors autant faire du tricot ! Bon sans aller jusqu'à les infantiliser.
Ceci étant j'ai le sentiment parfois que c'est un peu le contraire, que certains profs par ex. refusent de donner trop de travail à leurs élèves adultes, ou bien leur refusent même du répertoire classique sous prétexte ...qu'il faut commencer à 3 ans et demi !!! :shock: SINON RIEN !
Cela c'est infantilisant je trouve, beaucoup plus que de demander à un élève de travailler plus...(enfin c'est mon opinion, peut-être due au fait que pour ma part j'ai du batailler pendant des mois afin que ma prof. consente enfin à me donner du répertoire uniquement classique)
Je compte également lui demander de voir les choses plus en profondeur d'ailleurs.
Enfin voilà, c'était pour vous donner un peu l'autre côté des choses... :D
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Re: Réflexions & questions: relations "compliquées" profs/élèves adultes

Message par Lee »

:mrgreen: Mais sur ce fil nous avons vu beaucoup de côté élève je trouve !
P&MV a écrit : mer. 21 mars, 2018 12:37 Je pense que la plupart des adultes sous-estiment grandement la somme de travail - souvent ingrat - que représente l'apprentissage d'un instrument.
Oui, le progrès n'est pas linéaire et parfois on travaille mal et on regresse même à cause du travail, ce qui est décourageant. Bref j'ai récemment ménacé une amie qui parlait d'arrêter, si elle arrête moi aussi, pour une passion moins difficile !

Avec l'histoire de M. Z, c'est fascinant. Aujourd'hui il devrait enregistrer ses cours et assurer qu'il ne revient pas avec le même erreur. Reviser ses cours sur ce point chaque jour pour que ça rentre.

Toutefois je n'aime pas "embêter" mes profs avec ce temps d'entraînement, pour faire correctement et refaire. Parfois j'ai besoin de temps chez moi tranquille devant le piano sans la pression de "produire parfaitement" pour bien comprendre, digérer, faire, répéter. Ou simplement d'écouter un enregistrement du rythme correcte plusieurs fous pour l'intégrer plus profondement dans ma tête. J'écris tout ou quasiment tout ce que ma prof dit sur la partition pour ne pas oublier et pour faire un peu mieux le prochain cours (ou au moins pas exactement de même!).
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Re: Réflexions & questions: relations "compliquées" profs/élèves adultes

Message par Erin »

Lee a écrit : mer. 21 mars, 2018 17:36 Mais sur ce fil nous avons vu beaucoup de côté élève je trouve !
C'est vrai Lee tu as raison ! :oops:
Mais c'est juste pour dire qu'il y a des adultes qui bossent.
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Re: Réflexions & questions: relations "compliquées" profs/élèves adultes

Message par kerry117 »

Arabesque44 a écrit : mer. 21 mars, 2018 14:20 Très bon texte P&MV, vous devriez publier vos mémoires! 8)
+1
Arabesque44 a écrit : mer. 21 mars, 2018 14:20 .Et j'imagine que le prof est lui aussi un peu trop pressé parfois, il insiste lourdement pour 'obtenir un résultat immédiat que l'élève adulte, à sa grande honte, est incapable de reproduire alors même "qu'il a compris", que "c'est tout bête" et qu'il préfèrerait travailler tout seul chez lui. Et parfois, en effet ça va marcher chez lui... mais pas forcément définitivement, et surtout, pas devant le prof le cours suivant! :evil:
L'enfant lui va reproduire tout de suite ce qu'il faut faire...mais il n'aura pas forcément compris, et placé devant une situation similaire, il fera peut-être moins vite le rapprochement que l'adulte.
L'enfant va apprendre par imitation, les adultes ont besoin de comprendre. J'ai pu constater en écoutant les adultes motivés et travailleurs qui ont leur cours après ou avant le mien que tous les adultes n'ont le même fonctionnement. A niveau technique égal, certains vont attendre la recette,les doigtés ...d'autres vont se poser des questions et proposer plusieurs possibilités d'exercice pour résoudre une difficulté.

