Battements des notes dans les accords

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BM607
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Battements des notes dans les accords

Message par BM607 »

Bon eh bien puisque ma proposition de vous faire un petit article sur la théorie des battements des cordes de piano a reçu un accueil favorable de quelques-uns (es) d’entre vous (peu… mais la qualité compense) je vais m’exécuter.

Désolé pour ceux qui sont bien au-delà des éléments simples du début, mais vous pouvez passer (d’ailleurs même sans mon avis vous l’auriez fait !)

Tout d’abord un petit rappel de certains aspects théoriques.

Phénomènes vibratoires
-----------------------------
On conçoit bien ce que peut être une vibration en regardant par exemple un élastique épais peu tendu entre 2 points fixes, que l’on écarte de sa position de repos et qu’on lâche, on le voit vibrer autour de sa position d’équilibre.
Les types de vibrations les plus usuels autour de nous concernent les ondes électromagnétiques (lumières, mais aussi ondes radio, etc…) et les ondes sonores. Les ondes ont en théorie besoin d’un milieu matériel pour se propager car ils le mettent en vibration (il n’y pas de propagation du son dans le vide, mais le son se propage très bien dans un métal par exemple), avec le cas particulier des ondes électromagnétiques (nature mixte corpusculaire – ondulatoire et déplacement dans le vide).
Les grandeurs caractéristiques d’une vibration élémentaire simple (c'est-à-dire sinusoïdale) sont sa fréquence f (qu’on relie simplement à la longueur d’onde, mais là je ne développe pas car c’est peu lié au sujet) et son amplitude a. La représentation de la position d’un corps vibrant de par l’excitation de cette vibration (par exemple le tympan d’une oreille, l’air, le centre de la table d’harmonie par la corde via les chevalets… ou bien le milieu de l’excitateur, c’est à dire de la corde de piano) peut être représentée commodément par un graphique dans lequel l’axe vertical représente la position par rapport à l’équilibre, et l’axe horizontal le temps ; dans le schéma 1 ci-dessous au bout de 0,25 s le corps vibrant s’est écarté de sa position d’équilibre de sa valeur maximale, a, au bout de 0,5 s il est de nouveau à sa position d’équilibre, au bout de 0,75 il est au maximum mais dans l’autre sens. On voit qu’au bout d’une seconde on recommence, la fréquence est donc de 1 vibration par seconde, 1 hertz. L’oreille entend une gamme de fréquence comprise dans les meilleurs des cas entre 20 et 20000 Hz pour une oreille jeune (malgré mon oreille fine, à 20 ans j’atteignais à peine 16000 Hz…).
Un bruit est composé de grands nombres de ces vibrations superposées de façon anarchique, un son musical assez pur est composé de la superposition de cette fréquence principale et de ses sous-multiples, ici 2 Hz, 3 Hz, 4 Hz…appelés harmoniques. Sur le second graphe j’ai représenté un signal musical 1 Hz avec 2 harmoniques parfaites à 2 et 3Hz mais d’amplitude plus faibles. Le son final est le gros trait.
Vous pouvez aussi relire le post avec l’article sur le tempérament égal que j’avais fait pour vous remémorer certains points.

Cordes vibrantes
-------------------------
Une corde vibrante a une particularité évidente quand on réfléchit : elle ne peut pas se déplacer à ses 2 extrémités où elle est fixée (« nœuds »). Evident mais la suite en découle : par un simple raisonnement logique (je passe bien sûr sur l’équation mathématique de cette déformée) on sent que le point où le déplacement est maximal (« ventre ») ne peut être qu’au milieu si la vibration est simple (c’est-à-dire si la forme de la corde est ce que représenté sur le troisième graphique, mais ce coup-ci avec l’axe horizontal qui est tout simplement la position réelle de la corde au repos : c’est ce qu’on voit réellement en figeant la corde, par exemple au stroboscope, ce qui est très joli à voir). Admettons maintenant que cette corde vibre une fois par seconde
Il peut y avoir 2 ventres, 3…. Et de même que pour les vibrations ci-dessus elles peuvent se combiner.
Ainsi la forme réelle d’une corde de piano frappée par un marteau ressemble (échelle verticale exagérée bien sûr) à un moment donné au 4ème graphique ! Bien sûr au cours du temps sa forme va changer et la partie d’amplitude maximale va être à différents endroits et avoir différentes amplitude, la forme sera complètement différente.
Pour vous faire une idée du phénomène imaginez vous que l’onde de la figure 3 vibre à son tour, comme représenté sur la figure 5 (je n’ai représenté que la seule harmonique 3).
Une expérience amusante sur une corde de piano consiste à poser légèrement son doigt sur la corde au milieu exact de celle-ci : vous étouffez ainsi le ventre de la fondamentale, mais aussi des harmoniques 3, 5, 7.. et vous entendez l’harmonique 2 (surtout !) ; 4, 6 .. Essayez en théorie çà marche (moi je ne sais pas, çà marche pas bien sur un piano électronique !!) (et dites-moi …).
La rapidité des battements (fréquence) dépend de paramètres tels que : tension de la corde (plus elle est tendue plus la fréquence est élevée, le son est plus aigu), longueur libre entre les points fixes, nature de la corde (matériau, méthode de fabrication, épaisseur… : on parle de raideur)
Bon çà va ?
Voilà pour les rappels élémentaires

Approchons nous maintenant des phénomènes de battements par un peu de théorie (encore !).

