musique vs théorie

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davsad
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Re: musique vs théorie

Message par davsad »

Au fait, si tu en as sous la main, je serai bien curieux d'entendre une de tes compositions, aussi atonales qu'elles soient :mrgreen: Tes compositions d'ado aussi sont atonales ?
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Okay
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Re: musique vs théorie

Message par Okay »

Jusqu'à 15 ans j'ai écrit des choses d'inspiration post-romantique (comment y couper ?), puis j'ai été embarqué par des compositeurs comme le dernier Scriabine, Schostakovitch, Messiean, Dutilleux ...
Il n'y a pas grand chose que je souhaite partager sur le forum, je n'assume peut-etre qu'une ou deux petites pièces de deux ou trois pages, écrites à 18 ans. Je n'ai pas ça sous la main mais un jour je posterai quelque chose.

Oui je suis d'accord avec toi pour le travail. Il faut noircir des pages et des pages, écrire des petites choses bien ficelées sans spécialement soigner le détail mais en prêtant une attention particulière à leur équilibre (je ne suis jamais passé par là, d'où mes grosses maladresses qui me sautent désormais aux oreilles). Exactement comme un dessinateur qui empile des croquis rapides. Dans un bon croquis on peut sentir le mouvement des personnages et comprendre toute la scène même s'ils n'ont pas de visage, et qu'il n'y a aucun détail fini. Voilà l'idée.

Je ne résiste pas à l'envie de solliciter Einstein pour rappeler Bach à l'ordre : "le génie c'est 99% de transpiration et 1% d'inspiration". Plus facile à dire quand on a le 1% :-)

EDIT : La citation est en fait d'Edison (merci Lee)
Modifié en dernier par Okay le lun. 21 juil., 2014 10:29, modifié 1 fois.
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JPS1827
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Re: musique vs théorie

Message par JPS1827 »

davsad a écrit : "J'ai beaucoup travaillé. Quiconque travaillera comme moi pourra faire ce que j'ai fait."
J.S.Bach
Souvent cité, mais ce n'est malheureusement pas vrai !!!!

Sinon, il en va de la composition comme de l'écriture. Beaucoup ont des idées très intéressantes à exprimer, mais peu de personnes qui se mettent à écrire ont "le sens" de ce qui peut s'écrire ou pas, et, hors pour ceux qui sont vraiment doués, un apprentissage de la forme reste nécessaire, pas du tout pour "coller" à tel ou tel impératif théorique ou historique, mais simplement pour que ce soit audible (ou lisible, dans le cas de l'écriture). Les nécessités liées à la forme se retrouvent dans toutes les formes d'art et dans toutes les cultures et semblent liées à la structure de l'esprit humain. Bon, il y a des gens beaucoup plus savants que moi sur ce sujet…
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Re: musique vs théorie

Message par davsad »

Okay a écrit : Il n'y a pas grand chose que je souhaite partager sur le forum, je n'assume peut-etre qu'une ou deux petites pièces de deux ou trois pages, écrites à 18 ans. Je n'ai pas ça sous la main mais un jour je posterai quelque chose.
Ok n'hésite pas ! Tu peux m'envoyer ca par MP si tu as honte, je ne le dirai à personne :mrgreen:

Je suis d'accord avec toi JPS, ces principes sur la forme et l'équilibre sont finalement un dénominateur commun à l'art en général, et puis pour ce qui est des citations d'Einstein et de Bach, on peut les assumer fausses en effet, c'est de la propagande 8)
Modifié en dernier par davsad le mer. 13 janv., 2016 23:57, modifié 1 fois.
davsad
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Re: musique vs théorie

Message par davsad »

Au fait j'y pense (je profite de l'absence de Nox pour pas me faire taper dessus), s'il y a bien un compositeur qui semble moins attaché à toutes ces histoires de formes et d'équilibre ce serait Liszt non ? (je dis cela sans remettre en cause son génie bien évidemment...)
Je pense par exemple à ses rhapsodies hongroises, mais à pleins d'autres de ses œuvres également.
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Lee
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Re: musique vs théorie

Message par Lee »

davsad a écrit :et puis pour ce qui est des citations d'Einstein et de Bach, on peut les assumer fausses en effet, c'est de la propagande
Okay a écrit :Je ne résiste pas à l'envie de solliciter Einstein pour rappeler Bach à l'ordre : "le génie c'est 99% de transpiration et 1% d'inspiration". Plus facile à dire quand on a le 1%
C'était Edison qui a dit ça, pas Einstein. En l’occurrence, il a bien bossé quand même. :wink:
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Okay
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Re: musique vs théorie

Message par Okay »

Ah oui c'est Edison, merci Lee.

