Intuitif vs. contre-intuitif

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Moderato Cantabile
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Re: Intuitif vs. contre-intuitif

Message par Moderato Cantabile »

Lee : je suis tout à fait d'accord avec Oupsi . Tu sembles avoir une excellente oreille "douée pour la polyphonie" ce qui n'est pas le cas de tout le monde . Mais bizarrement ce don semble représenter un handicap puisqu'il t'empêche d'apprécier le travail MS et c'est très dommage . Moi , je ne suis pas hyper fan du travail MS , je ne le fais pas systématiquement mais lorsque je m'y mets c'est toujours très intéressant , cela occasionne beaucoup de découvertes et c'est très enrichissant en plus de faire progresser le jeu. Tu devrais vraiment essayer de le pratiquer en changeant ton approche : c'est à dire sans grommeler avant même d'avoir commencé ! :mrgreen:

Quel est le pianiste célèbre supposé avoir travaillé ses mains séparément en piochant alternativement dans une coupe de chocolats ou de pâtes de fruits avec la main laissée libre ?? :wink:
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Okay
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Re: Intuitif vs. contre-intuitif

Message par Okay »

Lee a écrit :
BluePhoenix05 a écrit :2) Practicing slowly hands together and gradually ramping up the speed is what we tend to do intuitively, but it turns out to be one of the worst ways to practice because it wastes so much time and you are training the hands to execute slow motions that are different from what you need at the final speed. Technique for speed is acquired by discovering new hand motions, not by speeding up a slow motion; i.e., the hand motions for playing slowly and fast are different. [...] Speeding up a slow play is like asking a horse to speed up a walk to the speed of a gallop — it can’t. [...]

3) In order to memorize well, and be able to perform well, you must practice slowly, even after the piece can be played easily at speed. This is counter-intuitive because you always perform at speed, so why practice slowly and waste so much time? Playing fast can be detrimental to performance as well as to memory. Playing fast can cause “fast play degradation”[...] However, practicing slowly is tricky because you should not practice slowly until you can play fast! Otherwise, you would have no idea if your slow play motion is right or wrong. [...]
On n'a pas besoin de parler de metronome, que je deteste, donc c'est reglé. Je ne comprends rien de ce que les 2 et 3 impliquent, pire, ils me semblent contradictoire. Déjà, si jouer lentement n'est pas la solution pour les passages rapides, comment faire pour memoriser s'il faut jouer lentement ? #-o Peut-être vos (ses) conseils sont pour les pianistes qui font déjà très bien la lecture à vue. J'ai quand même besoin d'apprendre lentement avant tout.
Oui ça semble a priori contradictoire puisqu'il dit en 2) qu'il ne faut pas travailler en accélérant progressivement le tempo, et en 3) qu'il faut bosser lentement. En fait ce n'est pas contradictoire, car une façon efficace de travailler est d'alterner le travail rapide et lent plutôt que de monter petit à petit la vitesse.
Le point en 2) est qu'il est très important de rapidement tester le tempo rapide même si on n'est pas du tout prêt, car en restant collé sur le travail lent jusqu'à qu'on le possède, on ne fait que posséder des gestes qui fonctionnent à ce tempo là, mais qu'il faudra changer en accélérant. C'est ça qui est contre-productif. En fait la bonne façon de travailler, c'est d'essayer tant bien que mal de jouer vite, trouver le geste qui fonctionne dans la vitesse, et de l'importer dans le travail lent. Puis retester vite, et faire la navette entre le travail rapide et lent sans arrêt.
En 3) ça concerne seulement la mémorisation. On enregistre solidement surtout lorsqu'on travaille lentement, car en jouant vite, on utilise beaucoup de réflexes avec une conscience assez limitée (et heureusement) de tout ce qu'on est en train de faire. L'intérêt de jouer lentement justement, c'est de faire temporairement attention à beaucoup de choses, et c'est à ce moment là qu'on grave le plus d'information dans la mémoire, ne serait-ce par la répétition de courtes sections travaillées lentement.
Lee a écrit :
BluePhoenix05 a écrit :1) Separating the hands for practice (1.2.7) is counter-intuitive because you need to practice each hand, then both together, so that it looks like you have to practice three times instead of just once hands together. Why practice hands separately, which you will never use in the end? [...]
Les mains séparés, on a déjà parlé, la raison pour laquelle je ne joue pas mains séparés, alors, je m'ennuie tellement que j'ai l'impression que mes oreilles sont en mode "off" je trouve cela conteproductif.
C'est le point avec lequel je suis un peu moins confortable avec Chang. Je ne travaille quasiment jamais mains séparées, mais pourtant les arguments qu'il développe font sens. En travaillant mains séparées, on peut parfois isoler un problème sans être pollué par l'autre main. Quoi qu'il en soit, je pense que c'est plutôt quelque chose à faire pour zoomer sur un problème non résolu, mieux entendre et observer ce qu'il se passe et très bien posséder chaque main sans utiliser de phénomènes de "compensation" (on ne se rend pas compte que parfois une main est en réalité fragile, alors qu'elle semble solide tant qu'elle peut se reposer/caler sur l'autre : jouer mains séparées révèle ces fragilités).
Lee a écrit :
BluePhoenix05 a écrit :4) Most people feel uncomfortable trying to memorize something they can’t play, so they instinctively learn a piece first, and then try to memorize it. It turns out that you can save a lot of time by memorizing first and then practicing from memory (we are talking about technically challenging music that is too difficult to sight read). [...]
Je ne comprends rien de comment on peut memoriser un morceau avant de le jouer. Si je me souviens bien, c'est quelque chose Strumpf fait systematiquement, je ne suis pas capable, j'ai besoin des gestes pour que ça creuse dans mon memoire. Je ne peux pas étudier une partition, ça me parle même pas, j'ai aucune idée comment ça sonne.
De ce que je comprends, il ne s'agit pas du tout de ça. Il ne recommande pas du tout d'apprendre la partition à la table avant de commencer à la jouer. J'utilise énormément (essentiellement ?) la mémoire kinesthésique donc je suis tout à fait d'accord avec toi. En revanche, je connais mes morceaux par cœur bien longtemps avant le moment où je peux les jouer correctement, et ensuite je travaille par cœur. On peut très bien avoir un passage dans la tête qu'on n'est pas encore capable de bien jouer au tempo, ne serait-ce qu'après l'avoir beaucoup répété lentement au départ avec partition. Une fois qu'on n'a plus de partition sous le nez, le travail lent/rapide/lent/rapide pour posséder le texte dans les doigts est beaucoup plus productif.
Lee a écrit : Et pour terminer, j'ai aucune idée ou notion de comment faire ces 2 trucs :
Okay a écrit :Pour bien jouer des passages en accords ou octaves, il faut parvenir à ne pas les préparer. Pour attraper le geste on est donc conduit à ne pas nécessairement chercher à jouer les bonnes notes au début, car in fine ce que fait le bras est plus important que de tomber sur les bonnes touches au départ (j'ai observé que chercher à jouer les bonnes notes au départ produit par défaut le mauvais geste).

