Désenchantement des oeuvres qu'on apprend

Théorie, jeu, répertoire, enseignement, partitions
Line-Marie

Re: Désenchantement des oeuvres qu'on apprend

Message par Line-Marie »

:D je ne déchiffre pas 5 œuvres en même temps !
C'est comme avec les enfants : je n'ai pas eu d''enfants jumeaux donc mes 4 enfants sont nés à plusieurs années d'écart ce qui m'a permis de découvrir chacun d'eux de façon intense.
C'est la même chose avec les œuvres que je travaille. Pour les 5 oeuvres citées plus haut:
j'ai commencé à travailler les Variations Sérieuses début juin 2014, et j'ai pu les enchaîner par cœur fin aout, mais avec beaucoup d'accros ...Le travail est loin d'être fini, et la construction de l’œuvre est encore bancale...
le nocturne de Poulenc mi septembre 2014, bon que 3 pages donc fin octobre je l'avais mémorisé, plus facile que la pièce précédente évidement, mais pleine de pièges quand même...
Le nocturne de Chopin , difficile... j'ai commencé à le travailler à la mi octobre, début décembre je l'avais mémorisé, je commence à pouvoir faire chanter les passages qui me posent problème....
l'étude de Debussy début novembre, je l'ai mémorisé complétement, très belle petite pièce, qui m'est accessible sans énormément d'efforts.
Je n'arrive plus à travailler d’œuvre sans les avoir mémorisées. Il n'y a aucune vantardise dans mes propos ! Nombreux sont ceux sur ce forum qui savent que j'ai découvert il y a seulement 3 ans que je pouvais mémoriser une partition. Pour moi c'est une nécessité. Je n'arrive pas à travailler autrement. D'autres beaucoup plus savants que moi sauront expliquer pourquoi.
Pour moi, cela correspond à une intériorisation de l’œuvre étudiée, ainsi je la fais mienne. Je fonctionne de la même façon dans mon enseignement des mathématiques, à ceci près que je ne m'étais jamais posé la question de la mémorisation, je le faisais naturellement.
J'ajoute que je travaille le piano plusieurs heures par jour.
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Mona
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Re: Désenchantement des oeuvres qu'on apprend

Message par Mona »

Oupsi a écrit : Je me demande, ça vient progressivement cette capacité à travailler des morceaux aussi longs et nombreux? Pour l'instant, j'ai beaucoup de mal à tenir la concentration et mon discours sur des morceaux de plus de deux pages. Je peux les travailler et les jouer toute seule, mais pour donner à entendre c'est autre chose. J'ai bien repéré que je mets un peu moins de temps à apprendre mes morceaux qu'il y a trois ans, mais c'est assez long quand même, et quand je fais le forcing pour essayer d'avancer plus vite je le paye ensuite assez chez, tout est bancal, du coup j'ai inversé et je mets plus de soin qu'avant à la mise en place initiale, je veux dire j'essaye d'intégrer d'emblée plus de paramètres, même si ça prend plus de temps.
Même questions et même problèmes.... Je mets beaucoup de temps pour monter un morceau. Il me semble néanmoins que c'est un peu moins long et laborieux qu'avant, et puis, forcément, les morceaux sont aujourd'hui plus longs et difficiles qu'il y a 2 ans. Je préfère, comme toi, prendre plus de temps dans la mise en place de la pièce, travailler très lentement, certes ça ne va pas vite, mais je pense qu'au final on s'y retrouve : le morceau est plus solide, plus construit. Quand je cherche à aller plus vite, certes je mets moins de temps à "jouer" mon morceau, mais je ressens comme un déséquilibre dans mon jeu, qui est mal aisé, je ne suis pas en place, tout est de guingois. Aucun intérêt pour moi de survoler un morceau sans être vraiment "dedans". L'installation soignée de cette "structure" de départ me semble essentielle, même si j'ai souvent envie de brûler les étapes... Et je trouve que ce travail empêche justement le désenchantement. Parce qu'au final, le résultat est tellement plus satisfaisant.... Quand je cherche à éviter ce travail initial, au final, j'ai le sentiment de "subir" le morceau, tout est flottant... Quand j'accepte de prendre le temps, c'est moi qui prends possession du morceau, je m'en imprègne, je ne suis pas "jouée" par lui, c'est moi qui le joue.... Plus ou moins bien, certes, mais j'y suis... Après, je suppose qu'avec les années, cette phase initiale sera moins longue et qu'il sera possible de monter les morceaux moins laborieusement... (enfin j'espère..)

