Méthode pour "terminer" un morceau

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jackgal
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Méthode pour "terminer" un morceau

Message par jackgal »

Bonsoir à tous,

Voilà, j'ai reçu mon piano (un yam P121 silent, j'avais mis un poste à ce sujet), et je me suis donc remis au piano depuis 2 semaines. J'essaie d'en faire grosso modo 45min-1h par jour, un peu plus le week-end. Je ne peux pas plus (horaires de cadre oblige) ...

Suite aux conseils de franz liszt, j'ai recommencé des morceaux assez faciles. Je travaille donc 2 Inventions de Bach (1 et 8 ), la valse "Brillante" de Chopin, et Golliwog's Cakewalk (ce morceau me fait délirer et je ne l'avais pas travaillé).

Je maîtrise "à peu près" les 2 Inventions. Par "à peu près", j'entends que je les joue au tempo qui me convient, mais je n'arrive pas à ne pas faire de faute; j'ai toujours 1 ou 2 notes qui dérapent, rarement au même endroit. C'est un problème que j'avais déjà du temps où je prenais des cours en école de musique.

Je n'ai pas de méthode pour perfectionner le morceau, je le joue de bout en bout plusieurs fois d'affilée, mais j'ai l'impression de stagner et de ne pas arriver à les maîtriser du bout des doigts, même sur ces morceaux assez simples. D'où ma première question: quelle est votre méthode pour arriver à quelque chose que vous pourriez jouer sans faute à n'importe quel moment ? Je n'ai pas l'impression que le seul fait de jouer le morceau en boucle de bout en bout soit efficace pour moi ... Mon amie, qui est violoniste, me conseille de jouer "en rythme", ou de compter, mais j'aimerais avoir l'avis de pianistes.

Ma deuxième question concerne Golliwog's Cakewalk: peut-être est-ce du au manque de pratique totale pendant 6 ans, mais les sauts de la main gauche me posent problème, même assez lentement. J'ai la main crispée, et rapidement des douleurs surviennent. Si je me décrispe, je tape n'importe où. Que me conseilleriez-vous pour corriger ça ?

Voilà, j'attends vos conseils et vos secrets pour le "polissage" des morceaux, je pense que je ne suis pas le seul à avoir ce problème !

Merci d'avance,

Jackgal
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Marie-france
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Message par Marie-france »

Bonjour jackgall,
Je maîtrise "à peu près" les 2 Inventions. Par "à peu près", j'entends que je les joue au tempo qui me convient, mais je n'arrive pas à ne pas faire de faute; j'ai toujours 1 ou 2 notes qui dérapent, rarement au même endroit.
C'est un problème qui peut venir de ta façon de travailler, ou d'un manque de régularité dans le travail (sauter ne serait-ce qu'un seul jour d'entraînement peut impliquer ce genre de désagrément).
Chaque enchaînement de note doit avoir été vu dans le détail, et répété maintes fois.
Je ne sais pas comment tu t'y prends pour apprendre. C'est vraiment un travail de fourmi.

En tout cas il ne sert à rien de répéter ton morceau d'un bout à l'autre plusieurs fois.
Chaque erreur doit être retravaillée, même si ce n'est jamais la même. Encore une chose, si tu laisses faire, tu ne pourras plus rattrapper tes erreurs. Rien de pire qu'une faute à corriger; mieux vaut apprendre proprement à la base et rester intransigeant par la suite pour ne pas laisser venir la moindre hésitation ou la moindre faute.
C'est une discipline de fer. Pas de laxisme.
Facile à dire tout cela.

Pour Golliwogg's, il y a des choses à faire évidemment.
Dis-moi si tu as des problèmes partout ou juste à certains endroits.

Bonne continuation sur ton beau P121 :D
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Franz Liszt
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Message par Franz Liszt »

ça peut aussi venir d'une difficultés technique particulière, la bonne vieille méthode du "on joue lentement et on regarde où même lentement ça ne va pas comme il faudrait " peut t'aider dans le sens où tu auras déjà cerné les passages vraiment problématiques.