Pour l'élève " chercheur", les relations. peuvent se compliquer si le prof a l'impression que l'élève est trop autonome et a une forte personnalité.
Parfois le prof peut se tromper sur la cause d'une erreur.
Erin

Re: Réflexions & questions: relations "compliquées" profs/élèves adultes

Message par Erin »

kerry117 a écrit : mer. 21 mars, 2018 19:35 Pour l'élève " chercheur", les relations. peuvent se compliquer si le prof a l'impression que l'élève est trop autonome et a une forte personnalité.
Parfois le prof peut se tromper sur la cause d'une erreur.
Tout à fait Kerry, c'est bien là que résident parfois toutes ces difficultés à bien communiquer... !
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Re: Réflexions & questions: relations "compliquées" profs/élèves adultes

Message par leLama »

P&MV a écrit : mer. 21 mars, 2018 12:37
C'est une évidence, mais il est toujours bon de le répéter, quel que soit le domaine d'étude, un adulte apprend moins vite qu'un enfant.
Merci P&MV pour ton témoignage.

Je rebondis sur ton affirmation. C'est une idée très souvent véhiculée comme une évidence comme tu le fais. Je ne suis pas certain que ce soit correct. Je vais essayer de donner quelques arguments dans le sens contraire, sans prétendre trancher la question.

D'abord, il y a des cas (par exemple sur ce forum) d'adultes qui apprennent a une vitesse prodigieuse, quand ils ont beaucoup de temps à consacrer au piano. Sans aller à ces exemples extremes, les adultes qui travaillent normalement ont un niveau assez modeste, mais souvent assez raisonnable. La tres grande majorité des enfants qui commencent un instrument abandonnent en quelques années et ne savent pas grand chose. Il y a la minorité la plus douée/travailleuse qui certes a de bons résultats. Mais la comparaison est biaisée si on compare les enfants les meilleurs (ceux qui n'ont pas abandonné) avec les adultes moyens ( les adultes sont en général plus opiniatres et continuent meme avec un niveau modeste).

Le deuxieme point qui fausse la comparaison est le temps disponbie. Pour apprendre, il faut du temps à consacrer à l'instrument, mais aussi du temps pour y repenser pendant la journée. On sait tres bien qu'on ne peut faire qu'une ou deux choses sérieusemeent en meme temps, parce qu'une passion et une expertise demandent en général une immmersion totale. Un enfant qui va au college ou au lycée a tout le temps pendant ses cours un peu ennuyeux de rever à sa musique. Un adulte sera en général investi dans son travail et n'aura pas ce temps de rêverie nécessaire. Et même en revenant du travail, il y a la préparation du repas, s'occupper des enfants, des factures, de la maison. Les responsabilités à assumer sont différentes. Pour développer son potentiel musical, un adulte devrait être dans le même environnment qu'un enfant. Pas de responsabilité, la possibliité de consacrer toute son énérgie à ce qu'il aime. Sauf cas rarissime, cela n'arrive jamais chez l'adulte.

Enfin dernier point, et je rejoins les intervenants précédents sur ce point, il y a de nombreux types d'adulte. L'adulte a une plus longue histoire que l'enfant, son cerveau s'est spécialisé. Il y a une difference importante entre un adulte qui a passé sa vie à continuer à apprendre, à s'emerveiiler, en cuisine, au billard, au tennis, a la couture, a bricoler chez lui, a lire et apprendre, et celui qui fait un boulot un peu mécanique et qui regarde la télé. Certains adultes ont entretenu leurs capacités physiques et mentales d'apprentissage pendant 10 ou 40 ans, d'autres non.

Cela étant, je suis évidemment d'accord qu'il y a une limite. Si on commence le piano a 60 ans, il y a une baisse de la vivacité. Pour des adultes de 30 ou 40 ans qui se sont entretenus, c'est le facteur temps/responsabilité qui me semble le plus limitatif.

Je suis également d'accord qu'un adulte n'a pas la souplesse de caractere d'un enfant. Mais ca me semble jouer dans les deux sens. Davantage de blocages, mais aussi cavantage de détermination et d'autonomie. On sait d'ailleuurs bien que les enfants les plus doués ne sont pas ceux qui obeissent gentiment, mais ceux qui ralent quand ils ne comprennent pas et qui sont capables de transformerr les informations recues pour se les approprier et les intégrer au reste des connaissances.