Interférences vibratoires
-------------------------------
Les phénomènes vibratoires ont ceci de particulier que si on en combine 2 qui sont opposés (une vibration dans un sens et une autre de même fréquence et amplitude mais dans l’autre sens, une vers le haut et une vers le bas au même instant sur le graphe 3 par exemple : on dit en opposition de phase) il en résulte une absence de vibration. En optique on appelle cela une interférence, c’est le phénomène qui est utilisé pour traiter les lentilles d’appareil photo contre les reflets (on met des couches minces sur la lentille, l’onde lumineuse est réfléchie une fois sur le verre et une fois sur la couche mince, du fait de la différence de chemin il y a un retard entre les deux, si le retard est bien calculé on a le phénomène décrit ci-dessus, les reflets sont nuls ou plutôt atténués, je n’entre pas dans le détails, mais c’était pour illustrer l’universalité du phénomène).
En son on sait créer des pièges à son en émettant un son en opposition de phase par un dispositif électronique qui enregistre et ré-émet avec un retard calculé (ligne à retard) les bruits… et on créé du silence !
Pour ce qui est du piano, imaginez 2 cordes ayant exactement la même fréquence et la même amplitude, mais en opposition de phase… on n’entendrait rien. Imaginez vous que l’air est poussé par une des cordes, mais tiré de la même valeur par l’autre, il est donc immobile (en fait c’est la table d’harmonie qui met l’air en vibration, mais je simplifie).
Maintenant supposons encore ces 2 cordes mais avec deux variantes :
- l’amplitude de la seconde n’est pas la même que la première : dans ce cas il n’y aura pas de silence, mais une atténuation du son (l’amplitude du son résultant est la différence des amplitudes), avec la même fréquence
- la fréquence de la seconde n’est pas la même que celle de la première. Par exemple la première est à 440 Hz et la seconde à 500 Hz. Dans ce cas, un schéma vaut mieux qu’un long discours, regardez le schéma 6 qui représente ces 2 signaux et leur résultante. On entend des battements, le son augmente puis diminue. En fait on l’entend ou on ne l’entend pas selon la fréquence de battement bien sûr (si le battement est trop rapide on n’entend rien.. par contre s’il est lent, par exemple si le son met 3 secondes pour passer de son amplitude maxi à son amplitude nulle (du premier quart du graphique à la moitié par exemple), on entend le son fluctuer : ce n’est pas la fréquence du son qui intervient ici mais la fréquence de la fluctuation, attention. Le signal n’est plus périodique mais pseudo-périodique.
OK, vous suivez toujours ?

Je vous propose une pause de 2-3 jours pour digérer poser des questions avant qu’on passe au cas du piano et des battements d’accords, dans un piano parfait tout d’abord, puis dans un piano réel ensuite, avec une petite digression à la fin sur l’art de l’accordeur.

Du moins si tout cela vous intéresse toujours. (sinon j'arrête car je n'ai pas écrit la suite, juste le plan...)

BM
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roland
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Message par roland »

ouais, ouais, lumineux, encore...
BM t'es bon vulgarisateur et bon pédagoque, me tarde de lire la suite
Merci
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Marie-france
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Message par Marie-france »

Merci BM :D , il n'y a plus qu'à lire tout ça.................. bien tranquillement!
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BM607
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Message par BM607 »

Bon personne ne m’ayant demandé de m’arrêter, je vais supposer que cela en intéresse quelques uns (au moins 2 ! Bah, c’est toujours cela, après tout on peut s’intéresser à d’autres choses que la vie de Grigri… l’un n’empêchant pas l’autre d’ailleurs).

Juste une petite précision mathématique, que vous pouvez survoler car elle ne fait que donner quelques éléments à ceux qui ont quelques notions de trigo (environ niveau 1ère S) :
Si on reprend le second cas de mon texte précédent avec les 2 signaux à 440 et 500 Hz, les équations mathématiques du son résultant sont :
a sin (440t*2pi) + a sin (500t*2pi) = 2a cos ((500-440)t/2*2pi) sin ((500+440)t/2*2pi), t en seconde.
Le terme à droite de l’égalité en cosinus est un terme multiplicatif qui représente l’enveloppe des sinusoïdes (deux courbes, une qui joint les sommets supérieurs et une autre les sommets inférieurs de ces petites sinusoïdes, et qui forme une grande sinusoïde : un seule est représentée sur le graphe ci-dessous) de ces petites sinusoïdes. La pseudo-fréquence est donc de 60 Hz, trop rapide pour être perçue (on ne distingue pas les battements au-dessus d’une 15aine d’Hz dans les meilleurs cas, au-dessus on intègre les variations et on entend un signal non modulé).
Fin de la pause mathématique.

Battements dans un accord.
-----------------------------------
Vous vous souvenez (CF viewtopic.php?p=9172&highlight=#9172 )que le tempérament égal qui prévaut à l’accordage d’un instrument tel que le piano est en fait un pis-aller qui permet aux accords de ne pas sonner trop faux.
Les différences entre les accords du tempérament égale et ceux de la gamme sont
-------------------------Valeur -------------Valeur gamme
Accord -----------tempérament égal-------Naturelle-----------écart
---------------------------------------------------------------------------
Unisson----------------1.000000---------1/1 = 1.000000--- -0.00%
Seconde mineure-----1.059463------16/15 = 1.066667---- +0.68%
Seconde majeure----1.122462--------9/8 = 1.125000---- +0.23%
Tierce mineure-------1.189207--------6/5 = 1.200000---- +0.91%
Tierce majeure-------1.259921--------5/4 = 1.250000---- -0.79%
Quarte juste----------1.334840--------4/3 = 1.333333---- -0.11%
Quinte diminuée------1.414214--------7/5 = 1.400000---- -1.02%
Quinte juste-----------1.498307--------3/2 = 1.500000---- +0.11%
Sixième mineure-----1.587401--------8/5 = 1.600000---- +0.79%
Sixième majeure-----1.681793--------5/3 = 1.666667---- -0.90%
Septième mineure----1.781797--------16/9 = 1.777778--- -0.23%
Septième majeure----1.887749--------15/8 = 1.875000--- -0.68%
Octave-----------------2.000000---------2/1 = 2.000000--- -0.00%
(J’espère que je ne me suis pas planté dans les noms d’accords, sinon je vais y avoir droit !)
Vous vous souvenez également que les sons musicaux sont composés d’harmoniques, qui sont pour le cas d’un piano parfait des sons de fréquences multiples de la note de base (dite fondamentale). Par exemple un LA440 peut être composé de fréquences 880, 1320, 1760… qui s’ajoutent (les harmoniques ont une amplitude plus faible que la fondamentale dans le cas des cordes vibrantes).

