Ah la la Franzounet, mon petit père, c'est fou ce besoin que tu as de juger les gens sur ce qu'ils font, ont fait, feront...Ben parle nous des pièces que tu joues actuellement?
Ne sais tu pas qu'on peut jouer le prélude n°5 de Rachmaninov ou la balade n°1 de Chopin au bout de 5, de 10, de 20 ou de 50 ans de pratique du piano, et que ca n'est pas le fait de le jouer mais bien plus la manière dont on le joue qui compte?
Mais je vais te répondre parce que ca a l'air de te tenir à coeur.
Ayant du jouer à un mariage le week end dernier, j'ai re-préparé rapido deux impromptus de Schubert et son Ave Maria. Parallèllement à ça je me rejoue en ce moment la fantaisie impromptue (n°4, bien sûr) et la Révolutionnaire, pour les doigts et pour la beauté de ces oeuvres, ainsi que d'autres partitions qui me passent entre les doigts.
Mais je consacre d'avantage de temps en ce moment à l'apprentissage de l'improvisation jazz, des gammes dans tous les sens, des accords à coucher dehors, des plans relevés dans les solos de quelques génies vivants ou morts. C'est une aventure passionnante, quoique d'une difficulté extrême... on se met sacrément plus à poil que devant une partition, si tu vois ce que je veux dire. Et on apprend à écouter! Et c'est très frustrant de ne pas pouvoir sortir quoique ce soit de correct de son piano, en jazz, alors qu'on a derrière soi de très nombreuses années de pratique du piano et que bon nombre de pièces classiques ne vous opposent plus de résistance majeure. Qui n'a jamais fait cette expérience, à une rencontre entre amis ou un barbecue le week end, d'assister impuissant au spectacle désarmant d'un jeune crétin gominé qui joue à la demande le morceau de votre choix, en plaquant trois accords à 2 francs 50, alors qu'il n'a pas 5 ans de pratique du piano ?Certes, ce qu'il fait ne vaut rien, mais n'est ce pas surprenant, voire désolant, qu'après 15 ou 20 ans d'étude sérieuse au Conservatoire, la plupart des virtuoses classiques qui en sortent soient incapables de vous jouer correctement "happy birthday" à l'oreille? Il me semble que l'apprentissage classique, bien souvent, est comparable à celui d'une langue morte. Quel plaisir de pouvoir concilier l'apprentissage d'une langue morte avec celui d'une langue vivante !
Non...?