Les sensations psychomotrices au piano

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Jean-Luc
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Re: Les sensations psychomotrices au piano

Message par Jean-Luc »

C'est une discussion passionante!
Et assez complexe.
Il me semble qu'on tourne un peu autour de la question initiale, mais tout ce qui est diti ici est vraiment intéressant.

Il est tard, donc je ne "discute" qu'un seul élément qui a attiré mon attention : le désaccord entre nox et Okay sur le niveau de connaissances extra-pianistique de l'interprète. Okay fait référence à l'excellent ouvrage de Neuhaus, qui est régulièrement mon livre de chevet.
En deux mots : je ne suis pas trop d'accord avec l'argumentaire d'Okay sur ce point, qui va à l'encontre de ce que dit Neuhaus (cf. pages 28 et suivantes dans l'édition Van de Velde).

L'image esthétique : ces deux mots parlent presque d'eux-mêmes.

Pour reprendre ton exemple Okay, avec les FPiano Beethoven vs. Schubert, je suis 100% d'accord avec ton analyse. Mais justement, comment faire cette analyse, et l'appliquer au piano lorsqu'on veut produire un son très précis, si on ne connaît rien de la vie de Beethoven ou Schubert? On peut supposer que les FPiano Beethovéniens sont étroitement liés à sa vision du monde et de la société, sa surdité... L'état mental et la psychologie de Beethoven sont si forts qu'ils transparaissent dans sa musique : la rage et le désespoir d'un destin injuste qu'il na jamais accepté, entremêlés à une profonde humanité. C'est tout à fait particulier et ce sont des éléments qui sont impossibles à "deviner" en ne lisant que la partition sans rien connaître de sa vie.
On peut dire la même chose de Chopin, Schumann, Tchaïkovsky, etc...

Imaginons que je donne à un pianiste très doué, mais très ignorant la partition de la Polonaise op.44 de Chopin (qui n'a aucun "sous-titre" à ma connaissance?), comment s'en sortira-t-il musicalement parlant? Sera-t-on emporté par ces grondements de canons, cette révolte? Comment s'articulera la partie centrale en forme de mazurka? Sans rien connaître de ce qu'a vécu Chopin, l'interprétation sera vite très ennuyeuse, en dépit d'une technique hors pair.

A moins que j'ai mal compris tes propos... :!:

Par ailleurs, la musique s'inscrit dans une époque, dans des courants artistiques en vogue, et sont en rapport direct avec le comportement de toute une société, de toute une culture. Les compositeurs qui ont marqué des tournants dans la musique ont toujours été accompagnés par des changements concernant la peinture ou la littérature. Comment comprendre réellement ce qu'est la musique impressioniste sans n'avoir jamais vu de peintures du même style?

Enfin, ce que nous dit la musique des grands compositeurs à travers ces "gribouillis" de notes, ce sont leurs angoisses, leurs questionnements, leur bonheur, leurs espoirs... leurs vies tout simplement.
Modifié en dernier par Jean-Luc le jeu. 27 févr., 2014 4:04, modifié 1 fois.
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Oupsi
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Re: Les sensations psychomotrices au piano

Message par Oupsi »

davsad a écrit :Tu parles de sensation d'éveil, je suis d'accord avec toi, mais pour moi ce n'est pas un éveil de l'intellect mais plutôt un éveil de l'âme.
Là où ce que tu dis m'interroge, c'est que je pense qu'en musique l'exécution a un aspect physique, corporel, très important, et je ne suis pas sûre que la capacité et liberté expressives d'un corps soient uniquement réflexes. Dans les exemples que tu donnes, "je dois faire ci, je dois faire ça", pour moi il y a un dédoublement parasite, comme si on se voyait jouer. Il y a une sorte de jugement impératif, un "moi" qui juge et un "moi" qui joue. Évidemment là il n'y a pas beaucoup de liberté. Mais le moi qui joue, comment joue-t-il?
Pour moi, la question demeure entière.

On a parlé plusieurs fois d'arriver à jouer avec naturel, comme si la musique était notre "langue maternelle", ce qui tendrait à aller dans ton sens, puisque quand on parle on ne réfléchit pas à comment articuler chaque consonne voyelle etc, on parle et c'est tout. Sauf que la langue en musique c'est disons le bagage que l'on a acquis, les moyens à mettre en place, mais faire de la musique ce n'est pas tout à fait équivalent à juste parler, ce serait plutôt parler en déclamant, c'est une parole transcendée. Donc, pour moi, il y a quand même quelque chose qui est du ressort conscient, ultra-conscient même. Mais ce n'est pas du tout une "conscience de soi".
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JPS1827
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Re: Les sensations psychomotrices au piano

Message par JPS1827 »

