La musique : art scientifique, science artistique ?
Re: La musique : art scientifique, science artistique ?
Dans un esprit analogue, les rimes sont aussi une astreinte pour le poète ; s'ils ont une fonction esthétique évidente, dépeignent-ils toujours la pensée de l'auteur qui s'y soumet ?
Le fameux poème qui suit sous-tend une évolution qui a eu des répercussions, me semble-t-il, aussi bien au niveau littéraire que musical.
Bonne lecture !
Réponse à un acte d'accusation, Les Contemplations, L'Homme Océan
Donc, c'est moi qui suis l'ogre et le bouc émissaire.
Dans ce chaos du siècle où votre cœur se serre,
J'ai foulé le bon goût et l'ancien vers françois
Sous mes pieds, et, hideux, j'ai dit à l'ombre: -Sois!-
Et l'ombre fut. -- Voilà votre réquisitoire.
Langue, tragédie, art, dogmes, conservatoire,
Toute cette clarté s'est éteinte, et je suis
Le responsable, et j'ai vidé l'urne des nuits.
De la chute de tout je suis la pioche inepte;
C'est votre point de vue. Eh bien, soit, je l'accepte;
C'est moi que votre prose en colère a choisi;
Vous me criez: Racca; moi je vous dis: Merci!
Cette marche du temps, qui ne sort d'une église
Que pour entrer dans l'autre, et qui se civilise;
Ces grandes questions d'art et de liberté,
Voyons-les, j'y consens, par le moindre côté,
Et par le petit bout de la lorgnette. En somme,
J'en conviens, oui, je suis cet abominable homme;
Et, quoique, en vérité, je pense avoir commis,
D'autres crimes encor que vous avez omis.
Avoir un peu touché les questions obscures,
Avoir sondé les maux, avoir cherché les cures,
De la vieille ânerie insulté les vieux bâts,
Secoué le passé du haut jusques en bas,
Et saccagé le fond tout autant que la forme.
Je me borne à ceci: je suis ce monstre énorme,
Je suis le démagogue horrible et débordé,
Et le dévastateur du vieil A B C D;
Causons.
Quand je sortis du collége, du thème,
Des vers latins, farouche, espèce d'enfant blême
Et grave, au front penchant, aux membres appauvris;
Quand, tâchant de comprendre et de juger, j'ouvris
Les yeux sur la nature et sur l'art, l'idiome,
Peuple et noblesse, était l'image du royaume;
La poésie était la monarchie; un mot
Était un duc et pair, ou n'était qu'un grimaud;
Les syllabes, pas plus que Paris et que Londre,
Ne se mêlaient; ainsi marchent sans se confondre
Piétons et cavaliers traversant le pont Neuf;
La langue était l'état avant quatre-vingt-neuf;
Les mots, bien ou mal nés, vivaient parqués en castes:
Les uns, nobles, hantant les Phèdres, les Jocastes,
Les Méropes, ayant le décorum pour loi,
Et montant à Versaille aux carrosses du roi;
Les autres, tas de gueux, drôles patibulaires,
Habitant les patois; quelques-uns aux galères
Dans l'argot; dévoués à tous les genres bas,
Déchirés en haillons dans les halles; sans bas,
Sans perruque; créés pour la prose et la farce;
Populace du style au fond de l'ombre éparse;
Vilains, rustres, croquants, que Vaugelas leur chef
Dans le bagne Lexique avait marqué d'une F;
N'exprimant que la vie abjecte et familière,
Vils, dégradés, flétris, bourgeois, bons pour Molière.
Racine regardait ces marauds de travers;
Si Corneille en trouvait un blotti dans son vers,
Il le gardait, trop grand pour dire: Qu'il s'en aille;
Et Voltaire criait: Corneille s'encanaille!
Le bonhomme Corneille, humble, se tenait coi.
Alors, brigand, je vins; je m'écriai: Pourquoi
Ceux-ci toujours devant, ceux-là toujours derrière?
Et sur l'Académie, aïeule et douairière,
Cachant sous ses jupons les tropes effarés,
Et sur les bataillons d'alexandrins carrés,
Je fis souffler un vent révolutionnaire.
Je mis un bonnet rouge au vieux dictionnaire.
Plus de mot sénateur! plus de mot roturier!
Je fis une tempête au fond de l'encrier,
Et je mêlai, parmi les ombres débordées,
Au peuple noir des mots l'essaim blanc des idées;
Et je dis: Pas de mot où l'idée au vol pur
Ne puisse se poser, tout humide d'azur!
Discours affreux! -- Syllepse, hypallage, litote,
Frémirent; je montai sur la borne Aristote,
Et déclarai les mots égaux, libres, majeurs.
Tous les envahisseurs et tous les ravageurs,
Tous ces tigres, les Huns les Scythes et les Daces,
N'étaient que des toutous auprès de mes audaces;
Je bondis hors du cercle et brisai le compas.
Je nommai le cochon par son nom; pourquoi pas?
Guichardin a nommé le Borgia! Tacite
Le Vitellius! Fauve, implacable, explicite,
J'ôtai du cou du chien stupéfait son collier
D'épithètes; dans l'herbe, à l'ombre du hallier,
Je fis fraterniser la vache et la génisse,
L'une étant Margoton et l'autre Bérénice.
Alors, l'ode, embrassant Rabelais, s'enivra;
Sur le sommet du Pinde on dansait Ça ira;
Les neuf muses, seins nus, chantaient la Carmagnole;
L'emphase frissonna dans sa fraise espagnole;
Jean, l'ânier, épousa la bergère Myrtil.
On entendit un roi dire: -Quelle heure est-il?-
Je massacrais l'albâtre, et la neige, et l'ivoire,
Je retirai le jais de la prunelle noire,
Et j'osai dire au bras: Sois blanc, tout simplement.
Je violai du vers le cadavre fumant;
J'y fis entrer le chiffre; ô terreur! Mithridate
Du siége de Cyzique eût pu citer la date.
Jours d'effroi! les Laïs devinrent des catins.
