Mais où est la limite entre sérieux et ludique ? Cette opposition me semble être le source de ces réflexions et c’est bien ce qui me semble générer l’impasse. Sérieux ou ludique ? Le deux pardi !
Quelle intensité ? Celle dont les enfants ont soif, tant que cela ne se fait pas au détriment de leur instruction générale et de leur équilibre. On ne peut pas mettre le curseur quelque part arbitrairement en disant que si c’est sérieux alors on pousse ! Je pense que la bonne démarche c’est de soutenir à fond tant qu’il y a cet engouement, dans la limite de leur équilibre et bien-être...
Elle a seulement 10 ans !
Re: Elle a seulement 10 ans !
Je comprends ce que tu veux dire Okay, mais chez un enfant, la motivation est quelque chose de fluctuant et l’auto-discipline fait souvent défaut. Pour exemple: mon petit pianiste a bien travaillé ce matin (entendre par là : avait un certain nombre de problèmes à résoudre et fait le nécessaire pour y parvenir), ce soir, rentré après une journée dehors, il est allé spontanément à son piano.. mais là pour le coup ce n’était plus du travail du tout 
. Ce que je lui dis a son stade c'est qu’il doit avoir fait le travail donné par sa prof pour le cours d’après, mais dans les faits, si pour X raisons tel n’est pas le cas, ce ne sera pas très grave à son niveau et le fait que le piano ne soit pas travaillé ou seulement survolé à certains moments ne nous empêchera pas de faire autre chose si nous en avons envie
Maintenant, le cas de figure de mon violoniste. Lui ne doit plus travailler en dilettante ou se permettre de ne faire que la partie plaisante, cette façon de faire peut passer auprès des étudiants qui donnent des « cours tous niveaux, tous styles et sans solfège », moins bien auprès des profs du conservatoire, pas du tout quand on a affaire à une pointure lauréate de concours internationaux qui enseigne dans le supérieur et qui vous propose de donner des cours à votre enfant. Alors forcément il y a le boulot technique pas amusant du tout, des exercices pour la mécanique des doigts, une exigence toute autre sur la qualité de son et la propreté qui lui demande plus d’efforts et surtout l’essentiel du travail n’est plus ludique du tout, il y a désormais une distinction très nette entre « jouer » du violon et le « travailler ». Mon fils SAIT que c’est nécessaire et y vient de plus en plus, MAIS il n’a pas encore assez de maturité ni d’auto-discipline pour le faire systématiquement de lui-même. En tant que parent, on veut ce qui est le mieux pour lui, alors doit-on le laisser profiter du moment présent ou bien l’oblige-t-on à une certaine rigueur et à se donner les moyens d’aller jusque bout de ses rêves? La réponse est moins évidente qu’il n’y parait, et finalement est propre à l’appreciation de chacun.
Pour en revenir au sujet du départ et à ces fameuses vidéos, la réalité est sans doute beaucoup plus complexe et moins binaire que le choix entre « enfant-génie-qui-ne-reve-que-de-gammes » et « parent-égoïste-tortionnaire-qui-s’en-sert-pour-se-faire-mousser » . J’ai aussi eu occasion d’echanger avec une violoniste de talent qui a fait partie de ce circuit de « enfants prodiges » dont la décision de la pousser dedans avait été prise par les parents, qui en avait souffert, elle n’a en effet pas profité de son enfance mais elle est heureuse de faire son métier aujourd’hui, de voyager, de faire ce qui lui plaît et de rencontrer des gens passionnants et de se lancer dans mille projets. Elle reconnaît aussi que si elle n’avait pas été poussée (d’une façon très extrême je dois dire), elle n’aurait pas son niveau actuel ni cette vie qu’elle apprécie tant... Alors, finalement, ses parents avaient-ils raison et à quel point? Encore aujourd’hui, de l’extérieur, il reste difficile d’en juger, je m'abstiendrais donc de le faire.