Nous tournons bien autour d'un problème que nous formulons de plusieurs manières. Davsad nous dit que l'état "de flow", la situation 1, est l'état souhaitable pour avoir de bonnes sensations. Je suis entièrement d'accord. Mais qu'est ce qui fait qu'après avoir travaillé soigneusement, testé cet état "de flow" à plusieurs reprises chez soi, on se retrouve à pouvoir le reproduire ou pas, ce qui est à mon avis relativement indépendant du trac. Il y a des fois où on a un gros trac et où tout se passe assez bien dès qu'on a posé les mains sur le piano, et des fois où on a peu le trac au départ et où on se retrouve quand même misérablement dans l'état 2, à se dire toute sortes de choses complètement parasites avec la sensation que l'instrument ne rêve que de vous en faire baver, et qu'on ne sait quasiment plus rien jouer. Ca arrive même chez soi sans avoir le trac du tout, il y a des jours où je trouve les touches très lourdes et le son désespérément sec, où j'ai l'impression de ne rien faire de ce que je veux, il me faut 1 heure de travail vraiment concentré sur la production du son pour en sortir.

La phrase d'Oupsi sur "le moi qui juge et le moi qui joue" me parle tout à fait. Dans ces cas là, "le moi qui joue, comment joue t-il ?" Eh bien, il joue mal ! Je pense que l'état de "flow" est incompatible avec un tel dédoublement (qui peut avoir une forme aggravée, dans des cas où j'ai l'impression que ce n'est même pas moi qui joue). Par ailleurs, on rejoint un peu le premier post de Nox sur ce fil qui nous dit "Mais j'ai l'impression que ça reste superficiel, ça reste joli mais la démarche artistique globale est absente. C'est un peu comme si je lisais un beau poème en public en le découvrant pour ainsi dire au fur et à mesure de ma lecture. Il manque une direction, une tête, une démarche."
Il semble tout de même qu'il faille autonomiser une démarche artistique personnelle, et arrêter d'être en situation de juger si on a bien observé un grand nombre de prescriptions, pour se retrouver plus facilement dans cet "état de grâce" auquel il a été fait allusion.

Je glisse un peu à côté du sujet, mais j'ai remarqué qu'une des meilleures situations pour autonomiser une démarche se produit dans le cas où on a l'impression de trouver tout seul une nuance, une façon d'attaquer qui améliore sensiblement ce qu'on fait, et où on s'aperçoit après qu'en fait c'était plus ou moins écrit sur la partition. Je garde la plupart du temps de "bonnes sensations" en jouant ces passages (qui me servent ensuite un peu de points d'ancrage).
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Okay
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Re: Les sensations psychomotrices au piano

Message par Okay »

@davsad :
J'ai dévoré Thinking Fast and Slow de Kahneman le mois dernier (je recommande d'ailleurs chaudement, ce bouquin est extraordinaire), et tu as du d'ailleurs repérer que c'est de ce bouquin que provient ce que je raconte sur la jauge commune entre capacités phyisques et cognitives (j'ai reformulé, mais c'est la même conclusion). Donc je vois très bien comment il définit l'état de "flow". Ce que j'ai appelé "fluidité cognitive" utilise en partie cette notion, mais ce n'est pas du tout l'état de "flow". Pour moi, la "fluidité cognitive", c'est une combinaison entre Système 1 (pilote automatique, l'inconscient est aux commandes) et Système 2 (on conscientise via un processus de pensée plus laborieux et demandant plus de ressources cognitives). Il ne s'agit pas du tout de tout confier à un Système 1 bien éduqué, ce qui se rapprocherait plus de cet état de flow, dont je tiens à démarquer ce concept de "fluidité cognitive".
Pour préciser ça, je vais utiliser un exemple du bouquin. Il définit un Système 1 performant (car même si c'est lui qui est à la source de bien des erreurs de jugement - le sujet du livre - , il est aussi d'une aide inestimable) comme celui de "l'expert". Il utilise plusieurs fois l'exemple du maître aux echecs. Le grand joueur a joué des milliers de parties et "connait" une quantité innombrables de configurations sur l'échiquier. Sans réfléchir, il est généralement en mesure de sortir en peu de temps un coup entre fort et très fort, car il reconnait grâce à un apprentissage acquis au cours d'innombrables parties la configuration des pièces et le stade de la partie. Pour autant, au cours d'une partie réelle, il ne peut pas confier ses décisions à 100% à son instinct, aussi sûr et expert qu'il soit. Son instinct va lui suggérer des coups qu'un joueur peu expérimenté ne pourrait pas envisager, mais il ne va pas les executer aveuglément : il va aussi mettre son Système 2 en route afin de contre-valider cette intuition, de re-situer les risques de ce coup intuitif (peut-être génial, ou suicidaire) par rapport aux coups plus classiques, etc. Je veux dire qu'il a besoin des deux modes de pensée pour jouer ... tout comme le pianiste.
Voilà ce qu'est ma "fluidité cognitive", c'est la combinaison la plus équilibrée possible entre les deux modes de pensée, où certaines choses sont automatisées et d'autres balisées, ne serait-ce que pour savoir quand faire appel à telle ou telle procédure automatisée (on sort des reflexes). Jouer du piano demande une énorme concentration, même dans cet état, et même lorsque beaucoup de choses sont automatiques.

