Merci Poppotame d'avoir mis en ligne la vidéo que tu as présentée pour le déchiffrage du concours dans ton autre fil. Je suis assez époustouflé par la vitesse de réalisation que tu as pu avoir, et surtout de la compréhension si vive que tu as eue de ce morceau par rapport à cette épreuve en temps limité.
Et c'est super intéressant d'avoir les retours du jury. Cela m'intéresse beaucoup parce que je travaille aussi ce morceau.
L'erreur dont tu parlais, question solfège, est-ce dans la mesure 7 ou tu joues la première double croche mg comme une croche ? Tu joues croche double double à la mg alors qu'il aurait fallu jouer double double, croche. C'est bien cela ? En fait, il est pas facile ce passage. Je ne sais pas si cela t'a fait ça : c'est exactement la même chose qu'au début de la partition, même esprit (croche puis doubles.. mais on a tendance à ne pas le voir, on a aussi tendance à ne pas comprendre la fluidité, la dynamique de la même façon, alors qu'elle est semblable....
J'ai mis aussi pas mal de temps à réagir à ton fil parce que je voulais trouver le temps de pouvoir écrire tout ce qui suit :
C'est aussi très intéressant de voir pour moi aussi ton choix d'interprétation (là je parle de ta vidéo sur ce fil), le tempo que tu retiens. Tu dois être autour de 120 à la noire. Après, je pense aussi que c'est une question de goût, le choix du tempo. De mon côté, je reste beaucoup plus lent, autour de 70 à la noire.
J'ai la chance d'avoir pu étudier ce morceau (je suis encore dessus d'ailleurs) avec une prof assez géniale et je m'autorise alors à te dire des petites choses qui pourrait peut-être te permettre de peaufiner plus. Disons aussi que tout n'est pas forcément à prendre à la lettre, il y a aussi des choix qui sont propre à chacun.
- Mesure 2, dernier temps MD joue beaucoup moins fort pour aller faire mourir sur le sol et pareil mesure 4
Il faut aussi bien penser dans ta tête, mesure 2, ce do# MD avec ce si grave MG (donc une 9e), c'est pour cela que je te dis de jouer moins fort ensuite, pour mieux faire sentir la résolution.
C'est encore plus prégnant mesure 4, ce la MD avec cette basse Sol# (9eb), qui fait qu'on doit sentir cette tension, et cette détente ensuite, qui est encore plus géniale parce qu'au lieu de ramener sur le I, amène sur VI, donnant un effet de surprise.
- mesure 5, 3ème et 4e temps, essaie de jouer encore moins fort les doubles, pour que la première note, le do# soit mis en valeur, sans qu'on ait besoin de trop marquer un accent, et le crescendo va être justement à chaque fois dans les mesures suivantes dans le dosage de cette croche, qui permet alors d'encore mieux faire entendre cette suite do#, ré#, mi# et c'est à partir de ce mi# que tu dois encore faire monter ce crescendo jusqu'à la résolution. Pour donner aussi plus d'ampleur à ce crescendo, ralenti les 4 doubles croches du 4ème temps de la mesure 7 en leur donnant le juste poids qui t'amène au forte sur le si # , ce qui donnera plus d'ampleur à ce passage.
Mesure 9, 3ème temps : joue encore moins fort ta première note de l'arpège (le sol # et encore plus douce) en visant l'intensité finale du la (1er temps et demi mesure 10.
Mesure 11 : attaque bien moins fort le triolet... il faut penser la montée du crescendo à partir de cela pour arriver au climax, ce la MD mesure 16 et donc il faut super doser cette montée progressive... là tu pars de trop fort pour que cela prenne vraiment toute son ampleur. Il faut aussi vraiment veiller à jouer le moins fort possible, mesure 12 ce mi ré do # et en fait y penser à chaque fois que cela se représente dans la suite (en fait on ne doit presque pas l'entendre pour ne pas brouiller le chant de mélodie, 3 notes que tu joues bien trop fort mesure 15 (le lab solb fa bécarre) [ nb : rassures-toi, je fais pareil, alors que je le sais tellement ce truc, c'est pour cela que dans
un des messages de mon fil j'ai mis cette remarque que lorsqu'on s'enregistre (ou pire quand on est en condition de "concert", on ne pense plus bien... on oublie ce qu'il faut vraiment faire, le juste dosage.
