Bach au piano ou pas ?

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Jacques Béziat
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Re: Bach au piano ou pas ?

Message par Jacques Béziat »

Oukee a écrit : ven. 17 févr., 2023 11:49
La version pour orgue retire le coté percussif de l'original et donne un caractère complètement différent au morceau. On dirait parfois du Mendelssohn transporté au 20ième siècle :D !
C'est vrai, et personnellement j'adore.
Dans un autre registre, je me suis amusé à écrire une transcription (qui ne m'a pris guère de temps) du Prélude en si mineur de Bach/Siloti écrit pour piano, voilà ce que cela donne à l'orgue.
Sur la fin de la reprise, j'ai hésité entre un diminuendo et un crescendo, j'ai opté pour cette dernière solution pour ne pas répéter le schéma du premier tour.

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Oukee
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Re: Bach au piano ou pas ?

Message par Oukee »

Jacques Béziat a écrit : sam. 18 févr., 2023 0:15 Dans un autre registre, je me suis amusé à écrire une transcription (qui ne m'a pris guère de temps) du Prélude en si mineur de Bach/Siloti écrit pour piano, voilà ce que cela donne à l'orgue.
Sur la fin de la reprise, j'ai hésité entre un diminuendo et un crescendo, j'ai opté pour cette dernière solution pour ne pas répéter le schéma du premier tour.
C'est très convaincant, avec un élargissement de la dynamique qui en fait un autre morceau : la version piano de Siloti est vraiment très nostalgique, alors que ta transcription avance avec assurance.
nox
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Re: Bach au piano ou pas ?

Message par nox »

Merci beaucoup Oukee pour cet avis détaillé ! C'est intéressant, on ne le perçoit pas du tout de la même manière !
Oukee a écrit : ven. 17 févr., 2023 11:47 M8, FS met le thème en octave, alors que EA reste en note simple, ce qui me parait efficace pour ménager la progression ultérieure.
J'étais d'accord sur ce point, après finalement en le jouant j'aime bien le fait que dès le début tout en restant piano, on occupe "tout l'espace". Ca fait plus "cathédrale" :) mais c'est de l'ordre du pur ressenti.
Oukee a écrit : ven. 17 févr., 2023 11:47 M45 : au 3ième temps de la MG, FS supprime le si bécarre/Ré (deux dernière double croches) alors que la 10ième , maintenue par EA est faisable.
Oukee a écrit : ven. 17 févr., 2023 11:47 M50 : FS transpose le Fa (dernière croche de la mesure) à l’octave supérieur alors que EA maintient la progression des voix en prenant fa-sol avec le 1 de la MG.
C'est typiquement le genre de simplification qui ne me pose aucun soucis. Au tempo la 10ème est "faisable" mais sans plus, assez casse gueule quand même. Au final l'arrangement de FS me semble beaucoup plus confortable dans les 2 cas et on ne perd rien musicalement.
C'est sûr que c'est toujours mieux de préserver l'intégrité des voix, mais honnêtement la différence ne s'entend pas sauf à avoir la partition sous les yeux.
Oukee a écrit : ven. 17 févr., 2023 11:47M62 : EA fait prendre par la MG les doubles mi-ré-do, ce qui permet à la MD de tenir le la b et de lier avec la mesure suivante, ce que ne permet pas l’écriture de FS.
Ah ben c'est marrant parce que la partition de EA sur IMSLP indique au contraire de le prendre à la main droite (si je ne me suis pas trompé de mesure). Ceci dit ça me semble quand même faisable de tenir la voix supérieure, mais là aussi c'est vraiment bénin. A l'oreille ça ne fait aucune différence.
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Oukee a écrit : ven. 17 févr., 2023 11:47M65 à 71 : FS indique pp sur ce passage ave la basse en note simple : je préfère EA qui met plus de sonorité avec le thème en octave et parvient quand même à garder toutes les voix ave une écriture ingénieuse alors que FS supprime quand même des notes de temps en temps…. Par exemple, FS supprime le sol au début du 4ième temps, mais la 10ième arpégée est tout à fait faisable dans la version de d’Albert, et éviter un « trou » dans le flux de doubles croches.
Oui je comprends. Après très honnêtement je ne respecte de toute façon pas les nuances indiquées (quelque soit la transcription) qui relèvent à 100% de l'interprétation vu que Bach n'indique ni nuances ni registration dans l'original. C'est justement très intéressant de voir comment les organistes construisent la registration dans cette oeuvre. J'ai été bercé par la version de Michel Chapuis pour ma part :) qui du coup reste plutôt forte dans ce passage
Oukee a écrit : ven. 17 févr., 2023 11:47M80 à 96 : dans ce passage, je n’aime pas les octaves systématiques de FS, je trouve la sonorité un peu creuse, surtout dans le médium et l’aigu. EA écrit le flux de double croches en notes simples, et place des accords sf sur les notes du thème à la MG.
Je suis d'accord, ces octaves me cassent les pieds, ça donne un côté martelé à ce passage qui ne me plait pas.
Après dans les 6 ou 7 transcriptions que j'ai vu, c'est 50/50. Plusieurs ont fait le même choix...
Oukee a écrit : ven. 17 févr., 2023 11:47M88 : FS indique ff sur tout ce passage, EA est au contraire pp, en notes simples, et c’est l’inverse M97 (FS indique piano, EA met un crescendo) : je préfère la progression indiquée par EA.
Ah non là ça me fait très très bizarre ce piano qui tombe au milieu de nulle part.
En fait justement chez d'Albert j'ai l'impression qu'on est toujours en train de faire le yo-yo, alors que c'est globalement un énorme crescendo cette passacaille.
Oukee a écrit : ven. 17 févr., 2023 11:47M97 à 103 : dans ce passage assez scabreux, FS redistribue et simplifie quand EA s’efforce de maintenir la polyphonie au prix d’une redistribution assez difficile à exécuter. Mais musicalement, je trouve EA bien plus convaincant.
C'est un des passages qui m'a franchement cassé l'envie de travailler cette version. On passe 5 mesures en hyper-extension à se farcir des 9èmes et des 10èmes. C'est vraiment un "simple" copier/coller des notes de l'orgue. C'est peut être un tantinet mieux au final quand on sait le jouer, mais le ratio effort/"amélioration" pour moi est franchement négatif.
Oukee a écrit : ven. 17 févr., 2023 11:47M129 –M136: EA réplique les doubles croches aux 2 mains, ce qui permet d’avoir plus de son sans forcer, alors que FS n’a les doubles qu’à la MD.
Oui je suis d'accord que là ça manque d'ampleur côté FS.
Oukee a écrit : ven. 17 févr., 2023 11:47M61 jusqu’à la fin de la première partie, EA fait participer la MG aux doubles notes alors que FS fait tout faire par la MD, ce qui pour le coup est moins facile à exécuter.
Pour le coup je n'ai vraiment aucune difficulté à jouer ce passage chez FS.