Bon me voilà partie dans des considérations métaphysico-musicologico-existentielles.... Sans doute l'abus d'alcool des derniers jours....
Line-Marie

Re: Désenchantement des oeuvres qu'on apprend

Message par Line-Marie »

:D on s'éloigne un peu du sujet, non?
l'apprentissage du piano n'est pas linéaire ! on peut piétiner pendant plusieurs semaines et puis tout d'un coup , on ne sait pas pourquoi, on passe au travers de la difficulté qui nous préoccupait.
Pour revenir au sujet: pour moi pénétrer dans une œuvre que je connaissais uniquement par l'écoute, c'est toujours un chemin qui me mène à une écoute totalement diffrente et donc bien plus passionnante.
C'est comme un tableau dans un musée, vous ètes attiré par sa beauté, mais c'est tout. Et puis une conférencière vous guide dans les méandres de ce tableau et après chaque fois que vous retrouvez ce tableau au musée , toute son histoire revient à vous et vous découvrez encore d'autres choses . Pour certaines œuvres , la découverte semble infinie...
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Re: Désenchantement des oeuvres qu'on apprend

Message par zebestovol »

Mona a écrit : Je préfère, comme toi, prendre plus de temps dans la mise en place de la pièce, travailler très lentement, certes ça ne va pas vite, mais je pense qu'au final on s'y retrouve : le morceau est plus solide, plus construit. Quand je cherche à aller plus vite, certes je mets moins de temps à "jouer" mon morceau, mais je ressens comme un déséquilibre dans mon jeu, qui est mal aisé, je ne suis pas en place, tout est de guingois. Aucun intérêt pour moi de survoler un morceau sans être vraiment "dedans". L'installation soignée de cette "structure" de départ me semble essentielle, même si j'ai souvent envie de brûler les étapes... Et je trouve que ce travail empêche justement le désenchantement. Parce qu'au final, le résultat est tellement plus satisfaisant.... Quand je cherche à éviter ce travail initial, au final, j'ai le sentiment de "subir" le morceau, tout est flottant... Quand j'accepte de prendre le temps, c'est moi qui prends possession du morceau, je m'en imprègne, je ne suis pas "jouée" par lui, c'est moi qui le joue....
100% d'accord!

C'est drôle, je m'apprêtais à écrire un message pour dire qu'on peut "arriver" à jouer un morceau sans faute, et pourtant sans le connaître vraiment bien, ce qui peut susciter un manque de conviction, et qu'on peut le répéter très longtemps sans jamais l'assimiler ni pouvoir s'exprimer vraiment à travers lui.
Outre l'ennui réel dû à nos propres goûts musicaux, ce fait-là peut également provoquer un désenchantement, et augmenter cet ennui.
sylvie piano
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Re: Désenchantement des oeuvres qu'on apprend

Message par sylvie piano »