Force mots, par Restaut peignés tous les matins,
Et de Louis-Quatorze ayant gardé l'allure,
Portaient encor perruque; à cette chevelure
La Révolution, du haut de son beffroi,
Cria: -Transforme-toi! c'est l'heure. Remplis-toi
-De l'âme de ces mots que tu tiens prisonnière!-
Et la perruque alors rugit, et fut crinière.
Liberté! c'est ainsi qu'en nos rébellions,
Avec des épagneuls nous fîmes des lions,
Et que, sous l'ouragan maudit que nous soufflâmes,
Toutes sortes de mots se couvrirent de flammes.
J'affichai sur Lhomond des proclamations.
On y lisait: -Il faut que nous en finissions!
-Au panier les Bouhours, les Batteux, les Brossettes
-A la pensée humaine ils ont mis les poucettes.
-Aux armes, prose et vers! formez vos bataillons!
-Voyez où l'on en est: la strophe a des bâillons!
-L'ode a des fers aux pieds, le drame est en cellule.
-Sur le Racine mort le Campistron pullule!-
Boileau grinça des dents; je lui dis: Ci-devant,
Silence! et je criai dans la foudre et le vent:
Guerre à la rhétorique et paix à la syntaxe!
Et tout quatre-vingt-treize éclata. Sur leur axe,
On vit trembler l'athos, l'ithos et le pathos.
Les matassins, lâchant Pourceaugnac et Cathos,
Poursuivant Dumarsais dans leur hideux bastringue,
Des ondes du Permesse emplirent leur seringue.
La syllabe, enjambant la loi qui la tria,
Le substantif manant, le verbe paria,
Accoururent. On but l'horreur jusqu'à la lie.
On les vit déterrer le songe d'Athalie;
Ils jetèrent au vent les cendres du récit
De Théramène; et l'astre Institut s'obscurcit.
Oui, de l'ancien régime ils ont fait tables rases,
Et j'ai battu des mains, buveur du sang des phrases,
Quand j'ai vu par la strophe écumante et disant
Les choses dans un style énorme et rugissant,
L'Art poétique pris au collet dans la rue,
Et quand j'ai vu, parmi la foule qui se rue,
Pendre, par tous les mots que le bon goût proscrit,
La lettre aristocrate à la lanterne esprit.
Oui, je suis ce Danton! je suis ce Robespierre!
J'ai, contre le mot noble à la longue rapière,
Insurgé le vocable ignoble, son valet,
Et j'ai, sur Dangeau mort, égorgé Richelet.
Oui, c'est vrai, ce sont là quelques-uns de mes crimes.
J'ai pris et démoli la bastille des rimes.
J'ai fait plus: j'ai brisé tous les carcans de fer
Qui liaient le mot peuple, et tiré de l'enfer
Tous les vieux mots damnés, légions sépulcrales;
J'ai de la périphrase écrasé les spirales,
Et mêlé, confondu, nivelé sous le ciel
L'alphabet, sombre tour qui naquit de Babel;
Et je n'ignorais pas que la main courroucée
Qui délivre le mot, délivre la pensée.
L'unité, des efforts de l'homme est l'attribut.
Tout est la même flèche et frappe au même but.
Donc, j'en conviens, voilà, déduits en style honnête,
Plusieurs de mes forfaits, et j'apporte ma tête.
Vous devez être vieux, par conséquent, papa,
Pour la dixième fois j'en fais meâ culpâ.
Oui, si Beauzée est dieu, c'est vrai, je suis athée.
La langue était en ordre, auguste, époussetée,
Fleur-de-lys d'or, Tristan et Boileau, plafond bleu,
Les quarante fauteuils et le trône au milieu;
Je l'ai troublée, et j'ai, dans ce salon illustre,
Même un peu cassé tout; le mot propre, ce rustre,
N'était que caporal: je l'ai fait colonel;
J'ai fait un jacobin du pronom personnel;
Dur participe, esclave à la tête blanchie,
Une hyène, et du verbe une hydre d'anarchie.
Vous tenez le reum confitentem. Tonnez!
J'ai dit à la narine: Eh mais! tu n'es qu'un nez!
J'ai dit au long fruit d'or: Mais tu n'es qu'une poire!
J'ai dit à Vaugelas: Tu n'es qu'une mâchoire!
J'ai dit aux mots: Soyez république! soyez
La fourmilière immense, et travaillez! Croyez,
Aimez, vivez! -- J'ai mis tout en branle, et, morose,
J'ai jeté le vers noble aux chiens noirs de la prose.
Et, ce que je faisais, d'autres l'ont fait aussi;
Mieux que moi. Calliope, Euterpe au ton transi,
Polymnie, ont perdu leur gravité postiche.
Nous faisons basculer la balance hémistiche.
C'est vrai, maudissez-nous. Le vers, qui, sur son front
Jadis portait toujours douze plumes en rond,
Et sans cesse sautait sur la double raquette
Qu'on nomme prosodie et qu'on nomme étiquette,
Rompt désormais la règle et trompe le ciseau,
Et s'échappe, volant qui se change en oiseau,
De la cage césure, et fuit vers la ravine,
Et vole dans les cieux, alouette divine.
Tous les mots à présent planent dans la clarté.
Les écrivains ont mis la langue en liberté.
Et, grâce à ces bandits, grâce à ces terroristes,
Le vrai, chassant l'essaim des pédagogues tristes,
L'imagination, tapageuse aux cent voix,
Qui casse des carreaux dans l'esprit des bourgeois;
La poésie au front triple, qui rit, soupire
Et chante, raille et croit; que Plaute et Shakspeare
Semaient, l'un sur la plebs, et l'autre sur le mob;
Qui verse aux nations la sagesse de Job
Et la raison d'Horace à travers sa démence;
Qu'enivre de l'azur la frénésie immense,
Et qui, folle sacrée aux regards éclatants,
Monte à l'éternité par les degrés du temps,
La muse reparaît, nous reprend, nous ramène,
Se remet à pleurer sur la misère humaine,
Frappe et console, va du zénith au nadir,
Et fait sur tous les fronts reluire et resplendir
Son vol, tourbillon, lyre, ouragan d'étincelles,
Et ses millions d'yeux sur ses millions d'ailes.
Le mouvement complète ainsi son action.