Autre truc non intuitif esquissé dans ce fil, on peut parfois donner une meilleure impression de jeu lié en ne jouant pas lié. Dans la même série, plus les bras sont détendus et utilisent peu leur force dans le forte, plus le son se projette avec puissance.
Pour les accords, essaie par exemple avec la main droite de jouer un accord simple comme do-mi b-sol au milieu du clavier avec 1-2-4, puis d’enchaîner le même accord à l'octave au dessus, puis une troisième fois à l'octave encore au dessus. Si tu veux faire ça très vite, il va être impossible de préparer la position des accords avant de les jouer car ça prend beaucoup de temps et crispe le main. Le seul moyen est de se projeter sur l'accord, en faisant davantage attention à ne pas interrompre son geste que de jouer les bonnes notes (même si au début ça ressemble à deux clusters). Une fois que le geste est fluide, tu peux commencer à viser les notes. Une fois qu'on sait le faire avec 3 fois le même accord, on peut modifier légèrement d'un accord à l'autre pour apprendre à changer la position des doigts en cours du déplacement plutôt qu'à l'arrivée juste au dessus des touches.
Pour le legato, il se trouve qu'on peut souvent phraser plus naturellement en ne jouant pas legato, car il est beaucoup plus difficile d'avoir un jeu égal en liant physiquement les notes. Je pense que l'égalité s'obtient en évitant le legato (encore un truc contre-intuitif ?). Un jeu bien phrasé non lié a l'air davantage lié qu'un jeu lié non phrasé...
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Lee
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Re: Intuitif vs. contre-intuitif

Message par Lee »

Pfiou, vous êtes efficaces ! =D>

@Oupsi et Moderato Cantabile Merci pour vos réponses. J'apprécie les compliments sur la polyphonie, mais ça dépend le morceau et le public quand même. Et plus généralement, oui, il y a du travail. #-o Mais tout vaut essayer au moins une ou deux fois, peut-être même par morceau ! Le métronome, ahem, oui, ma prof m'indique un passage à travailler avec le métronome quasiment pour chaque morceau, je suis une handicappée de timing et je dois suivre ce conseil. :oops:

@ Okay Merci pour ces détails, maintenant c'est très clair. Pour les mains séparées, souviens-tu si tu avais travaillé MS très jeune, avant de pouvoir faire la lecture à vue aussi bien ?
(Plus généralement, il y a peut-être des mauvaises orientations en te prenant comme exemple quand mon niveau est des années lumières derrière.)
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Lee
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Re: Intuitif vs. contre-intuitif

Message par Lee »

Pfiou, vous êtes efficaces ! =D>

@Oupsi et Moderato Cantabile Merci pour vos réponses. J'apprécie les compliments sur la polyphonie, mais ça dépend le morceau et le public quand même. Et plus généralement, oui, il y a du travail. #-o Mais tout vaut essayer au moins une ou deux fois, peut-être même par morceau ! Le métronome, ahem, oui, ma prof m'indique un passage à travailler avec le métronome quasiment pour chaque morceau, je suis une handicappée de timing et je dois suivre ce conseil. :oops:

@ Okay Merci pour ces détails, maintenant c'est très clair. Pour les mains séparées, souviens-tu si tu avais travaillé MS très jeune, avant de pouvoir faire la lecture à vue aussi bien ?
(Plus généralement, il y a peut-être des mauvaises orientations en te prenant comme exemple quand mon niveau est des années lumières derrière.)
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Presto
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Re: Intuitif vs. contre-intuitif

Message par Presto »

BluePhoenix05 a écrit : D'ailleurs dans le même prolongement, j'ai envie d'aller plus loin encore. On voit régulièrement sortir le conseil "travaille au métronome !" dès qu'on entend le moindre écart de rythme/irrégularité. Pour moi ce n'est pas s'attaquer à l'éventuel vrai problème à la source (tension dans le corps qui amène à "tirer" sur le tempo sans s'en rendre compte? manque d'écoute dû à une focalisation sur les gestes/la synchonisation ? déséquilibre dans les gestes qui conduit à "précipiter" un trait sans le vouloir? etc.), et donc le métronome n'est pas toujours suceptible de le résoudre.

Evidemment que le rythme n'est pas une question de métronome, la pulsation doit venir de l'intérieur, l'idéal serait même de jouer avec, et là ça devient un niveau pro. Neuhaus a écrit quelques pages là-dessus, maintenant ce n'est pas donné à tout le monde.

Pour le travail technique il est pour moi indispensable, Je suis personnellement totalement incapable de travailler des variantes sans métronome. il me permet de maintenir un tempo lent et de graduer les progressions. l'alternance travail lent / rapide ne fonctionne pas chez moi, j'ai besoin des vitesses intermédiaires pour voir poindre 2-3 difficultés que je n'aurais pas vues et je ne "contrôle" ces vitesses qu'avec le métronome.
Pour travailler la régularité, je ne connais rien de pire que de maintenir une pulsation très lente, tous les défauts apparaissent au grand jour. D'expérience, je me suis aperçu que de travailler à 30 par exemple est aussi excellent pour le rythme car la pulsation "rentre" dans la main.
En même temps je m'interroge, ça peut devenir une pratique routinière et paresseuse. Je sais pas...

Là où je ne suis pas d'accord c'est ta comparaison avec la fausse note. ça n'a rien à voir. ça dépend des cas, le rythme c'est la musique, des temps forts, faibles, des appuis, des respirations... vouloir travailler ça au métronome est évidemment un non sens et le remède n'en sera pas un. Mais si quelque chose est bancal, il aura moins de chance de le rester en travaillant au métronome que sans.
Modifié en dernier par Presto le mer. 07 janv., 2015 13:33, modifié 1 fois.
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Okay
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Re: Intuitif vs. contre-intuitif

Message par Okay »

Lee a écrit :@ Okay Merci pour ces détails, maintenant c'est très clair. Pour les mains séparées, souviens-tu si tu avais travaillé MS très jeune, avant de pouvoir faire la lecture à vue aussi bien ?
En fait je travaille davantage MS maintenant que plus jeune, où vraiment je ne le faisais jamais. C'est vrai que si on inclut la problématique du déchiffrage dans cette démarche, je conçois que ça puisse changer des choses.
En fait quand j'étais enfant (j'ai débuté vers 8-9 ans), je déchiffrais au bout d'un an ou deux n'importe quoi (concertos ...) coûte que coûte et sans m'arrêter, les doigts littéralement à plat, sans faire spécialement gaffe au pourcentage de fausses notes ou de notes manquantes. Le principal était d'arriver à enchaîner, même en faisant n'importe quoi, même s'il manquait plus de la moitié des notes (ce qui était le cas). Ça ne m'ennuyait pas, tant que ça me rappelait au moins vaguement ce que j'entendais dans les disques, ça me faisait plaisir.
Il m'a bien fallu 4 ou 5 bonnes années pour que j'accepte l'idée qu'il convenait de jouer un maximum de ce qui était écrit, et d'arrêter de combler n'importe comment dès que c'était trop compliqué (bref, accepter l'idée qu'on pouvait ralentir par rapport au disque, et essayer de travailler). C'est peut-être une attitude désinhibante face aux partitions (mon tout premier prof - qui m'a tout de même supporté un an - disait que c'était un comportement "boulimique", ce qui décrivait plutôt bien cette réalité avec le recul), et une école redoutable si le but unique est de savoir déchiffrer à vue peu importe la difficulté (en fait maintenant je sais que ces débuts chaotiques m'ont tout de suite appris à faire des tris efficaces en déchiffrant un texte). Mais je suis persuadé que c'est globalement un exemple à ne suivre sous aucun prétexte si on veut vraiment jouer du piano ... à moins d'être prêt à subir un jour un sacré redressement lorsqu'un prof vous dit que jusqu'à ce jour vous avez fait absolument n'importe quoi ...
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Re: Intuitif vs. contre-intuitif

Message par BluePhoenix05 »

