La conférence de Jérôme Ducros Tonal vs Atonal

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alcalde françois
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Re: La conférence de Jérôme Ducros Tonal vs Atonal

Message par alcalde françois »

Neuhaus répondait : non monsieur, c est vous qui ennuyez les sonates de Beethoven !!
Ah ah ah, celle-là elle est imparable. Disons que la différence avec certains qui jugent hâtivement ici la musique contemporaine, c'est que je sais que c'est de ma faute si je n'apprécie pas tout Beethoven. Je le vis comme un manque et non comme un rejet.
Pour sortir de ce débat, il faudrait donner une définition de la musique. Comme: ensemble structuré de notes visant à produire un effet tonal ou atonal sur l'auditeur
alcalde françois
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Re: La conférence de Jérôme Ducros Tonal vs Atonal

Message par alcalde françois »

Même si ça vous énerve, je convoque encore les enfants. Mon petit de deux ans dit : papa écoute de la musique (atonale). Ma fille de 8 ans dit : c'est la musique de papa. Nuance. La moyenne, qui est la seule musicienne ne dit rien. Et l'aîné, ado, dit que c'est de la musique de dégénérés. Qui croire?
Jean-Luc
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Re: La conférence de Jérôme Ducros Tonal vs Atonal

Message par Jean-Luc »

Je ne comprends décidemment pas ce que vous cherchez à démontrer avec l'expérience de vos enfants... :roll:
alcalde françois a écrit :Même si ça vous énerve, je convoque encore les enfants. Mon petit de deux ans dit : papa écoute de la musique (atonale). Ma fille de 8 ans dit : c'est la musique de papa. Nuance. La moyenne, qui est la seule musicienne ne dit rien. Et l'aîné, ado, dit que c'est de la musique de dégénérés. Qui croire?
Aucun.
Ce n'est pas que ça m'énerve, c'est que vous revenez sans cesse dans le même "argumentaire" (notez les guillemets) sans appronfondir vos réponses et en vous contentant de rester descriptif sur le comportement de vos enfants à l'écoute de la musique atonale (ou pas d'ailleurs).
Encore une fois, un enfant de 2 ans n'a pas de sens objectif construit, il avale ce qu'on lui donne et c'est avec ça qu'il va se construire.
Ca ne veut pas dire non plus que votre ado qui pense que c'est de la musique de dégénérés a raison... :mrgreen:
alcalde françois a écrit :"Au fond de l'Inconnu pour trouver du nouveau !" Baudelaire. Voilà pourquoi j'aime la musique contemporaine. Parfois lassé par la musique tonale, si prévisible, j'y trouve une nouveauté sans pareille.
Alors là, si ce n'est pas déformer le propos de Baudelaire...
Tout d'abord, un véritable effet de surprise ne peut se produire que quand le reste est prévisible. C'est comme si vous étiez devant un champs de roses, vous n'êtes pas surpris. En revanche, si une rose est au beau milieu d'un champs de maïs, effet de surprise garanti.
Dans la musique atonale, tout est imprévisible puisqu'il n'y a ni règles, ni codes... Comment voulez-vous savourer la surprise?
Dans la musique tonale, écrite avec ses codes qui varient selon les époques, et qui je l'admets bien volontiers, est souvent prévisible, il faut être sacrément blasé pour ne jamais entendre de surprise... C'est là le génie d'un compositeur. Savoir créer un effet de surprise lorsqu'on ne s'y attends pas. Ceux qui n'en font jamais sont tombés dans un certain oubli.
Et ceux qui en font trop? Trop tôt pour le dire... :D
alcalde françois
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Re: La conférence de Jérôme Ducros Tonal vs Atonal

Message par alcalde françois »

Et bien alors je vais parler d'un effet de surprise magique qui ne peut arriver que dans la musique contemporaine : c'est quand tout à coup il y a un passage tonal. Au milieu de l'étrangeté, un petit coin familier nostalgique.
Quant à l'absence de surprise dans une oeuvre atonale en général, je ne suis pas d'accord. Tout oeuvre nous éduque et construit peu à peu une habitude, dès lors il est parfaitement possible de surprendre même si l'oeuvre n'obéit pas à des règles et des codes externes. J'exclus la musique sérielle qui a des règles très précises qu'un musicien averti peut percevoir à l'écoute.
alcalde françois
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Re: La conférence de Jérôme Ducros Tonal vs Atonal

Message par alcalde françois »