Maintenant puisque cela ne fait pas longtemps que tu as repris assure toi une bonne position au piano, c'est à dire les épaules basses, et joue avec le poids de ton corps et non pas avec force, ne pas faire de mouvement inutiles avec les doigts, avoir une attaque correcte. Ce sont quelques pistes pour pouvoir éventuellement regarder ce qui ne pourrait pas être correcte au niveau de ta position.
Totalement fan de la 2ème Ballade de Chopin...
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egtegt
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Message par egtegt »

J'ai un peu le même problème, un morceau que je joue depuis trés longtemps et je fais toujours quelques fautes, mais jamais au même endroit. Et je ne rencontre plus de difficultés particulières dans ce morceau pourtant.

Je me suis rendu compte que le fait de travailler d'autres morceaux me faisait progresser et éviter des erreurs dans celui-ci.

Je pense qu'au delà du fait d'avoir maîtrisé un morceau et ses difficultés, il y a un niveau général qui fait qu'on arrive de mieux en mieux à jouer sans erreurs.

S'il s'agit de fautes toujours aux mêmes endroits, je rejoins Marie-France et Franz Liszt : il faut travailler ces passages. Eventuellement en travaillant des exercices adaptés. Mais s'il s'agit d'une tendance générale à faire des erreurs, alors à mon avis, il suffit de prendre son mal en patience, travailler le piano en général, et ça partira tout seul. Je pense qu'il est normal, quand on n'est pas un pianiste émérite, d'avoir une certaine imprécision dans les doigts, qui se traduit par des fautes aléatoires. Un des buts du travail, en plus de maîtriser des difficultés particulières, est justement de devenir globalement plus précis et agile (à mon avis en tout cas :) )
Erik
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Message par Erik »

Il ne faut pas jouer le morceau de bout en bout, et surtout pas plusieurs fois de suite. Il faut découper le morceau en petits bouts, bien maitriser tous les petits bouts, et travailler les transitions entre 2 petits bouts consécutifs.

Pour les sauts entre 2 notes, je procède comme suit : jouer d'abord la première note, se décontracter, sauter à la dexième note mais sans jouer cette deuxième note, faire un arrêt dessus pour se préparer mentalement et physiquement à attaquer cette deuxième note, et enfin la jouer. Ca peut paraître un peu bizarre ou ne ressembler à rien mais ca marche, en tout cas pour moi.

Sinon lorsqu'on est crispé, il vaut mieux s'arreter un moment, et recommencer plus tard, avant que des douleurs ne surviennent.
Drooxy
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Message par Drooxy »

Ne pas hésiter à remettre les doigtés en cause... à en chercher de plus confortables...

Je dis cela car j'ai été longtemps à penser qu'une fois qu'ils étaient choisis il n'était plus question de les changer... l'expérience me prouve qu'il ne faut pas hésiter, même longtemps après !

Sauf avis contraires ? :?
Drooxy
Erik
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Message par Erik »

Je pense aussi qu'on peut changer de doigté, et même travailler le morceau avec des doigtés différents. Mais garder le même doigté adopté tout le long du morceau, c-a-d pas improviser des changement de doigté en cours du morceau.
Je pense aussi que changer de doigté permet aussi lorsqu'on a travaillé un morceau avec des mauvaises habitudes de se defaire de ces habitudes et de reprendre le morceau comme si on partait de zero.