Moderato, ton témoignage sur le métronome qui t'a aidé à enchaîner le morceau entier avec plus de fluidité, à prendre un peu plus de hauteur, est très intéressant, merci. Est-ce que les effets subsistent quand tu le retires ? ça donne quoi ? :)
Presto a écrit : Pour le travail technique il est pour moi indispensable, Je suis personnellement totalement incapable de travailler des variantes sans métronome. il me permet de maintenir un tempo lent et de graduer les progressions. l'alternance travail lent / rapide ne fonctionne pas chez moi, j'ai besoin des vitesses intermédiaires pour voir poindre 2-3 difficultés que je n'aurais pas vues et je ne "contrôle" ces vitesses qu'avec le métronome.
Pour travailler la régularité, je ne connais rien de pire que de maintenir une pulsation très lente, tous les défauts apparaissent au grand jour. D'expérience, je me suis aperçu que de travailler à 30 par exemple est aussi excellent pour le rythme car la pulsation "rentre" dans la main.
En même temps je m'interroge, ça peut devenir une pratique routinière et paresseuse. Je sais pas...
C'est très intéressant, tu devrais détailler ta façon de travailler, pour nous tous, car on ne parle pas forcément tous de la même chose avec l'expression "travailler au métronome". Est-ce que tu travailles par petites sections répétées en boucle, au métronome ? et/ou le morceau entier au métronome ? Et à partir de quel moment/dans quels cas travailles-tu sans ? l'utilises-tu systématiquement :shock: ?

Il y a des choses pour lequelles le cerveau a besoin d'un "temps différencié" d'assimilation (ou intégration/compilation/encapsulation) et pour lesquelles on ne peut pas enchaîner avec régularité (ce qui est normal). Dans ces cas-là, je ne trouve pas profitable d'imposer une contrainte de régularité supplémentaire par le métronome, même si on diminue la pulsation dans l'optique d'"égaliser" le tempo par le bas. Mais peut-être qu'en fait tu as une pulsation très sûre et tu n'as pas vraiment besoin de faire d'effort pour suivre le métronome, il n'est là que pour te rassurer. Sinon je ne suis pas systématiquement contre le métronome, dans certains types de travail on peut s'en remettre à lui pour "gérer" la pulsation, afin qu'on puisse se concentrer sur d'autres choses - je l'ai déjà évoqué, je crois.
Moderato Cantabile a écrit :Lee: je suis tout à fait d'accord avec Oupsi . Tu sembles avoir une excellente oreille "douée pour la polyphonie"
je suis d'accord aussi, je suis content d'être conforté dans mon écoute :)
Okay a écrit :Pour le legato, il se trouve qu'on peut souvent phraser plus naturellement en ne jouant pas legato, car il est beaucoup plus difficile d'avoir un jeu égal en liant physiquement les notes. Je pense que l'égalité s'obtient en évitant le legato (encore un truc contre-intuitif ?). Un jeu bien phrasé non lié a l'air davantage lié qu'un jeu lié non phrasé...
La dernière phrase dit tout : le legato au piano, ce n'est PAS la "liaison physique" de la définition "classique"...
Okay a écrit :C'est peut-être une attitude désinhibante face aux partitions (mon tout premier prof - qui m'a tout de même supporté un an - disait que c'était un comportement "boulimique", ce qui décrivait plutôt bien cette réalité avec le recul), et une école redoutable si le but unique est de savoir déchiffrer à vue peu importe la difficulté (en fait maintenant je sais que ces débuts chaotiques m'ont tout de suite appris à faire des tris efficaces en déchiffrant un texte). Mais je suis persuadé que c'est globalement un exemple à ne suivre sous aucun prétexte si on veut vraiment jouer du piano ...
Oui, la lecture à vue et la technique pianistique sont des compétences distinctes qu'on peut acquérir... Par exemple jouer MS ne va pas directement faire progresser en lecture à vue :mrgreen: :wink:
Okay a écrit :C'est le point avec lequel je suis un peu moins confortable avec Chang. Je ne travaille quasiment jamais mains séparées, mais pourtant les arguments qu'il développe font sens. En travaillant mains séparées, on peut parfois isoler un problème sans être pollué par l'autre main. Quoi qu'il en soit, je pense que c'est plutôt quelque chose à faire pour zoomer sur un problème non résolu, mieux entendre et observer ce qu'il se passe et très bien posséder chaque main sans utiliser de phénomènes de "compensation" (on ne se rend pas compte que parfois une main est en réalité fragile, alors qu'elle semble solide tant qu'elle peut se reposer/caler sur l'autre : jouer mains séparées révèle ces fragilités).
C'est tout à fait ça pour moi aussi :)
C'est étonnant que tu aies eu si peu besoin de travailler MS. Ca dépend de te morceaux, si tu en as où les mains sont très intriquées et où elles se partagent un chant ou une voix. Il y a quand même plein de passages (polyphonie, polyrythmie, substitutions de doigts...) où je ne vois pas comment on peut s'en sortir sans un jeu bien assuré MS au préalable. Même un accompagnement seul sur une main est intéressant à travailler MS, tel que le décrit Oupsi :
Oupsi a écrit : Simple, c'est la partie d'un tout, qui a une vie propre, et qui prend encore plus de vie lorsqu'elle échange avec les autres parties; mais pour échanger en toute plénitude, il faut bien qu'elle soit consciente d'elle-même, naturelle par elle-même, et consciente de sa relation aux autres parties.
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Okay
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Re: Intuitif vs. contre-intuitif

Message par Okay »

