"Anything goes": Piano Jazz

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quasimodo
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"Anything goes": Piano Jazz

Message par quasimodo »

Je ne puis résister à l'envie de vous parler du cru 2004 du trio de Brad Mehldau, toujours avec Larry Grenadier (b) et Jorge Rossy (d).

On pourrait regretter que ce disque ne recèle pas de grande surprise (telle que les repises des Beatles ou de Radiohead dans des livraisons précédentes), mais c'est la rançon de la durée pour toute formation. L'album est en tout cas d'excellente facture car le trio gagne en précision ce qu'il peut avoir perdu en fraicheur.

Cela s'ouvre sur les chapeaux de roues avec un Get Happy fort enjoué où le pianiste s'en donne à coeur joie dans une illustration parfaite de sa maîtrise du piano, porté par une dynamique irréprochable de ses deux compagnons. Brad Mehldau confirme une fois de plus qu'il est au dessus du lot parmi les pianistes de jazz, il lui manque certes encore l'expérience d'un Keith Jarrett, mais son jeu de piano est à part dans le monde du jazz. Chez Mehldau, la main gauche ne sert pas qu'à plaquer des accords savants mais participe souvent pleinement à la virtuosité vertigineuse de ses improvisations. C'est malheureusement extrêmement rare.

Mon morceau de prédilection dans cet album est un "The Nearness Of You" d'une grande sobriété, bâti sûr une ligne de contrebasse de Grenadier, inventive mais très rigoureuse, sur laquelle Mehldau surfe en nous gratifiant d'un jeu harmonique très "impressioniste" et d'une improvisation mélodique nonchalante et syncopée. Brad Mehldau est sûrement au jazz ce que Samson François était au classique : faussement brouillon avec un toucher parfois corrosif mais ô combien précis.

Un autre standard issu, lui du répertoire cubain, "Très Palabras" nous montre ce trio sous l'angle plutôt inhabituel de la musique latino. Mehldau se laisse ici aller à des envolées lyriques pleines de finesse.

Une mention spéciale enfin pour ce "Smile" parfaitement iconoclaste sur un tempo de valse rappelant un peu ce lui de "River Man" joué dans des albums précédents (on retrouve d'ailleurs le même motif rhytmique dans la plage titre de l'album "Anything Goes"). Le célebre standard co-composé par Charlie Chaplin est joué sur une obsédante pédale de Si majeur qui finit par se déconstruire totalement dans un final en modulations.

Je n'ai cité que quelques plages mais l'album est vraiment attachant dans son ensemble et nous fait souhaiter que le trio Mehldau-Grenadier-Rossy connaisse au moins la même longévité que celle du légendaire Jarrett-Peacock-DeJohnette. A mon humble avis, tout amoureux du piano devrait posséder leur série "Art of the Trio" dans sa discothèque, quand bien même il ne serait pas fan de jazz, car Mehldau est bien plus qu'un pianiste de jazz : c'est tout simplement un grand pianiste.
Modifié en dernier par quasimodo le mar. 14 déc., 2004 10:11, modifié 1 fois.
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La440
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Message par La440 »

Bonjour,

Je suis un grand fan de brad mehldau, j'ai tous ses albums, mais c'est bien celui là que j'aime le moins !!
C'est marrant, mais je le trouve moins profond, j'ai l'impression que ça a été fait à la va vite.
Peut etre que ça a vraiment été fait à la va vite, puisque la branche Jazz de Warner bros a fermé, brad devait finir son contrat, et faire un dernier album. Peut etre que ça coinçide !

Je préfère même son premier album "introducing" à celui là.
Je crois que si je devais faire un classement:
1) Places , alternance entre trio et solo, excellent, ça me fout la chair de poule tout ça..
2)Art of the trio vol 1 avec la reprise de Blackbird
3)Ou bien Elegiac Cycle, mais ça dépend des moments, ou Progression.