Piano parfait
---------------
Quel rapport avec les battements ? Et bien on peut penser qu’il puisse exister des harmoniques qui, du fait du tempérament égal et donc de l’approximation faite par rapport aux accords parfaits, soient à quelques Hz de la fondamentale d’autres notes.
C’est bien le cas : par exemple :

LA 220,00---440,00---660,00----880,00---1100,00---1320,00
DO 261,26---523,25---784,88---1046,50---1308,13---1569,76

On voit que l’harmonique 5 du LA et l’harmonique 4 du DO ont 11,87 Hz d’écart, on entendra donc un battement. Par contre pour les autres harmoniques, l’écart est trop important pour être audible.

Egalement, il peut exister des battements entre cordes d’un unisson, si l’accord est mal réalisé.

Piano réel
------------
En fait les éléments ci-dessus sont faux. Pour une raison simple, c’est qu’une corde telle que définie ci-dessus est une corde théorique parfaite, sans épaisseur.
Dans la pratique la corde n’est pas mathématiquement parfaite, en particulier l’épaisseur n’est pas complètement négligeable par rapport à la longueur, et d’autres phénomènes plus marginaux également (par exemple la carde au droit des point d’appuis doit se plier progressivement et ne peut donc avoir une pente théorique, comme celle de mes schéma ci-dessus, dès le début comme si elle était montée sur des rotules) les fréquences des harmoniques réelles sont donc légèrement décalées des fréquences théoriques pures, on parle d’inharmonicité. On parle alors parfois de partiels plutôt que d’harmoniques.
A titre d’exemple des valeurs réelles de cette inharmonicité des cordes de pianos se trouvent dans «Le Piano » de A.A. REIBLIZ (exemple d’un piano droit haut de gamme, marque non citée)

---------------Harmoniques-----Partiels---------------------
----------------théoriques-------réels---------différence---
Fondamental-------32,703---------32,703-----------0
2ème partiel------65,406---------65,523-----------0,117
3ème partiel------98,109---------98,401-----------0,292
4ème partiel-----130,812--------131,434-----------0,622
5ème partiel-----163,515--------164,779-----------1,264
6ème partiel-----196,218--------198,435-----------2,217

· Un premier constat est qu’une corde n’a pas de battement avec elle-même ! Curieux constat ? En fait il n’était pas complètement évident, si l’inharmonicité avait été importante, une corde aurait pu battre avec ses harmoniques (dans l’extrême grave).
· Un second constat : vous pensiez peut-être qu’on accordait l’octave au double de la fréquence de la fondamentale, par exemple DO32,703 suivi de DO65,406…. Ce serait vrai pour un piano parfait, dans l’exemple ci-dessus il y aurait un battement à 0,117 Hz, peut-être peu audible (un battement toutes les 8,5 s)… mais pour le DO130,812 il y aurait 0,662 HZ soit 3 battements par 2 secondes, parfaitement audible. Donc on décale l’accord progressivement, et tout l’art de l’accordeur est donc de trouver un décalage qui sonne bien, d’octave en octave : les réglages nécessitent donc une bonne oreille pour trouver l’optimum, déjà à ce niveau !
· Une conséquence de ce qui est dit ci-dessus est qu’un accordeur électronique qui donnerait uniquement des fréquences théoriques et un écart du réglage par rapport à cette théorie (un tel instrument est simple à fabriquer) est tel quel inutilisable, il faut en fait tenir compte en permanence de l’inharmonicité et l’accordeur électronique n’est donc qu’une aide qui ne peut remplacer une bonne oreille (par contre un accordeur électronique sophistiqué, qui stocke les bons réglages qu’un bon accordeur a réalisé pour un piano donné et les redonne pour le réglage suivant me semble pouvoir être d’une bonne aide…)
· Une autre conséquence de ce qui est dit ci-dessus est que les notes sont progressivement décalées vers l’aigu au fur et à mesure qu’on se décale vers les notes à droite du clavier (les notes les plus aigues), et les dernières sont alors assez franchement décalées de la valeur théorique. C’est le même raisonnement pour les notes plus graves, qui s’éloignent vers le grave.
· Ces phénomènes de battements sont ce qui est utilisé par les accordeurs de piano, à partir de tables théoriques de battements de certains accords et en choisissant judicieusement les empilements d’accords, différents selon les méthodes (LA440, le vrai, pourrait infirmer/confirmer…). C’est en fait une partie qui est un véritable travail d’artiste dans la mesure ou il faut sans arrêt trouver les battements, et décaler les réglages pour obtenir la meilleure sonorité possible, la meilleure musicalité, pour un instrument qui non seulement est en théorie accordé de façon imparfaite (le tempérament égal) mais également dans la réalité possède une inharmonicité dont il faut minimiser les conséquences. En plus a cela il faut ajouter les difficultés à manier la clé d’accord (car l’élasticité des cordes, le fait qu’elle ont à glisser sur le sillet, que les chevilles font preuve d’élasticité vu les énormes tensions des cordes et qui tournent plus ou moins par à-coups, le fait que quand on accorde une partie du piano les tensions déforment en partie les accords déjà réalisés plus avant), bref…un art !