Par contre, la ou c'est un peu plus délicat à mon avis c'est de dire qu'on va chercher un doigté plus comfortable, car il me semble que le but premier n'est pas de trouver un doigté comfortable, mais un doigté qui sert l'interprétation. Le doigté le plus comfortable physiquement n'est pas forcément le meilleur du point de vue de l'interprétation.
Drooxy
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Message par Drooxy »

Le doigté le plus comfortable physiquement n'est pas forcément le meilleur du point de vue de l'interprétation.
Tu veux dire, par exemple, qu'il est préférable de garder un doigt "fort" (2/3) sur une note accentuée, même si cela n'est pas la solution la plus confortable ?
Drooxy
Erik
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Message par Erik »

Oui par exemple. Certains doigtés permette de mieux faire legato. Ou alors un doigté un peu plus difficile à un endroit peut permettre d'exprimer une certaine tension. Peut-etre meme que à des endroits ou on a tendance à accélrer, choisir un doigté un peu plus contraignant permet de l'éviter. Il n'y a pas de règles, mais ce sont quelques exemples.
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quasimodo
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Message par quasimodo »

C'est un problème qui me concerne aussi, et pour lequel j'avais déjà demandé conseil sur un autre forum.

Pour abonder dans le sens de Marie-France, il faut vraiment travailler sérieusement dessus et ne pas laisser les imperfections persister.

Une idée préliminaire, qui pourra paraître un peu loufoque pour commencer : apprendre une pièce c’est essentiellement un travail de mémoire. Beaucoup de gens semblent dissocier la notion d’ « apprendre » et celle de « mémoriser » ce qui est, à mon sens une démarche erronée en grande partie. Mais ce n’est pas vraiment le débat, ici.

Que faisons-nous quand nous travaillons un passage difficile en le répétant plusieurs fois, MS puis ME ? Nous implantons dans notre mémoire une série de gestes. Comme dit Marie France dans un autre sujet, cela tient un peu de la programmation. Le souci c’est que cette machine étrange qu’est notre cerveau a un fonctionnement assez capricieux. En l’occurrence, une grande partie de cette programmation ou mémorisation se fait hors de notre conscience. On dit même que c’est par le rêve, lors du sommeil, qu’une mémorisation définitive s’effectue (pour reprendre l’analogie avec les ordinateurs : c’est comme si en éveil nous stockons l’information en mémoire vive et c’est pendant le sommeil qu’elle s’écrit sur le disque dur), et c’est là que ça devient important : ce qui va s’implanter « en dur » dans notre mémoire sera la dernière exécution d’un passage que nous ayons effectuée dans la journée. Mettons que je sois en difficulté sur une mesure dans une partition, et que je consacre une séance plus ou moins longue de travail à cette mesure spécifique, je dois ABSOLUMENT veiller à conclure la session sur une exécution correcte de cette mesure, si je clos la session sur une faute, c’est cette faute qui va s’implanter dans ma mémoire et il sera extrêmement difficile de l’ « effacer ».

Cela implique toute une série de choses :

1 - lorsque, comme indique très justement Erik, nous découpons la pièce en petits bouts, il faut que les bouts soient suffisamment petits pour que nous soyons capable de les travailler correctement sans trop galérer. Si on choisit un segment trop long dont on ne parvient pas à venir à bout au terme d’une session de vingt minutes, on court à la catastrophe que j’évoquais ci-dessus. (Soit dit en passant, pour gérer la transition qu’évoque Erik, entre les petits bouts, le plus simple est de faire en sorte que les bouts ne se suivent pas séquentiellement mais qu’ils se superposent, exemple : il y a un passage difficile de la mesure 11 à la mesure 16, je découpe en trois segments : mesures 11 à 13 (inclus), mesures 13 à 14 puis mesures 14 à 16 et non pas 11 à 13 puis 14 puis 15-16.)

2 – sur ces passages difficiles il ne faut jamais se presser à passer Mains Ensemble, il faut au préalable vraiment s’assurer de complètement maîtriser les mouvements MS car la mémorisation ME est différente et favorise la mémorisation « musculaire » à laquelle il ne faut pas trop se fier mais qui est très difficile à « désimplanter ».