. Ce que je lui dis a son stade c'est qu’il doit avoir fait le travail donné par sa prof pour le cours d’après, mais dans les faits, si pour X raisons tel n’est pas le cas, ce ne sera pas très grave à son niveau et le fait que le piano ne soit pas travaillé ou seulement survolé à certains moments ne nous empêchera pas de faire autre chose si nous en avons envie Maintenant, le cas de figure de mon violoniste. Lui ne doit plus travailler en dilettante ou se permettre de ne faire que la partie plaisante, cette façon de faire peut passer auprès des étudiants qui donnent des « cours tous niveaux, tous styles et sans solfège », moins bien auprès des profs du conservatoire, pas du tout quand on a affaire à une pointure lauréate de concours internationaux qui enseigne dans le supérieur et qui vous propose de donner des cours à votre enfant. Alors forcément il y a le boulot technique pas amusant du tout, des exercices pour la mécanique des doigts, une exigence toute autre sur la qualité de son et la propreté qui lui demande plus d’efforts et surtout l’essentiel du travail n’est plus ludique du tout, il y a désormais une distinction très nette entre « jouer » du violon et le « travailler ». Mon fils SAIT que c’est nécessaire et y vient de plus en plus, MAIS il n’a pas encore assez de maturité ni d’auto-discipline pour le faire systématiquement de lui-même. En tant que parent, on veut ce qui est le mieux pour lui, alors doit-on le laisser profiter du moment présent ou bien l’oblige-t-on à une certaine rigueur et à se donner les moyens d’aller jusque bout de ses rêves? La réponse est moins évidente qu’il n’y parait, et finalement est propre à l’appreciation de chacun.
Pour en revenir au sujet du départ et à ces fameuses vidéos, la réalité est sans doute beaucoup plus complexe et moins binaire que le choix entre « enfant-génie-qui-ne-reve-que-de-gammes » et « parent-égoïste-tortionnaire-qui-s’en-sert-pour-se-faire-mousser » . J’ai aussi eu occasion d’echanger avec une violoniste de talent qui a fait partie de ce circuit de « enfants prodiges » dont la décision de la pousser dedans avait été prise par les parents, qui en avait souffert, elle n’a en effet pas profité de son enfance mais elle est heureuse de faire son métier aujourd’hui, de voyager, de faire ce qui lui plaît et de rencontrer des gens passionnants et de se lancer dans mille projets. Elle reconnaît aussi que si elle n’avait pas été poussée (d’une façon très extrême je dois dire), elle n’aurait pas son niveau actuel ni cette vie qu’elle apprécie tant... Alors, finalement, ses parents avaient-ils raison et à quel point? Encore aujourd’hui, de l’extérieur, il reste difficile d’en juger, je m'abstiendrais donc de le faire.
Modifié en dernier par Lana le sam. 21 avr., 2018 9:24, modifié 1 fois.
Re: Elle a seulement 10 ans !
Chère Lana,
Je suis impressionnée par votre engagement en tant que mère, je veux bien croire que ce n'est pas facile tous les jours de tenir ce rythme et que la fatigue se mêle parfois au doute.
Je vous félicite pour votre courage de venir partager vos questionnements ici.
Je vous propose une réflexion à la manière de celle que Okay et Coignet vous proposent : et si, devenus de grands ados, de jeunes adultes, ils font d'autres choix professionnels que de vivre de la musique ? Comment le vivrez-vous ? Vous sentirez-vous trahis ?
Je suis impressionnée par votre engagement en tant que mère, je veux bien croire que ce n'est pas facile tous les jours de tenir ce rythme et que la fatigue se mêle parfois au doute.
Je vous félicite pour votre courage de venir partager vos questionnements ici.
Je vous propose une réflexion à la manière de celle que Okay et Coignet vous proposent : et si, devenus de grands ados, de jeunes adultes, ils font d'autres choix professionnels que de vivre de la musique ? Comment le vivrez-vous ? Vous sentirez-vous trahis ?
Re: Elle a seulement 10 ans !