Même si nox n'est pas là, je vais devoir m'insurger pour lui :twisted: Je pense au contraire que Liszt est un maître absolu de la forme. Il est encore plus difficile que ça tienne debout et de faire sentir un équilibre à l'auditeur lorsque la construction est libre ou de style improvisé. Il y a chez lui beaucoup d'instinct et souvent de science qui lui permettent de cacher les coutures et raccords avec plus d'élégance que d'autres.
Encore une fois, les questions de forme ne se limitent pas à la construction en différentes parties d'une pièce, très loin de là.
Et même de ce point de vue, je ne pense pas d'emblée à une oeuvre de Liszt qui soit décousue. Tu penses à une rhapsodie en particulier ?
La simple construction d'un thème répond à des questions de forme, autant dans son contour que son déploiement rythmique. En fait, je crois qu'on est tellement habitué à écouter et jouer de la musique bien écrite qu'on n'imagine rarement qu'il puisse en être autrement ...
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Re: musique vs théorie

Message par davsad »

Je pense par exemple à la 6e rhapsodie, j'ai souvent entendu des gens la critiquer en disant qu'elle manque de construction, de sens, ou qu'elle est trop improvisée...moi ça me gêne pas je sais bien que c'est là le style de Liszt et c'est une de mes rhapsodies préférées..
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Okay
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Re: musique vs théorie

Message par Okay »

Haha j'attendais la 6e rhapsodie car j'ai déjà lu la même critique. C'est aussi l'une de mes préférées, et il me semble que le public ne s'y trompe pas non plus. On pourrait penser que peu importe la forme, la musique emporte tout, mais regardons de plus près en ne restant qu'à la surface, c'est à dire en ne creusant pas plus loin que la construction :

Nous avons 4 parties très clairement délimitées : une ouverture majestueuse, une intermède vif et pétillant, un grand récitatif pathétique, et un brillant et irresistible final en guise de friska. Cette description succinte du plan rappelle déjà celui d'une sonate ou symphonie en 4 mouvements (1er mouvement, scherzo, mouvement lent, final).
Ensuite, l'enchainement des tonalités est parfaitement naturel. On démarre en ré b M, puis on passe en ut# M (tiens tiens, revoilà les couleurs, on dirait que Liszt aussi estime que ré b et ut# méritent d'être distinguées !), la partie lente adopte le relatif mineur, et l'heureux final s'éclaire en adoptant le même ton en mode majeur.
Au delà de ces raccords de tons, on pourrait croire que les 4 parties sont strictement indépendantes en raison de leurs caractères très individualisés. Il n'en est rien. Le thème piqué de la friska n'est qu'une variation calquée sur le récitatif. Sans les petites notes, le thème lent est fa-sol-la- si b-si b-do-ré b-si b-do. Le thème de la friska est fa-sol-la-si b-do-si b-la-sib do (seul le milieu diffère un peu). Liszt n'a pas été le chercher très loin. De la même manière, l'ouverture et l'intermède sont reliés par des motifs communs. Le plus frappant est le contretemps (accords de tonique frappés sur les 2e et 4e croches, début du thème de l'ouverture, fin du thème de l'intermède, qui répond rythmiquement en miroir), on a aussi les mêmes rythmes "2 brèves/une longue" (même structure binaire très marquée, en dactyles), et enfin un motif descendant avec exactement les mêmes notes (ré b-do b-si b dans l'ouverture, do#-si-la # dans l'intermède, avec exactement les mêmes dixièmes à la main gauche). Je n'ai pas vraiment creusé partition à la main, mais voilà ce qui pour moi saute aux yeux, donc d'autres éléments de structure globale ont du certainement m'échapper.
Voilà pour la construction en gros. Si on détaillait chaque partie, la construction et le développement des thèmes, on pourrait montrer à quel point l'architecture de ce morceau est sans faille, sans la moindre maladresse, tout en délivrant une impression fantastiquement improvisée ...
davsad
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Re: musique vs théorie

Message par davsad »

Hehe, bien tenté, tu m'as en partie convaincu mais je reste tout de même sur ma position concernant certains points.