3 – la règle des 20 minutes : une séance de travail sur un passage spécifique ne doit pas excéder 20 minutes. Si en 20 min on n’y arrive pas c’est que le segment est trop long. Si c’est bon en 20 min ou moins inutile de prolonger la séance. Lorsqu'on travaille sur un passage délicat, une fois qu'on a réussi à l'exécuter correctement, on a tendance à vouloir le répéter encore et encore... jusqu'au moment ou la saturation aidant on commence à faire des fautes. Et alors, impossible de le refaire correct, du coup, on clôt la session sur du faux et… vous connaissez la suite.

4 – la meilleure manière d’apprendre une pièce n’est pas forcément de commencer par le début et d’avancer séquentiellement jusqu’au bout. En procédant ainsi on favorise les premières mesures d’une pièce, qui seront alors parfaitement maîtrisées, et on se casse la figure souvent vers la fin (quoi de plus rageant qu’une grosse horrible fausse note à quelques secondes de la fin alors que tout allait parfaitement bien…). Il vaut mieux : travailler en priorité sur les passages identifiés comme difficiles (une fois que vous avez terminé cela, c’est presque comme si vous aviez terminé la pièce entière, en tout cas psychologiquement), puis ensuite travailler pour maîtriser l’entièreté de la pièce en prenant les dernières mesures puis, petit à petit rajouter les mesures qui précèdent jusqu’à en arriver à la toute première. Je sais que cela parait un peu loufoque mais je vais vous démontrer pourquoi c’est valide : en commençant par apprendre le début puis avancer séquentiellement, vous aurez tendance, à chaque fois que vous travaillez sur la pièce encore inachevée, à jouer depuis le début que vous connaissez déjà (c’est si rassurant !). Un mois après vous arrivez enfin à cette fichue dernière mesure. « La pièce est apprise ! » vous dites vous en jubilant. Vous n’avez pas totalement tort, seulement votre niveau de maîtrise des mesures sera inégal et ira en décroissant dans la pièce. Normal : vous aurez répété les premières mesures de centaines, peut être des milliers de fois, alors que les dernières, n’auront eu droit qu’à quelques dizaines de répétitions. Au contraire, en travaillant en remontant, sur chaque session de travail vous allez d’abord vous intéresser à ce que vous ne connaissez pas encore : la ou les mesure(s) d’avant et la (les) répéter autant de fois que nécessaire pour passer aux suivantes qu’en principe vous maîtrisez déjà, en bout de course votre niveau de maîtrise sera beaucoup mieux équilibré sur l’ensemble de la pièce et vous serez beaucoup plus en confiance : cela diminue largement le risque d’erreur

Enfin il y a un aspect psychologique des choses. Un grand maître à qui on demandait comment il faisait pour ne jamais faire de faute répondait « Parce que je ne travaille que des notes justes. » Il faut travailler dans l’esprit de jouer juste et non pas dans celui d’éviter (ou corriger) l’erreur. C’est un peu jouer sur les mots, je sais bien, mais je pense que vous comprenez l’idée et c’est vraiment très important : dans le premier cas on s’avance avec confiance tandis que dans l’autre on aborde l’écueil avec appréhension. Cela fait toute la différence.
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yannis
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Message par yannis »

j'ail l'impression que ce topic est un de ceux qui sont des véritables révélations pour moi et qu'il s'inscrit parmi les plus utiles de ce forum !

je n'ai rien à ajouter à tout ce qui a été dit, par contre je voudrais poser quelques questions afférentes qui me turlupinent.

en reprenant la métaphore de la mémoire vive et du disque dur (en remarquant que dans les systèmes d'exploitation qui se respectent quand la mémoire vive est dépassée on stocke sur une partie privilégiée du disque dur, appelée le cache), je me pose la question du "mode" qui dépend de l'"intention" : quand on joue un morceau on peut être dans différents modes qui dépendent de l'intention :

