Ninoff a écrit : mer. 24 juin, 2020 15:51
Très intéressant de suivre cette progression..
Par exemple dans le domaine de la peinture l’on sait que la plupart des artistes ont recommencé des dizaines de fois leur toile pour avoir les teintes les plus justes, les accords les plus harmonieux et finalement une reproduction exacte du dessin imaginé.
Il faut du temps faire différents essais, et finalement en écoutant plusieurs fois plus aucun doute ne subsiste, les notes, les mots, les teintes ne peuvent être autrement.
Bravo mon ami
Merci Ninoff
Oui, tu as raison. Un long travail, sur lequel on revient sans cesse, jusqu'à trouver la substantifique moelle, on change ici et là, on rature, on reprend, on remet certaines choses plutôt ici, alors qu'au début on les avait mises plutôt là... on biffe par-ci, on rallonge un peu par -là. On change les tournures, la recherche de la note qui peut sonner plus juste. La teinte, un peu comme dans le processus d'écriture...
Dans un autre domaine (mais lié), j'adore regarder les manuscrits originaux des auteurs, par exemple ceux de Proust. C'est très formateur. On comprend encore mieux l'étendue du travail. Les ratures, les rajouts dans tous les coins. Et toutes ces papiers collés, sur les feuillets initiaux pour enrichir le premier jet d'écriture.
Je crois me souvenir que le manuscrit du
"Mort à crédit" de Céline a été retapé une bonne douzaine fois et comptait au tout départ, avant peaufinage , près de 50 000 feuillets (je ne sais combien en contenait au départ celui de l'ensemble de
"A la recherche" de Proust, mais cela doit être étourdissant... ).
"En réalité, je travaille avec beaucoup de labeur si j'ose dire. Il y a l'éloquence naturelle. ça, évidemment, c'est la base. mais enfin, la feuille de papier ne retient pas l'éloquence naturelle [...] Maintenir un effort de stylisation sur plusieurs centaines de pages demande énormément d'efforts, à savoir qu'il faut énormément revoir et revoir. Pour dire la vérité, 400 pages imprimées font 80 000 pages à la main. Le lecteur n'est pas obligé de le savoir. Il ne doit même pas le savoir. C'est affaire de l'auteur à effacer le travail", a pu dire Céline lors d'un entretien donné à la radio en 1957.
Et dire qu'à le lire, on a l'impression que c'est du style parlé, posé là, en une fraction de seconde, tout naturellement....