Ce que tu décris sur la force dans les doigts, me fait penser à l'école française de Marguerite Long, ultra digitale. Je ne peux pas cacher que je suis beaucoup plus proche de l'école russe, sans en embrasser non plus toutes les extrémités. Mais c'est aussi plus pragmatique. Ce que j'affirme, c'est qu'il est physiologiquement impossible de jouer du piano en ayant 100% de la force dans les doigts, et qu'il est tout aussi impossible d'y parvenir en étant 100% détendu. Je pense pouvoir le montrer assez simplement.
Un état 100% détendu ne permet pas d'utiliser le poids, donc interdit de tirer le son, ou même "basiquement" de jouer legato. Jouer 100% avec les doigts ne donne pas accès à des pans entiers de techniques qui n'utilisent peu ou pas du tout les doigts, ceci inclue la technique d'accords et d'octaves. Pour ma part, j'utilise le poignet et le coude même dans les traits digitaux. Les doigts sont par nature inégaux, et il faut accepter leur inégalité, car ils ont chacun leur caractère. Pour jouer égal, on peut cependant compenser certaines "faiblesses" naturelles en prolongeant les gestes au delà des doigts.

@JPS :
Je commence par te citer ici :
"Davsad nous dit que l'état "de flow", la situation 1, est l'état souhaitable pour avoir de bonnes sensations. Je suis entièrement d'accord. Mais qu'est ce qui fait qu'après avoir travaillé soigneusement, testé cet état "de flow" à plusieurs reprises chez soi, on se retrouve à pouvoir le reproduire ou pas, ce qui est à mon avis relativement indépendant du trac."
C'est là que je rentre en désaccord, en raison de ce que je décris au dessus au sujet du parallèle piano/échecs. Pour moi, l'état de flow n'est pas l'objectif car justement il est trop aléatoire. Je pense que l'objectif est que certaines des composantes du jeu soient caractérisées par cet état, mais pas l'ensemble de l'execution. Sinon ça peut très bien ou très mal se passer, car cet état est trop fragile en lui-même. Il est d'après moi crucial de trouver cet équilibre entre flow et concentration (appel au composantes flow aux bons moments, et parfois rejet du flow).


@Jean-Luc :
Je pense que tu as très bien compris mes propos, et je pense aussi que je comprends ce que tu veux dire (dis moi si ce n'est pas le cas au vu de la suite). Tout en restant sur ma position, je suis (sans contradiction) le premier à recommander de lire des biographies et de se renseigner sur les oeuvres. Cependant, je pense que le contenu de la partition peut généralement être auto-suffisant. Ca me semble même une nécessité, d'abord car tous les compositeurs et oeuvres ne sont pas aussi documentés que ceux et celles qu'on cite ici. Parfois, l'information n'existe simplement pas (compositeur inconnu en son temps ? musique trop ancienne ?), et il faut bien alors se débrouiller avec le contenu strictement musical. Je ne dis pas qu'absolument tout est écrit sur la partition, mais qu'avant de chercher à connaître ce qui l'entoure, il faut déjà avoir dépouillé toute l'information qu'elle renferme.

Je vais tenter de montrer que même lorsqu'on a les éléments, parfois, il n'est pas plus mal de s'en passer. Pour revenir à cette 5e Polonaise, je ne vois pas quel élément de tout ce que je sais sur Chopin me donne la certitude que la "Mazurka" centrale n'est pas simplement une mazurka qui s'est invitée dans la polonaise. Ce n'est pas du tout une citation de mazurka, pour moi, ça ne peut être qu'un "souvenir" de mazurka, un "fantome" de mazurka. Ca change tout dans mon image esthétique et dans la manière dont je joue ça. Et comment j'en viens à cette conclusion ? Pleins d'indices : le contraste entre les rythmes de danse et les piano/pianissimo partout (on a une mazurka dansée "de loin"), l'usage inédit des basses (souvent toutes les 2 mesures sur une harmonie unique, alors que dans la plupart des autres mazurkas, c'est toutes les mesures), cet usage des basses demande une pédalisation différente (plus longue) qui contribue à créer ce son d'ether, la notation perlando qui revient partout (piqué et lié en même temps) et qui refuse le legato profond tout autant que le stacatto dansant, mais demande de jouer avec les résonnances, etc. D'où cette notion de souvenir, d'éloignement. Tout concorde : cette mazurka refuse de s'affirmer, elle n'ose que s'auto suggérer. Effrayante cette évocation de mazurka quand j'y pense, nimbée d'un mystère que le pianiste doit laisser là où il est...
Modifié en dernier par Okay le jeu. 27 févr., 2014 12:43, modifié 3 fois.
BluePhoenix05
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Re: Les sensations psychomotrices au piano