1) on peut jouer pour apprendre. Alors on décortique, on attaque les difficultés séparement, on organise, on structure, on planifie, on imagine ce que donnera le résultat final
2) on peut jouer pour vérifier où on en est. On essaie d'obtenir un résultat musical correct, on fait semblant d'avoir résolu les problèmes, on veut voir si le travail a porté des fruits, si on est loin ou près du but
3) on peut jouer pour le plaisir (de soi-même ou d'autres auditeurs). On veut alors donner une version aussi bonne que possible du morceau, en masquant les points faibles

personnellement quand je suis en mode (2) ou (3) alors que je suis en train d'apprendre, j'ai des gros sentiments de culpabilité, sans doute parce que sous-consciemment je crois que (2) et (3) ont un effet négatif sur le travail effectué en (1). [c'est comme manger des sucreries alors qu'on est censé être en régime]

mais est-ce vraiment le cas ? est-ce que ces modes entrent dans le schéma décrit par quasimodo ? qu'en pensez-vous : en phase d'apprentissage faut-il vraiment éviter la tentation de jouer "normalement" voire de "tricher", ou est-ce que ces deux activités sont indépendantes et peuvent être menées en parallèle ?
Es gab eine Zeit, wo ich nur ungern über Schubert sprechen, nur Nächtens den Bäumen und Sternen von ihm vorerzählen mögen. [R. Schumann, 1838]
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quasimodo
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Message par quasimodo »

Je ne suis pas certain de bien comprendre ta question Yannis, il me semble que ton mode 3 ne peut être abordé qu'après avoir largement dépassé les modes 1 et 2, de même que le mode 2 ne peut être abordé sans avoir déjà significativement avancé en mode 1... Quant à tricher pour masquer les points faibles cela me semble à proscrire, dans cet esprit d’éviter d’implanter en mémoire quelque chose de faux

En tout cas ton post m’inspire d’autres idées éparses que je livre ci-après :

La vertu cardinale dans l'apprentissage musical est probablement la patience... : savoir se donner du temps entre le moment où on a bouclé une pièce au plan apprentissage et celui où on la joue pour la première fois en public, donner un bon degré de maturation à la maîtrise qu’on a de la pièce.

Savoir aussi se réfréner à vouloir aller au piano et « travailler » la pièce, je veux dire par là qu’il y a tout un travail préalable d’écoute, d’analyse de pré-mémorisation auditive qui aide grandement et il faut savoir se donner le temps de le faire, différer l’instant où on jouera les premières notes au clavier. Il s’agit concrètement d’écouter plusieurs enregistrements différents de la pièce par de grands pianistes, en suivant sur la partition. Idéalement, ne commencer à travailler au piano que lorsqu’on est capable d’entendre dans sa tête la pièce entière. C’est le premier stade de l’apprentissage mental (mental practice). Au stade avancé, il s’agit de « jouer » mentalement la pièce c'est-à-dire exécuter en pensée les mouvements qu’on fera par la suite au piano

Beaucoup de pianistes professionnels parlent de l’apprentissage mental. Le top du top est illustré par le cas d’un concertiste (il me semble que c’était Brendel), appelé à jouer pour la première fois de sa vie un concerto de Beethoven au Japon, qui étudia la partition pendant son trajet d’avion. Arrivé sur place : une répétition avec l’orchestre, puis ça roule pour le concert le soir même… Impressionnant.

A propos de l’intention, une autre idée, qui développe le dernier paragraphe de mon post précédent, c’est « Travailler les notes justes », l’expression en Anglais « Practice to have it right » est peut-être plus parlante. Quand on travaille, dans la phase « apprentissage », il faut traiter chaque passage en « approche globale ». Beaucoup disent qu’ils essaient d’abord de jouer les notes de la partition, puis, lorsque ça va vite, essaient d'aller progressivement au tempo et après seulement se soucient des nuances dynamiques, rythmiques, d’articulation etc. Dans la démarche que je défends ce n’est pas bon. Dès la première tentative de jouer chaque passage, il faut s’efforcer de jouer chaque note avec toutes les nuances qu’on veut y apporter. Si la partition dit « ff », il faut travailler directement ff. En d’autres termes se soucier de la musicalité dès l’instant ou appuie sur les touches.