Grâce à toi, progrès saint, la Révolution
Vibre aujourd'hui dans l'air, dans la voix, dans le livre;
Dans le mot palpitant le lecteur la sent vivre;
Elle crie, elle chante, elle enseigne, elle rit,
Sa langue est déliée ainsi que son esprit.
Elle est dans le roman, parlant tout bas aux femmes.
Elle ouvre maintenant deux yeux où sont deux flammes,
L'un sur le citoyen, l'autre sur le penseur.
Elle prend par la main la Liberté, sa soeur,
Et la fait dans tout homme entrer par tous les pores.
Les préjugés, formés, comme les madrépores,
Du sombre entassement des abus sous les temps,
Se dissolvent au choc de tous les mots flottants,
Pleins de sa volonté, de son but, de son âme.
Elle est la prose, elle est le vers, elle est le drame;
Elle est l'expression, elle est le sentiment,
Lanterne dans la rue, étoile au firmament.
Elle entre aux profondeurs du langage insondable;
Elle souffle dans l'art, porte-voix formidable;
Et, c'est Dieu qui le veut, après avoir rempli
De ses fiertés le peuple, effacé le vieux pli
Des fronts, et relevé la foule dégradée,
Et s'être faite droit, elle se fait idée!
Le fameux poème qui suit sous-tend une évolution qui a eu des répercussions, me semble-t-il, aussi bien au niveau littéraire que musical.
Bonne lecture !
Réponse à un acte d'accusation, Les Contemplations, L'Homme Océan
Donc, c'est moi qui suis l'ogre et le bouc émissaire.
Dans ce chaos du siècle où votre cœur se serre,
J'ai foulé le bon goût et l'ancien vers françois
Sous mes pieds, et, hideux, j'ai dit à l'ombre: -Sois!-
Et l'ombre fut. -- Voilà votre réquisitoire.
Langue, tragédie, art, dogmes, conservatoire,
Toute cette clarté s'est éteinte, et je suis
Le responsable, et j'ai vidé l'urne des nuits.
De la chute de tout je suis la pioche inepte;
C'est votre point de vue. Eh bien, soit, je l'accepte;
C'est moi que votre prose en colère a choisi;
Vous me criez: Racca; moi je vous dis: Merci!
Cette marche du temps, qui ne sort d'une église
Que pour entrer dans l'autre, et qui se civilise;
Ces grandes questions d'art et de liberté,
Voyons-les, j'y consens, par le moindre côté,
Et par le petit bout de la lorgnette. En somme,
J'en conviens, oui, je suis cet abominable homme;
Et, quoique, en vérité, je pense avoir commis,
D'autres crimes encor que vous avez omis.
Avoir un peu touché les questions obscures,
Avoir sondé les maux, avoir cherché les cures,
De la vieille ânerie insulté les vieux bâts,
Secoué le passé du haut jusques en bas,
Et saccagé le fond tout autant que la forme.
Je me borne à ceci: je suis ce monstre énorme,
Je suis le démagogue horrible et débordé,
Et le dévastateur du vieil A B C D;
Causons.
Quand je sortis du collége, du thème,
Des vers latins, farouche, espèce d'enfant blême
Et grave, au front penchant, aux membres appauvris;
Quand, tâchant de comprendre et de juger, j'ouvris
Les yeux sur la nature et sur l'art, l'idiome,
Peuple et noblesse, était l'image du royaume;
La poésie était la monarchie; un mot
Était un duc et pair, ou n'était qu'un grimaud;
Les syllabes, pas plus que Paris et que Londre,
Ne se mêlaient; ainsi marchent sans se confondre
Piétons et cavaliers traversant le pont Neuf;
La langue était l'état avant quatre-vingt-neuf;
Les mots, bien ou mal nés, vivaient parqués en castes:
Les uns, nobles, hantant les Phèdres, les Jocastes,
Les Méropes, ayant le décorum pour loi,
Et montant à Versaille aux carrosses du roi;
Les autres, tas de gueux, drôles patibulaires,
Habitant les patois; quelques-uns aux galères
Dans l'argot; dévoués à tous les genres bas,
Déchirés en haillons dans les halles; sans bas,
Sans perruque; créés pour la prose et la farce;
Populace du style au fond de l'ombre éparse;
Vilains, rustres, croquants, que Vaugelas leur chef
Dans le bagne Lexique avait marqué d'une F;
N'exprimant que la vie abjecte et familière,
Vils, dégradés, flétris, bourgeois, bons pour Molière.
Racine regardait ces marauds de travers;
Si Corneille en trouvait un blotti dans son vers,
Il le gardait, trop grand pour dire: Qu'il s'en aille;
Et Voltaire criait: Corneille s'encanaille!
Le bonhomme Corneille, humble, se tenait coi.
Alors, brigand, je vins; je m'écriai: Pourquoi
Ceux-ci toujours devant, ceux-là toujours derrière?
Et sur l'Académie, aïeule et douairière,
Cachant sous ses jupons les tropes effarés,
Et sur les bataillons d'alexandrins carrés,
Je fis souffler un vent révolutionnaire.
Je mis un bonnet rouge au vieux dictionnaire.
Plus de mot sénateur! plus de mot roturier!
Je fis une tempête au fond de l'encrier,
Et je mêlai, parmi les ombres débordées,
Au peuple noir des mots l'essaim blanc des idées;
Et je dis: Pas de mot où l'idée au vol pur
Ne puisse se poser, tout humide d'azur!
Discours affreux! -- Syllepse, hypallage, litote,
Frémirent; je montai sur la borne Aristote,
Et déclarai les mots égaux, libres, majeurs.
Tous les envahisseurs et tous les ravageurs,
Tous ces tigres, les Huns les Scythes et les Daces,
N'étaient que des toutous auprès de mes audaces;
Je bondis hors du cercle et brisai le compas.
Je nommai le cochon par son nom; pourquoi pas?
Guichardin a nommé le Borgia! Tacite
Le Vitellius! Fauve, implacable, explicite,
J'ôtai du cou du chien stupéfait son collier
D'épithètes; dans l'herbe, à l'ombre du hallier,
Je fis fraterniser la vache et la génisse,
L'une étant Margoton et l'autre Bérénice.