Message par BluePhoenix05 »

davsad a écrit :Je lis en ce moment un livre intitulé "les deux vitesses de la pensée" de Daniel Kahneman, professeur de psychologie cognitive et prix nobel en 2002. Et les "deux vitesses de la pensée" sont justement ces deux systèmes de reflexion que tu met si bien en opposition : "la pensée instinctive, automatique" d'une part et "les instructions conscientes à mettre en oeuvre" d'autre part.
Dans le livre, il ne met pas les 2 systèmes en opposition, juste une description schématique pour les distinguer et les "étudier".
davsad a écrit : Et dans une partie de son livre, Kahneman parle justement de l'état de flow, et il explique en gros qu'on peut l'atteindre lorsque l'on parvient à rendre une activité qui en théorie devrait être pilotée par le système 2 (le système de pensée qui reflechit avant d'agir donc) par le système 1 (celui qu'on appelle communément l"instinct" ou les "reflexes").
L'état de flow correspondrait donc en fait à la capacité d'être tout à fait instinctif dans une activité qui necessiterait en théorie de la reflexion consciente.
Voilà, je pourrai développer beaucoup plus mais il est bien tard, et je me rend compte que je ne suis pas très clair.
Voilà, une sorte de symbiose à atteindre !

où Okay en parlait
Okay a écrit : - Facteurs cognitifs. Tout d'abord une intuition, confirmée scientifiquement dans un bouquin lu récemment. Nous avons une jauge physique et cognitive commune : un effort cérébral diminue les performances physiques, et un effort cérébral diminue les performances cognitives. Autrement dit, après une heure de travail intense (intense dans le sens où on mobilise 110% de sa concentration à chaque instant, ce qui donne chaud au crane au sens propre ; ce n'est pas pour rien que ce genre d'heure apporte 10 fois plus que 3 jours de travail à répéter en boucle lentement), l'état de fluidité cognitive devient absolument hors de portée car on a épuisé la jauge.
Modifié en dernier par BluePhoenix05 le jeu. 27 févr., 2014 10:18, modifié 1 fois.
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Okay
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Re: Les sensations psychomotrices au piano

Message par Okay »

BluePhoenix05 a écrit :
davsad a écrit :Je lis en ce moment un livre intitulé "les deux vitesses de la pensée" de Daniel Kahneman, professeur de psychologie cognitive et prix nobel en 2002. Et les "deux vitesses de la pensée" sont justement ces deux systèmes de reflexion que tu met si bien en opposition : "la pensée instinctive, automatique" d'une part et "les instructions conscientes à mettre en oeuvre" d'autre part.
Dans le livre, il ne met pas les 2 systèmes en opposition, juste une description schématique pour les distinguer et les "étudier".
Exact, il démontre même leurs aspects complémentaires, c'est ce que je tente d'exprimer dans ce fil, car je pense que c'est une idée infiniment utile pour l'execution musicale ...
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Re: Les sensations psychomotrices au piano

Message par BluePhoenix05 »

Et ca ne concerne pas uniquement l'exécution, mais aussi l'apprentissage.
Chuang parle de laisser son "inconscient" travailler pour soi et résoudre les problèmes (c'est utile en maths aussi).

Quand on est dans cet état de "flow", on a l'impression de vivre pleinement le moment présent, tout en voyant le paysage entier défiler (passé/présent/avenir du morceau), une sorte d'omniscience. Il y a aussi une sorte de lâcher-prise à réaliser, quelque chose que les arts martiaux aussi cherchent à enseigner, in fine tout semble "naturel".
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Oupsi
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Re: Les sensations psychomotrices au piano

Message par Oupsi »