On peut aussi citer quelques phénomènes annexes de ce phénomènes de battements :
· Il peut exister des battements par sympathie si des cordes sont mal étouffées : par sympathie on entend qu’un corde dont des harmoniques correspondent a peu près à une note qui vient d’être jouée peuvent être excitées par les vibrations sonores transmises par l’air et donc émettre un son qui va donc se trouver occasionner des battements lesquels peuvent se situer dans la zone critique des fréquences de battements audibles,
· Il peut exister des faux battements : il faut bien se souvenir qu’une fréquence émise par une corde est fonction entre autre de sa longueur libre entre appuis, si un des appuis est incertain (par exemple si les crémaillères de chevalet sont marquées ou si les pointes de chevalet ne sont pas parfaitement alignées avec les arêtes des crémaillères), attendu que la corde vibrante peut alors prendre appui successivement sur différentes parties de ces éléments et donc avoir une longueur libre qui fluctue, elle aura une fréquence qui variera et semblera battre .


Voilà, c’est terminé ce coup-ci.

Interrogation dans 8 jours !


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egtegt
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Message par egtegt »

Merci beaucoup pour cette explication, elle est trés claire et compléte. J'ai tout de même deux questions :

Tu explique que l'accord se faisant sur les battements et non sur les fréquences, et comme les harmoniques ne sont pas parfaites, l'accord est légérements décalé, surtout aux extrémes. Comment celà se passe-t-il avec les autres instruments, tous sont ils accordés avec ces mêmes approximations ? ou est-ce que si je joue avec une guitare par exemple, ça risque de sonner faux quand je jouerai dans les extrémes ?

Et ma seconde question : je pense avoir bien compris le phénoméne des battements, et que pour accorder une octave, on essaye tout bonnement de supprimer ces battements. Mais pour un autre intervalle comment fait-on ? Vise-t-on une certaine fréquence de battements ? Et surtout, si on a un instrument parfait, je veux dire non tempéré, est-ce qu'il y a des battements tout de même sur les intervalles autres que les octaves ?
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BM607
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Message par BM607 »

egtegt a écrit :Merci beaucoup pour cette explication, elle est trés claire et compléte. J'ai tout de même deux questions ....
Oulà, j'en vois qui m'ont lu.

Bon, je vais essayer quelques réponses. Sachant que LA440 serait bien mieux placé pour répondre aux question sur l'accordage.. et que je suis plutôt un théoricien donc j'ai un raisonnemetn qui est peut-être approché.

Pour la première question, il est effectivement probable qu'un second intrument gagne à être accordé avec celui avec lequel il va jouer. Je crois d'ailleurs que c'est ce qu'on fait quand on fait jouer 2 pianos ensemble (outre le fait que pour minimiser les problèmes d'inharmonicité entre instruments il vaut mieux choisir 2 pianos identiques). Par contre celà dépend de la plage de fréquence de l'instrument considéré, car s'il entoure la fréquence 440 Hz il ne sera pas trop loin et pourra sonner pas trop mal... par contre s'il va bien plus loin dans les aigus il pourrait sonner un peu faux (tout celà est un avis de scientifique, je ne suis pas spécialisé dans les instruments de musique...).

Pour la seconde question, il s'agit en fait de minimiser dans un sens ou dans l'autre les battements de différents intervalles : après avoir réglé une première foi le LA440, on règles des quartes, des quintes, des octaves, puis on remonte, on redescend...et des tables donnent les valeur des battements théoriques, on ajuste en fonction de l'inharmonicité ; les intervalles sont choisis judicieusement pour procéder aux réglages de toutes les notes en final le plus rapidement et le plus efficacement possible.
Le but étant à la fin d'avoir le moins de battements et des accords les plus harmonieux, il faut revenir et re-revenir sur les réglages des accords jusqu'à ce que tous les accords possibles soient globalement les meilleurs (pas : certains très bons et d'autres mauvais, mais : tous bons, c'est-à-dire de très bons à acceptables). A partir de là on ne peut qu'avoir procèdé par tatonnements et retouches multiples, et c'est l'oreille de l'accordeur qui va décider.
Mais là on entre dans le détail de l'accordage, je te conseillerais volontiers le livre de REIBLIZ sur ce sujet qui explicite dans le détail différents choix d'accords (à moins que LA440 se fende d'un post...)

BM
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La440
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Message par La440 »

Bravo pour ton explication BM,

C'est même mieux que vulgarisé, car le vocabulaire technique y est, tout en laissant le contenu du texte accessible et clair. bravo.

Expliqué comme ça, c'est certain que l'accord de piano paraît être quelque chose de très fastidieux, qui demande des connaissances en maths, physique et poterie...

Il est certain qu'il faut connaître cette partie théorique pour bien comprendre ce qu'on fait et pourquoi on le fait.

Grosso modo, après pas mal d'années d'apprentissage et de travail, on laisse de côté cet aspect théorique, car au fur et à mesure, ce qui nous servait de balises de repérage au cours de l'accord n'est plus tellement nécessaires.

L'accord n'est finalement qu'une succession d'intervales que l'on doit faire sonner le plus harmonieusement possible, tout en garantissant une bonne stabilité de la structure harmonique une fois le travail terminé.
Au fur et à mesure de l'apprentissage de l'accord, on finit par se "mettre dans l'oreille" certains intervales, et tout devient plus facile.
Ca varie d'un accordeur à l'autre bien sûr, mais personnellement, j'ai plusieurs points de repères "dans l'oreille", je sais ce que je veux obtenir, car j'ai ma propre façon d'accorder. Certaines tierces de la "partition" (c'est l'octave Fa-Fa entourant le La440 qui nous sert de base pour monter et descendre vers les extrêmes du piano) me servent de point de repère, car je sais quelle progression je veux lorsque j'accorde.