Idem, pour arriver à ce climax, ce forte, cette note (le la) qui en fait est le point le plus important du morceau, qui va nous faire basculer ensuite dans quelque chose de nouveau, tu dois ralentir ce sib dob réb MD mesure 15 pareil que ma remarque précédente en donnant un poids à chaque note et pareil sur les notes qui suivent, en visant cette arrivée sur le la (tu cavales un peu trop) et jouer l'accompagnement sur la syncope du 3ème temps, encore moins fort que tu ne le fais
Il faut aussi que tu penses encore plus le sol# qui suit comme un autre monde où l'on pénètre, et donc jouer cela un peu différemment, et aussi moins fort MG et MD les doubles qui accompagnent, sauf la première (1er temps), 1ere troisième temps, ainsi de suite pour bien faire entendre cette descente : do# si, la#, la bécarre,ré bécarre, ré dièse, mi, sol#, sol#, do# (ce que tu fais déjà très bien), mais tu joues trop fort l'accompagnement (tu peux ainsi encore plus faire ressortir le chant MD).
Mesure 20, tu dois absolument couper la pédale pour qu'on n'entende plus que le mi de mélodie tout seul sur cette syncope de fin du deuxième temps, pareil syncope du 4 e, pour qu'on entende juste le ré de mélodie à cet instant. Tu verras, l'effet est saisissant.
Mesure 22 : on ne doit presque pas entendre aux deux mains les notes de triolets pour mettre en valeur ce sol# de mélodie, pareil mesure 24 (j'ai beau le savoir, je n'ai pas respecté aussi quand j'ai joué en concert live).
Bon, j'ai mis le principal. Il y aurait tellement à dire. C'est sans fin.
Dans un autre domaine, j'ai trouvé aussi autre chose de très intéressant avec ton fil, c'est de parler de "petit morceau" (je comprends que tu voulais dire "seulement deux pages") et que cette interprétation jouée venait du plus profond de toi même. Et là, je ne comprends pas bien. Comme si tu nous disais qu'avant cela n'était pas du plus profond de toi-même ? Que là, tu étais poète.
Tu écris
"Même si mon prochain post sera un Liszt plutôt virtuose, le Poppotame postera davantage de poésie à l'avenir"
Pourquoi ne serait-on pas poète avec la virtuosité ? Tu veux dire qu'avant, tu n'étais pas poète dans ta tête Je ne comprends pas bien.
Ou alors veux-tu dire que tu es arrivé à un passage très important dans ta progression, une prise de conscience grâce au retour de ce jury, qui montre l'infinité de ce que recèle une partition, l'immensité du génie du compositeur (il y aurait tellement de chose à dire harmoniquement par exemple sur ce joyau qu'est cette improvisation), pour faire vivre au plus profond la musique, la comprendre et pouvoir alors la livrer au prisme de notre ferveur de musicien, en faire un peu sa propre création.
Alors c'est super chouette. Se trouver soi-même dans une partition. On est sans arrêt en évolution.
Trouver toute ses forces dans le piano, dans la richesse de la musique et notre ferveur à vouloir l'approcher.
J'adore ma prof. Elle ne me passe rien, mais c'est toujours fait avec une grande gentillesse. Elle va toujours me chercher au plus profond de moi. La technique n'est pas grand chose (bien sûr il en faut), l'essentiel c'est qu'on ne la voit pas (bon, moi, j'en ai pas des masses, et c'est sûrement aussi pour ça qu'on ne la voit pas

).
Je suis en train de travailler Hivernale, de Reynaldo Hahn et cela fait pas mal de temps. Quand on regarde la partition, cela n'a l'air de rien comme ça. Je trouve que c'est un des morceaux les plus difficiles que je n'ai jamais joué. 3 pages. Je pense que c'est du niveau de 3 ans de piano, mais de 40 ans de vie de pianiste... Donner à voir cette ambiance d'hiver, ces pas feutrée dans la neige, quelque chose de tragique aussi. Une harmonie comme figée par le froid, mais c'est comme si on avait pris la neige à même la peau dans ses mains, sentir ses mains qui brûlent.