C'est intéressant; ça me fait penser à un livre que mon professeur de piano m'a prêté il y a quelques mois, qui traite... du tennis. Ça s'appelle The Inner Game of Tennis, de Thimothy Galway,et ça distingue aussi ces deux systèmes, qu'il appelle Self 1 et Self 2, qui équivalent à ce que vous décrivez. Ce qui est très intéressant dans ce livre c'est qu'il s'agit d'une activité très physique bien sûr, où la vitesse et la stratégie sont très importantes et où, donc, on n'a pas le temps de réfléchir, si on réfléchit trop on loupe la balle bien sûr.
Dans ce livre toutefois, si je l'ai bien compris, il ne s'agit pas de "réflexe". Il s'agit de restituer l'état spontané de l'enfance ("childlikeness"), ce à quoi je pense quand je parle d'"éveil", c'est-à-dire un état où tout ce qui est disponible comme "moyens" est intimement associé au déploiement plein de désir et d'appétit d'une curiosité présente. La partie "Juge" est absente, mais ça ne veut pas dire pas de conscience, ça veut dire une conscience disponible, pleine d'intérêt et de curiosité, non consciente de soi mais absolument réceptive à tout ce qui se passe, la respiration, le son de la balle, la trajectoire, absolument présente dans le geste. Cette manière de jouer permet d'arriver à ce que "ça joue" plutôt que "Je joue", mais dans ce laisser les choses se faire pratiquement toutes seules, il n'y a pas de retrait de la conscience, il y a un retrait du jugement et du contrôle, ce qui n'est pas du tout pareil.

Il y a dans ce livre une remarque en passant très intéressante: l'auteur dit que beaucoup de gens font inconsciemment le choix de ne pas lâcher la position de contrôle, même s'ils savent qu'ils jouent moins bien; parce qu'en quelque sorte, ils ne supportent pas la sensation que le crédit de la réussite leur échappe. Quelque chose résiste.
Modifié en dernier par Oupsi le jeu. 27 févr., 2014 11:10, modifié 1 fois.
Val
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Re: Les sensations psychomotrices au piano

Message par Val »

La difficulté, c'est de répartir efficacement ces deux "pensées". Comment peut-on jouer une mazurka sans y penser ? En particulier chez Chopin, la musique demande un certain état d'esprit, qui ne peut être obtenu dans l'exécution "instinctive", et qu'il faut réinventer à chaque fois, il ne faut jamais jouer une œuvre plusieurs fois de la même manière... Mais pourquoi ? Car les moment où l'on se trouve dans l'état d'esprit que nécessite l'œuvre, s'ils sont suffisamment réguliers, peuvent s'inscrire dans la pensée instinctive. Pourrait-on alors jouer une pièce sans la sentir ? Pour autant, techniquement j'en suis presque assuré, mais émotionnellement... Sommes-nous capables d'exprimer des sentiments profonds sans même qu'ils n'aient été convoqués ? Jusqu'où peut apprendre cette mémoire instinctive, et surtout dans quelle mesure peut-on l'utiliser, face à la pensée ordonnée ?
Val
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Re: Les sensations psychomotrices au piano

Message par Val »

BluePhoenix05 a écrit :Et ca ne concerne pas uniquement l'exécution, mais aussi l'apprentissage.
Chuang parle de laisser son "inconscient" travailler pour soi et résoudre les problèmes (c'est utile en maths aussi).
C'est tout à fait vrai, et cet inconscient réfléchit pendant que l'on fait n'importe quoi d'autre... Chez Google d'ailleurs, quand les employés ne trouvent pas ce qu'il faut, il leur est conseillé (imposé ?) d'aller marcher, ou de se détendre, et, revenus au travail, ils trouvent, le plus souvent.

Nous avons encore beaucoup de choses à apprendre sur notre cerveau et son fonctionnement.
Serge
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Re: Les sensations psychomotrices au piano

Message par Serge »

Je pense que cette état de flow est éminemment chimique, c a dire que le cerveau stimule la production de certaines
Hormones comme l andorphine par exemple... Planant... Un peu comme si on était sous morphine mais en pleine conscience..
BluePhoenix05
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Re: Les sensations psychomotrices au piano

Message par BluePhoenix05 »

davsad a écrit : Okay : "Oui, c'est très utile de souligner ça. L'objectif au piano n'est pas la détente abolue. C'est une hérésie de poursuivre ce but. Comment peut-on jouer du piano en étant comme un chamallow ? Selon les besoins, la force doit être repartie dans les doigts, jusqu'aux poignets, épaules, dos, voire tout le corps. La tension pour moi provient d'une mauvaise repartition de la force entre toutes ces parties. Plus précisément, si par exemple en jouant des octaves très vite on libère les poignets et les coudes mais pas les épaules, ça va coincer. Donc en effet, pour atteindre cet état, il y a déjà un rapport au corps. Généralement, on est trop tendu. Mais parfois on peut aussi être trop détendu, ce qui peut être ravageur pour la sécurité, notamment lorsqu'on a besoin d'attaques égales ou qu'on doit prendre des risques. Il faut bien allouer son energie."

