BluePhoenix05 a écrit :
Pourrais-tu nous exposer de façon plus détaillée ta position, ou nous renvoyer vers un fil ou tu en parles ?
Si tu me poses une question précise, je répondrai avec plaisir
Prenons les gammes par exemple. Pourquoi les gammes ?
Les gammes, c'est l'alpha et l'omega de notre art. Tout l'univers musical que nous fréquentons au quotidien de notre passion est construit sur cette base. Je disais par ailleurs que savoir jouer des morceaux mais ne pas savoir faire une gamme proprement me ferait un peu le même effet que de savoir dessiner sans pouvoir tracer un beau trait. C'est qu'il y a un problème, c'est pour moi, comment dire, qu'on utilise un certain aspect de notre instrument de manière instinctive sans vraiment le maîtriser. Il est bon je trouve d'amener le questionnement aux fondations de notre pratique.
Liszt était un enfant prodige, capable de tout jouer, de déchiffrer a prima vista les concertos de Hummel ou les sonates de Beethoven. A 11 ou 12 ans, il avait déjà conquis sa place au panthéon des pianistes. Mais après avoir entendu Paganini, il a eu l'impression de n'avoir jamais joué au piano, et il a passé des jours entiers (d'après certaines biographies) chez lui, à frapper une note pour en écouter la résonance, sentir, comprendre le son, l'enfoncement de la touche, il a frappé des notes fortes, des notes douces, des notes quasi-inaudibles inlassablement. Il a repris le travail à la base (la note), il est reparti de zéro en quelque sorte.
C'est pour moi pousser à son paroxysme ce que j'essaye péniblement de décrire plus haut.
Evidemment, aucun morceau ne requiert une égalité parfaite, des notes strictement identiques qui se suivent sans effet musical, sans phrasé, sans crescendo ou decrescendo même minime, ça n'existe pas. Mais la pédale, le phrasé, les nuances, ne doivent pas être là pour masquer une faiblesse du pianiste.
BluePhoenix05 a écrit :
Cela m'intéresse, n'ayant jamais fait de Hanon, je ne sais même pas comment ça se "travaille" :
joue-t-on ces exercices mains séparées ? mains ensemble ? dans ce cas vous étudiez d'abord MS, plus coordonnez ME ? Les deux mains jouent toujours à l'octave ? il faut étudier tous les exercices de A à Z ?
Ca ne se travaille pas. On joue évidemment mains ensembles uniquement. Il n'y a rien à coordonner, ce sont des formules répétitives, les deux mains jouant exactement la même chose à l'unisson. C'est tout bête, tu as une formule sur la première mesure, et tu montes sur je crois 2 octaves en répétant cette formule, puis tu redescends.
Ce sont des "gammes++" en quelque sorte
BluePhoenix05 a écrit :
Pour moi, il y a toujours le risque de jouer de façon mécanique.
C'est une critique que j'avoue ne jamais comprendre. De toute façon quand on travaille un morceau, face à une difficulté purement technique on fait forcément un travail mécanique à un moment donné.
Et surtout, ce n'est pas parce qu'on travaille pendant une heure sans musicalité qu'on finit par jouer comme ça. D'ailleurs les exercices ne constituent qu'une petite part de l'entraînement quotidien, le gros du travail est évidemment consacré aux pièces.
BluePhoenix05 a écrit :
De plus on ne sait pas sur quels points porter notre attention en pratiquant ces exercices. J'imagine qu'il ne s'agit pas simplement de jouer les notes (j'espère...).
Tout à fait. Avoir les mains à l'unisson sur des formules simples, ça permet de se concentrer totalement sur l'égalité, la continuité dans la sonorité, le legato, et ça empêche de "tricher" pour contourner la difficulté. Il faut que chaque note soit exactement pareille à la précédente, avec une justesse et une égalité très stricte.
BluePhoenix05 a écrit :
De plus cela m'étonnerait que les formules du Hanon soient retrouvées fréquemment dans les morceaux de musique (auquel cas, on aurait gagné du temps en les pratiquant). Au contraire des gammes et arpèges, qui doivent être joués musicalement (et donc être agréable à écouter), même si ce sont des formules musicales assez pauvres sans contexte, il faut donc y mettre de l'imagination...
L'intérêt du Hanon ou des gammes et arpèges n'est pas de travailler des formules qu'on retrouvera strictement dans les morceaux. Voir plus haut.
Je ne pense pas que le fait de travailler les gammes et arpèges aide pour jouer les gammes et arpèges qu'on retrouve dans les morceaux d'ailleurs, le doigté est souvent différent, le geste est différent, il y a les nuances, la pédale parfois etc...