Alors, l'ode, embrassant Rabelais, s'enivra;
Sur le sommet du Pinde on dansait Ça ira;
Les neuf muses, seins nus, chantaient la Carmagnole;
L'emphase frissonna dans sa fraise espagnole;
Jean, l'ânier, épousa la bergère Myrtil.
On entendit un roi dire: -Quelle heure est-il?-
Je massacrais l'albâtre, et la neige, et l'ivoire,
Je retirai le jais de la prunelle noire,
Et j'osai dire au bras: Sois blanc, tout simplement.
Je violai du vers le cadavre fumant;
J'y fis entrer le chiffre; ô terreur! Mithridate
Du siége de Cyzique eût pu citer la date.
Jours d'effroi! les Laïs devinrent des catins.
Force mots, par Restaut peignés tous les matins,
Et de Louis-Quatorze ayant gardé l'allure,
Portaient encor perruque; à cette chevelure
La Révolution, du haut de son beffroi,
Cria: -Transforme-toi! c'est l'heure. Remplis-toi
-De l'âme de ces mots que tu tiens prisonnière!-
Et la perruque alors rugit, et fut crinière.
Liberté! c'est ainsi qu'en nos rébellions,
Avec des épagneuls nous fîmes des lions,
Et que, sous l'ouragan maudit que nous soufflâmes,
Toutes sortes de mots se couvrirent de flammes.
J'affichai sur Lhomond des proclamations.
On y lisait: -Il faut que nous en finissions!
-Au panier les Bouhours, les Batteux, les Brossettes
-A la pensée humaine ils ont mis les poucettes.
-Aux armes, prose et vers! formez vos bataillons!
-Voyez où l'on en est: la strophe a des bâillons!
-L'ode a des fers aux pieds, le drame est en cellule.
-Sur le Racine mort le Campistron pullule!-
Boileau grinça des dents; je lui dis: Ci-devant,
Silence! et je criai dans la foudre et le vent:
Guerre à la rhétorique et paix à la syntaxe!
Et tout quatre-vingt-treize éclata. Sur leur axe,
On vit trembler l'athos, l'ithos et le pathos.
Les matassins, lâchant Pourceaugnac et Cathos,
Poursuivant Dumarsais dans leur hideux bastringue,
Des ondes du Permesse emplirent leur seringue.
La syllabe, enjambant la loi qui la tria,
Le substantif manant, le verbe paria,
Accoururent. On but l'horreur jusqu'à la lie.
On les vit déterrer le songe d'Athalie;
Ils jetèrent au vent les cendres du récit
De Théramène; et l'astre Institut s'obscurcit.
Oui, de l'ancien régime ils ont fait tables rases,
Et j'ai battu des mains, buveur du sang des phrases,
Quand j'ai vu par la strophe écumante et disant
Les choses dans un style énorme et rugissant,
L'Art poétique pris au collet dans la rue,
Et quand j'ai vu, parmi la foule qui se rue,
Pendre, par tous les mots que le bon goût proscrit,
La lettre aristocrate à la lanterne esprit.
Oui, je suis ce Danton! je suis ce Robespierre!
J'ai, contre le mot noble à la longue rapière,
Insurgé le vocable ignoble, son valet,
Et j'ai, sur Dangeau mort, égorgé Richelet.
Oui, c'est vrai, ce sont là quelques-uns de mes crimes.
J'ai pris et démoli la bastille des rimes.
J'ai fait plus: j'ai brisé tous les carcans de fer
Qui liaient le mot peuple, et tiré de l'enfer
Tous les vieux mots damnés, légions sépulcrales;
J'ai de la périphrase écrasé les spirales,
Et mêlé, confondu, nivelé sous le ciel
L'alphabet, sombre tour qui naquit de Babel;
Et je n'ignorais pas que la main courroucée
Qui délivre le mot, délivre la pensée.
L'unité, des efforts de l'homme est l'attribut.
Tout est la même flèche et frappe au même but.
Donc, j'en conviens, voilà, déduits en style honnête,
Plusieurs de mes forfaits, et j'apporte ma tête.
Vous devez être vieux, par conséquent, papa,
Pour la dixième fois j'en fais meâ culpâ.
Oui, si Beauzée est dieu, c'est vrai, je suis athée.
La langue était en ordre, auguste, époussetée,
Fleur-de-lys d'or, Tristan et Boileau, plafond bleu,
Les quarante fauteuils et le trône au milieu;
Je l'ai troublée, et j'ai, dans ce salon illustre,
Même un peu cassé tout; le mot propre, ce rustre,
N'était que caporal: je l'ai fait colonel;
J'ai fait un jacobin du pronom personnel;
Dur participe, esclave à la tête blanchie,
Une hyène, et du verbe une hydre d'anarchie.
Vous tenez le reum confitentem. Tonnez!
J'ai dit à la narine: Eh mais! tu n'es qu'un nez!
J'ai dit au long fruit d'or: Mais tu n'es qu'une poire!
J'ai dit à Vaugelas: Tu n'es qu'une mâchoire!
J'ai dit aux mots: Soyez république! soyez
La fourmilière immense, et travaillez! Croyez,
Aimez, vivez! -- J'ai mis tout en branle, et, morose,
J'ai jeté le vers noble aux chiens noirs de la prose.
Et, ce que je faisais, d'autres l'ont fait aussi;
Mieux que moi. Calliope, Euterpe au ton transi,
Polymnie, ont perdu leur gravité postiche.
Nous faisons basculer la balance hémistiche.
C'est vrai, maudissez-nous. Le vers, qui, sur son front
Jadis portait toujours douze plumes en rond,
Et sans cesse sautait sur la double raquette
Qu'on nomme prosodie et qu'on nomme étiquette,
Rompt désormais la règle et trompe le ciseau,
Et s'échappe, volant qui se change en oiseau,
De la cage césure, et fuit vers la ravine,
Et vole dans les cieux, alouette divine.
Tous les mots à présent planent dans la clarté.
Les écrivains ont mis la langue en liberté.