Pour mes enfants qui me servent de cobayes, je préciserai que celles de 11ans qui fait de la musique (tonale), sifflote bien souvent de petits extraits de musique atonale : Schoenberg le rêvait, elle le fait! Et j'ajoute aussitôt que c'est une petite pianiste tout à fait ordinaire qui ne joue que depuis deux ans. Mais voilà, la musique ça se reconnaît et après on la siffle.
alcalde françois
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Re: La conférence de Jérôme Ducros Tonal vs Atonal

Message par alcalde françois »

Maintenant promis, j'arrête de parler des enfants pcq ça ne sert à rien, on n'est pas d'accord. Je penserai tjs qu'un enfant a une conscience musicale élaborée dès deux ans et vous le contraire. Tant que l'un de nous n'aura pas produit une étude cognitive un peu sérieuse à l'appui, on n'avancera pas. Malheureusement, celle sur laquelle j'appuie mes observations je l'ai perdue et j'en ai même oublié le titre.
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Re: La conférence de Jérôme Ducros Tonal vs Atonal

Message par Jean-Luc »

alcalde françois a écrit :Et bien alors je vais parler d'un effet de surprise magique qui ne peut arriver que dans la musique contemporaine : c'est quand tout à coup il y a un passage tonal. Au milieu de l'étrangeté, un petit coin familier nostalgique.
C'est donc la musique tonale qui provoque l'effet de surprise... Bin si je m'attendais à ça... :mrgreen: :mrgreen:
alcalde françois a écrit :Quant à l'absence de surprise dans une oeuvre atonale en général, je ne suis pas d'accord.
J'ai exactement dit le contraire.
J'aurais pu faire un raccourci en écrivant de la musique atonale : trop de surprises tue la surprise... :wink:
alcalde françois a écrit :Pour mes enfants qui me servent de cobayes, je préciserai que celles de 11ans qui fait de la musique (tonale), sifflote bien souvent de petits extraits de musique atonale : Schoenberg le rêvait, elle le fait! Et j'ajoute aussitôt que c'est une petite pianiste tout à fait ordinaire qui ne joue que depuis deux ans. Mais voilà, la musique ça se reconnaît et après on la siffle.
Certes, et alors? Je ne vois toujours pas où vous voulez en venir. Décidemment, je dois être un fini crétin... :D
alcalde françois
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Re: La conférence de Jérôme Ducros Tonal vs Atonal

Message par alcalde françois »

Je veux en venir au fait que la musique atonale est perçue par des auditeurs, à partir de deux ans, comme de la musique à part entière et je soutiens qu'elle présente des caractéristiques qui en font bel et bien de la musique.Il n'y a pas que la tonalité en musique. Debussy a mis en avant le timbre, suivi par l'école de Vienne. Il y a aussi le rythme. Et puis l'usage d'intervalles. etc
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Okay
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Re: La conférence de Jérôme Ducros Tonal vs Atonal

Message par Okay »

J'ai de plus en plus l'impression qu'on s'égare sur un point crucial.
Le caractère intelligible, compréhensible, plaisant ou tout ce que vous voulez de la musique n'est pas une conséquence exclusive de son caractère tonal.

Ce qui fait que nous avons parfois l'impression de ne percevoir qu'un chaos bruyant provient plus du traitement rythmique qu'harmonique du flux musical. On va m'accuser de faire des défigurations comme dans la conférence mais l'expérience suivante est intéressante pour mettre le phénomène au clair :
- On prend le début de la 2e Sonate de Boulez, un pillier incontournable du sérialisme, construction portée aux nues et qualifiée de "classique", de coup de génie d'un jeune homme d'une vingtaine d'années. On garde tout le rythme et toutes les nuances (incroyablement précises du reste) et on glisse toutes les notes de quelques demi-tons au plus (on garde les registres) pour en faire quelque chose en "do majeur"
- On prend le début du 13e nocturne de Chopin, une des plus merveilleuses mélodies du piano romantique. On glisse toutes les notes de quelques demi-tons (on garde toujours les registres) pour le "sérialiser". Un simple algoritme après tout.

Que va t-il se passer ?
D'après moi - qui ne peut réaliser cette expérience que par la pensée - le langage de Boulez ne va pas prendre vie en y forçant la tonalité à apparaître. Celui de Chopin, également peu épargné par la transformation subie, va cependant être très facile à suivre. Peut-être qu'on ne pourra plus le siffler, mais on pourra bel et bien suivre les événements.
Que tirer de cette observation ?
Je pense que l'élément "rythme" peut dominer l'élément "hauteur du son" en musique. On se passe plus difficilement des repères dans le temps que ceux dans l'espace sonore.
Donc ma conjecture, c'est qu'une bonne partie des hurlements contre la musique atonale, sont en fait un cri contre la destructuration du suivi dans le flux musical que cette "musique" impose parfois, et non pas une plainte contre l'éclatement de la tonalité.
Il est peut-être temps de mettre fin à un amalgame si on veut limiter le débat à la question de la tonalité : harmonie vs rythme. En plus, ça permet d'évacuer tous les exemples extrêmes et les caricatures.