En fait, tout cela se tient : dans la mesure où on a effectué le travail mental dont je parle plus haut, on SAIT déjà, avant même de s’asseoir au piano, comment on compte interpréter la pièce, quelle nuance(s) sur telle note précise, etc.
jackgal
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Message par jackgal »

Wow ! Je ne m'attendais pas à autant de réponses !... :)

Quasimodo, je me reconnais complètement dans ton paragraphe 4. Je vais essayer de changer ma méthode de travail. Ce n'est pas évident, car ma prof précédente avait tendance à me faire répéter les morceaux en boucle jusqu'à ce que ça passe, et on recommençait du début à la moindre fausse note, c'était très stressant, je me concentrais à mort pour pas me planter dans le passage que je redoutais, et crac ! la fausse note et je me faisais engueuler :cry:

Maintenant je travaille sans prof et j'essaie de trouver des méthodes de travail. Je suis peut-être aussi un peu frustré de ne pas retrouver tout de suite mon niveau précédent, mais il faut peut-être que je patiente un peu, ça ne fait que 2 semaines !

Mon amie (violoniste, à un niveau bien plus avancé que moi en piano) ne joue que quelques fois un morceau "en entier" avant de le présenter à un examen ou un concert. Elle veut absolument que j'applique ses méthodes, mais je ne pense pas qu'elles soient transposables au piano: jouer en rythme pour la régularité des traits (4 doubles -> double pointée triple double pointée triple, puis on inverse, triple double pointée triple double pointée). Elle apprend également les traits à l'envers, j'ai essayé, c'est assez masochiste ;) Elle considère qu'elle connaît un trait quand elle peut le jouer à l'envers aussi bien qu'à l'endroit. Qu'en pensez-vous ?

Pour ma part, je fais assez peu de technique (à part gammes et arpèges dans les tonalités des morceaux que je joue), mais je ressens vraiment des manques, au niveau des trilles par exemple. Je ne fais plus de Hanon, ça me fait mal et je ne veux pas attraper de tendinite. Que pensez-vous des 100 exercices de Czerny Op. 139 ? L'école de la Vélocité (Op. 299) me semble un peu trop costaud, je n'ai pas envie d'y passer trop de temps non plus ...


Pour Golliwog's C. j'arrive petit à petit à me décrisper, en pensant moins à ma main gauche, et en me concentrant sur la mélodie à la main droite. En fait, j'arrive jamais à faire ce que je veux quand je me concentre dessus, il faut que je n'y pense pas pour y arriver !

Voilà, merci en tout cas pour vos réponses !

Jackgal
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yannis
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Message par yannis »

quasimodo a écrit :Je ne suis pas certain de bien comprendre ta question Yannis, il me semble que ton mode 3 ne peut être abordé qu'après avoir largement dépassé les modes 1 et 2, de même que le mode 2 ne peut être abordé sans avoir déjà significativement avancé en mode 1... Quant à tricher pour masquer les points faibles cela me semble à proscrire, dans cet esprit d’éviter d’implanter en mémoire quelque chose de faux
tout est bien dans le meilleur des mondes. Quand on a une discipline de fer on passe par les étapes dans l'ordre 1->2->3. Mais quand on est impatient, quand on veut "voir ce que ça donne", on se surprend à faire du 2, voire même du 3 quand la famille veut écouter ce qu'on est en train de travailler.

ma question portait sur le préjudice porté par de tels "faux pas" : ma prof me dit toujours "il ne faut surtout pas jouer le morceau rapidement avant d'avoir appris les bons gestes". Mais nous avons dépassé l'âge du "n'y touche pas tu vas te brûler". Selon ton schéma est-ce que le fait de "brûler les étapes" détruit totalement l'édifice mental, ou est-ce que c'est sans importance ?