Et, grâce à ces bandits, grâce à ces terroristes,
Le vrai, chassant l'essaim des pédagogues tristes,
L'imagination, tapageuse aux cent voix,
Qui casse des carreaux dans l'esprit des bourgeois;
La poésie au front triple, qui rit, soupire
Et chante, raille et croit; que Plaute et Shakspeare
Semaient, l'un sur la plebs, et l'autre sur le mob;
Qui verse aux nations la sagesse de Job
Et la raison d'Horace à travers sa démence;
Qu'enivre de l'azur la frénésie immense,
Et qui, folle sacrée aux regards éclatants,
Monte à l'éternité par les degrés du temps,
La muse reparaît, nous reprend, nous ramène,
Se remet à pleurer sur la misère humaine,
Frappe et console, va du zénith au nadir,
Et fait sur tous les fronts reluire et resplendir
Son vol, tourbillon, lyre, ouragan d'étincelles,
Et ses millions d'yeux sur ses millions d'ailes.
Le mouvement complète ainsi son action.
Grâce à toi, progrès saint, la Révolution
Vibre aujourd'hui dans l'air, dans la voix, dans le livre;
Dans le mot palpitant le lecteur la sent vivre;
Elle crie, elle chante, elle enseigne, elle rit,
Sa langue est déliée ainsi que son esprit.
Elle est dans le roman, parlant tout bas aux femmes.
Elle ouvre maintenant deux yeux où sont deux flammes,
L'un sur le citoyen, l'autre sur le penseur.
Elle prend par la main la Liberté, sa soeur,
Et la fait dans tout homme entrer par tous les pores.
Les préjugés, formés, comme les madrépores,
Du sombre entassement des abus sous les temps,
Se dissolvent au choc de tous les mots flottants,
Pleins de sa volonté, de son but, de son âme.
Elle est la prose, elle est le vers, elle est le drame;
Elle est l'expression, elle est le sentiment,
Lanterne dans la rue, étoile au firmament.
Elle entre aux profondeurs du langage insondable;
Elle souffle dans l'art, porte-voix formidable;
Et, c'est Dieu qui le veut, après avoir rempli
De ses fiertés le peuple, effacé le vieux pli
Des fronts, et relevé la foule dégradée,
Et s'être faite droit, elle se fait idée!
« Il ne cria pas plus devant l’abîme qu’il n’avait crié devant les hommes. » L’Homme qui rit, Hugo
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- Messages : 238
- Enregistré le : jeu. 03 juil., 2008 22:19
- Mon piano : Hellas 105cm
- Localisation : Montpellier, Lyon
Re: La musique : art scientifique, science artistique ?
La grammaire et les rimes sont de bons exemples. Tout comme en musique, beaucoup de gens se sont contrefoutus de ces règles pour produire du neuf. Certains allant jusqu'a détruire les mots eux-mêmes.
Au final on trouve du bien dans les règles comme en dehors... Et souvent, les oeuvres nous plaisent pour des raisons radicalement différentes, selon qu'elles soient d'un coté ou de l'autre de la barrière.
EDIT : en fait, on pourrait aller au-delà, et constater que souvent, c'est justement le franchissement de la barrière lui-même qui nous fait apprécier l'oeuvre. Alors que quand on se plie aux règles, on le note rarement. J'aurais presque envie de dire que du coup, les règles restent fondamentales car c'est encore par elles qu'on juge l'oeuvre qui a voulu s'en débarraser.
Au final on trouve du bien dans les règles comme en dehors... Et souvent, les oeuvres nous plaisent pour des raisons radicalement différentes, selon qu'elles soient d'un coté ou de l'autre de la barrière.
EDIT : en fait, on pourrait aller au-delà, et constater que souvent, c'est justement le franchissement de la barrière lui-même qui nous fait apprécier l'oeuvre. Alors que quand on se plie aux règles, on le note rarement. J'aurais presque envie de dire que du coup, les règles restent fondamentales car c'est encore par elles qu'on juge l'oeuvre qui a voulu s'en débarraser.
- egtegt
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- Enregistré le : jeu. 24 juin, 2004 2:17
- Mon piano : Blüthner 2m10 et Casio PX110
- Localisation : Saverne
Re: La musique : art scientifique, science artistique ?
De toute façon, pour enfreindre les règles, il faut les connaître. Donc on en revient au même point : pas de liberté sans contraintes, quitte à ce qu'on enfreigne ces contraintes.
Re: La musique : art scientifique, science artistique ?
Oui, je vous rejoins en disant que l'on est d'autant plus libre aue l'on est contraint car alors chaque choix même minime revêt une grande importance. Cela est vrai pour la composition mais surtout pour l'interprétation: la rigueur de la partition est très grande, elle fixe énormément de choses... mais pourtant les artistes arrivent très bien à donner leur vision en faisant des choix comme plus appuyer un accord, rejouter un insensible accéléré, un rubato furtif... Chacun de ces choix est très faible par rapport à tout ce qui est décidé par la partition, mais au final, ils créent l'inbterprétation toute personnelle du morceau. 

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Re: La musique : art scientifique, science artistique ?
La transgression est l' acte qui offre le plus de plaisir dans la vie, sinon pourquoi chercherait on à connaître les règles et à s' en débarasser ?egtegt a écrit :De toute façon, pour enfreindre les règles, il faut les connaître.
La matière est pleine de vide dit-on. Des grands espaces interstellaires au atomes (il y a je crois plusieurs dizaines de km de vide entre un noyau et ses électrons s'il était à taille humaine).Gershwin' a écrit :Les sciences étudient la vacuité ? Mouais je crois comprendre mais c'est mal dit...
Cela à une existence au mieux relative et contingente et au pire accidentelle, mais qui ne change pas l' essentiel, ni ton destin ni celui du monde.Gershwin' a écrit :Alors un chimiste qui synthétise une nouvelle molécule ça n'a pas d'existence réelle
Si tu relis mon post, je n' ai rien opposé au contraire en avertissant que l' intitulé du topic était lui même à la base tendancieux.Gershwin' a écrit :Et je pense que ça nous mènerait forcément à opposer la science et l'art dans un débat sans queue ni tête...
