On a tous des compositeurs auxquels on a du mal à accrocher. J'ai eu les miens. Mais le goût évolue. C'est comme la cuisine : j'aimais pas les épinards quand j'étais petit
(bon ok, d'accord, je sors 
).Non, plus sérieusement, oublions la cuisine et restons sur la musique.
Il fut un temps il y a bien longtemps (dans une galaxie lointaine) j'accrochais pas du tout, mais alors pas du tout à la musique de J.S. Bach (à la musique baroque en général en fait, mais notamment Bach). Il aurait été impossible de me faire jouer un morceau de Bach. Et pourtant, c'est pas les écoutes qui manquaient : j'étais plein de bonne volonté. J'avais beau avoir écouté le Clavier bien tempéré dans différentes interprétations (Gould, Richter, Koroliov, Rosalyn Tureck, Kenneth Gilbert, Gustav Leonhardt). Ça marchait pas. Je trouvais ça trop mécanique, je ressentais pas les émotions de cette musique (et pourtant Dieu sait qu'elle en contient). Et puis quelques années plus tard, un déclic s'est fait. J'ai entendu par hasard cette musique à la radio :
Passion selon saint Matthieu : "Kommt, ihr Töchter, helft mir klagen" : http://www.youtube.com/watch?v=uTkxFQ0ePms
J'avais pas entendu l'annonce du présentateur avant le morceau, ou bien je l'ai peut-être entendu sans y faire attention. Donc, j'ai entendu le morceau sans savoir que c'était du Bach (et c'est tant mieux ; si je l'avais su, j'aurai peut-être éteint le poste de radio). En écoutant ce morceau, j'ai eu une révélation. Je n'avais entendu autant d'émotion dans un même morceau. J'ai pensé : "C'est curieux comme morceau : y a peu d'instruments : un clavecin, quelques instruments à cordes et des vents qui font l'accompagnement. Et pourtant, de cette musique se dégage une puissance incroyable. C'est aussi puissant qu'un Requiem de Mozart ou Verdi, voire plus. Quand le morceau était fini, j'étais en larmes. (Je signale que je ne pleure jamais en écoutant de la musique, j'ai jamais versé une larme en écoutant Chopin). Je suis resté comme un idiot dans mon fauteuil sans rien faire pendant une demi-heure. J'avais complètement perdu tous mes repères. Ce Bach m'a absolument cloué sur place.
J'ai noté le nom de l'oeuvre qu'avait donné le présentateur radio une fois le morceau terminé et j'ai fais toutes les recherches inimaginables sur cette fameuse Passion de Bach (y avait pas d'Internet à l'époque). Je suis allé à la bibliothèque pour emprunter tous les disques qui étaient disponibles pour réécouter ce morceau.
Depuis, Bach est devenu mon compositeur préféré. Il ne se passe pas une semaine sans que je joue sa musique. Donc, je pense qu'il tout à fait possible d'apprécier que l'on approche au début avec réticence. L'appréciation peut venir avec la maturité, le déclic peut se faire avec un morceau bien précis. Ce morceau a été pour moi un extrait de la Passion selon Matthieu : dans un sens, c'est logique, la musique vocale est plus expressive. Avec le temps, je me suis rendu que je comprends beaucoup mieux le langage des compositeur en écoutant autre chose que leur musique pour piano. J'ai appris beaucoup de choses sur Beethoven en écoutant ses quatuors à cordes.
Essaie d'écouter le Scriabine orchestral : le concerto, les symphonies ou les poèmes symphoniques. Y a un peu de musique de chambre aussi : sur IMSLP, je vois des pièces pour piano et voix, piano et cor. Ça permet de voir d'autre facettes du compositeur.
Après, peut-être que tout simplement c'est pas ton truc. C'est tout à fait possible aussi. Y a pleins de gens qui n'aiment pas Scriabine (ou Bach). Ça veut pas dire qu'ils sont cons. Moi, j'accroche pas à Satie par exemple. Je pense que ça fait pas de moi un idiot (du moins j'espère que non). Faut pas se prendre la tête avec ça. Y a des choses plus graves dans la vie.
Tu m'as livré le message le plus long et le plus descriptif que j'ai jamais vu de ton part. 
Je suis touchée et par le contenu et par son exception. Merci, je ne le merite pas...