jean-séb a écrit : mer. 29 nov., 2017 13:26
Très beau programme. Je ne suis pas un fan des sonates de Schubert, généralement, que je trouve facilement ennuyeuses, mais là, bravo. Et quel époustouflant Szymanowski qui séduit d'emblée.
Lee a écrit : mer. 29 nov., 2017 23:23
Je trouvais le premier lien de Blancette (un Schubert) le plus beau que j'ai entendu des enregistrements de Debargue. Non, je n'ai pas beaucoup écouté par lui, le concours et quelques bis des enregistrements officiels. Si un jour je peux aller l'écouter jouer Schubert j'irai !
Très intéressant... parce que voyez-vous, les 'critiques officiels', eux, n'aiment pas le Schubert de Lucas.
À commencer par le critique américain du Chicago Tribune qui commentait le récital de Lucas dans sa ville (lien fourni plus haut par M-Olib). Selon ce monsieur, Lucas n'a rien compris à Schubert.
Ensuite celui-ci, qui était au concert à la Philharmonie, pour qui le Schubert de Lucas est «
en retrait, délicat, peu sonore, peu affirmé», où souvent «
l’intériorisation tourne à l’afféterie ou au maniérisme».
https://toutelaculture.com/musique/clas ... en-allant/ - Il s'entendrait bien avec Bastien.
Puis récemment, une critique du dernier cd, dans la revue Diapason de décembre, signée Bertrand Boissard. Je n'ai jamais lu une critique aussi alambiquée, on se demande vraiment ce qu'il pense ! Si j'avais lu sans connaître sa note, j'aurais pensé qu'il aurait donné au mieux 3 diapasons - mais il en donne 5 ! Allez comprendre...
Pour lui, Lucas «
livre de la Sonate D 784 une interprétation tantôt d’un ascétisme rugueux, tantôt d’une violence granitique. Il y a dans son jeu quelque chose de cinglant, parfois même de cassant, ce qu’accentue une très grande clarté d’exécution. On retrouve Debargue tel qu’en lui-même : entier, refusant d’arrondir les angles. Si l’Andante pâtit d’un phrasé banal, sans la candeur attendue, applaudissons le finale, tourbillon véritablement vivace – et aveuglant.» Bon, vu la note, j'imagine que ça doit être compris comme positif ? Mais Boissard nous invite ensuite à écouter Kissin à 23 ans dans cette sonate, dont la main gauche «
possède une véritable éloquence» alors que celle de Lucas serait floue et ne chanterait pas. [Je me suis imposé d'écouter Kissin... et me suis rapidement ennuyée. Exécution impressionnante qui ne me touche pas; j'entends un premier de classe qui livre un version de concours].
Ensuite, la petite La majeur en prend vraiment pour son rhume: «
La chaleureuse insouciance, l’atmosphère doucement lyrique de la D.664 lui échappent.» Ah bon ? Est-ce qu'il s'est trompé de disque ? Comme les critiques cités plus haut, lui non plus n'aime pas le jeu retenu de Lucas dans cette sonate: «
Pourquoi ce début en retrait, alors qu’il gagnerait à être énoncé avec confiance, et plus distinctement ? » Et pour finir: «
Le jeu de Lucas Debargue ne possède ni la sérénité, ni la naïveté d’évocation qui conviendraient à l’œuvre» même s'il lui reconnait une «
mise en place et un contrôle sonore remarquables». Pourtant, s'il veut des références, qu'il aille écouter Brendel, également très retenu, et que Lucas cite comme sa version préférée dans une récente interview pour Rondo Magazin. Lucas a déjà expliqué qu'il avait choisi de la jouer comme s'il regardait vers le passé, se souvenant avec une certaine mélancolie de sa jeunesse insouciante. Et c'est bien ce que j'ai entendu dès la première écoute (à Auvers), nul besoin de l'expliquer! Il faut juste l'écouter, sans
a priori, et être prêt à se laisser toucher.
Je dois dire que le texte de Boissard m'a vraiment choquée, moi qui jusqu'ici respectait beaucoup ce critique, dont les textes se montrent habituellement très respectueux des artistes. Pourquoi choquée ? Parce que son avis diffère du mien ? Non, mais à cause de ce bout de phrase: 'qui conviendraient à l'oeuvre'. Ce qui sous-entend, encore, que ce n'est pas comme ça qu'il faut jouer Schubert; que lui, Boissard, sait mieux que Lucas comment il faut jouer cette sonate. Un regard différent c'est un regard moins bon.