Je ne défends rien, mais il est vrai que j' ai placé davantage mon ou mes actions dans la musique que dans la science sinon je ne serais pas sur ce forum, auquel cas j' aurais préféré dire l'essence est antérieur à la substance ce que je n' ai pas fait.Gershwin' a écrit :Tu sembles défendre la musique au détriment des sciences dans ton post alors que je ne vois pas pourquoi il faudrait défendre un camp ou l'autre. '
Désolé si c' a a pu te paraître compliqué mais j' ai passé mon exam' sur ce sujet alors je rebalanceBasstyra a écrit :la philosophie non plus n'est pas un prétexte pour utiliser des mots compliqués

le problème n' est pas les mots, ce sont les définitions d'un même mot qui peuvent être différentes selon les pensées.
Concernant, le sensible,la réalité qui nous entoure ne peut être perçu que par les sens. Si par exemple tu avais d' autres outils à la place de l'oeil (la vision animale, un microscope...) ta vision du monde serait completement différente. Tu ne peux donc t' appuyer sur le sensible ou si tu préfères toi-même pour assoir ta quète d' objecvité. La science utilse des moyens plus sophistiqués pour étudier le sensible sans pour autant prétendre à l' objectivité réelle.
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Re: La musique : art scientifique, science artistique ?
"La matière est pleine de vide dit-on. Des grands espaces interstellaires au atomes (il y a je crois plusieurs dizaines de km de vide entre un noyau et ses électrons s'il était à taille humaine)."
=> La comparaison est audacieuse mais pourquoi pas. Tu as utilisé vacuité comme métonymie de la matière. Les sciences étudient la matière, ok, je vois pas trop ce que ca vient faire là mais encore une fois pourquoi pas. En revanche, ca n'explique pas ce que tu entends par la rigueur et le déterminisme de la vacuité... Ni même par la rigueur et le déterminisme de la matière.
"Cela à une existence au mieux relative et contingente et au pire accidentelle, mais qui ne change pas l' essentiel, ni ton destin ni celui du monde."
=> Ah ? Et un malade soigné, sauvé de la mort, grâce à cette molécule, ca n'est pas un infléchissement de son destin ? Pour celui du monde, il suffit d'attendre, l'homme étant en train de le détruire...
"le problème n' est pas les mots, ce sont les définitions qui peuvent être différentes selon les pensées."
=> C'est la même chose, un mot n'ayant guère d'utilité sans le sens qu'on lui donne. A moins de faire de la calligraphie (et de se servir donc du mot comme graphisme et non comme support d'un concept) mais ça n'est pas le sujet.
Un mot est inutile si celui qui le dit et celui qui l'entend ne sont pas d'accord sur son sens. Si le but de la communication est d'échanger des idées et des notions, chaque partie a intérêt à ce que ses mots soient compris par l'autre. Il existe aussi l'exercice consistant à se servir des flous autour des mots pour tromper l'autre, mais je n'aurais pas suffisamment de vocabulaire pour exprimer le mépris que j'ai pour cette pratique, tuant l'échange, les mots, la langue, allant presque jusqu'a nous nier en tant qu'êtres humains, puisque c'est notre communication par le langage qui fait de nous des hommes et non des animaux. Quand le langage perd son intérêt premier de comminucation, il ne reste plus que la tarte dans la gueule, qui est le pire constat d'échec qu'on puisse imaginer pour un homme. A ce moment il redevient animal (temporairement, s'entend).
"Concernant, le sensible,la réalité qui nous entoure ne peut être perçu que par les sens. Si par exemple tu avais d' autres outils à la place de l'oeil (la vision animale, un microscope...) ta vision du monde serait completement différente. Tu ne peux donc t' appuyer sur le sensible ou si tu préfères toi-même pour assoir ta quète d' objecvité. La science utilse des moyens plus sophistiqués pour étudier le sensible sans pour autant prétendre à l' objectivité réelle."
=> Oui. Mais comme tu dis, il n'y a pas prétention à l'objectivité de la part de la science. Pourquoi y en aurait-il une de la part de l'homme ?
Et ici encore j'ai envie de dire, "et alors ?" Des discours sur la science, on peut en sortir des pages, mais quel rapport avec le sujet ? On pourait s'amuser à donner une définition du réel, de l'objectif, et ca me passionnerait sans doute, mais ça n'aurait guère de rapport avec ce dont il est question ici, non ? A moins bien sûr que tu ne considères qu'un état de l'art soit nécessaire avant d'attaquer la question, ce qui pourrait se défendre.
Quoi qu'il en soit, en creusant un peu ton discours n'est pas si vide qu'il n'y paraissait, tu as derrière quelques notions interessantes. Mais moi perso, je me pose la question de la valeur d'un discours sans construction, que personne ne comprend, et qui, une fois un peu expliqué, se révèle quand même bien hors sujet.
Au passage, la présence d'une personne sur ce forum ne saurait traduire son engagement pour la musique plus que pour la science. elle traduit son engagement pour la musique, mais n'a guère de lien avec la science. Un pianiste amateur présent ici pourrait tout à fait être prix nobel de physique, non ?
Oui, j'aime traquer les incohérences et les erreurs dans le discours. Parce que je n'aime pas qu'on le vide de son utilité, comme je l'ai expliqué plus haut. Ca me rend sûrement agaçant, et j'en suis bien désolé, mais c'est un exercice qui me passionne. Je n'aime pas les charlatans, quel que soit le domaine où ils exercent, et balancer des mots sans sens et sans ordre sous couvert de la license poétique ou de la distance philosophique est un beau symptôme de charlatanisme. Pour le coup il a fallu te pousser un peu mais tu viens de prouver que tes mots n'étaient pas si vide, je ne te vise donc pas. C'était plus pour expliquer ma démarche
J'ajoute que mon métier ne me laisse que trop peu le loisir de manier la langue alors j'ai tendance à profiter des occasions comme celles-ci pour m'entrainer et garder la main...
=> La comparaison est audacieuse mais pourquoi pas. Tu as utilisé vacuité comme métonymie de la matière. Les sciences étudient la matière, ok, je vois pas trop ce que ca vient faire là mais encore une fois pourquoi pas. En revanche, ca n'explique pas ce que tu entends par la rigueur et le déterminisme de la vacuité... Ni même par la rigueur et le déterminisme de la matière.