Je me rends compte que la question est sans doute sans intérêt pour ce forum... vous êtes tous tellement sérieux et disciplinés, je me sens comme le dernier des pêcheurs condamnés à l'enfer éternel du pianisme médiocre...
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quasimodo
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Message par quasimodo »

yannis a écrit :Je me rends compte que la question est sans doute sans intérêt pour ce forum... vous êtes tous tellement sérieux et disciplinés, je me sens comme le dernier des pêcheurs condamnés à l'enfer éternel du pianisme médiocre...
Détrompe-toi, si je pratiquais avec constance le quart de ce que je préconise, je progresserais sans doute bien mieux :lol: .

Mais bon, faites ce que je dis, pas ce que je fais :wink: .

Sur ce que dit ta prof, il y a quelque chose de discutable : les bons gestes pour jouer un passage rapide au tempo peuvent souvent être différents de ceux qui permettent de le jouer lentement. Le travail à vitesse lente est utile pour d'autres fins, qui sont de consolider la mémorisation, mais en aucun cas pour avancer vers le bon tempo.

La clé reste de bien insister sur le travail MS à un tempo supérieur à celui visé ME. On dit que la vitesse maximum ME est à peu près de 80% de celle qu'on peut atteindre MS.

Pour la question de brûler les étapes, clairement, c'est à fuir comme la peste, pour les raisons développées plus haut : risque d'implanter une mauvaise habitude qui sera extrêmement difficile à "désapprendre". Et quand bien même une faute est corrigée, il est hautement probable qu'en situation stressante (présence d'une audience) elle repointe son nez car le cerveau se trouvera alors face à un dilemme entre le mouvement correct et celui qui était faux et qui n'est pas totalement effacé.

Cela étant dit, il arrive souvent, semble-t-il que les pianistes de niveau débutant ou intermédiaire ne se rendent pas compte qu'ils "savent" déjà et surinvestissent en travail sur quelque chose qu'en fait il maîtrisent déjà.

En d'autres termes, le "1" et le "2" se superposent forcément à un moment donné. En revanche le "3", je persiste et signe : être patient, maturer la maîtrise de la pièce.
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quasimodo
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Message par quasimodo »

Il y a aussi, très évidemment la question centrale de la concentration, et là, pas de recette miracle : ça demande beaucoup d'effort et beaucoup d'expérience.
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Gastiflex
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Message par Gastiflex »

Pour la question des traits à l'endroit et à l'envers, ma prof de piano me le conseille aussi et il me semble que c'est assez efficace.
Lasciate ogni speranza, voi ch'entrate.
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Marie-france
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Message par Marie-france »

Le plus simple est de faire en sorte que les bouts ne se suivent pas séquentiellement mais qu’ils se superposent, exemple : il y a un passage difficile de la mesure 11 à la mesure 16, je découpe en trois segments : mesures 11 à 13 (inclus), mesures 13 à 14 puis mesures 14 à 16 et non pas 11 à 13 puis 14 puis 15-16.)
Indispensable en effet!! Ne jamais faire autrement!!!

Par contre, si tu me le permets Quasi, je ne suis pas tout à fait d'accord avec ton paragraphe 4, preuve en est que je sais toujours mes fins aussi bien que mes débuts de morceaux.
On ne peut, à mon avis, travailler à "rebrousse poil" ainsi.
En effet, comment est-il possible musicalement, textuellement et gestuellement parlant d'assimiler un timbre, un texte ou un geste dont tu ne connais pas le départ.
Pour moi, il me paraît inconcevable de travailler les passages difficiles en dehors de leur contexte, car la note suivante est l'aboutissement de la précédente, un prolongement...
Est-il plus facile par ailleurs d'apprendre par reconstruction d'un puzzle, plutôt qu'en suivant le fil d'ariane.
Là je ne suis franchement pas convaincue!