J'aime bien cette idée de pièce en 4 mouvements, c'est vrai qu'on pourrait presque y voir une sonate. Tout de même dans une symphonie c'est généralement le 2e mouvement qui est lent non ?
De manière général, je trouve tout ce que tu dis intéressant et je suis plutôt d'accord, mais disons que je ne remettais pas en question le fait que Liszt maitrisait tout ce qui concerne les tonalités ou les modulations.

Je vais te donner deux exemples de ce que je voulais dire avec ma remarque.

D'abord, d'un point de vue extérieur à l’œuvre, on voit que cette structure en 4 parties n'est pas propres à ses rapsodies, loin de là. La seconde par exemple n'a que 3 parties, d'autres en ont 2, etc. Ca n'a rien à voir par exemple avec les nocturnes de Chopin qui toutes ont une structure voisine, avec pour schématiser une mélodie, une seconde partie dans la tonalité relative, puis on revient à la mélodie, et tout cela avec un nombre de mesures identique pour chaque parties, ou double selon l'effet recherché.

Ensuite à l'intérieur même de l’œuvre, tu dis ne pas vouloir creuser plus que la construction, mais c'est justement en creusant plus qu'on peut se rendre compte de ce que je dis. La troisième partie semble extrêmement improvisée par exemple, on compte 7 mesures pour revenir au thème F F SO L Sb ce qui ne pourrait jamais arriver chez Chopin (où les parties sont généralement constituées d'un nombre de mesures puissance de 2). Et puis cette écriture avec pleins de points d'orgues, ces groupes de petites notes à n'en plus finir qui durent bien plus qu'une mesure, tout cela montre pour moi une certaine liberté vis à vis de la forme, qui s'oppose encore une fois à l'extrême minutie que Chopin avait à vouloir un équilibre parfait en ce qui concerne le rythme, le nombre de mesures, finir le morceau dans la même tonalité (ce qui n'est manifestement pas le cas de cette 6e rhapsodie ).

Bref tout cela non pas pour dire que Liszt était un mauvais compositeur mais qu'au contraire il avait un style bien à lui, qu'on peut apprécier ou non, il adore improviser, se laisser aller à la musique, parfois il lance un thème au début d'une pièce de 10 minutes et il n'y revient plus, d'autres fois il s'acharne sur une mélodie à tel point qu'on pourrait presque le qualifier de précurseur du courant répétitif :P (je pense au final de cette 6e rhapsodie par exemple..).
nox
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Re: musique vs théorie

Message par nox »

Attention quand même : on parle de rhapsodies. Ce n'est pas de la forme classique construite, et ça n'obéit à aucune règle à ma connaissance. C'est de la musique d'inspiration tzigane, improvisée, Liszt est je crois le premier à avoir noté ces mélodies populaires et à les avoir introduites dans la musique "savante".
On ne peut pas comparer ça avec des constructions comme les sonates ou les concertos.

C'est justement tout le mérite de Liszt je trouve d'avoir su préserver la liberté de ces mélodies tout en les immergeant dans la musique écrite et "réfléchie".
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Okay
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Re: musique vs théorie

Message par Okay »

Davsad, je suis globalement d'accord avec tout ce que tu dis. En fait, je n'ai jamais voulu dire que sous cette rhapsodie ou d'autres oeuvres apparemment libres se cachaient une belle forme classique bien rigoureuse. Pas du tout en fait. Je reprécise que par forme, je n'entends pas un code strict correspondant à des règles établies, mais à un sentiment d'équilibre pour l'auditeur peu importe les moyens utilisés (mais qui demande toujours des moyens formels).
Mon analogie avec les grandes sonates/symphonies ne se veut pas un calque parfait, ne serait-ce que parce que le premier mouvement serait juste une ouverture dans cette oeuvre. Mais c'est néanmoins le plan d'ensemble suivi et sûrement pas au hasard. Pour ce qui l'ordre mouvement lent et scherzo, il n'y a aucune règle. Beethoven lui même les intervertit fréquemment, en choisissant la meilleure formule dans un souci d'équilibre global de ses oeuvres. D'ailleurs, c'est un plan dont Chopin s'éloigne considérablement dans la plupart de ses propres formes libres (Ballades, grandes Polonaises etc). Ca ne l'empêche pas de créer ses propres formes, d'où il tire de nouveaux équilibres non moins "parfaits".
Retirer la courte 2e partie de la 6e rhapsodie la rendrait complètement bancale, vu la longeur du récitatif qui suit et des répétitions du finale. La 2e rhapsodie n'a que 3 partie parce que son Lassan constitue un pendant équilibré à la dernière partie, et qu'un intermède central plus court fait office de transition respectant ces proportitions.
Peu importe le nombre de parties en fait, il y a cohérence entre l'intérieur des parties, leurs durées respectives, leur echainement, etc. On s'en fiche des règles et des formes établies, j'insiste là dessus. Ce qui compte et peu importe les moyens, c'est que l'auditeur n'ait jamais le mal de mer. Grâce à l'équilibre obtenu, il doit savoir où on en est sans chercher à comprendre, et il peut s'abandonner à l'écoute. C'est ça le signe d'une composition réussie sur le plan formel (à nouveau peu importe les moyens formels, qui sont très variés). Le plan sonate/symphonie offre une combinaison équilibrée prête à l'emploi, mais c'en est une parmi d'autres.