"Cela à une existence au mieux relative et contingente et au pire accidentelle, mais qui ne change pas l' essentiel, ni ton destin ni celui du monde."
=> Ah ? Et un malade soigné, sauvé de la mort, grâce à cette molécule, ca n'est pas un infléchissement de son destin ? Pour celui du monde, il suffit d'attendre, l'homme étant en train de le détruire...

"le problème n' est pas les mots, ce sont les définitions qui peuvent être différentes selon les pensées."
=> C'est la même chose, un mot n'ayant guère d'utilité sans le sens qu'on lui donne. A moins de faire de la calligraphie (et de se servir donc du mot comme graphisme et non comme support d'un concept) mais ça n'est pas le sujet.
Un mot est inutile si celui qui le dit et celui qui l'entend ne sont pas d'accord sur son sens. Si le but de la communication est d'échanger des idées et des notions, chaque partie a intérêt à ce que ses mots soient compris par l'autre. Il existe aussi l'exercice consistant à se servir des flous autour des mots pour tromper l'autre, mais je n'aurais pas suffisamment de vocabulaire pour exprimer le mépris que j'ai pour cette pratique, tuant l'échange, les mots, la langue, allant presque jusqu'a nous nier en tant qu'êtres humains, puisque c'est notre communication par le langage qui fait de nous des hommes et non des animaux. Quand le langage perd son intérêt premier de comminucation, il ne reste plus que la tarte dans la gueule, qui est le pire constat d'échec qu'on puisse imaginer pour un homme. A ce moment il redevient animal (temporairement, s'entend).
"Concernant, le sensible,la réalité qui nous entoure ne peut être perçu que par les sens. Si par exemple tu avais d' autres outils à la place de l'oeil (la vision animale, un microscope...) ta vision du monde serait completement différente. Tu ne peux donc t' appuyer sur le sensible ou si tu préfères toi-même pour assoir ta quète d' objecvité. La science utilse des moyens plus sophistiqués pour étudier le sensible sans pour autant prétendre à l' objectivité réelle."
=> Oui. Mais comme tu dis, il n'y a pas prétention à l'objectivité de la part de la science. Pourquoi y en aurait-il une de la part de l'homme ?
Et ici encore j'ai envie de dire, "et alors ?" Des discours sur la science, on peut en sortir des pages, mais quel rapport avec le sujet ? On pourait s'amuser à donner une définition du réel, de l'objectif, et ca me passionnerait sans doute, mais ça n'aurait guère de rapport avec ce dont il est question ici, non ? A moins bien sûr que tu ne considères qu'un état de l'art soit nécessaire avant d'attaquer la question, ce qui pourrait se défendre.
Quoi qu'il en soit, en creusant un peu ton discours n'est pas si vide qu'il n'y paraissait, tu as derrière quelques notions interessantes. Mais moi perso, je me pose la question de la valeur d'un discours sans construction, que personne ne comprend, et qui, une fois un peu expliqué, se révèle quand même bien hors sujet.
Au passage, la présence d'une personne sur ce forum ne saurait traduire son engagement pour la musique plus que pour la science. elle traduit son engagement pour la musique, mais n'a guère de lien avec la science. Un pianiste amateur présent ici pourrait tout à fait être prix nobel de physique, non ?
Oui, j'aime traquer les incohérences et les erreurs dans le discours. Parce que je n'aime pas qu'on le vide de son utilité, comme je l'ai expliqué plus haut. Ca me rend sûrement agaçant, et j'en suis bien désolé, mais c'est un exercice qui me passionne. Je n'aime pas les charlatans, quel que soit le domaine où ils exercent, et balancer des mots sans sens et sans ordre sous couvert de la license poétique ou de la distance philosophique est un beau symptôme de charlatanisme. Pour le coup il a fallu te pousser un peu mais tu viens de prouver que tes mots n'étaient pas si vide, je ne te vise donc pas. C'était plus pour expliquer ma démarche

J'ajoute que mon métier ne me laisse que trop peu le loisir de manier la langue alors j'ai tendance à profiter des occasions comme celles-ci pour m'entrainer et garder la main...

- Gershwin'
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Re: La musique : art scientifique, science artistique ?
Ah ok, c'était pas ce que j'avais compris ! Et si tu fais une métonymie comme l'a dit Basstyra, à la rigueur, ok. Mais si c'était pas le cas, je pense que la plupart des scientifiques (pas les vieux chercheurs poussiéreux, sans offense lol) ne se préoccupent pas vraiment du vide dans la matière puisque justement, c'est du vide... C'est intéressant d'un point de vue théorique mais pas d'un point de vue pratique, ou alors c'est marginal et ça serait un peu réducteur de dire que les sciences étudient la vacuité... Mais encore une fois, si c'était par métonymie, alors ok ! Et sinon, si t'es bien renseignée sur cette histoire de vacuité dans la recherche, ça m'intéresse assez ^^anuradha a écrit :La matière est pleine de vide dit-on. Des grands espaces interstellaires au atomes (il y a je crois plusieurs dizaines de km de vide entre un noyau et ses électrons s'il était à taille humaine).Gershwin' a écrit :Les sciences étudient la vacuité ? Mouais je crois comprendre mais c'est mal dit...
Je sais bien mais ce que je voulais dire, c'est que si on commence à débattre de la "qualité" d'une existence plus ou moins abstraite qu'est celle d'une musique par rapport à celle d'un objet matériel (ou même d'une équation mathématique), tout deux produits de l'activité humaine respectivement représentatifs d'un art et de la science, ça nous amènerait dans un débat plus profond entre Sciences et Art. Et je n'ai pas dit que tu avais opposé mais que l'on risquait d'opposer. Nuanceanuradha a écrit :Cela à une existence au mieux relative et contingente et au pire accidentelle, mais qui ne change pas l' essentiel, ni ton destin ni celui du monde.Gershwin' a écrit :Alors un chimiste qui synthétise une nouvelle molécule ça n'a pas d'existence réelle
Si tu relis mon post, je n' ai rien opposé au contraire en avertissant que l' intitulé du topic était lui même à la base tendancieux.Gershwin' a écrit :Et je pense que ça nous mènerait forcément à opposer la science et l'art dans un débat sans queue ni tête...