Conclusion : il faudrait faire un aménagement à partir des deux transcriptions :)
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Durtal
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Re: Bach au piano ou pas ?

Message par Durtal »

Boléro2Tcaikovsky a écrit : mar. 07 févr., 2023 15:48 Bonjour,
vous préférez Bach au piano ou à l'orgue/clavecin ? Moi ça dépend : pour les clavier bien tempérés c'est le piano, mais pour le reste orgue...
Et pour ce qui est des arrangements de Liszt comme les BWV 542 et 543 par exemple, je les trouve plus durs au piano et je les préfères en version originale à l'orgue. Ici je trouve que le piano ne rend pas vraiment justice à ces œuvres et on a du mal à entendre toutes les voix.

J'aimerais bien avoir votre avis
Pour ma part, je n'ai pas vraiment de préférence. Le répertoire d'orgue est magnifique. Et je ne suis pas très fan des transcriptions, même si Bach lui-même ne s'est pas privé de faire de nombreux arrangements. Par exemple, les concertos sont des arrangements pour l'orgue de concertos pour orchestre de Vivaldi. Bach les a d'ailleurs considérablement enrichis en y ajoutant des voix. Et dans le sens inverse, il existe une transcription pour l'orchestre symphonique de sa fameuse toccata et fugue, par Leopold Stockowski. C'est intéressant à écouter, mais sans plus (pour ce qui est de mon goût personnel). En fait, ce qui fait l'intérêt d'une transcription, c'est le génie du transcripteur lui-même. Les transcriptions ou arrangements par Bach sont géniales, bien évidemment, et donc très écoutables. C'est très certainement le cas de celles de Liszt aussi, mais je ne les ai pas écoutées.

Quant à sa musique pour "clavier", je l'apprécie tout autant, même si l'effet est très différent, au clavecin comme au piano. Pour moi, il n'y a rien d'aberrant de jouer - et écouter - Bach au piano : cet instrument est issu de la facture du 18e siècle, en perpétuelle phase d'expérimentation, recherche et évolution tout au long de ce siècle.