C'est un bien joli thème, qui vient de ce mot " désenchantement ". Pour qu'il y ait " désenchantement " il faut qu'il y ait eu " enchantement ". Or, l'enchantement n'est pas donné à tous.
Je ne pense pas que la difficulté de l'oeuvre soit un facteur important. Une petite pièce de rien peut " enchanter ". Une première mélodie, le premier prélude de Bach....
Si il y a désenchantement, ne faut-il pas déjà se réjouir qu'il y ait eu enchantement ?
Depuis le début de ce fil j'attendais une intervention comme celle de Stroumpf.
Il me semble qu' en effet travailler plusieurs oeuvres en parallèle, les abandonner un peu, les retrouver, les faire évoluer contribuent à renouer avec des enchantements inespérés. Il faut ajouter l'enchantement du travail. Le travail en tant que tel est pour certains ( dont je fais partie) un véritable plaisir enchanté.
Avec Beethoven ou Bach c'est flagrant. Chaque revisite permet de découvrir des richesses insoupçonnées. Et même avec des oeuvres simples.
Désenchantement ou découragement ?
Il faut souvent passer un cap pour retrouver la magie de la musique. Débloquer une nouvelle clé.
Il me semble que même en travaillant plusieurs oeuvres simultanément on peut approfondir le travail. Cependant, il faut certainement une grande capacité d'organisation.
Les oeuvres citées par Stroumpf si elles sont difficiles sont très complémentaires. Des textes de toutes expressions, de toutes durées, qui n'ont pas été commencées simultanément. Ainsi elles permettent à la pianiste de nourrir chaque jour un temps et un besoin différents.
Peut-être faut-il avoir en plus un faible besoin de sommeil !
Line-Marie

Re: Désenchantement des oeuvres qu'on apprend

Message par Line-Marie »

lorsque j'ai commencé avec ma prof actuelle, durant un an j'ai cru que j'allais explosé tant elle me donnait d’œuvres à étudier.... et puis un jour chez un ami commun , j'ai rencontré un pianiste professionnel qui me posait plein de questions sur mon parcours , sur ma façon de travailler et je lui confie alors ma peur devant tant d’œuvres à travailler... il a bien ri, et puis m'a dit de continuer sans me poser de questions , que c'était la meilleure méthode qu'il connaisse, que tous les pianistes travaillaient de cette façon et je pouvais envoyer balader tous ceux qui critiquait cette manière de faire , ils n'avaient rien compris ! Pourtant , je répondis que j'avais envie de travailler plus en profondeur, plus lentement, plus.... nouveau rire : il connaissait bien ma prof et me dit "parce qu'elle n'approfondit pas assez ? cela m'étonnerait d'elle !!!"
Oui il avait raison, tout est disséqué, fouillé, analysé et le seul frein c'est moi ! J'avais envie de mon traintrain quotidien, mes deux petites œuvres sympas à étudier et puis c'est tout !
Je pense avoir vraiment progresser avec ma prof depuis plus de trois ans et les progrès sont dû aussi à la quantité d’œuvres étudiées, les styles etc...
J'ai énormément lu aussi, énormément écouté d'émissions qui aident à comprendre tellement de chose, dans l'interprétation mais aussi sur le compositeur ou tout simplement à mieux se connaître.
Mes progrès sont dû aussi au groupe dynamique et amical que nous avons formé avec d'autres pianistes du forum. Leur culture, leur richesse, leur amitié m'est précieuse et me dynamise. sans eux , je ne serais pas arrivé à ce stade de connaissances.
Wandarnok
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Re: Désenchantement des oeuvres qu'on apprend

Message par Wandarnok »

Merci strumpf! :)
Ton temoignage est vraiment très interessant. J'en tire déjà des conclusions pratiques pour mon apprentissage.
D'autant plus que j'ai pris un premier cours avec une nouvelle prof samedi dernier.
Et ce qui se dégage, à confirmer par la suite car un seul cours c'est trop peu, c'est qu'il faut bosser de nombreuses situations différentes.
Qui vont se renforcer les unes les autres.
Non à la sclérose! Passez douze ans sur 2 morceaux, aussi prestigieux ou importants soient-ils est une erreur dans la stratégie d'apprentissage (bon, 12 ans, j'exagère un peu :wink: ...).
8)
Line-Marie

Re: Désenchantement des oeuvres qu'on apprend

Message par Line-Marie »

:D oui, Wandermok, je crois que c'est l'idéal de tout apprentissage. Mais il faut un prof compétent pour faire ce type d'enseignement.
sylvie piano
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Re: Désenchantement des oeuvres qu'on apprend

Message par sylvie piano »

Un bon prof mais aussi un élève qui peut suivre le rythme ! :D
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