Au sujet de la construction des thèmes et phrases, Chopin et l'essentiel de la musique occidentale parvient à cet équilibre en effet en utilisant ce qui ressemble à des constructions "en puissances de 2" comme tu dis. On trouve très souvent un énoncé en 4 mesures, qui est répété de manière plus ou moins changée sur 4 autres mesures. Puis les développements arrivent, suivant les mêmes genres de proportions.
Une partie du bouquin de Schönberg présente néanmoins des exceptions très intéressantes à ces constructions car il les tire volontairement de là où on ne les attend pas : des thèmes binaires de 7 ou 9 mesures chez Mozart et Haydn. Il explique comment ces maîtres parviennent à préserver le naturel bien qu'ils ajoutent ou retirent dans ces thèmes une mesure du compte attendu par l'oreille (qui serait parfait avec 8 mesures). Mais il déconseille fortement ces techniques très difficiles à maîtriser aux apprentis compositeurs, car c'est déjà bien compliqué d'écrire une belle phrase bien équilibrée sur 8 mesures.
davsad
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Re: musique vs théorie

Message par davsad »

Effectivement je suis d'accord on a pas le mal de mer, Liszt est parvenu a trouver un équilibre dans ces formes très libres et chaque partie à sa place.
Finalement la phrase de Nox résume le mieux ce que l'on essaye tous les deux de dire je pense :
nox a écrit :
C'est justement tout le mérite de Liszt je trouve d'avoir su préserver la liberté de ces mélodies tout en les immergeant dans la musique écrite et "réfléchie".

Néanmoins, tu avais dis précédemment que l'auditeur ne s'y trompe pas, qu'il reconnait immédiatement au premier écoute si la pièce est "équilibrée" ou non, mais je suis pas tout à fait d'accord, je pense que même un fin connaisseur aura besoin de plusieurs écoutes et d'un certains temps de maturation lorsqu'il s'agit d'un nouveau style, de nouvelles formes avant de reconnaître qu'effectivement il y a une structure sous-jacente cohérente ou non. Ca me rappelle un peu ce que tu disais avec Proust sur la Recherche du Temps Perdu. En musique par exemple j'ai des amis fan de musiques classique qui trouvent que la musique de Glass ou de Reich n'est pas sérieuse, et j'étais moi même dérouté lorsque j'ai écouté pour la première fois une musique aussi longue que "music for 18 musicians" de Steve Reich par exemple, qui n'épouse aucune des formes classiques que l'on connait. Pourtant maintenant je pense que cette œuvre est un des grands chefs-d’œuvre du courant minimaliste où chaque partie dure exactement le temps qu'il faut et s'enchaine sur la suivante avec une parfaite harmonie. Bref, Reich a pour moi pointé du doigt une nouvelle forme et il nous faut du temps pour l'assimiler..
Modifié en dernier par davsad le jeu. 14 janv., 2016 0:00, modifié 1 fois.
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Okay
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Re: musique vs théorie

Message par Okay »

davsad a écrit : Néanmoins, tu avais dis précédemment que l'auditeur ne s'y trompe pas, qu'il reconnait immédiatement au premier écoute si la pièce est "équilibrée" ou non, mais je suis pas tout à fait d'accord, je pense que même un fin connaisseur aura besoin de plusieurs écoutes et d'un certains temps de maturation lorsqu'il s'agit d'un nouveau style, de nouvelles formes avant de reconnaître qu'effectivement il y a une structure sous-jacente cohérente ou non.
Là dessus l'histoire te donne mille fois raison. Il y a plein d'exemples de réactions d'incompréhension d'oeuvres qui nous semblent aujourd'hui très équilibrées. On ne se pose même plus la question là où les auditeurs passés ont été parfois très critiques.