Idéalement, dans la partition (et donc sur l'ensemble du piano, car l'accord étendu vers les basses et aigüs n'est que la prolongation de cette phase de l'accord), toutes les intervalles doivent progresser de plus en plus rapidement lorsqu'on monte vers les aigüs. C'est à dire que la première tierce de la partition Fa-La440 sera plus lente que la deuxième tierce Fa#-La# et tout progresse comme cela: tierces, sixtes, dixièmes, mais aussi quartes et quintes.

C'est bien cela qui est génial: 10 accordeurs peuvent avoir le même professeur, ayant reçu la même méthode, et pourtant, ces 10 pianos sonneront différemment !! Génial non??
C'est de la sculpture de son.

L'apprentissage de l'accord est vraiment dur, mais quand on commence à comprendre et à obtenir des résultats plutôt satisfaisants, on peut être fier de soi. Pour ma part, ça m'a pris environ 2 ans de travail pour que mon travail commence à ressembler à un accord de piano correct.

Concernant le chapitre sur les accordeurs électroniques:

il existe aujourd'hui des machines fabuleuses, qui simplifient grandement le travail, surtout dans de mauvaises conditions: combien de fois il m'est arrivé en concert de devoir accorder pendant que le staff technique installe les chaises, ou les spots en faisant un vacarme monstrueux.
Dans ces cas là, j'étais content de pouvoir me reposer sur mon appareil qui est une deuxième paire d'oreilles pour moi, mais certainement pas la paire d'oreilles principales, car c'est moi qui juge au final.

Cependant, posséder un tel appareil ne remplace pas le coup de "patte", un accord doit tenir et ça demande des années de pratique.
On doit savoir accorder d'oreille avant de penser à utiliser les machines.

De plus, l'accord des unissons de toutes les notes doit se faire à l'oreille, car rien ne remplace la sensibilité de l'oreille pour cette opération. C'est l'accord de l'unisson qui donne toute sa profondeur et sa richesse harmonique à la note que l'on joue. Et d'un accordeur à l'autre, il peut y avoir énormément de différence.

Ah oui, une info plutôt surprenante: les techniciens Yamaha au Japon apprennent à accorder AVEC l'accordeur électronique.
Pendant plusieurs mois, il montent et descendent de 2Hz les pianos d'entraînement sans arrêt, afin d'acquérir une excellent maîtrise du geste. Seulement après ils apprennent à mettre en pratique l'aspect théorique (accord du tempérament lors de la partition, puis montée et descentes dans les octaves basses et aïgus).

Pour finir, il est vraiment difficile d'écrire quelque chose de clair sur cette opération.
Il serait plus facile de vous faire écouter tous ces intervales.
Si un jour j'y pense, j'enregistrerai une partition, avec tous ses intervales et sa progression au niveau du rythme des battements.

Je vous recommande de demander des explications à vos accordeurs(euses) respectifs, qui seront sûrement ravis de vous expliquer de quelle façon ils travaillent.
Je vous laisse, j'ai ma clé d'accord qui refroidit...
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Message par BM607 »

Merci pour tes félicitations, LA, venant d'un pro celà me touche.

C'est vrai que la lecture de l'ouvrage de REIBLIZ (visiblement un passionné lui aussi) donne l'impression que derrière toute les techniques d'accords "standardisées" il reste que de toute façon on en revient pour la fin à ce que ce soit l'oreille de l'accordeur qui fasse sur les dernières manip' la différence entre un accordage quelconque (ou pire) et un piano qui sonne bien.
Et même si il faut maîtriser la clé (je suis encore passé semaine dernière chez un vendeur de piano à Paris rue Monge, une accordeuse (c'est français, çà ?) était au travail, j'ai regardé un peu, il y a tout de même un coup de patte pour asseoir cordes et chevilles...) ce ne doit pas être le plus dur.

Par contre j'ai vu qu'aux states ils se servaient d'un accordeur éelctronique pour enregistrer le meilleur réglage qu'ait pu faire un accordeur de très haut niveau sur leur piano de test, et que ensuite ils jugent l'accordeur débutant par rapport à ce réglage "étalon". Dans le principe j'ai trouvé celà surprenant car allant à l'encontre de la musicalité : supposons qu'une seule note soit pas mal éloignée de l'accord étalon et toutes les autres soient calées comme l'étalon, le jeu du piano sera faux pour pas mal d'accords (ceux utilisant cette note) et donc le son serait horrible, alors que si pas mal de notes sont un peu éloignées, les accords pourraient tous sonner assez juste malgré tout, plus que le cas précedent. J'espère et je suppose n"anmoins qu'ils savent apprécier ce genre de distinguo.

Mais ce n'est qu'une interrogation en passant, j'en ai d'autres au sujet des sons (par exemple : comment se fait-il que les 2 cordes d'un bicorde ne vibrent jamais en opposition ? il suffirait pour une fréquence de 500 Hz qu'il ya ait un décalage de 1/1000ème de s pour qu'on soit en interférence parfaite et donc coupure du son, or la précision des chocs des marteaux est loin d'atteindre une telle valeur, surtout avec des marteaux neufs...)

BM
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Message par La440 »

oui, aux USA il se servent de l'accordeur électronique comme référence pour le test d'entrée dans la PTG (l'association des accordeurs US).

Après tout, pourquoi pas?