De plus, en réponse à ta démonstration, ce n'est pas tant dans la multiplicité des répétitions mais dans la qualité de l'apprentissage que l'on mémorise correctement une oeuvre jusqu'à sa fin.
Il est bien évident qu'il faut savoir se maîtriser dans son travail et que lorsqu'on se met au piano, il ne faut pas commencer systématiquement par le début, mais aller directement là où on l'a laissé. Puis reprendre pour peaufiner, au début, en retravaillant éventuellement ce qui pose encore problème.
Et lorsqu'on est arrivé au bout, il faut continuer de retravailler systématiquement tous les passages délicats, aller au fond des choses. Vérifier tous les engrenages, amener la pièce à maturité.

En réponse à Yannis, il me semble que le 2 ne doit pas être dissocié du 1, et il ne faut jamais faire "semblant".
Et le 3 ne doit se faire qu'après avoir terminé complètement le morceau, enfin à mon avis. Bien que pour nous qui n'avons pas un statut de super star pianistique, et un certain âge, l'impatience est forte de voir le final alors qu'il n'est pas maitrisé. L'intransigeance s'émousse car les enjeux sont moindres. Il faudrait ne pas tomber dans la tentation.
A mon avis et selon mon expérience, jouer un morceau rapidement ou en faire une esquisse générale, alors qu'il n'est pas fini, ne peut qu'induire des erreurs dont il est pratiquement sûr qu'elles resteront.



Dès la première tentative de jouer chaque passage, il faut s’efforcer de jouer chaque note avec toutes les nuances qu’on veut y apporter. Si la partition dit « ff », il faut travailler directement ff. En d’autres termes se soucier de la musicalité dès l’instant ou appuie sur les touches.
Là, Quasi je te rejoins entièrement! La première est celle sur laquelle tout le reste se forgera, avec ses erreurs et ses manques s'il y en a. Veiller au premier déchiffrage comme du lait sur le feu!

Bon j'arrête là pour l'instant! Ouf!!!!!!
Vous êtes trop bavards :D
Difficile de répondre à tout.
krou
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Message par krou »

à mon avis, le plus important n'est pas de jouer au bon tempo avec tjs quelques erreurs, je pense qu'il est préfèrable de jouer légèrement plus lentement pour 2 raisons

- si il y a des fautes et si elles ne sont jamais au même endroit c'est à mon avis que tu manques d'assurance sur le morceau, avec un jeu légèrement plus lent tu sentiras que tu as "plus de temps" pour placer tes doigts et au bout de quelques fois le morceau devrait te sembler plus facile à jouer

- ces fautes semblent t'agacer, hypothèse pure mais il est possible que tu te dise : va y avoir une faute bientôt :? ca peut pas louper :? et en conséquence, tu commetras effectivement une faute et tu te concentras tellement pour pas en faire que ton jeu sera moins nuancé :wink:

une fois que tu te sens bien sur un morceau de toute façon, les doigts accélèrent tout seuls :)

quoi qu'il en soit je crois que tu devrais essayer un peu tout ce qui a été proposé ici parce que toutes les méthodes sont bonnes, seulement certaines personnes s'adaptent plus volontiers à certaines ;)
Albert
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Message par Albert »

Je rencontre aussi ce probleme avec les inventions, la 13 a 2 voix m en pose de serieux, pareil, toujour des petites erreurs jamais aux memes endroits. je met en pratique vos conseils de jouer mesures par mesures en les chevauchant, et petit a petit cela passe mieux, de plus j ai ralenti le tempo, et repris le ms. j ai pu ce matin la jouer 4 fois d'affilé la jouer sans accros, mais la peur engendrent l erreur, la 5 eme, replantages.
En paralelle, je commence une piece de Carnaval op9 de Schumman "Pierrot", et aussi "Chiarina" mais j ai peur de sauter des etapes. Ces pieces ne me semblent pas pas tres difficille a déchifrer, mais l interpretation n est pas simple.Qu'en pensez vous?
Albert, çui du fond, a coté du poele a bois
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