BluePhoenix05 a écrit :
Okay a écrit :Pour le legato, il se trouve qu'on peut souvent phraser plus naturellement en ne jouant pas legato, car il est beaucoup plus difficile d'avoir un jeu égal en liant physiquement les notes. Je pense que l'égalité s'obtient en évitant le legato (encore un truc contre-intuitif ?). Un jeu bien phrasé non lié a l'air davantage lié qu'un jeu lié non phrasé...
La dernière phrase dit tout : le legato au piano, ce n'est PAS la "liaison physique" de la définition "classique"...
Ce n'est qu'une question lexicale mais je crois que tu te doutes que je ne suis pas du tout d'accord avec ça :mrgreen:
Je pense que pour toi, jouer legato veut dire avoir un suivi, une direction, un chant avant tout. C'est ce que j'appelle le phrasé, et que je distingue strictement de la notion de legato. Pour moi jouer legato, c'est ni plus ni moins que maintenir enfoncée temporairement la touche de la note précédente pendant qu'on presse la touche de la note courante (une liaison physique). Ce n'est pas du tout subjectif : c'est lié ou non.
Si bien qu'on se retrouve grossièrement avec 4 grandes manières de jouer une ligne selon qu'on lie ou non, et qu'on phrase ou non. En vérité, ça se réduit presque toujours à juste 2 manières car la plupart du temps il faut phraser, tandis que lier ou non se considère au cas par cas.
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Re: Intuitif vs. contre-intuitif

Message par nox »

Je ne travaille pas du tout mains séparées non plus.
En fait je ne "travaille" pas. Je joue une fois chaque pièce, en rejouant éventuellement plus lentement certains passages.
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Re: Intuitif vs. contre-intuitif

Message par BluePhoenix05 »

Okay a écrit : Ce n'est qu'une question lexicale mais je crois que tu te doutes que je ne suis pas du tout d'accord avec ça :mrgreen:
Je sais, on en a déjà discuté sur le forum :wink: - nous radotons dangereusement ... :mrgreen:
Pour parler uniquement de la liaison physique, j'emploie juste l'adjectif "lié".
Pour moi le legato c'est la ligne, la continuité d'une note à l'autre. Et le phrasé c'est la direction (l'orientation). (c'est comme les vecteurs orientés dans le plan en maths :mrgreen: :P )
Mais c'est compliqué :| , car dans une phrase staccato il y a quand même une idée de ligne, non ? (même pour un chanteur) :-k
Et on peut poser la question : peut-on avoir une ligne sans direction ? ou une direction sans ligne ? Question très intéressante...
Pour schématiser, j'aurais envie de répondre que le legato c'est la continuité entre une note et ses voisines (adjacentes), et le phrasé, c'est la relation de chaque note avec chacune du reste des autres notes de la même phrase (sous la même liaison, donc).
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Re: Intuitif vs. contre-intuitif

Message par Okay »

Distinguer les termes "lié" et "legato" pour désigner 2 choses différentes pose quand même un sacré problème non ? il me semble que c'est exactement le même terme en français et en italien.
Tu soulignes l'autre contradiction, car en effet il y a une direction dans une ligne staccato : c'est le phrasé :)
Ta définition du legato correspondrait à une sorte de phrasé local ... je crois que ça complique encore les choses ...

Je pense qu'on simplifie énormément, et qu'on couvre naturellement toutes les possibilités si l'on conçoit le phrasé comme le lien dynamique entre les notes (que ce soit une longue phrase ou juste 2 notes), et le legato comme l'action technique de lier physiquement indépendamment de la volonté de phraser (le pianiste colle au clavier, le chanteur ou l'instrumentiste à vent place plusieurs notes dans une seule expiration, l'instrumentiste à cordes frottées fait de même avec un seul coup d'archet, etc.)

Pour répondre à ta question, pour moi c'est oui et oui :
- Il peut clairement y avoir une ligne sans direction : on joue les notes de la phrase de façon monotone sans reconnaître le lien dynamique entre elles (qu'on lie ou non).
- De même il peut y avoir une direction sans ligne, dans la progression d'un accompagnement par exemple.
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Re: Intuitif vs. contre-intuitif

Message par BluePhoenix05 »

Okay a écrit :Pour répondre à ta question, pour moi c'est oui et oui
Mais s'il y a lieu de distinguer les deux notions de ligne et direction, alors pour moi, jouer "lié" ne suffit pas à créer du "legato", et encore moins à phraser.
Si on fait de faux accents, ça rompt le legato.
Et même sans faire de faux-accents, enchaîner deux notes en faisant en sorte que l'entrée de la 2e se fasse dans le prolongement de la 1ere, sans heurt, en douceur et "en phase" avec la fin de la 1ere, en fonction du temps pris entre les attaques des 2 notes, et en écoutant le "decay" de la 1ere (mais ça ne suffit pas non plus), est une question de son très difficile, pour créer du legato (étirement de la ligne), et tout ça aussi en l'insérant dans un phrasé.
Ce n'est pas un "mini" phrasé local non plus... Bien que dans une liaison de deux notes (two-note slur), il n'est pas évident de distinguer ce qu'on mettrait sur le dos du phrasé et ce qu'on mettrait dans le legato (mais est-ce si important?).
nox a écrit :Je ne travaille pas du tout mains séparées non plus.
En fait je ne "travaille" pas. Je joue une fois chaque pièce, en rejouant éventuellement plus lentement certains passages.
Et le Hanon, tu le "travailles" ou tu le "joues" (comme un morceau) ? :wink:
Modifié en dernier par BluePhoenix05 le mer. 07 janv., 2015 15:36, modifié 1 fois.
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Re: Intuitif vs. contre-intuitif

