en fait je n'etais jusqu'ici pas un grand fan de Mozart, et j'avais deja entendu cette K475 une fois ou deux (par E. Fisher) sans qu'elle retienne mon attention, sauf de manière assez fugace, par moments.
Puis j'ai entendu une version très orchestrale, presque Wagnérienne, de Cortot dans un CD sur ses master class à l'ENM dans les années 50. Et là...révélation.
Cortot l'interprète comme un mini opéra sur le thème de Don Giovanni, avec les différents personnages (Don G, Dona Elvire, le thème de la malédiction, Zerline...). Par le jeu des nuances très marquées (mais pas outrées) il traduit parfaitement ce qui pourrait être la rencontre entre Don Giovanni et Dona Elvire, la noirceur du coeur de Don Giovanni, la noblesse de Dona Elvire, la pureté de ses sentiments, la séduction à laquelle elle cède, son très court bonheur quand elle s'imagine aimée de cette affreux Don Giovanni, puis son abandon, son désespoir, et finalement sa déchéance. Avec cette hypothèse d'interprétation, les nuances à utiliser deviennent limpides et coulent de source et le morceau prend une autre dimension.
Enfin, bon, je m'emporte (je dois être un peu amoureux de Dona Elvire en fait

)
Mais cet exemple est pour moi typique de la difficulté d'interprétation de Mozart. Car cette écriture épurée ne pas souffrir une interprétation "distraite" ou "plate", sinon c'est l'ennui pour l'auditeur. Les nombreuses reprises en particulier, si elles ne sont pas "pensées" et sont systématiquement ré-exécutées à l'identique, m'ennuient un peu. En revanche, si des nuances judicieuses sont introduites, ça peut devenir très profond. Le problème étant de savoir quelles nuances introduire et quand.
Et puis il y a des petits bouts de virtuosité disséminés ça et là qui demandent une grande rapidité et une grande propreté, on peut savoir jouer 98% du morceau rapidement et se retrouver coincé par 2% de mesures vraiment techniques.
« L'inconvénient du piano, c'est que chaque bonne note est située entre deux mauvaises. » A.Schnabel