Ils utilisent une référence universelle.

Si l'on demande à 10 individus de trancher, personne ne sera d'accord.
L'accordeur électronique met tout le monde d'accord: on te demande d'être juste, et c'est tout.
L'accordeur électronique rend énormément service au niveau des orchestres à ce niveau là. Quand le piano est parfaitement au La de l'accordeur électronique, les hautbois et clarinettes ne peuvent plus lui reprocher d'être beaucoup trop haut !

En ce qui concerne la musicalité, les nouveaux appareils sont époustouflants, à des années lumières des premiers accordeurs chromatiques.

Le programme que j'ai dans mon pocket PC prend en compte l'inharmonicité de l'ensemble du piano, et calcule le meilleur accord possible pour le piano sur lequel j'ai fait les calculs d'inharmo.

Il résulte de ces calculs une courbe qui assure une progression parfaite, et une extension des octaves plus ou moins prononcée suivant ce que l'on veut faire. Il y a différents réglages de disponibles.

Je n'ai utilisé que très peu le programme pour de " vrais" accords (à vrai dire, il me sert plus de diapason mains-libres que d'accordeur électronique complet) mais quand les conditions sont impossibles, c'est le meilleur ! Il entend tout !

J'ai même fait le test avec un aspirateur en marche à 1m de l'appareil, et c'est comme si la pièce était silencieuse pour lui, alors que pour nos pauvres oreilles de petits accordeurs, ce n'est pas la même chose !!

Je pense sincèrement qu'il faut vivre avec son temps.
L'accordeur électronique est complètement passé dans les moeurs aux US et dans d'autres pays, mais pas du tout en France, du moins pour l'instant.

Ce serait bête de se priver de tels outils lorsque leur utilisation est justifiée.
Après tout, n'est-il pas plus rapide et pratique d'utiliser un aspirateur au lieu d'un balai? Une tronçonneuse au lieu d'une hache? etc...

L'important est de savoir complètement s'en passer.

Je n'utiliserai jamais mon accordeur lorsque les conditions sont bonnes, sauf pour me donner le La en ayant les deux mains de libres.
Et puis c'est tellement plaisant de réaliser son propre accord.
C'est vraiment de la satisfaction gratuite que de jouer sur le piano que le vient de faire sonner, et de se dire que ce n'est vraiment pas du mauvais boulot !
Je vous laisse, j'ai ma clé d'accord qui refroidit...
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Utricule
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Message par Utricule »

[quote="BM"]Bon personne ne m’ayant demandé de m’arrêter, je vais supposer que cela en intéresse quelques uns (au moins 2 ! quote]

Je me sens oublié... :cry:
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La440
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Message par La440 »

Utricule a écrit :
BM a écrit :Bon personne ne m’ayant demandé de m’arrêter, je vais supposer que cela en intéresse quelques uns (au moins 2 !
Je me sens oublié... :cry:

euh, tu pourrais dire pourquoi?? :shock:
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Marie-france
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Message par Marie-france »

:x Toujours pas eu le temps de finir de lire ce post très intéressant :x
Je vais encore partir! :?
Merci toutefois BM :)
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egtegt
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Message par egtegt »

Je ne connais pas la précision des accordeurs éléctroniques, pour ce qui concerne l'oreille humaine, on entend sans problème des battements à une fréquence d'un quart d'Hertz (à la louche, c'est juste l'impression que j'ai, on peut probablement faire beaucoup mieux même), ce qui veut dire qu'on est capable d'acorder une unisson à un quart d'Hertz sans difficulté. Ce qui est pas mal quand on sait qu'un demi ton dans les mediums, c'est quelques dizaines d'Hertz.

Mais j'ai juste une petite question : Si les accordeurs electroniques sont si parfaits, pourquoi ne pas se contenter de former les accordeur à la méthode de tension d'une corde et leur conseiller d'acheter un accordeur ? A mon avis, ça ne va pas tarder.

Je m'étonne d'ailleurs qu'il n'existe pas encore de piano capable de s'autoaccorder. Ca pourrait être intéressant pour faire du travail sur les tempéramments.
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La440
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Message par La440 »

egtegt a écrit :Je ne connais pas la précision des accordeurs éléctroniques, pour ce qui concerne l'oreille humaine, on entend sans problème des battements à une fréquence d'un quart d'Hertz (à la louche, c'est juste l'impression que j'ai, on peut probablement faire beaucoup mieux même), ce qui veut dire qu'on est capable d'acorder une unisson à un quart d'Hertz sans difficulté. Ce qui est pas mal quand on sait qu'un demi ton dans les mediums, c'est quelques dizaines d'Hertz.

Mais j'ai juste une petite question : Si les accordeurs electroniques sont si parfaits, pourquoi ne pas se contenter de former les accordeur à la méthode de tension d'une corde et leur conseiller d'acheter un accordeur ? A mon avis, ça ne va pas tarder.

Je m'étonne d'ailleurs qu'il n'existe pas encore de piano capable de s'autoaccorder. Ca pourrait être intéressant pour faire du travail sur les tempéramments.
Il y a de fortes chances que ça arrive oui, en tous cas du côté des charlatans.
Parce que je pense tout de même qu'on apprendra toujours aux apprentis à accorder à l'oreille parce que:
1- C'est indispensable (que faire si l'appareil déconne ou que la batterie est Low)
2- C'est plaisant et très gratifiant d'avoir les félicitations d'un pianiste à propos de l'accord
3- C'est une tradition et un savoir faire qu'il serait tout simplement dommage de voir disparaître.

En ne travaillant qu'avec l'accordeur électronique, on ne voit pas où sont nos défauts, ce qu'on doit améliorer.