Ma connaissance du contemporain est loin d'être encyclopédique, mais je n'ai pas trouvé un seul exemple d'oeuvre qu'on pourrait qualifier d'anti-musicale, qui soit à la fois profondément atonale et d'écriture rythmique claire. Après, il y a les oeuvres qui éclatent le temps et l'espace (comme cette Sonate de Boulez)...

[Edit : Marrant, j'ai posté avant de lire le message précédent, que j'ai finalement développé par pure coincidence]
alcalde françois
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Re: La conférence de Jérôme Ducros Tonal vs Atonal

Message par alcalde françois »

Merci d'avoir développé ma pensée. :D Mais je ne suis pas d'accord sur la destructuration du flux musical. Les oeuvres contemporaines sont hyper structurées, et heureusement, pcq déjà qu'elles nous privent des repères de la tonalité. Leur structuration est même parfois d'une simplicité biblique, je pense par exemple à Scelsi ou à un autre extrême, Morton Feldman. Je n'ai pas fait d'études de composition, je sais à peine lire une partition, mais je ressens profondément la structure de la 2eme sonate de Boulez. Instinctivement (je ne prétends pas percevoir les séries).
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Okay
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Re: La conférence de Jérôme Ducros Tonal vs Atonal

Message par Okay »

alcalde françois a écrit :Merci d'avoir développé ma pensée. :D Mais je ne suis pas d'accord sur la destructuration du flux musical. Les oeuvres contemporaines sont hyper structurées, et heureusement, pcq déjà qu'elles nous privent des repères de la tonalité. Leur structuration est même parfois d'une simplicité biblique, je pense par exemple à Scelsi ou à un autre extrême, Morton Feldman. Je n'ai pas fait d'études de composition, je sais à peine lire une partition, mais je ressens profondément la structure de la 2eme sonate de Boulez. Instinctivement (je ne prétends pas percevoir les séries).
Je n'ai pas dit qu'il n'y avait plus de logique interne. Je pense même qu'il y en a davantage dans ce genre d'oeuvre, ultra intellectualisées. Je suis sûr qu'une fugue de Bach c'est même le bazar à côté, car pour compenser une telle sensation auditive de bazar absolu, il faut que la salle des machines qui sous-tend l'ensemble ressemble à une montre Suisse vue au microscope. Sinon ça s'effondrerait j'imagine.

Ce que je dis, c'est que le flux musical semble destructuré (à mon pauvre cerveau du moins). Pas de repères rythmiques, au mieux parfois une cellule qu'on a l'impression de réentendre à 2 minutes d'intervalle après 10 écoutes, mais réalité ou pure coincidence ?

J'ai envie d'introduire cette référence dans la discussion, qui semble controversée mais plus solide que la conférence de Ducros, et qui reprend certains des arguments déjà avancés ici :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Les_Fondem ... ce_humaine
nox
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Re: La conférence de Jérôme Ducros Tonal vs Atonal

Message par nox »

C'est du lourd !
La première partie reprend en effet assez bien mon impression
Dans la première partie de son ouvrage, La conscience auditive et la conscience musicale, Ansermet démontre que l'évidence de sens de la musique — autrement dit ce qui fait qu'elle s'adresse directement au sentiment de l'auditeur et non à sa pensée — passe par son obéissance à une certaine loi tonale. Partant du constat que la perception humaine des intervalles est logarithmique (c'est-à-dire que l'oreille ne perçoit, entre deux sons, ni la différence de leurs fréquences, ni le rapport de leurs fréquence, mais le logarithme de ce rapport), il consacre, au début de son livre, de nombreuses pages à exprimer le logarithme de la quarte et de la quinte en fonction du logarithme de l'octave, jugeant fondamentale l'appartenance des intervalles à un même système. Si l'exactitude de ces développements musico-logarithmiques a pu être contestée, la question de leur validité n'en affecte pas pour autant la définition première qu'Ansermet donne de la musique, selon laquelle la racine même de l'acte musical consiste à lier les intervalles en un système. Il en conclut ainsi que l'atonalité se méprend entièrement sur la perception de la musique par la conscience auditive, dans la mesure où elle traite chaque intervalle isolément, et non comme un élément d'une structure globale. Les œuvres rigoureusement atonales ne peuvent donc plus, selon lui, prétendre à être de la musique, mais uniquement des successions de sons ; car elles n'ont plus cette cohérence interne, cette « évidence de sens » qui différencie le musical du sonore.
alcalde françois
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Re: La conférence de Jérôme Ducros Tonal vs Atonal