Je l'ai vu récemment à paris en solo, c'était excellent, mais un peu court (environ 1h15 je crois)

Je recommande aussi l'album fait sous le nom de sa femme "Close Enough for Love" avec une reprise de "Logical Song" de Supertramp, un truc hallucinant.
Et aussi une version piano chant de ma pièce préférée de brad (que je joue, eh eh , mais c'est du boulot de tout décrypter d'oreille), chanté en portugais "Resignation".

son dernier paru "Live in tokyo" est pas mal, mais je trouve le son plutot décevant. En ayant signé sur un petit label (Nonesuch) je me demande si il n'a pas du en même temps faire quelques concessions sur la production de ses albums. Nous verrons sur les prochains cd's, mais ils auraient pu faire un effort sur le son, surtout pour un enregistrement solo !! Si il y a quelque chose à entendre, c'est bien le piano, non?

Je suis ultra fan de Keith Jarrett (jai plus de 40 albums), encore plus que de Brad, et je crois que parmi les jeunes, il n'y a bien que Brad qui puisse prendre la "relève" d'un monstre comme KJ.

En général, les places des concerts de Keith Jarrett coutent plutot cher, mais ça vaut vraiment le coup, c'est inoubliable, même pour les non initiés.
En plus ses pianos sont toujours nickel ;-)

Longue vie à Keith et à Brad,

QJ.
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quasimodo
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Message par quasimodo »

J'ignorais que la charmante Fleurine était la femme de Brad Mehldau. Cela explique la complicité musicale de ce duo.

Quentin, votre critique plutôt défarovable à l'album "Anything goes" n'est pas la première que je rencontre. Je trouve cela un peu sévère (c'est d'ailleurs la raison pour laquelle je tenais à en faire un éloge), tout en reconnaissant que les albums précédents avaient probablement plus d'impact . Cela reste un très bon album de trio piano/contrebasse/batterie et je n'ai personnellement pas cette impression de quelque fait à-la-va-vite. D'ailleurs, en général, des musiciens de jazz de ce niveau ne passent jamais beaucoup de temps sur les enregistrements (une ou deux prises et c'est bouclé) ni les répétitions.

Je pense plutôt que Brad et ses deux compères souffrent du syndrôme bien connu des formations qui durent : les afficionados finissent toujours par dire "les premiers albums étaient meilleurs" mais je trouve cela très subjectif. Il est clair qu'avec la durée, la formation perd le bénéfice de la surprise mais elle gagne forcément en précision et en expérience commune. Enfin... des goûts et des couleurs...

Keith Jarrett est grand mais sa personalité me déplait assez à certains égards et je n'approuve pas certaines de ses prises de positions telle que le rejet catégorique des instruments électriques. Néanmoins il reste à ce jour le plus grand pianiste de jazz, probablement de tous les temps.

Sur quel modèle piano Brad Mehldau joue-t-il ? Voyage-t-il avec son propre piano ?
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La440
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Message par La440 »

Comme vous dites, tout ça est subjectif.
Y en qui aiment bien "A la queue leu leu", mais chacun son truc.

Brad est artiste Steinway, mais je pense qu'il joue sur ce qu'il peut.
Par exemple, lors des festivals (et non des festivaux, alors qu'on dit un cheval, des chevaux, un pianal, des pianaux) qui sont sponsorisés par Yamaha, c'est forcément un CFIIIS, ou au festival Jazz à Vienne, c'est le Bosendorfer de Dugas.
Je sais qu'il a un Baldwin chez lui.

En tout cas,Brad ne se balade pas avec son propre piano.
Même KJ ne le fait pas. Par contre il s'offre le luxe de faire venir 3 Steinway sur scène et de choisir le meilleur. Et je crois que sur certaines tournées, un accordeur le suit toujours, mais à confirmer.

C'est un véritable luxe d'avoir SON piano.
A ce jour, je ne connais (façon de parler) que Horowitz, Gould qui avaient LEURS piano, et... Véronique Sanson !! Dans un tout autre registre... Elle a un Bösendorfer impérial je crois.

Sinon certains artistes de variété ont un piano de scène dans leur matériel lorsqu'ils font des tournées, mais ce piano n'a rien de personnel pour eux je pense.
Alors qu'il y avait une vraie histoire entre Horowitz et son "vieux" Steinway.

Concernant le caractère éxécrable de KJ, ce n'est vraiment pas un truc qui m'énerve. De même que ses cris pendant qu'il joue.
Pour moi, ça fait partie de son jeu, intégralement. idem pour Glenn Gould qui chantonne sur le Clavier bien Tempéré.
Ca me fait marrer de savoir que KJ envoie valser les accordeurs, qu'il se plaint tout le temps, etc...
Si j'étais à la place de l'accordeur (un jour peut etre :-) ) je rirais peut etre moins, mais de là ou je suis, c'est marrant, ça fait des anecdotes à raconter aux collègues lors des stages en usine ou pendant les cocktails d'après concerts...