Bref, l'accordeur s'utilise à bon escient, mais ne remplace pas la "oreille touch".

En fait, il y a de fortes chances pour que l'accordeur se démocratise, et que la différence se fasse au niveau de l'harmonisation et du réglage.
Travailler avec un accordeur permet de gagner pas mal de temps, et du coup, on a plus de marge pour retoucher les réglages ou l'harmonisation (je parle en cas de concert).

En tous cas, l'accordeur électronique est un très bon prof lorsqu'on apprend à accorder, c'est indéniable.

Le piano qui s'auto-accorde a été inventé. Je crois que ça fonctionne grâce à un système électrique qui "chauffe" la corde jusqu'à la bonne tension.
Cela dit, je n'ai aucune crainte pour l'instant quant à la disparition de notre profession à cause d'une telle invention !!
Je vous laisse, j'ai ma clé d'accord qui refroidit...
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Utricule
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Message par Utricule »

La440 a écrit :
Utricule a écrit : Je me sens oublié... :cry:

euh, tu pourrais dire pourquoi?? :shock:
C'était ma manière à moi de dire Ô combien ce topic est intéressant... :D
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BM607
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Message par BM607 »

Concernant les accordeurs électroniques (je réponds là en tant que technicien) je pense que vu les progrès foudroyants de l'électronique de traitement de signal et de traitement de l'information on devrait voir arriver des matériels qui tiennent tout à fait la route assez vite, et je vois au moins une manière d'y parvenir :

- l'instrument analyse le signal des cordes, et calcule les harmoniques par FFT (ça c'est facile, c'est à la portée de n'importe quel ingé, j'ai moi-même fait en C++ un tel analyseur, pour m'amuser),
- ensuite en fonction des valeurs trouvées il compare à des banques de donnés pour donner les meilleurs réglages, il ne s'agirait plus à ce moment que de manier la clé.

Ce qui ferait l'acceptabilité du produit pour moi est clairement le second point : il devra y avoir des données en nombre très important, issues des meilleurs réglages qu'auront fait les meilleurs accordeurs sur des centaines de pianos, et il y aura à partir de là quelques ajustements mineurs pour les dernières décimales. Le fait de calculer les réglages qui minimisent les battements ne me semblerait pas suffisant pour assurer qu'un instrument sonnerait au mieux de ce qu'il peut faire.

Donc si le marché est assez intéressant, il me semble effectivement que nous devrions voir fleurir ces matériels, mais il ne me paraîtrait pas inutile que les futurs accordeurs utilisant ces instruments sachent malgré tout apprécier les réglages proposés...et donc savoir peu ou prou régler à l'oreille.

Voici mon sentiment de (vulgaire) technicien.

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Message par BM607 »

Utricule a écrit :...C'était ma manière à moi de dire Ô combien ce topic est intéressant... :D
Merci donc à toi pour l'appréciation, et merci a postériori à Roland et M-F de leurs éloges.

Je ne remercie pas LA440... celà a déjà été fait.

BM

NB : euh, dites-moi, en lisant le post "sexe et piano" et en réfléchissant, j'espère que mes courbes de fréquences qui ondulent langoureusement et ce mélangent harmonieusement ne vous ont pas fait croire que ... Image

sexe et mathématiques, je vais y réfléchir. Et peut-être censurer mon article...
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La440
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Message par La440 »

BM a écrit :Concernant les accordeurs électroniques (je réponds là en tant que technicien) je pense que vu les progrès foudroyants de l'électronique de traitement de signal et de traitement de l'information on devrait voir arriver des matériels qui tiennent tout à fait la route assez vite, et je vois au moins une manière d'y parvenir :

- l'instrument analyse le signal des cordes, et calcule les harmoniques par FFT (ça c'est facile, c'est à la portée de n'importe quel ingé, j'ai moi-même fait en C++ un tel analyseur, pour m'amuser),
- ensuite en fonction des valeurs trouvées il compare à des banques de donnés pour donner les meilleurs réglages, il ne s'agirait plus à ce moment que de manier la clé.

Ce qui ferait l'acceptabilité du produit pour moi est clairement le second point : il devra y avoir des données en nombre très important, issues des meilleurs réglages qu'auront fait les meilleurs accordeurs sur des centaines de pianos, et il y aura à partir de là quelques ajustements mineurs pour les dernières décimales. Le fait de calculer les réglages qui minimisent les battements ne me semblerait pas suffisant pour assurer qu'un instrument sonnerait au mieux de ce qu'il peut faire.

Donc si le marché est assez intéressant, il me semble effectivement que nous devrions voir fleurir ces matériels, mais il ne me paraîtrait pas inutile que les futurs accordeurs utilisant ces instruments sachent malgré tout apprécier les réglages proposés...et donc savoir peu ou prou régler à l'oreille.

Voici mon sentiment de (vulgaire) technicien.

BM
Tu es technicien de quoi, en fait? :?:

En fait, les accordeurs électroniques dont tu parles existent déjà, ils sont déjà capables de te sortir le MEILLEUR accord possible dans n'importe quelle situation.
Ils coûtent cher mais rendent de sacrés services.

De toute façon, un accordeur électronique pour piano est entièrement paramétrable, et permet, comme je l'ai dit hier, d'agrandir plus ou moins les octaves, afin que l'accord fait par la machine ressemble le plus possible à ce qu'on est capable de faire lorsqu'on est en pleine forme et que les conditions de travail sont optimales (super bon piano, pas trop faux, silence dans la pièce).

On peut aussi paramétrer la machine pour accorder avec des tempéraments anciens (Valotti, Werckmeister, et Cie).