Mon propos était plus réducteur, et j'avais en tête des choses plus banales que le cas des compositeurs qui bousculent les choses et ne sont vraiment compris qu'avec du temps. De toute façon, avant de bousculer les formes établies, un compositeur doit les avoir digérées. Voilà le genre de problèmes que j'évoque :

Prenons le thème en 4 mesures au début de la sonate facile de Mozart (au moins tout le monde à le bon rythme en tête) :
do mi sol si do-ré do , la sol do sol fa(tr) mi-fa mi .
Tronquons la 2e partie de la phrase d'une manière vraissemblable harmoniquement et mélodiquement, c'est à dire en supprimant la 3e mesure :
do mi sol si do-ré do , sol fa(tr) mi-fa mi .
Cet exemple n'est pas si caricatural, il en a l'air juste parce que tout pianiste a déjà entendu et/ou joué la sonate facile. Essayez de jouer le thème tronqué au piano en rajoutant la main gauche, avec expression et conviction. C'est plutôt crédible je trouve, le thème s'ouvre bien et se termine de façon intelligible.
Nénamoins, l'auditeur qui entend la 2e version va avoir le mal de mer ici, il va être bousculé par ce thème de 3 mesures qui n'a pas sa symétrie naturelle, avec une 2e partie de thème qui va sembler précipitée, bancale.
Le contrepoint est celui de Mozart, la mélodie a des intervalles bien équilibrés. Donc il n'y a pas de maladresse autre que formelle ici. Si la sonate commençait comme ça et poursuivait normalement avec les gammes en doubles croches (la si do ré, etc), on serait dérangé par l'arrivée de ces gammes, après ce thème qui commençait bien et s'est trop vite refermé sur lui-même sans suffisament s'étendre dans le temps et l'espace.
On se rend compte que la 3e mesure est indispensable. On pourrait même inventer une autre 3e mesure que celle de Mozart (qui serait sûrement moins réussie mélodiquement mais tout à fait "correcte"), et le thème serait à nouveau bien proportionné.

Ce principe se retrouve à toutes les échelles de temps d'une composition : durée des thèmes, des parties, contrastes, transitions, etc.
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Re: musique vs théorie

Message par davsad »

Oui j'aime bien ton exemple, je serai curieux d'ailleurs que tu m'envoies ce thème en 7 mesures de Mozart dont tu parlais dans ton précédent message, si tu te souviens où il se trouve !
Jean-Luc
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Re: musique vs théorie

Message par Jean-Luc »

Okay, je pense que tu parles de la carrure. C'est souvent 4 temps ou 8 temps. Si tu supprimes une mesure, tu brises la carrure et c'est bancal comme tu dis. Dans quasiment toute la musique occidentale, la carrure est la base de tous les morceaux. Même dans la musique écrite en 6/8, prends n'importe lequel, tu verras que c'est écrit en 1x4 temps ou 2x4 temps (sans compter les levées bien sûr). Dans la musique contemporaine, c'est déjà moins vrai par contre.
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Okay
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Re: musique vs théorie

Message par Okay »

Oui c'est exactement de la carrure dont il est question dans cet exemple.

Davsad, je vais essayer de retrouver ces thèmes avec 7 ou 9 mesures. De mémoire, le compositeur utilisait des répétitions, ce qui ne détruisait pas vraiment la carrure justement.
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Re: musique vs théorie

Message par davsad »

Merci Okay, Jean-Luc qu'entends-tu exactement par 2x4 temps, tu veux dire 2 groupes de 4 mesures ?
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Re: musique vs théorie

Message par Okay »

Je pense que Jean-Luc (qui me reprendra sinon) fait allusion à ce que les anglo-saxons appellent une "period". Je ne sais pas si le terme "période" est aussi utilisé en français.
Je renvoie à nouveau vers le super bouquin de Schönberg pour étudier le concept sous toutes ses coutures.
davsad
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Re: musique vs théorie

Message par davsad »

Ok, merci pour le lien, c'est curieux non que Schönberg ait pu rédiger un bouquin où il parle de mélodies et des formes classiques alors que justement c'est ce que la musique sérielle semble rejeter ? Tu l'as lu jusqu'au bout ?
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