En tous cas, je suis content de parler un peu de jazz au milieu de tous ces "classiqueux" (désolé, mon p'tit franz...)

Bonne soirée,

QJ.
TeeTof
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Message par TeeTof »

Néanmoins il reste à ce jour le plus grand pianiste de jazz, probablement de tous les temps.
Non vraiment y a des choses que je ne peux pas laisser passer!! Comment peut-on écrire quelque chose comme ça, d'aussi peremptoire et absurde?... Qu'est-ce q'un grand pianiste de jazz? Qu'est-ce que LE plus grand? Qu'est-ce que le jazz??? Eventuellement que l'on évoque, parmi les plus grands pianistes de jazz (sans qu'il ne soit question de les "hierarchiser") Bud powell, Thelonious Monk, Bill Evans, Mc Coy Tyner, Horace Silver, Herbie Hankock, Wynton Kelly, Oscar Peterson et de nombreux autres... Mais Keith Jarret?!? Velu, il l'est. Jazzeux à ses heures. Représentatif du piano jazz certainement pas, ni du jazz actuel, non plus bien sûr que celui du bebop hardbop free ou quelqu'autre mouvement historique. De ces jazz il en a (eu) l'esprit, l'inspiration d'un style, en retire beaucoup de choses intéressantes... mais je ne vois vraiment pas en quoi il pourrait être le plus grand pianiste de jazz!! Par sa technique? Son caractère de m...? Non, vraiment, je vois pas...

Le jazz, impalpable, est un des trucs les plus difficiles à définir, des bouquins n'y suffisent pas, ce n'est donc pas le but d'un petit post comme celui-ci... Mais quand-même le jazz c'est une histoire, une philosophie, des trippes (beaucoup!), des tentatives antagonistes, des impasses ou des explosions musicales, des libertés, des douleurs... Ecoutez Bud Powell. Qu'en pensez-vous? Techniquement... hésitant, obtu, imprévisible, faux, risqué? Certes. C'est pas du KJ. Mais écoutez. Ce swing, cette rage, ces harmonies, ces fausses notes, cette folie, ces mélodies, cette douleur, cette prise de risque, cette intégrité. A mon sens Bud Powell est infiniment plus grand comme pianiste de Jazz.

C'était juste une petite réaction urticaire, mais je n'ai pas l'intention non plus d'écrire un roman sur le sujet (sauf s'il déclenche un raz de marrée...). A part ça j'adore Brad Meldhau, c'est un pianiste techniquement très avancé, avec un toucher unique et une très grande sensibilité, avec un sens aigü de la mélodie (rarissime en jazz de nos jours!) dans ses improvisation et avec beaucoup de swing. Waouh. Peut-être un poil trop lyrique quand-même?...
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La440
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Message par La440 »

Décidement, il faut n'avoir rien écouté de KJ pour dire de telles inepties...
Eh mec, y a pas que le Köln concert.

QJ.
alain
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Message par alain »

Bonsoir,

Ah! quand même Monk...

Alain
TeeTof
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Message par TeeTof »

Eh mec, y a pas que le Köln concert.
Ah je l'attendais celle-là! Heureusement qu'il n'ya pas que le Köln concert, parce que là non seulement il ne serait pas "le meilleur pianiste de jazz de tous les temps" mais plutôt le plus mauvais...
il faut n'avoir rien écouté de KJ pour dire de telles inepties...
Qu'est-ce qui est une ineptie?? Tu peux développer? De trouver que KJ n'est pas le meilleur de tous les temps? De rappeler qu'il existe ou a existé d'autres pianiste de jazz? Qu'il n'y a pas un jazz? De parler de Bud Powell (ou des autres) qui diffèrent tant de KJ par leur approche, leur histoire, leur sensibilité, leur urgence? On est en droit d'aimer KJ, je pense qu'on est aussi en droit d'élargir le débat sur le piano jazz? A moins que sur un forum de piano classique ceci ne soit pas de rigueur... dommage.

