Merci Kurt pour ton écoute
mh_piano a écrit : mer. 27 avr., 2022 23:06
Intéressant en effet ! Ou comment harmoniser de manière complexe une petite mélodie de rien du tout...
Je crois que j'ai compris dans les grandes lignes le principe. Mais comment tu es capable de faire ça en direct me laisse songeuse. Et il me manque les principes du "voice leading" pour vraiment piger (j'aurais besoin de réviser).
Es-tu conscient pendant que tu fais ça des accords que tu joues ? Des rapports entre les notes ? Ou bien c'est "à l'oreille" et en se basant sur tes automatismes ?
J'ai bien aimé le résultat. (Et j'ai bien reconnu la mélodie).
Oui, je suis conscient pendant que je le fais à la volée mais cela ne vient pas de rien, c'est le fruit d'un entraînement depuis des années, que j'ai commencé à pratiquer après avoir suivi une master class de Kenny Werner lors d'un passage de celui-ci à Paris. Ce serait un peu fastidieux à expliquer. L'idée est de chaque jour (ou plutôt à son propre ryhtme, par exemple une fois par semaine... ) tirer complètement au hasard 4 notes.
Disons par exemple que ce soit ces quatre-là : mi b, la, si, fa#
Ces notes vont donner le nom d'un accord, qu'on choisit aussi totalement au hasard :
par exemple :
- Mib dorien (donc va être un accord mineur puisque le mode dorien est mineur (tierce mineure, avec une 7ème mineure),
- La aéolien (sera accord mineur, puisque le mode aéolien est mineur, avec tierce mineure, sixte b, et 7ème mineure)
- Si maj 7 #5 (accord majeur avec 7ème majeure et quinte augmentée)
- Fa# min/majeur7 (accord mineur, avec une 7ème majeure)
L'exercice consiste alors à jouer ces accords, sachant que pour que cela se tienne, la note du haut de l'accord à chaque changement ne doit pas trop faire de saut, disons demi ton, ou ton, voire ton et demi (mais ne pas trop abuser de ce denier écart)
Dans ce cas là - tu ne fais pas de grand saut dans les notes du haut, il faut organiser les notes entre la note du haut et celle de la basse de façon aussi qu'elles ne fassent pas de grand saut, chaque voix donnant quelque chose alors de facilement chantable au cours de l’exécution des quatre accords.
Au départ, c'est une vrai galère, car il faut déjà bien connaître tous les accords, ce que l'on doit trouver à l'intérieur (sachant qu'il existe 4 types d'accords majeur7 (c'est à dire avec 7ème majeure, mais peut être aussi un accord maj7 avec une 11#, ou avec une 5#, avec une 9# (accord qui n'est apparu que vers la fin des années 1960 et a bien été popularisé par Keith Jarret ; qu'il existe 6 types d'accords mineurs ; 5 grands types d'accords 7, 4 grands types d'accords sus (qui dépendent de ce qu'on suspend).
Donc la grande galère vient de savoir quelles notes vont exprimer l'accord...
Par exemple pour le deuxième accord dans ma liste des quatre cités (la aéolien), pour exprimer le fait qu'il est aéolien il faudra donc un fa (qui est la note 6b) et donc ne pas mettre de quinte (qui sonnerait alors faux avec cette note de 6b). Ainsi pour exprimer complètement cet accord, tu auras besoin des notes la (la basse) du do (qui donne la tierce mineure), sol (note 7ème mineure), mais aussi un fa (pour bien exprimer l'aéolien), mais aussi le si (pour qu'on ne puisse confondre avec le phrygien (mode mineur aussi, mais qui aurait lui un sib )ou avec le locrien, mode mineur qui lui aussi aurait un sib)...
Même chose pour chaque accord : par exemple pour le si maj7 #5, tu auras besoin du si (la basse) de la tierce (ré#), du la# (septime majeure), du sol bécarre (pour exprimer la 5#)
etc.
Et cela t'entraîne aussi l'oreille, entendre mieux les colorations, la fonction qu'une coloration prend au sein d'un accord.
Ensuite le travail consiste donc à enchaîner ces accords en suivant tout ce que j'ai expliqué plus haut. Trouver une bonne répartition.
Mais on peut aussi avoir plusieurs façons d'organiser l'accord : on n'est pas obligé dans un deuxième temps de mettre la note qui donne le nom de l'accord en bas, mais on peut choisir un renversement. Ce qui entraîne alors que souvent la note du haut change aussi et donc aussi réorganiser les voicings en fonction de toute la progression (ce qui va te donner finalement une autre mélodie)
Chercher d'autres renversements aussi.... Voir aussi qu'il peut y avoir des impasses.
Du coup, en faisant cet exercice, non seulement tu apprends tes modes, tu connais vraiment les notes qui vont donner la coloration, tu connais des progressions que tu ne serais jamais allé chercher, que tu n'aurais jamais jouées de ta vie, et tu sais faire ces progressions pour que cela sonne.
Et une autre semaine (ou moins), tu tires quatre autres accords au hasard, et ainsi de suite.
Et petit à petit, tu enrichis tes connaissances de plus en plus et oui, peuvent à un moment venir certains automatismes qui se rajoutent à tes connaissances, et ainsi de suite.
Et du coup, si tu joues au clair de la lune, avec do do do ré mi ré, do mi ré ré do, pour toi, ce premier do de mélodie peut appartenir à une multitude d'accords, et ainsi de suite.
Et le fait de descendre la basse de façon assez conjointe organise les choses... Et en faisant cela, tu as aussi besoin, pour certaines basses de penser un accord renversé...
J'espère que c'est pas trop nébuleux tout ce que j'écris ?