J'ai souligné les points que je sentais différemment, mais il y a évidemment bien davantage de choses que je trouve interessantes et avec lesquelles je suis d'accord dans ton message :wink:
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Re: Réflexions & questions: relations "compliquées" profs/élèves adultes

Message par oiseau.prophète »

P&MV a écrit : mer. 21 mars, 2018 12:37La condition pour apprendre un instrument, qu'on le veuille ou non, c'est de s'y mettre TOUS LES JOURS au moins une demi-heure, c'est un minimum - et pas 5 heures le dimanche pour rattraper les jours où l'on n'a pas joué. C'est le travail quotidien - sérieux -, et lui seul, qui paye. Il faut donc s'interroger avant de franchir le pas : Ai-je cette disponibilité ? Puis-je assumer cette contrainte ? Si la réponse est négative, les risques d'échec sont grands. On ne progressera pas, ou très peu, on aura l'impression de faire du sur-place, on se découragera, et on laissera tomber
Bonjour

Je me permets de relever ce passage - mon emploi du temps ne me permet pas, à mon grand désarroi, de jouer tous les jours loin de là

La semaine c'est presque impossible et parfois le week-end c'est compliqué aussi, raison pour laquelle j'espace mes cours tous les 15 jours

Donc en suivant le précepte ci-dessus je devrais arrêter ?

Heureusement que ma prof a une autre approche, elle me sait motivé et elle sait que si lors d'un cours je lui explique que je n'ai pas eu le temps de bien travailler, et bien c'est que je n'ai pas eu le temps, et on en profite pour rattrapper pendant le cours

Les adultes ne sont pas tous des élèves difficiles ne se laissant rien dire, paresseux et de mauvaise foi.
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Re: Réflexions & questions: relations "compliquées" profs/élèves adultes

Message par roulroul »

Jazz / Qu'est-ce vraiment qu'un BON prof pour nous adultes à votre avis et au vu de vos expériences (passées ou présentes) ?
Un bon prof est extrêmement patient, s' adapte au niveau de l' élève, est franc, mais encourage et motive quand c'est nécessaire,
sachant qu’un gamin apprends nettement plus vite qu'un adulte, mais est moins accrocheur, en général.
-A quoi devons nous faire attention ?
aux diverses consignes données par lui, position, tempo, tuyaux pour le déchiffrage....
-Peut-t'-on réellement se permettre quelques familiarités, une complicité en peu en-dehors du côté piano et dans ce cas, comment évaluer les limites ?
oui c'est exactement comme dans la vie, plaisanter et prendre 5 mn dans un cours,
pour parler de choses et d' autres contribue a déstresser l'élève, et a faire des pauses, pour mieux repartir ensuite.
-Comment le/la cerner ? Comment être certain(e)s que nous pouvons faire confiance ?
au bout d'un certain temps, la confiance s' installe, il n' y qu' a voir les progrès accomplis, mêmes modestes.
-Comment savoir si nous sommes en de bonnes mains, si nous sommes en bonne voie par rapport à nos attentes (qui doivent rester raisonnables hélas, du fait d'un apprentissage ou ré-apprentissage tardif MAIS tout en évitant à tout prix stagner, d'être dans la superficialité !?)
Un prof est toujours franc avec vous, comme dit plus haut, mais il faut se fixer des objectifs réalistes, et essayer de bosser un peu tout les jours,
quand c'est possible, a partir du moment ou ça prend la tête, ou des limites physiques surviennent , mal au dos, poignets ou autres,
il faut s' arrêter et reprendre plus tard...
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Re: Réflexions & questions: relations "compliquées" profs/élèves adultes

Message par Lee »

leLama a écrit : lun. 26 mars, 2018 14:40 P&MV a écrit : ↑
C'est une évidence, mais il est toujours bon de le répéter, quel que soit le domaine d'étude, un adulte apprend moins vite qu'un enfant.
Merci P&MV pour ton témoignage.

Je rebondis sur ton affirmation. C'est une idée très souvent véhiculée comme une évidence comme tu le fais. Je ne suis pas certain que ce soit correct.
:) En fait j'étais tellement certaine que ça ne soit pas correcte que je n'ai pas pris le temps de développer, mais il me suffit de comparer moi enfant entre 7-11 ans et Jouishy ces 2-3 dernières années pour constater qu'il y a des adultes qui apprennent beaucoup plus vite que des enfants. (Je n'étais pas une enfante hyper douée mais musicale et travailleuse et surtout trop sage !) Je peux aussi comparer moi-même enfante et adulte, j'apprends plus vite adulte grâce à la motivation par les morceaux que j'ai choisis, l'autonomie, l'écoute, la culture musicale, le questionnement, les livres, les moyens modernes, les meilleurs professeurs et mes amis Piano Majeur et plein d'autres avantages que je dois oublier...
“Wrong doesn't become right just because it's accepted by a majority.” - Booker Washington
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