Message par nox »

Je ne fais plus de Hanon.
Je joue tous les jours des études de Cramer ou Clementi.
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Re: Intuitif vs. contre-intuitif

Message par Lee »

Okay a écrit :Je pense qu'on simplifie énormément, et qu'on couvre naturellement toutes les possibilités si l'on conçoit
Nous sommes sur un forum français, il faut rester français : pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? :mrgreen: Alors :
BluePhoenix05 a écrit :Et même sans faire de faux-accents, enchaîner deux notes en faisant en sorte que l'entrée de la 2e se fasse dans le prolongement de la 1ere, sans heurt, en douceur et "en phase" avec la fin de la 1ere, en fonction du temps pris entre les attaques des 2 notes, et en écoutant le "decay" de la 1ere (mais ça ne suffit pas non plus), est une question de son très difficile, pour créer du legato (étirement de la ligne), et tout ça aussi en l'insérant dans un phrasé.
Ce n'est pas un "mini" phrasé local non plus... Bien que dans une liaison de deux notes (two-note slur), il n'est pas évident de distinguer ce qu'on mettrait sur le dos du phrasé et ce qu'on mettrait dans le legato (mais est-ce si important?).
Translation? No thanks, Margaret, I'll pass on this one.
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Re: Intuitif vs. contre-intuitif

Message par BluePhoenix05 »

Comment traduirais-tu le "decay" du son ? décroissance, déclin ? Je garde "extinction" pour quand l'étouffoir retombe :)
La "demie-vie" radioactive du son :mrgreen:
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Re: Intuitif vs. contre-intuitif

Message par Okay »

BluePhoenix05 a écrit :
Okay a écrit :Pour répondre à ta question, pour moi c'est oui et oui
Mais s'il y a lieu de distinguer les deux notions de ligne et direction, alors pour moi, jouer "lié" ne suffit pas à créer du "legato", et encore moins à phraser.
Si on fait de faux accents, ça rompt le legato.
On ne se mettra pas d'accord sur le vocabulaire, mais ce n'est pas bien grave ... je donne mon point de vue une dernière fois pour la cohérence du fil :
- Je suis d'accord de distinguer ligne et direction.
Pour moi une ligne, c'est simplement une suite de notes formant une cellule musicale suivie, peu importe laquelle. Legato, lié, phrasé, etc on s'en fout car ça concerne juste la manière de la réaliser alors qu'elle existe avant la sortie du moindre son. Ca peut être un thème, un motif, une suite d'accords. C'est quelque chose qui a une identité/unité et se déroule dans le temps horizontalement.
La notion de direction implique nécessairement celle de phrasé, c'est la manière dont l'interprète fait vivre la ligne, fait ressentir le chant, les points culminants, les terminaisons, etc.
- Jouer lié = jouer legato (je ne vois pas l'ombre d'une différence entre ces 2 termes, qui sont une traduction littérale du legato physique)
- Jouer lié ≠ jouer phrasé (mais on peut bien sur faire les 2 en même temps)
- Un faux accent rompt le phrasé, et ne change rien au legato. Tu peux faire un faux accent dans une phrase staccato ou dans une phrase legato, ça reste un faux accent ...

Je crois que toute la confusion vient du fait qu'on lit assez souvent le terme "legato" dans des passages chantants, et qu'on pourrait tendre à faire une sorte d'identification (même partielle) entre legato et chant, mais ce sont deux choses différentes. Le legato est une technique instrumentale objective souvent écrite, tandis que la manière de chanter/phraser est très variable d'un interprète à l'autre car on est dans l'implicite ...
Presto
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Re: Intuitif vs. contre-intuitif

Message par Presto »

BluePhoenix05 a écrit :Moderato, ton témoignage sur le métronome qui t'a aidé à enchaîner le morceau entier avec plus de fluidité, à prendre un peu plus de hauteur, est très intéressant, merci. Est-ce que les effets subsistent quand tu le retires ? ça donne quoi ? :) moi aussi je suis plutôt en phase avec Moderato, c'est au métronome que je trouve le bon tempo, souvent je joue trop vite et presse ou ralentis quand ça m'arrange ...