Ah! quand même Monk...
Certes, j'en suis un fervent adorateur... Monk comme compositeur, comme pianiste aussi, avec son sens du silence, ses développements harmoniques obtus, son "grain" (à tous les sens du terme). Maintenant purement en tant que pianiste, sa technique peut paraître limitée par rapport à de nombreux autres, mais c'est aussi ces "lacunes" qui lui ont permis d'élaborer son style si unique... La musique de Monk c'est avant tout la mélodie (si si!) et le sens du temps. C'est bancale et pourtant ça swingue instantanément, c'est à côté et pourtant c'est toujours dedans...
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Zerom
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Message par Zerom »

C'est vrai que dire "untel est le plus grand pianiste de jazz" ne mène pas à grand chose. Par contre je ne vois pas pourquoi Keith Jarret n'aurait pas sa place à coté des "Bud powell, Thelonious Monk, Bill Evans, Mc Coy Tyner, Horace Silver, Herbie Hankock, Wynton Kelly, Oscar Peterson".
Ce swing, cette rage, ces harmonies, ces fausses notes, cette folie, ces mélodies, cette douleur, cette prise de risque, cette intégrité
Cette phrase, à mon sens, s'applique complètement à Jarret.
(hum, en réflechissant bien, elle s'applique aussi à Paul Bley... et tiens, aussi à Cecil Taylor, et puis à Horace Parlan, à Lennie Tristano, à Prokovief, Memphis Slim, à moi-même et à Duke Ellington)
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Zerom
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Message par Zerom »

Au fait, le Köln Concert c'est super bien.
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La440
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Message par La440 »

Voilà, Zerom a répondu à ma place.
Je n'avais pas le temps de développer beaucoup au moment de ma réponse.
L'ineptie n'est pas de ne pas aimer KJ, mais de ne pas respecter son oeuvre, et de ne pas le considérer comme un jazzman, ni comme un musicien (mais plutot comme un velu (???), jazzeux à ses heures).
J'hallucine là, de lire des trucs comme ça.
D'ailleurs, ce n'est pas moi qui ai dit que c'était le plus grand jazzman de tous les temps.

Le Köln Concert, c'est super bien, mais ce n'est pas du jazz, je suis d'accord.
De même que pour moi, Pink Floyd, c'est super bien, mais ça n'est pas du rock, ça dépasse tout ça.

Mais tout est une question de gouts et d'affinités.
Y en a bien qui écoutent André Rieu.

De la même façon que Teetof, j'ai donné mon avis. Si il ne lui plaît pas tant pis.
A l'avenir je me contenterai de dire ce que je pense sur les questions uniquement techniques.
Je pense que ça vaudrait mieux, puisque visiblement certains ont des réactions urticaires quand d'autres prennent la parole.

Tant pis.

QJ.

QJ.
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Malik
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Keith Jarrett

Message par Malik »

Teetof a raison on ne peut pas dire d'un pianiste qu'il est le meilleur... sauf Keith Jarrett !
Je sais que c'est un peu enfantin comme jugement :oops: mais je l'assume également. KJ sait tout créer sur un clavier et sa technique est sans failles.
Le concert de Cologne est le plus connu et est souvent snobé dans le milieu (jazz) pour cette raison (d'être accessible à des non initiés) mais cela reste un sommet musical et a été ma porte d'entrée à la découverte du jazz. Ce qui est populaire n'est pas forcément mauvais.

J'adore également Brad Mehldau mais je ne connais pas ses derniers enregistrements. Ceci dit, il me semble plus proche musicalement de KJ que de Chick Corea ou Herbie Hankock.
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La440
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Message par La440 »

Hello Malik,

C'est chouette de pouvoir te lire.
C'est vrai: tu es le créateur de ce lieu de discussion et tu n'interviens jamais.

Je suis content de voir que je ne suis pas le seul à être profondément touché et peut être un peu "habité" par la musique de KJ.
On a le droit de ne pas apprécier du tout, mais ça n'empêche pas de respecter les goûts des autres (excellent film d'ailleurs, le Gout des autres :lol: )

Je crois que KJ est un des derniers descendants de cette génération de stars du piano-jazz (comme Herbie Hancock, ou Oscar Peterson), et si il est encore là, tout comme les deux noms que j'ai cités, ce n'est pas par hasard.