Caralire, la question ne se pose pas en ces termes. Mon petit pianiste, aujourd’hui, veut être architecte et « de temps en temps aller dans l’espace » 
, s’il est capable de passer des heures devant son piano , il s’y amuse plus qu’il ne travaille (il aime retrouver à l’oreille les airs de tout ce qu’il entend), il s’agit donc surtout de lui offrir la possibilité d’aller plus loin et voir ce que cela donne. Pour le petit violoniste, c’est un peu different: en réalité la question de ce qu’il va devenir s’etait posée très très tôt, avant même son entrée à l’ecole. Il a toujours eu beaucoup d’avance physique et intellectuelle (tenait sa tête dès la naissance, à la visite de un mois la pédiatre avait dit qu’il avait le développement psychomoteur d’un bébé qui en a trois), mais une façon d’etre qui rentre difficilement dans un cadre. L’ecole avait été une souffrance pour lui, il devait être assis de longues heures (impossible pour mon agité !) avec un apport intellectuel proche de zéro, n’etait jamais invité aux anniversaires.. Ses grands frères avaient passé un test de QI et sont donc « intellectuellement précoces », mais lui est encore dans quelque chose à part. Bref, quand il a retrouvé le petit violon de son frère dans la cave, c’etait juste une évidence: d’un coup, son endurance hors norme, sa motricité délirante et son émotivité, ses « handicaps » de la vie de tous les jours, prenaient un sens. Son frère lui a dit le nom des cordes, lui a montré sur la partition la plus grave et il en a déduit les autres (« facile, ça monte »). Il a déchiffré ses premiers morceaux tout seul et m’a supplié de lui prendre des cours. La situation était financièrement délicate, alors j’ai passé un deal avec lui: je lui paie les cours mais il bosse sérieusement. C’etait donc très clair dès le départ, et quand il m’a annoncé peu après qu’il voulait devenir soliste je lui ai encore expliqué ce que cela implique. Alors bien sûr il peut toujours changer d’avis mais je ne pense pas qu’il le fera, car aujourd’hui son violon c’est un peu comme la rose du Petit Prince: c’est parce qu’il s’en est occupé et qu’elle est capricieuse qu’elle lui est si chère. De toute façon, sa vie lui appartient et quels que soient nos efforts à nous c’est à lui d’être en accord avec ce qu’il en fait; s’il décidait d’arreter je serai déçue et j’essaieraI sans doute de voir si c’est passager ou définitif, mais de toute manière persévérer dans cette voie sans envie et sans passion serait impossible
, s’il est capable de passer des heures devant son piano , il s’y amuse plus qu’il ne travaille (il aime retrouver à l’oreille les airs de tout ce qu’il entend), il s’agit donc surtout de lui offrir la possibilité d’aller plus loin et voir ce que cela donne. Pour le petit violoniste, c’est un peu different: en réalité la question de ce qu’il va devenir s’etait posée très très tôt, avant même son entrée à l’ecole. Il a toujours eu beaucoup d’avance physique et intellectuelle (tenait sa tête dès la naissance, à la visite de un mois la pédiatre avait dit qu’il avait le développement psychomoteur d’un bébé qui en a trois), mais une façon d’etre qui rentre difficilement dans un cadre. L’ecole avait été une souffrance pour lui, il devait être assis de longues heures (impossible pour mon agité !) avec un apport intellectuel proche de zéro, n’etait jamais invité aux anniversaires.. Ses grands frères avaient passé un test de QI et sont donc « intellectuellement précoces », mais lui est encore dans quelque chose à part. Bref, quand il a retrouvé le petit violon de son frère dans la cave, c’etait juste une évidence: d’un coup, son endurance hors norme, sa motricité délirante et son émotivité, ses « handicaps » de la vie de tous les jours, prenaient un sens. Son frère lui a dit le nom des cordes, lui a montré sur la partition la plus grave et il en a déduit les autres (« facile, ça monte »). Il a déchiffré ses premiers morceaux tout seul et m’a supplié de lui prendre des cours. La situation était financièrement délicate, alors j’ai passé un deal avec lui: je lui paie les cours mais il bosse sérieusement. C’etait donc très clair dès le départ, et quand il m’a annoncé peu après qu’il voulait devenir soliste je lui ai encore expliqué ce que cela implique. Alors bien sûr il peut toujours changer d’avis mais je ne pense pas qu’il le fera, car aujourd’hui son violon c’est un peu comme la rose du Petit Prince: c’est parce qu’il s’en est occupé et qu’elle est capricieuse qu’elle lui est si chère. De toute façon, sa vie lui appartient et quels que soient nos efforts à nous c’est à lui d’être en accord avec ce qu’il en fait; s’il décidait d’arreter je serai déçue et j’essaieraI sans doute de voir si c’est passager ou définitif, mais de toute manière persévérer dans cette voie sans envie et sans passion serait impossible-
pianojar
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Re: Elle a seulement 10 ans !
Elle a seulement 10 ans... vainqueur du concours 2018 des jeunes pianistes
Alexandra Dovgan
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