C'est très intéressant, tu devrais détailler ta façon de travailler, pour nous tous, car on ne parle pas forcément tous de la même chose avec l'expression "travailler au métronome". Est-ce que tu travailles par petites sections répétées en boucle, au métronome ? et/ou le morceau entier au métronome ? Et à partir de quel moment/dans quels cas travailles-tu sans ? l'utilises-tu systématiquement :shock: ?
oui, je l'emploie vraiment beaucoup ce métronome, sinon j'accélère et travaille sans rigueur.
EN ce moment je travaille l'op.10 1. par deux mesures. au métronome
60, 70, 80, 90 et 100 dans une bonne dizaine de variantes, par exemple :
1. une fois 60 à la double
2. à 60 avec le doigt témoin (pas très utile dans cette étude, mais on ne sait jamais)
3. ensuite à 60 à la croche les exercices de Cortot, autant de fois que nécessaire pour que ça soit propre :
- les deux mesures avec le mouvement qu'il faut (ou que j'en ai capté à mon niveau pour l'instant)
- do / (sol do mi]
- do sol do / mi
- do sol / do mi
- do(1) do(5) / sol (2) mi (5)
- sol do (2-4) / do mi (51), variante de Josh Wright
4. en triolets avec des doubles notes
- do / sol-do / mi
- do-sol /do /mi
- do / sol / do mi
- puis en doubles notes comme des gouttes d'eau qui tombe do-sol / sol-do / do-mi, pas plus qu'à 80, sinon ce n'est pas propre.
5. en sicilienne et sicilienne inversée (la double croche entre les 2 des 3, puis à la 1er et à la dernière des 3)
6. puis variantes 9 à 15 de Cortot, montées jusqu'à 100

Je monte tout ce petit monde de 60 à 100, à 100 et là j'ai fait mon job et on verra...

L'inconvénient c'est que c'est chronophage et que l'unité de compte est au moins la dizaine d'heures de travail par mesure... mais je progresse donc ...
l'enfilade des quartes de la mesure 11 m'a coûté pas mal d'unités de compte... je laisse reposer maintenant.
j'ai encore pas mal de mesures à passer au crible, mais quand je la joue, le travail effectué sur un certain nombre de mesures paie tout de même sur l'ensemble de l'étude.
Je la joue rarement, sinon je "l'abîme", parfois ça passe, parfois ça passe pas :lol: , y compris les fameuses mesures 30 à 36 mais c'est encore très périlleux.

Le point fort de cette étude est qu'elle peut se travailler de toutes les manières possibles sans perdre de son intérêt musical, les harmonies sont absolument géniales ! ça aide et motive :wink:
BluePhoenix05 a écrit : Il y a des choses pour lequelles le cerveau a besoin d'un "temps différencié" d'assimilation (ou intégration/compilation/encapsulation) et pour lesquelles on ne peut pas enchaîner avec régularité (ce qui est normal). Dans ces cas-là, je ne trouve pas profitable d'imposer une contrainte de régularité supplémentaire par le métronome, même si on diminue la pulsation dans l'optique d'"égaliser" le tempo par le bas. Mais peut-être qu'en fait tu as une pulsation très sûre et tu n'as pas vraiment besoin de faire d'effort pour suivre le métronome, il n'est là que pour te rassurer. Sinon je ne suis pas systématiquement contre le métronome, dans certains types de travail on peut s'en remettre à lui pour "gérer" la pulsation, afin qu'on puisse se concentrer sur d'autres choses - je l'ai déjà évoqué, je crois.
non, je n'ai pas une pulsation très sûre c'est pour ça que constamment je vérifie avec le métronome. dans Scarlatti c'est métronome obligatoire assez souvent aussi, pour monter des passages délicats, assurer un tempo, vérifier la métrique, sinon j'ai de graves surprises :? , le texte se déforme très vite si je n'ai pas un minimum de rigueur là dedans.

Je travaillerais autre chose, ce serait certainement différent, mais là, à mon niveau, je ne vois pas d'autres solutions !

Pour moi le but du travail à pulsation très lente, c'est de faire un exercice de concentration sur chaque doigt, l'attention portée est très différente pour moi à pulsation très lente, vraiment pas facile à tenir.

En même temps je m'interroge, la mise en doigts je la fais avec les exercices 1, 2 et 4 du Gradus, jusque là au métronome, les deux mains une fois, ms et les 2 mains, pas vite. j'approfondis pas, mais j'aime bien ces études et elles sont excellentes pour placer la main. (les principes de Cortot, Brahms, tout ça je peux pas, ça m'enferme dans une approche mécanique pour la journée, j'y vais si j'en ai besoin), et donc avec le métronome. suite à la discussion, je l'ai fait sans métronome : et aïe, je fais trop attention au bip ...

Le métronome pour moi c'est pas le diapason mais le mètre qui permet de monter une table qui tienne debout, mais oui aussi, ça peut devenir une béquille encombrante.
"Vivi felice" Domenico Scarlatti,
Val
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Re: Intuitif vs. contre-intuitif

Message par Val »

Pour moi, jamais de métronome, et, à part quelques fois dans Bach, jamais de mains séparées. Je trouve ça contre-intuitif, justement, de rendre le morceau moins beau quand on le travaille.
Presto
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Re: Intuitif vs. contre-intuitif

Message par Presto »

Bah, po grave Val, on peut jouer parfaitement sans, et mal avec, ce qui n'est pas une plaisanterie.

