La nature et la musique

[Oupsi]

Comme petit clin d’œil au thème de la folle journée de cette année, je me suis demandé quelle était la relation entre la musique et la nature pour les musiciens (pas seulement les compositeurs), est-ce que c'est juste une lointaine thématique ou y a-t-il d'autres connexions plus profondes et mystérieuses? Est-ce que la contemplation de la nature, ou l'attrait pour la nature influencent votre relation à votre instrument? Y a-t-il des émotions qui se ressemblent? Bref, est-ce que la nature vous inspire?

[Lee]

Beau sujet, merci Oupsi.

Parfois j'entends les oiseaux chanter quand je joue au piano avec les fenêtres ouvertes, j'aime pensé plutôt que je les inspire !

Sinon, le sujet me fait penser à beaucoup de musique inspiré par les sons de l'eau. Le Moldau par Smetana, Pièce Lyrique Bekken par Grieg...
Je viens de lire il y a un ou deux jours dans un journal que le couleur vert inspire la créativité, mais je ne trouve pas sur Internet l'article en français.

[Okay]

Lee, peux-tu nous donner le lien de l'article quand même (si c'est un article en ligne) ?

Question très intéressante et redoutablement difficile, si on s'écarte de liens directs qui associent de nombreuses oeuvres à des évocations de la nature.
Pour ma part, je dirais qu'il y a cette sensation d'aspiration de tout ce qui est finalement accessoire et superflu. Se dire "c'est ça qui compte avant tout" en se sentant tout petit devant un paysage majestueux, ou en ressentant la puissante évidence offerte par la musique. Il y a l'idée d'une persistance intrinsèque, comme les montagnes qui étaient déjà dressées avant les villes et leur succéderont sans doute. Une sorte de porte vers un absolu, mais qui déroute dans le cas de la musique, car révélée par des hommes (j'emploie à dessein le verbe "révéler" plutôt que "créer"). Mais à l'arrivée, les deux s'imposent de façon tout aussi irrésistible. Je crois que lorsque des instabilités de toutes sortes deviennes trop prégnantes, l'une comme l'autre font office de tours fortifiées intemporelles, des refuges nous mettant à l'abri de bien des assauts hostiles.

[Lee]

Lee, peux-tu nous donner le lien de l'article quand même (si c'est un article en ligne) ?

En fait, j'ai lu l'article (très court) en français, mais là, je trouve un en anglais :
http://www.huffingtonpost.com/2012/04/0 ... 86190.html

[Kât]

edit

[Oupsi]

Se dire "c'est ça qui compte avant tout" en se sentant tout petit devant un paysage majestueux, ou en ressentant la puissante évidence offerte par la musique.

Voilà c'est à ce genre d'émotions que je pensais.
Pour moi il y a aussi le miracle des formes (symétries, spirales, stries, etc...) qui se déploient avec constance de la plus petite feuillette ou mini insecte jusqu'aux grandes roches; la métamorphose permanente (la larve qui devient papillon, les mues, les éclosions, germinations), affirmations multiples de la vie, splendeur toujours recommencée; l'existence aussi dans le mouvement d'un risque de non-ordre, plus ou moins réconfortant ou inquiétant, cours d'eau, nuages, avalanche, et le fait que notre regard s'accroche à l'aléatoire en y cherchant une loi ou à la loi en y cherchant de l'aléatoire (comme compter le flux et le reflux des vagues pour y trouver un retour ordonné), cette oscillation est très présente dans ma relation à la musique.

La sensation physique d'être étrangère, en décalage par rapport à la nature, tout en y participant d'une certaine manière puisque j'ai un corps et des sens; et le désir de creuser cette participation, de la rendre plus fluide, dans un plus grand abandon, en marchant, en regardant, en étant simplement là, à l'écoute.

Et l'absence de mots, bien sûr.