L'accordeur électronique pour piano analyse les partiels de chaque note et génère une courbe d'accord. Ensuite, on peut modifier la courbe générée par le calcul de ces partiels pour étendre plus ou moins les octaves.

Avant de comparer mes accords faits à l'oreille par rapport à la machine, je pensais que mes accords étaient plutôt "plats" et justes, c'est à dire pas trop stretchés (étirés) vers les extrêmes. Et en fait, quand j'ai comparé par rapport à l'accordeur réglé pour me faire un vrai accord de piano "beatless", j'ai vu que je stretchais un peu, mais d'une manière harmonieuse.

L'accord beatless produit par la machine me déplaît complètement: les basses me paraissent bien trop courtes, il manque de la profondeur.

C'est là où intervient la nécessité d'apprendre à accorder d'oreille.
Cela permet de nous donner un idéal de son, que l'on va essayer de reproduire le plus fidèlement possible à chaque fois qu'on accorde un piano. Et c'est ça le plus difficile.
Je vous laisse, j'ai ma clé d'accord qui refroidit...
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BM607
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Message par BM607 »

La440 a écrit :Tu es technicien de quoi, en fait? :?:
C'est une façon de parler, vulgaire technicien par opposition aux (vulgaires ?) artistes du forum.
Disons sans entrer dans trop de détails que j'ai en charge quelques équipes d'ingénieurs en elecromécaniques qui s'occupent d'activités telles qu'hydraulique (y compris pompes, vannes, échangeurs..), aéraulique, contrôle-commande, électricité courants forts et courants faibles, génie-civil, plus d'autres petites choses encore, en France ou plus loin (en Chine par exemple).
Donc très éloigné de l'accord de piano, mais parfois pas tant de certains sujets (traitement accoustique de locaux, traitement de signal).
La440 a écrit :En fait, les accordeurs électroniques dont tu parles existent déjà, ils sont déjà capables de te sortir le MEILLEUR accord possible dans n'importe quelle situation.
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Avant de comparer mes accords faits à l'oreille par rapport à la machine, je pensais que mes accords étaient plutôt "plats" et justes, c'est à dire pas trop stretchés (étirés) vers les extrêmes. Et en fait, quand j'ai comparé par rapport à l'accordeur réglé pour me faire un vrai accord de piano "beatless", j'ai vu que je stretchais un peu, mais d'une manière harmonieuse.

L'accord beatless produit par la machine me déplaît complètement: les basses me paraissent bien trop courtes, il manque de la profondeur.

C'est là où intervient la nécessité d'apprendre à accorder d'oreille.
Cela permet de nous donner un idéal de son, que l'on va essayer de reproduire le plus fidèlement possible à chaque fois qu'on accorde un piano. Et c'est ça le plus difficile.
Je ne pige pas : j'ai l'impression que tu me décris ce que justement je trouve insuffisant, à savoir une machine qui donne les accords théoriques beatless, et non les plus harmonieux que tu obtiens toi à l'oreille... d'où pour moi la nécessité d'un instrument qui intégre les données de ces meilleurs réglages humains. Et qu'à cette machine tu attribues le qualificatif MEILLEURS ! Ou alors pour toi le meilleurs est à prendre au sens mathématique : celui qui donne les battements les plus inaudibles possibles selon une répartition statistique qui minimise l'écart-type.

Car sinon tu confirmes bien ce que je pensais, à savoir qu'un accord optimisé mathématiquement n'est pas forcément (loin de là) celui qui sonne le mieux.

BM
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Message par La440 »

En fait, la machine fait la même chose que l'oreille humaine: elle analyse des fréquences pour les faire coincider les unes avec les autres, mais sans s'aider des battements puisqu'elle a déjà en mémoire une banque de fréquences qu'elle module suivant tes réglages.
Sauf que la machine entend beaucoup plus de partiels que notre oreille, et permet une analyse beaucoup plus fine, et en tous cas plus rapide que ce que nous pouvons faire naturellement.

Quand je parlais de l'accord beatless, j'ai volontairement confronté un de mes accords que je jugeais "satisfaisant" pour un concert (en tous cas à mon petit niveau) à l'accord mathématiquement parfait et beatless que peut me produire la machine si je lui demande de le faire.
Ce qui confirme ce que tu dis à la fin de ton message: l'accord mathématiquement parfait, avec une division de l'octave en 12 notes parfaitement égales n'est pas toujours ce qui sonne le mieux. Donc notre oreille est le juge final.

Mais quand tu paramètres cette machine pour te sortir un accord harmonieux, elle est fort capable de le faire, crois moi.

Est-ce que ça répond à tes questions?

Si tu veux en savoir plus sur le fonctionnement de ces appareils, tu peux faire une recherche en tapant "ETD's" sur google, ça signifie "Electronic Tuning Device" en anglais, et tu trouveras des tas d'infos sur les sites américains.
Tu peux essayer la version shareware de ce programme sur ton pc:
http://www.tunelab-world.com
Installes ou développes :wink: un programme comme winoscillo et balance lui des fréquences (il faut avoir un micro sur ton pc). Modifie la fréquence du La440 par exemple, en le montant à 440.005 tu vas voir que le programme va le reconnaître. Tu peux même aller beaucoup plus loin après la virgule.

Je ne suis pas sûr que ton oreille ni la mienne d'ailleurs soit capable de reconnaitre un mouvement de 0.005 Hz ! Tout ça pour dire que la technologie peut être au service de ce métier, sans en enlever la partie artistique et artisanale qui est de loin la plus interessante.

D'ailleurs, en parallèle avec le post de Yannis à propos des claviers numériques, j'ai trouvé assez surprenant l'accord des claviers Yamaha.
Vérifie par toi même, il n'est sûrement pas mathématiquement parfait, mais il sonne.
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