Beaucoup de jazzmen ont eu une fin plutôt désastreuse ou tragique, entre drogue et misère, mais eux ont échappé à tout ça, et c'est le dernier témoignage de cette énorme vague de monstres du jazz.

QJ.
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quasimodo
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Message par quasimodo »

J'ai découvert récemment "The Melody At Night, With You" de Keith Jarrett, album dédicacé à sa femme.

C'est SUBLIME, je pense que c'est un disque que même les irréductibles du classique doivent écouter.
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La440
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Message par La440 »

Ouais ce disque est bien, très très intime et doux.
Ca ne met pas forcément la pêche le matin, je ne l'écoute pas souvent, mais c'est un bon disque.

Ce disque a été enregistré chez lui après plusieurs mois passés sans jouer du tout (KJ était atteint du syndrome de fatigue chronique, il était incapable de jouer ou de faire quoi que ce soit d'autre).
Ca a été une sorte de résurrection pour lui après ça.

Il a repris la scène et les enregistrements après cet album lorsqu'il a retrouvé son énergie.

Le premier album live sorti après The Melody (et donc après sa maladie) est Whisper Not, qui est très bien aussi.

QJ.
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quasimodo
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Message par quasimodo »

C'est en relisant aujourd'hui ce sujet de discussion que je vois la réponse de teetof sur mon "plus grand pianiste de jazz" de tous les temps. Bon, OK c'est plus ou moins subjectif. Mais dans l'esprit de ma phrase c'est le "pianiste" qui est plus important que "de jazz". C'est clair qu'en terme de style, d'ambiance musicale etc. le jazz se caractérise par la plus grande diversité donc on peut effectivement préférer écouter du Hancock à du Jarrett, du Bud Powell à du Monk etc...

En revanche lorsqu'il s'agit de technique pure, il n'y a finalement pas tant de pianistes de jazz qui soient vraiment exceptionnels. Les noms qui me viennent en tête sont Erroll Garner (d'autant plus fort qu'il ne savait pas lire une note et n'a jamais eu de prof), Bill Evans (qui parait-il jouait du classique de manière époustouflante, je ne l'ai malheureusement jamais entendu), Keith Jarrett, Ahmad Jamal et... Brad Mehldau. Peut-être aussi Kenny Kirkland mais malheureusement son décès précoce ne nous a pas permis d'apprécier toute l'étendue de ses qualités.

Oscar Peterson pourrait aussi faire partie du lot, son jeu harmonique est souvent époustouflant (je pense par exemple à une interpretation de "Smile" dans l'album The Great Connction"), son doigté est très articulé et sa vélocité impressionante, mais je trouve qu'il a une tendance à stéréotyper ses improvisations et sa musique est particulièrement "sage". Herbie Hancock a aussi d'excellentes qualités techniques, en particulier un toucher, un contrôle sonore hors normes mais je trouve son jeu "en dedans", pas assez flamboyant à mon goût.

Quelques autres "techniciens" parmi les pianistes de jazz contemporains : Gonzalo Rubalcaba, Gerri Allen, Michel Camilo.

Mais clairement, les 5 que j'ai cités en premier lieu me semble sortir du lot, alliant une très forte technique avec beaucoup de musicalité, d'audace et d'inspiration.
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La440
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Message par La440 »

Je suis d'accord sur Peterson, dès fois c'est stéréotypé, et un peu toujours la même chose...
Mais soyons indulgents avec ce pauvre Oscar qui a été victime d'une attaque cérébrale, qui paralyse sa main gauche (c'est pourquoi il ne joue plus qu'en quartet piano guitare basse batterie, pour soulager la partie d'accompagnement).

J'ai entendu la même chose que vous sur Bill Evans, à savoir qu'il jouait très bien du classique. Il a même hésité entre la carrière Jazz et la carrière de concertiste classique !
J'avais un très bon reportage sur lui sur K7vidéo, malheureusement je l'ai effacée par erreur. Arrrgl...

Concernant Herbie Hancock, franchement j'adore!
Il a su traverser toutes les époques en adaptant sa musique, sans pour autant dénaturer son jeu.
Ce type là a un Groove que personne d'autre n'a.
Même les gars de la nouvelle génération un peu électro (comme Laurent deWilde) ne lui arrivent pas à la cheville, ils essaient de le copier simplement.
Il a bidouillé les synthés dans les 70, et ce sont dès albums que je trouve excellents (du style The Headhunters ou Manchild).
Ce type là, c'est le contraire de KJ: toujours dans la modernité, alors que Keith est resté dans la tradition du trio la plus pure.