Là je ne suis vraiment pas d'accord. Je pense que la force doit être entièrement localisé dans les doigts et que tout le reste de ton corps doit effectivement ressembler à un chamallow, je renvoie au livre de Monique Deschaussée sur les études de Chopin pour plus de précisions, où même plutôt à son livre "l'homme et le piano" que je ne peux pas encore conseillé néanmoins car ne l'ayant pas encore lu.
Pas d'accord non plus, pour moi tout le haut du corps (buste) participe à la production sonore : tout ce qui est en amont des doigts. Le mouvement part des bras, c'est-à-dire des muscles rattachés à l'omoplate dans le dos ! Ce n'est pas que les bras entraînent le mouvement. Ensuite la sensation de "force" est localisée au bout du doigt (on "attrape"/arrache le clavier), le reste du doigt devant rester souple et détendu.

J'ai lu "L'homme et le piano" mais n'en ai gardé aucun souvenir intéressant sur la technique pianistique...
Par contre il y a des choses intéressantes dans "Le piano" de Marguerite Long (la partie introductive, pas les exercices ! :lol:), notamment sur l'inégalité de fait des 5 doigts.
Okay a écrit :Ce que tu décris sur la force dans les doigts, me fait penser à l'école française de Marguerite Long, ultra digitale. Je ne peux pas cacher que je suis beaucoup plus proche de l'école russe, sans en embrasser non plus toutes les extrémités. Mais c'est aussi plus pragmatique. Ce que j'affirme, c'est qu'il est physiologiquement impossible de jouer du piano en ayant 100% de la force dans les doigts, et qu'il est tout aussi impossible d'y parvenir en étant 100% détendu. Je pense pouvoir le montrer assez simplement.
Un état 100% détendu ne permet pas d'utiliser le poids, donc interdit de tirer le son, ou même "basiquement" de jouer legato. Jouer 100% avec les doigts ne donne pas accès à des pans entiers de techniques qui n'utilisent peu ou pas du tout les doigts, ceci inclue la technique d'accords et d'octaves. Pour ma part, j'utilise le poignet et le coude même dans les traits digitaux. Les doigts sont par nature inégaux, et il faut accepter leur inégalité, car ils ont chacun leur caractère. Pour jouer égal, on peut cependant compenser certaines "faiblesses" naturelles en prolongeant les gestes au delà des doigts.
Je pense pareil, si on "détend", c'est qu'on a contracté... Il y a des muscles qu'on tend et détend, et d'autres qu'il faut laisser tout le temps détendu.
On ne peut pas jouer en étant totalement amorphe. Le buste reste tonique.

Mais pour parler plus de technique, un autre fil me semblerait plus approprié plutôt que de poursuivre dans celui-ci qui est déjà bien chargé !
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Re: Les sensations psychomotrices au piano

Message par BluePhoenix05 »

Val a écrit :
BluePhoenix05 a écrit :Et ca ne concerne pas uniquement l'exécution, mais aussi l'apprentissage.
Chuang parle de laisser son "inconscient" travailler pour soi et résoudre les problèmes (c'est utile en maths aussi).
C'est tout à fait vrai, et cet inconscient réfléchit pendant que l'on fait n'importe quoi d'autre... Chez Google d'ailleurs, quand les employés ne trouvent pas ce qu'il faut, il leur est conseillé (imposé ?) d'aller marcher, ou de se détendre, et, revenus au travail, ils trouvent, le plus souvent.
C'est une excellente démarche (bien que par partout bien vue malheureusement...).
N'avez-vous pas souvent l'impression que certaines des meilleures idées que vous avez eues pour résoudre un problème sont venues lorsqu'on laissait l'esprit divaguer, en milieu de la nuit, sous la douche, aux toilettes, ou pour d'autres en allant fumer une cigarette ?

Pour moi l'un des grands apports de Chuang a été de mettre le doigt sur ce processus (il ne l'a pas inventé :wink:), et sur le PPI (Post-Practice Improvement).
Il faut donc favoriser cet état de l'esprit où c'est "l'inconscient" (le terme n'est peut-être pas le plus précis) qui travaille pour nous sans effort.