Message par alcalde françois »

Je ne peux pas adhérer à la conception de la musique de Ansermet. Mon prof de piano, également chef d'orchestre, mais n'ayant jamais été plus loin dans la modernité que Prokofiev, me disait toujours : n'oubliez pas que la danse a précédé la musique. Je ne sais pas si c'est vrai historiquement, mais il voulait me dire de saisir le caractère, l'élan propre à chaque pièce, qui est d'abord rythmique. Donc je maintiens que la musique atonale dont le rythme est travaillé depuis l'extrême simplicité jusqu'à la plus grande complexité, est bien de la musique même si les intervalles obéissent à une logique interne complexe et non aux lois de l'harmonie.
alcalde françois
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Re: La conférence de Jérôme Ducros Tonal vs Atonal

Message par alcalde françois »

Je vais lancer un argument un peu audacieux : si la musique contemporaine n'était qu'un bazar insensé, comment un chef d'orchestre pourrait-il diriger cela? Comment Pollini pourrait-il mémoriser les partitions de Boulez? Un interprète ne peut mémoriser qu'une oeuvre construite et qui a du sens, pas du chaos pur. Disons plutôt humblement : non je n'ai pas l'intelligence musicale de Pollini. Je dirai pareil du quatuor Arditti, qui a tant fait : eh oui, eux ils se sont lancé à fond, ils ont du mettre au point des nouvelles manières de jouer et leur oeuvre est monumentale.
nox
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Re: La conférence de Jérôme Ducros Tonal vs Atonal

Message par nox »

Personne n'a dit que c'était un bazar insensé, mais que l'auditeur lambda pouvait le percevoir comme tel.
alcalde françois
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Re: La conférence de Jérôme Ducros Tonal vs Atonal

Message par alcalde françois »

J'ai beau être un auditeur lambda, je ressens et j'apprécie la musique contemporaine. Il suffit d'écouter.Les événements sonores qui la composent ont du sens, et heureusement pour les exécutants, sinon quel calvaire.Parait-il que Loriod a pleuré à l'idée d'apprendre la 2eme sonate de Boulez. Mais c'est une grande musicienne et elle l'a fait. J'inviterai tout le monde à un peu d'humilité. Parmi les 32 sonates de Beethoven seule une douzaine me touchent, le reste m'ennuie. Mais comme me disait l'un d'entre vous, c'est moi qui ennuie ces sonates. Je ne vais pas déduire de mon incapacité à les apprécier qu'il s'agit de mauvaise musique. C'est moi qui suis en cause. Et je voudrais bien que ceux qui critiquent la musique atonale pcq ils n'y prennent pas de plaisir se remettent en cause comme moi. Il me manque un truc sur Beethoven. Il vous manque un truc sur la musique atonale.
nox
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Re: La conférence de Jérôme Ducros Tonal vs Atonal

Message par nox »

alcalde françois a écrit :il voulait me dire de saisir le caractère, l'élan propre à chaque pièce, qui est d'abord rythmique. Donc je maintiens que la musique atonale dont le rythme est travaillé depuis l'extrême simplicité jusqu'à la plus grande complexité, est bien de la musique même si les intervalles obéissent à une logique interne complexe et non aux lois de l'harmonie.
Il y a, à mon sens, beaucoup d'approximations dans ce raisonnement.
D'une part, "l'élan propre à chaque pièce [...] est d'abord rythmique", ça ne veut pas dire grand chose pour moi. Le rythme, le tempo, est important dans la musique, aussi bien tonale qu'atonale. Mais de là à dire qu'une pièce est avant tout "rythmique" il y a un sacré pas à franchir. [-X
D'autre part, même si on se base sur cette affirmation que je ne partage pas, il me parait un peu abrupt d'en déduire que le raisonnement d'Ansermet est faux sous prétexte qu'il se base uniquement sur l'harmonie et le caractère tonale ou atonal de la musique. [-X [-X
nox
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Re: La conférence de Jérôme Ducros Tonal vs Atonal

Message par nox »

alcalde françois a écrit :J'ai beau être un auditeur lambda, je ressens et j'apprécie la musique contemporaine.
J'ai dit qu'un auditeur lambda pouvait la percevoir comme tel, ça ne veut pas dire que c'est systématique et que tout le monde partage forcément cette impression, évidemment. Un contre-exemple ne détruit donc en rien le raisonnement de base.
alcalde françois
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Re: La conférence de Jérôme Ducros Tonal vs Atonal