Je sais pas pourquoi, mais j'aime ces 2 approches du jazz, alors qu'elles sont complètement différentes.

Dans une moindre mesure, on peut citer Petrucciani aussi.. Je l'ai vu en concert, c'était bien (en solo) mais tout ce qu'il a fait en trio et autres, je n'accroche pas du tout.
Et il avait la facheuse tendance de massacrer ses pianos.

QJ.
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Zerom
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Message par Zerom »

En parlant de technique chez les pianistes de jazz, vous oubliez Art Tatum qui a scotché bon nombre de musiciens, dont Horowitz, par sa brillance, sa fluidité et son sens de l'improvisation modernissime à l'époque.
Les pianistes quittaient la scène où ils étaient en train de jouer lorsqu'ils le voyaient entrer dans le club pour boire un verre. Une anecdote connue à son sujet raconte qu'il s'est un jour pointé chez son prof en lui demandant comment faire pour executer un passage d'un morceau qu'il avait entendu à la radio et qu'il jouait presque parfaitement. Le prof ne sut pas quoi répondre, le morceau était un 4 mains.

Pour ce qui est de Peterson, je vous trouve bien sévères. Plutot que de qualifier son jeu de stéréotypé, je dirais qu'il fait partie des rares pianistes reconnaissables en moins de trois notes, et qu'il a atteint le niveau ultime en matière de swing pur (je le mets à ce titre dans le même sac que Wynton Kelly).
Quand à sa technique, essayez de phraser comme lui, en block-chords, à 260 à la noire :shock:

Par contre, je n'ai jamais eu l'impression que Bill Evans était un pianiste d'une technique exceptionnelle. Comme Monk, il avait sa propre façon de jouer, mais tous les chorus que j'ai relevés de lui sont tout à fait jouables. Ce n'est pas le cas des 2 autres monstres dont je parle plus haut.
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quasimodo
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Message par quasimodo »

AH, oui, Art Tatum, bien sûr. En fait j'hésitais à le citer car, honnêtement j'ai peu entendu de ses enregistrements. Je ne voulais pas parler par ouï-dire, mais sa réputation de virtuosité est légendaire.

Oscar Peterson est clairement un excellent technicien, je ne disais pas le contraire. Mais sa musique ne me parle pas autant que celle des autres que j'ai cités, un peu trop sage à mon goût. Pour ainsi dire, il ne me surprend pas assez "jazzistiquement" parlant. J'ignorais qu'il avait eu un AVC qui l'avait handicapé, c'est bien triste.

Bill Evans : il a été prolifique, il est clair qu'il n'a pas réalisé que des coups d'éclat, mais je trouve qu'il a une limpidité de jeu exceptionnelle qu'on ne rencontre que très rarement dans le jazz. Keith Jarrett et Brad Mehldau sont d'ailleurs à mon sens les héritiers directs d'Evans. La "jouabilité" de ses chorus n'est pas forcément un critère pertinent. L'idée c'est plutôt de le jouer exactement comme il le fait, avec le même contrôle, la même netteté et la même précision, écoutez un peu ses ornementations, trilles et autres : c'est d'une parfaite netteté sans jamais être monotone... Jouer des choses simples tout en finesse et musicalité est aussi difficile (voire plus) que des triples croches vertigineuses, qui souvent chez les jazzeux (et pas seulement les pianistes) les font tomber dans les "stéréotypes" que Quentin et moi-même reprochons un peu à Peterson.

Monk appartient à un tout autre univers musical et il ne faut surtout pas écouter sa technique, ce n'est pas le propos de sa musique.

Un pianiste contemporain qui est relativement mésestimé est Lyle Mays, qui souffre un peu d'être à l'ombre du génie guitaristique et musical de Pat Metheny. Lyle Mays n'a visiblement pas trouvé sa propre voie/voix dans le jazz, mais c'est un pianiste très très respectable, au moins sur le plan technique (mais pas seulement, à mon sens).
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quasimodo
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Message par quasimodo »

La critique est aisée bien sûr...
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