Daniel Kahneman pointe quand à lui les biais non conscients induit par ce système, pour pouvoir d'un autre côté mieux en tirer parti aussi.
Val a écrit : Nous avons encore beaucoup de choses à apprendre sur notre cerveau et son fonctionnement.
so true !
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Okay
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Re: Les sensations psychomotrices au piano

Message par Okay »

Oupsi a écrit : Cette manière de jouer permet d'arriver à ce que "ça joue" plutôt que "Je joue", mais dans ce laisser les choses se faire pratiquement toutes seules, il n'y a pas de retrait de la conscience, il y a un retrait du jugement et du contrôle, ce qui n'est pas du tout pareil.
C'est très intéressant ça. Ca suggère de seulement retirer le juge qui est en nous lorsqu'on execute un morceau, mais que la conscience reste dans un état de veille. Si elle doit rester là, ça veut bien dire qu'on a besoin d'elle au delà de son rôle spectateur non ? Car outre ce contrôle qui inhibe et qui ne doit rester là que dans les phases du travail, elle a quand même plein de choses à faire lorsque "ça joue". Je ne pense pas qu'on doive viser un pilote automatique total, cette sensation qu'on a parfois de se regarder jouer. Je pense que tout n'est pas automatisable. Ce qui nous amène à la remarque que tu nous fais partager :
Oupsi a écrit : Il y a dans ce livre une remarque en passant très intéressante: l'auteur dit que beaucoup de gens font inconsciemment le choix de ne pas lâcher la position de contrôle, même s'ils savent qu'ils jouent moins bien; parce qu'en quelque sorte, ils ne supportent pas la sensation que le crédit de la réussite leur échappe. Quelque chose résiste.
Je suis certain que ce phénomène a une drole d'importance, ça peut faire tellement de bien à certains égos de se dire "ça fonctionne car c'est ma tête qui l'a ordonné à mon corps, c'est donc grâce à moi". Cependant, je ne suis pas tout à fait sûr qu'il se transpose bien du sport vers la musique. Car la notion de performance n'est quand même pas la même. Surtout dans les sports où il y a un adversaire, il y a quand même l'aspect de la gagne, un esprit de compétition qui peut être tout à fait sain. Pour l'instrument, c'est plus une victoire sur soi même qui est recherchée, donc est-ce que le même type de resistances (i.e. je refuse de jouer bien grâce à un pilote automatique) peut se développer dans ce cas ?
Je pense qu'au contraire, un instrumentiste est d'autant plus flatté lorsqu'il arrive à bien jouer tout en se disant qu'il trouve ça facile et naturel ... (à moins que ce soit le reflet de mes propres resistances à lacher du leste) ...
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Re: Les sensations psychomotrices au piano

Message par Oupsi »

Okay a écrit :Je pense qu'au contraire, un instrumentiste est d'autant plus flatté lorsqu'il arrive à bien jouer tout en se disant qu'il trouve ça facile et naturel ... (à moins que ce soit le reflet de mes propres resistances à lacher du leste) ...
Tu as tout à fait raison, mais c'est parce que tu as pris conscience de l'intense satisfaction que produit ce résultat, tu as expérimenté de manière répétée et sincère que la musique s'exprime plus facilement ainsi et donc tu as investi cet état. Tu ne le sens pas comme une perte de contrôle, ni comme une perte de maîtrise, ni comme une capitulation. Cela n'est pas donné à tout le monde, en tout cas pas de prime abord.
Okay a écrit : Ça suggère de seulement retirer le juge qui est en nous lorsqu'on exécute un morceau, mais que la conscience reste dans un état de veille. Si elle doit rester là, ça veut bien dire qu'on a besoin d'elle au delà de son rôle spectateur non ? Car outre ce contrôle qui inhibe et qui ne doit rester là que dans les phases du travail, elle a quand même plein de choses à faire lorsque "ça joue". Je ne pense pas qu'on doive viser un pilote automatique total, cette sensation qu'on a parfois de se regarder jouer. Je pense que tout n'est pas automatisable.
Tu l'exprimes à plusieurs endroits de ce fil, c'est l'art de l'équilibre entre l'instinctif et le cognitif-conscient. En effet on a besoin de cet état de conscience puisqu'il guide en partie le choix des moyens utilisés. Savoir répondre à ce besoin à bon escient, dans ses ressorts les plus concrets, sans en tirer de conclusions ni de jugements sur soi, mais simplement en restant dans l'action est un exercice difficile et finalement assez humble dans son essence, je pense que ça rejoint ce que tu disais plus haut de l'artisanat au piano.
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BM607
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Re: Les sensations psychomotrices au piano

Message par BM607 »

Oupsi a écrit :C'est intéressant; ça me fait penser à un livre que mon professeur de piano m'a prêté il y a quelques mois, qui traite... du tennis. Ça s'appelle The Inner Game of Tennis, de Thimothy Galway,et ça distingue aussi ces deux systèmes, qu'il appelle Self 1 et Self 2, qui équivalent à ce que vous décrivez. Ce qui est très intéressant dans ce livre c'est qu'il s'agit d'une activité très physique bien sûr, où la vitesse et la stratégie sont très importantes et où, donc, on n'a pas le temps de réfléchir, si on réfléchit trop on loupe la balle bien sûr. ....
Ué un parallèle avec le sport, super je croyais être le seul à en faire ici (avec l'impression à chaque fois d'être à 8000 pieds au-dessus de l'auditoire). C'est un prof comme ça qu'il me faudrait, ouvert à des idées larges (et au sport :oops: ) !