Encore une fois, cf la réponse de Basstyra... De plus moi je rentre en 3è année pour faire une Licence Chimie-Environnement (et ne fais de la musique quasiment que lorsque je suis chez moi)... Et pourtant je suis sur le forum ^^anuradha a écrit :Je ne défends rien, mais il est vrai que j' ai placé davantage mon ou mes actions dans la musique que dans la science sinon je ne serais pas sur ce forum, auquel cas j' aurais préféré dire l'essence est antérieur à la substance ce que je n' ai pas fait.Gershwin' a écrit :Tu sembles défendre la musique au détriment des sciences dans ton post alors que je ne vois pas pourquoi il faudrait défendre un camp ou l'autre. '
- pierrearnaud
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Re: La musique : art scientifique, science artistique ?
Qui?La grammaire et les rimes sont de bons exemples. Tout comme en musique, beaucoup de gens se sont contrefoutus de ces règles pour produire du neuf. Certains allant jusqu'a détruire les mots eux-mêmes.
Et maintenant il a aussi son blog: http://blog.pierre-arnaud-dablemont.com
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Re: La musique : art scientifique, science artistique ?
Je pense à Jean Tardieu, mais je pourrais pas l'assurer. J'ai aps d'extrait sous la main, là. Raymond Queneau, évidemment, ne serait-ce que dans ses Exercices de Style. Et André Martel, moins connu du grand public, et pour cause... 
Extrait : "La materuniverse se transfigurge. Des pointestelles flusent dans les bouases". Ou encore : "Céporirencor quiladiqueu mon Paralloïdre ilavait du déliriol au spiritus".
Il est allé dans des territoires où je ne m'aventurerais pas...
A l'inverse, et pourtant pas si éloigné, notons Georges Perec. Il n'a guère tordu les mots eux-mêmes, et plutôt que de briser les règles il s'en imposait à outrance. Mais ça l'a fait pas mal tordre les phrases et les textes. Son palyndrôme sur plusieurs pages écorche quand même pas mal de mots (ou les invente, selon le regard qu'on y porte).

Extrait : "La materuniverse se transfigurge. Des pointestelles flusent dans les bouases". Ou encore : "Céporirencor quiladiqueu mon Paralloïdre ilavait du déliriol au spiritus".
Il est allé dans des territoires où je ne m'aventurerais pas...

A l'inverse, et pourtant pas si éloigné, notons Georges Perec. Il n'a guère tordu les mots eux-mêmes, et plutôt que de briser les règles il s'en imposait à outrance. Mais ça l'a fait pas mal tordre les phrases et les textes. Son palyndrôme sur plusieurs pages écorche quand même pas mal de mots (ou les invente, selon le regard qu'on y porte).
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Re: La musique : art scientifique, science artistique ?
ou bien A. Breton chef de file des surréalistes, même époque, méme concept, même C*** que l' atonalité
mais un mal nécessaire comme disait je sais plus qui.
mais un mal nécessaire comme disait je sais plus qui.
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Re: La musique : art scientifique, science artistique ?
"même C*** que l' atonalité" 

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Re: La musique : art scientifique, science artistique ?
Connerie ?
Peur des mots, maintenant ??
Peur des mots, maintenant ??

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Re: La musique : art scientifique, science artistique ?
En fait moi je cherchais un mot en quatre lettres... 

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Re: La musique : art scientifique, science artistique ?
Je répondrais bien sur l'histoire de la molécule mais on va penser que je cherche à avoir raison.Gershwin' a écrit :Basstyra a bien répondu ("Ah ? Et un malade soigné, sauvé de la mort, grâce à cette molécule, ca n'est pas un infléchissement de son destin ? Pour celui du monde, il suffit d'attendre, l'homme étant en train de le détruire...")

peut être des forumers travaillent ces oeuvres en ce moment.Basstyra a écrit :Peur des mots, maintenant ??
Je ne pense pas que le chercheur soit sensble à la vacuité puisque il est censé trouver l' objet de sa recherche ou en tout cas quelque chose.Gershwin' a écrit :Et sinon, si t'es bien renseignée sur cette histoire de vacuité dans la recherche, ça m'intéresse assez ^^
Pour le philosophe, la matière est cyclique et donc appartient à une réalité transitoire.
Le religieux, au mieux la nie, au pire la refoule. L' éternité et l' absolu est son fond de commerce.
Le musicien est aussi dans l' absolu et dans l' esprit mais a les contraintes de son corps ou de sa technique (heureux celui qui ne les a pas) qui lui sert de miroir, il peut pas être dans l'illusion.
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Re: La musique : art scientifique, science artistique ?
Pas la peine de me dire ça, tu me paraphrases presque là --' Mais je prends cette réponse pour un non alors. Pas de souci.anuradha a écrit :peut être des forumers travaillent ces oeuvres en ce moment.
Je ne pense pas que le chercheur soit sensble à la vacuité puisque il est censé trouver l'objet de sa recherche ou en tout cas quelque chose.Gershwin' a écrit :Et sinon, si t'es bien renseignée sur cette histoire de vacuité dans la recherche, ça m'intéresse assez ^^
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Re: La musique : art scientifique, science artistique ?
Vu ce que tu réponds, s'il y a bien une chose dont on ne peut pas t'accuser, c'est bien de çaanuradha a écrit :Je répondrais bien sur l'histoire de la molécule mais on va penser que je cherche à avoir raison.![]()

Moi ca me laisse sur ma 1ere impression : tu brasses du vent. J'ai passé l'age où agresser les gens sur les forums avait un coté amusant, je suis plutôt triste de ce constat. Tu as l'air malgré tout de savoir des choses, c'est dommage de ne pas faire en sorte d'en faire profiter les gens.
(pour la peur des mots, je n'ai pas compris ce que tu voulais en dire. Pour ma part j'évoquais ton auto-censure du mot, le fait de l'écrire avec des astérisques)