[Okay]

Oui je ressens ça fortement aussi, une beauté formelle des proportions dans l'art et la musique en particulier, que nous trouvons finalement belle car elle doit nous rappeler un certain équilibre que la nature a su fomenter, notamment cet aspect fractal que tu décris très bien. Cet aspect là est malgré tout statique, car il n'apparaît vraiment qu'une fois que la musique devient un souvenir.
Pour prolonger ton idée sur les formes et les métamorphoses, il y a le concept de motif, si important et unificateur. C'est le socle de toute la méthode de composition de Beethoven par exemple, qui travaille bien davantage le motif que le thème, et utilise nombre de thèmes qui ne sont que des motifs habillés. Tout le 1er mouvement de l'appassionata repose sur une formule d'arpège et 3 notes répétées, motif qui préside également la 5ème symphonie, mais tant d'œuvres de plein de compositeurs. La nature se saisit aussi de telles briques élémentaires et construit d'infinis thèmes et variations sur ces socles (finalement tous ces dénominateurs communs entre espèces mis en évidence par les naturalistes, mais aussi la possibilité de réduire la biologie à la chimie, et la chimie à la physique). La présence abondante de certains atomes élémentaires comme un squelette vertébré, qui donne lieu pourtant à une impression de diversité considérable.

[Okay]

Lee, peux-tu nous donner le lien de l'article quand même (si c'est un article en ligne) ?

En fait, j'ai lu l'article (très court) en français, mais là, je trouve un en anglais :
http://www.huffingtonpost.com/2012/04/0 ... 86190.html

Merci, très intéressant. J'adore l'explication que le vert susciterait la créativité car il nous rappelle de manière subconsciente l'idée de croissance végétale.

[pianojar]

http://www.futura-sciences.com/magazine ... 60/page/5/

Je pense que les nombreus "scriabinistes" du forum doivent connaitre cette particularité du compositeur. Est-ce-que cela aide à comprendre ou jouer sa musique ? La question est posée.....

[Lee]

3 notes répétées, motif qui préside également la 5ème symphonie

Quand j'étais petite j'ai vu à la télé un oiseau comme celui-là : http://youtu.be/92q6Fqy3iVk

[Okay]

http://www.futura-sciences.com/magazine ... 60/page/5/

Je pense que les nombreux "scriabinistes" du forum doivent connaitre cette particularité du compositeur. Est-ce-que cela aide à comprendre ou jouer sa musique ? La question est posée.....

Tu rouvres un boite de Pandore... me concernant, cette "particularité" s’infiltre dans toute la musique tonale, d'ailleurs plutôt lorsque la tonalité est stable. Chez Scriabine, je suis davantage sensible aux sensations de textures qu'aux couleurs, surtout dans ses dernières oeuvres, supposées d'une certaine façon revenir vers la nature...

[worov]

Certains musiciens sont très influencés par la nature. Beethoven en est un :

Symphonie pastorale : https://www.youtube.com/watch?v=H0_yQQN54Gg

Une symphonie qui contient le bruit du vent dans la forêt, le bruits des feuilles des arbres, le chant des oiseaux, la tempête.

[jean-séb]

Je vois que la plupart d'entre vous considèrent que le sujet de ce fil est la nature comme une source d'inspiration pour une musique plus ou moins imitative. J'avais d'abord compris le sujet comme se référant plutôt aux théories ramistes.

Le traité de l'harmonie réduite à ses principes naturels est le premier traité de théorie musicale écrit par Jean-Philippe Rameau et publié en 1722. [...] Pour Rameau, c'est « la nature » même qui fonde sa théorie et lui permet d'affirmer que l'harmonie est la quintessence de la musique, la mélodie ne faisant que procéder de l'harmonie.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Trait%C3% ... s_naturels

[pianojar]

A propos de Rameau et de la polémique (pour ne pas dire plus) qui l'a opposé à Rousseau cet article
http://www.persee.fr/doc/rde_0769-0886_ ... _17_1_1272