Je ne vais pas en faire des tonnes là-dessus donc, mais on a pas mal d'exemples qui pourraient être cités, par exemple (parmi bien d'autres) concernant la conduite automobile (F1 notamment) ou certains pilotes ont rapportés des expériences (rares) où ils avaient l'impression d'être en dehors de leur corps et où les mouvements et les anticipations de faisaient avec un naturel extraordinaire, s'occupant des "automatismes" très rapides et leur laissant juste l'initiative de la tactique de l'épreuve globale.

Ou encore.... non rien.

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Re: Les sensations psychomotrices au piano

Message par Oupsi »

BM607 a écrit :Ué un parallèle avec le sport, super je croyais être le seul à en faire ici
Je savais que ça te plairait!

C'est un livre pragmatique, à l'américaine; très amusant à lire; plein de bon sens et de vraies questions passionnantes; il est bien antérieur (1974) à toute la mouvance actuelle des sciences cognitives etc., le moins qu'on puisse dire c'est que ce monsieur a eu d'incroyables intuitions.
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Re: Les sensations psychomotrices au piano

Message par BM607 »

Il y a aussi des études sur le sujet (le livre je ne le connais pas, mais je lis assez d'ouvrage américains en langue originale pour me douter de la forme) car évidement il y a de gros enjeux dans le sport-business (le tennis effectivement brasse pas mal d'argent) et donc pas mal d'avancées récentes.

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Re: Les sensations psychomotrices au piano

Message par Jean-Luc »

Okay a écrit :Pour revenir à cette 5e Polonaise, je ne vois pas quel élément de tout ce que je sais sur Chopin me donne la certitude que la "Mazurka" centrale n'est pas simplement une mazurka qui s'est invitée dans la polonaise. Ce n'est pas du tout une citation de mazurka, pour moi, ça ne peut être qu'un "souvenir" de mazurka, un "fantome" de mazurka. Ca change tout dans mon image esthétique et dans la manière dont je joue ça. Et comment j'en viens à cette conclusion ? Pleins d'indices : le contraste entre les rythmes de danse et les piano/pianissimo partout (on a une mazurka dansée "de loin"), l'usage inédit des basses (souvent toutes les 2 mesures sur une harmonie unique, alors que dans la plupart des autres mazurkas, c'est toutes les mesures), cet usage des basses demande une pédalisation différente (plus longue) qui contribue à créer ce son d'ether, la notation perlando qui revient partout (piqué et lié en même temps) et qui refuse le legato profond tout autant que le stacatto dansant, mais demande de jouer avec les résonnances, etc. D'où cette notion de souvenir, d'éloignement. Tout concorde : cette mazurka refuse de s'affirmer, elle n'ose que s'auto suggérer. Effrayante cette évocation de mazurka quand j'y pense, nimbée d'un mystère que le pianiste doit laisser là où il est...
Merci Okay pour cette réponse que je pense avoir comprise. Bien sûr, tu as tout à fait raison sur cette analyse que je partage à 100%. Cette mazurka n'est qu'un souvenir nostalgique de "sa" Pologne qui contraste avec les 2 autres parties qui encadrent cette pseudo-mazurka, où ce sont la fierté polonaise et la colère quasi guerrière face à l'invasion Russe (et à la défaite de la Pologne) qui s'est déroulée 10 ans plus tôt.
Néanmoins, te baser uniquement sur la partition pour évoquer tous ces éléments, sans connaître le contexte est vraiment difficile. Ce que tu dis est très juste, mais très franchement, ton analyse n'est-elle pas influencée parce que tu sais déjà toutes ces choses, qui ne font que conforter ladite analyse?
L'écriture est certes un peu différente de ses mazurkas (notamment la MG pour les raisons que tu donnes), mais beaucoup de mazurkas évoquent un douloureux souvenir où la danse prend à peine le pas sur l'évocation et sans que l'écriture ne soit très différente d'une mazurka plus affirmée.
Nous sommes en plein dans l'image esthétique de Neuhaus!
Pardon pour ce HS...
davsad
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Re: Les sensations psychomotrices au piano

Message par davsad »

Merci à vous tous pour ces messages si instructifs et que j'ai lu avec beaucoup d'attention.

Pour conclure, j'ai envi de rendre hommage aux mazurkas de notre cher Chopin, qui étaient clairement sa forme musicale de prédilection, et qui restent pourtant (et de manière surprenante) tellement moins jouées que le reste de ses oeuvres...
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