Bach était justement très intéressé par les progrès de la facture, non seulement de l'orgue (il était réputé pour être un "expert", et sollicité fréquemment pour essayer les nouveaux instruments), mais également aussi du pianoforte. On sait que le premier "piano", construit par Cristofori, remonte à la fin du XVIIe s. Mais celui qui le fit considérablement évoluer, ce fut Silbermann, facteur d'orgue et de pianoforte, et parfaitement contemporain de Bach. Les deux hommes se connaissaient très bien. Bach essayait ses orgues, mais aussi ses pianos. Il ne se privait pas de les critiquer et d'en demander des améliorations, particulièrement pour le piano. Silbermann a donc cherché pendant des années à améliorer la facture de ses pianos pour arriver au résultat souhaité par Bach. Et ce dernier finit par se déclarer satisfait des progrès obtenus. C'est ce que raconte, en tout cas, l'un de ses élèves, Agricola. Par ailleurs, on sait par Wilhelm Friedemann Bach, le fils ainé de Jean-Sébastien, qu'il fut invité par le roi de Prusse à improviser sur son nouveau pianoforte, livré par le même Silbermann. Alors, bien sûr, ces deux témoignages sont à prendre avec des pincettes. Sont-ils sûrs ? Ils sont tardifs et indirects. La question est très débattue et ne sera jamais tranchée. Il y aura toujours le camp de ceux qui croient au rôle actif de Bach dans l'évolution du pianoforte, et ceux qui n'y croient pas. Mais ce qui est très certain, c'est que cet instrument est contemporain de Bach, et qu'on ne voit pas trop comment ni pourquoi Bach se serait senti non concerné par l'attente du milieu musical contemporain sur les promesses de cet instrument.

À titre personnel, je trouve légitime d'interpréter le répertoire du 18e siècle sur des instruments de facture moderne sachant que le résultat final obtenu au 19e siècle peut être considéré comme l'aboutissement et le résultat espéré par des compositeurs qui étaient insatisfaits des conditions matérielles de leur époque. Personne n'a l'idée d'écouter, par exemple, Mozart ou Beethoven sur des pianoforte d'époque, sauf à titre d'intérêt "archéologique".

Mais Bach au clavecin, ça me va très bien aussi.

Par contre, la pédale au piano pour jouer Bach, ça me semble vraiment hors style. Pour le coup, ce serait comme vouloir jouer Chopin ou Liszt sur un clavecin. Un peu anachronique.
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Re: Bach au piano ou pas ?

Message par axolotl »

Durtal a écrit : lun. 27 févr., 2023 2:35 ...
Quant à sa musique pour "clavier", je l'apprécie tout autant, même si l'effet est très différent, au clavecin comme au piano. Pour moi, il n'y a rien d'aberrant de jouer - et écouter - Bach au piano : cet instrument est issu de la facture du 18e siècle, en perpétuelle phase d'expérimentation, recherche et évolution tout au long de ce siècle.

Bach était justement très intéressé par les progrès de la facture, non seulement de l'orgue (il était réputé pour être un "expert", et sollicité fréquemment pour essayer les nouveaux instruments), mais également aussi du pianoforte. On sait que le premier "piano", construit par Cristofori, remonte à la fin du XVIIe s. Mais celui qui le fit considérablement évoluer, ce fut Silbermann, facteur d'orgue et de pianoforte, et parfaitement contemporain de Bach. Les deux hommes se connaissaient très bien. Bach essayait ses orgues, mais aussi ses pianos. Il ne se privait pas de les critiquer et d'en demander des améliorations, particulièrement pour le piano. Silbermann a donc cherché pendant des années à améliorer la facture de ses pianos pour arriver au résultat souhaité par Bach. Et ce dernier finit par se déclarer satisfait des progrès obtenus. C'est ce que raconte, en tout cas, l'un de ses élèves, Agricola. Par ailleurs, on sait par Wilhelm Friedemann Bach, le fils ainé de Jean-Sébastien, qu'il fut invité par le roi de Prusse à improviser sur son nouveau pianoforte, livré par le même Silbermann. Alors, bien sûr, ces deux témoignages sont à prendre avec des pincettes. Sont-ils sûrs ? Ils sont tardifs et indirects. La question est très débattue et ne sera jamais tranchée. Il y aura toujours le camp de ceux qui croient au rôle actif de Bach dans l'évolution du pianoforte, et ceux qui n'y croient pas. Mais ce qui est très certain, c'est que cet instrument est contemporain de Bach, et qu'on ne voit pas trop comment ni pourquoi Bach se serait senti non concerné par l'attente du milieu musical contemporain sur les promesses de cet instrument.
...
Le piano a été effectivement inventé en Italie par Cristofori en 1709. Il semble Bach n'a pu l'essayer que 3 ans avant sa mort soit en 1747.
À vérifier cependant, vos sources ont l'air plus sûres même si vous mentionnez que les échos des rapports entre Bach et le piano sont tardifs et peu sûrs aussi.
Voilà de petites précisions. Merci pour ce résumé très intéressant.
nox
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Re: Bach au piano ou pas ?

Message par nox »

Durtal a écrit : lun. 27 févr., 2023 2:35 Et dans le sens inverse, il existe une transcription pour l'orchestre symphonique de sa fameuse toccata et fugue, par Leopold Stockowski. C'est intéressant à écouter, mais sans plus (pour ce qui est de mon goût personnel).
Il y a en fait plusieurs transcriptions pour orchestre faites par Stochowski et Respighi principalement, dont la fameuse passacaille.
Personnellement, j'aime bien
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