Allez un petit plaidoyer pour le métronome quand-même :
"Je travaille parfois avec le métronome. Rachmaninov le faisait lui aussi. Je pense que c’est utile pour la mise en place. Un trait paraît souvent difficile parce que l’on ne réalise pas qu’en vérité on presse le mouvement inconsciemment, en le jouant. Le métronome permet d’aplanir le tout.
Guiomar Novaes l’utilisait beaucoup. J’ai une histoire très amusante à son sujet. Un jour, elle faisait des essayages chez un grand couturier brésilien, en vue d’un récital. Pendant qu’elle passait une robe dans la cabine, elle demanda à la personne qui l’accompagnait de sortir de son sac à main le métronome qu’elle emportait toujours avec elle. « Mettez-le à 72 », commanda-t-elle, « je suis en train de travailler dans ma tête cette partie là du concerto de Chopin ! » [rires]. "
http://www.jejouedupiano.com/le-mag-du- ... reire.html ,

Les Alban Berg travaillaient toujours au métronome,
"Le travail était extrêmement structuré, utilisant souvent le métronome pour « construire » une pulsion"
http://archives.lesoir.be/musique-derni ... 0LX5W.html

Eigelingen souligne l'importance qu'y attachait Chopin, Kirkpatrick insiste au contraire sur ses dangers quand les problèmes ne sont plus ceux de la métrique mais du rythme...

Débat certainement sans fin mais qui aura le mérite de me faire réfléchir sur l'usage que j'en fais...
"Vivi felice" Domenico Scarlatti,
BluePhoenix05
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Re: Intuitif vs. contre-intuitif

Message par BluePhoenix05 »

Presto a écrit :oui, je l'emploie vraiment beaucoup ce métronome, sinon j'accélère et travaille sans rigueur.
EN ce moment je travaille l'op.10 1. par deux mesures. au métronome
60, 70, 80, 90 et 100 dans une bonne dizaine de variantes, par exemple :
[...]
3. ensuite à 60 à la croche les exercices de Cortot, autant de fois que nécessaire pour que ça soit propre :
- les deux mesures avec le mouvement qu'il faut (ou que j'en ai capté à mon niveau pour l'instant)
[...]
- puis en doubles notes comme des gouttes d'eau qui tombe do-sol / sol-do / do-mi, pas plus qu'à 80, sinon ce n'est pas propre.[...]

Je monte tout ce petit monde de 60 à 100, à 100 et là j'ai fait mon job et on verra...

L'inconvénient c'est que c'est chronophage et que l'unité de compte est au moins la dizaine d'heures de travail par mesure... mais je progresse donc ...
Tu sembles vraiment "metronome-addict" selon l'expression de Moderato! :o Qu'appelles-tu "propre" ?

Je ne crois pas que les exercices de Cortot, bien que "sténographié" sous une forme rythmique, ne destinés à être répétés coûte que coûte de façon régulière..., l'accent de l'exercice n'est pas là.

Le travail avec doubles ou triples notes est bien pour mémoriser les positions et construire des repères, mais ensuite il faut travailler comment "partir" de chaque position le plus vite possible, pour atteindre la suivante, avec fluidité. (c'est aussi l'intérêt des exercices en rythmes pointés, mais quand ça ne permet par de trouver le bon geste, il faut chercher d'autres choses...)
De mon côté je n'ai pas (encore) trouvé de solution pour l'op.10 no.1 (même si j'ai quelques nouvelles idées sur les groupements, les appuis et les gestes, mais je ne suis pas encore prêt à reprendre l'étude).

Je ressortais hier soir d'une répétition pn+vlc.
Je ne connaissais pas bien le partie de piano, ni celle du soliste, d'où d'inmmanquables retards/accélérations de mon côté :roll:
Premier réflexe ? On sort le métronome ! Le morceau est à la blanche, mais c'est pas grave, c'est plus facile si le métronome est à la noire ! #-o ](*,)
Résultat, je dois essayer de me soumettre au diktat du "bip", en essayant de faire abstraction et d'écouter le moins possible le vlc., pour soi-disant "être ensemble".
De temps en temps, j'essaie d'éteindre l'appareil, ou demander à le mettre à la blanche - mais on le rallume ! :evil:

Ca a bousculé tous mes effort du début pour essayé d'écouter le vlc. J'aurais préféré mieux comprendre comment s'intégrait chaque partie dans le tout, et surtout écouter et comprendre les intentions musicales de l'autre. Car une partie des décalages provenait du fait que je ne parvenais pas à comprendre où tombaient les temps du vlc., et peut-être que je ne les marquais moi-même pas assez. Or pour pouvoir anticiper et marquer les "(down)beats", il faut écouter et faire entendre les "upbeats" qui sont tout aussi importants, voire plus. Tout ça se retrouve dans les mini-cresc., "l'onde rythmique", le phrasé. Ce sont donc des questions tout autant musicales que techniques. Ce n'est pas le métronome qui fait qu'on joue mieux ensemble. :(

Dur de travailler ainsi ensemble lorsqu'on n'a pas la même méthode.

C'est contre-intuitif, mais "jouer avec la pulsation", ou "introduire de la souplesse", ce n'est pas "faire intentionnellement des irrégularités à rattraper un peu plus loin", ou "décaler exprès de 1/1000 de seconde", ni "annihiler la pulsation".
Quelques traductions de poèmes chinois à ma sauce
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