Message par alcalde françois »

Avec un peu d'éducation et moins de préjugés le public de la musique contemporaine pourrait s'élargir, mais il est déjà relativement important. Mais pour prendre les choses sur le mode comique, qui d'entre vous oserait aller dire à Irvine Arditti sur son lit de mort : tu as consacré toute ta vie à une musique qui n'est pas de la musique, tu aurais mieux fait d'enregistrer les quatuors de Beethoven (que j'admire beaucoup). Moi, je le remercie d'avoir osé toutes les oeuvres et de me les avoir fait connaître.
Krisprolls
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Re: La conférence de Jérôme Ducros Tonal vs Atonal

Message par Krisprolls »

Oh punaise. Les gars.

Je dirais qu'une part très intéressante de la musique contemporaine atonale libre et même sérielle pure et dure, c'est de ne pas imposer d'émotion "a priori". L'auditeur peut alors librement projeter en son âme, ses souvenirs, son expérience, sa psyché. Il marche peut-être plus seul, sans personne pour lui tenir la main et lui dire : "ici, tu as la dissonance qui fait mal, ici, la cadence rompue qui met en attente, ici la tension, ici la relâche, ici la cadence parfaite qui te dit, c'est fini".
Donc, privé de ces repères conventionnels (car nous seuls issus de notre culture tonale en ressentons les effets), on peut penser que nous construisons en notre sein le cheminement imaginaire qui nous amène vers autre chose.
C'est exactement ce que j'ai ressenti il y a peu en écoutant une superbe version de "plis selon plis".
Et cette errance de l'âme non dictée par une dialectique conventionnelle m'a menée vers une grande émotion.
J'ai d'abord écouté ce disque avec ravissement, car le plaisir euphonique de la prise de son suffisait à un premier contentement superficiel : version datant des années 70, qui sentait l'analogique de pointe, avec une très belle définition des timbres, un soyeux, et une dynamique plutôt ébouriffante. L'espace de ma pièce d'écoute s'est métamorphosé en large auditorium rempli d'artistes de premier ordre.
Puis, délaissant peu à peu cette strate simple de plaisir physique du son, mon esprit s'est empressé dans un monde plus vaste. Il a quitté l'espace virtuel de la prise de son pour vagabonder dans les recoins de ma mémoire, de mes souvenirs, de mes amours passés. Libre d'errer sans contrainte.
Ca n'était pas une écoute analytique, mais une écoute purement sensuelle sous forme d'abandon... Proustien, peut-être... Chamanique, allez savoir ?

J'ai souvent ressenti cet abandon dans des oeuvres contemporaines, en particulier dans la musique répétitive qui a cet effet hypnotique, mais aussi dans certaines pages de Jazz contemporain (Louis Sclavis par ex.) ou même de Rock progressif (les Gongs...) (Nous sommes éloignés des gardiens du temple Boulezien.. D'ailleurs, toute la doxa pure et dure me fouetterait d'orties d'avoir ainsi pu sombrer dans tel voyage intérieur et sensitif, à l'écoute d'une musique aussi raisonnée).

IL y a tant de superbes choses dans l'atonal : je pense, là, maintenant, tout de suite, au Pierrot Lunaire. Raréfié, mi chanté mi chuchoté, épure sur un fil de nuit... Ahlàlà... Que vous me faites mal à vouloir tuer tout ça.
Avez-vous remarqué à quel point il est blessant de s'entendre dire qu'un compositeur aimé, ou qu'un courant aimé, c'est de la merde... Mettez-vous à ma place : j'aime assez Chopin, mais si je vous disais : c'est de la merde. C'est vide, sans intérêt, juste des trucs alanguis de phtisique impuissant, de la jérémiade niaise de salonnard petit bourgeoise et nombriliste, vous trouveriez ça blessant (et très con, et vous auriez mille fois raison).
je me souviens que j'avais ce genre de discussions avec un camarade en classe de première, au sujet de la musique de Mahler qui était mon adoration. C'était il y a plus de 25 ans... Je ne pensais pas avoir à nouveau à défendre certains pans de la musique auprès de mélomanes et de musiciens amateurs avertis.

Quand à l'argumentaire visant à taxer ceux qui aiment la musique contemporaine de Maoïstes, c'est euh... Une chose est sûre, les totalitarismes, les dictatures, les régimes tortionnaires s'attaquent en premier lieu à la pensée, puis au pluralisme culturel...
Modifié en dernier par Krisprolls le lun. 01 juil., 2013 22:17, modifié 6 fois.
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