Les Amateurs virtuoses !
Re: Les Amateurs virtuoses !
Quel récit palpitant ! Je suis ravie que c'était aussi bien passé, que malgré ta pouce tu sentais comme sur un nuage provident...Bach est resté avec toi une fois invoqué par les inventions 2 et 3 voix.
Merci et bravo Nox. "Plus la difficulté est grande, plus est la gloire de la surmonter. Les pilotes habiles acquièrent leur réputation dans la manœuvre d’orages et de tempêtes." Epictetus
Merci aussi à Mieuvotar, je suis tres contente que vous ayez fait enfin fait connaissance à l'autre bout du monde.
Merci et bravo Nox. "Plus la difficulté est grande, plus est la gloire de la surmonter. Les pilotes habiles acquièrent leur réputation dans la manœuvre d’orages et de tempêtes." Epictetus
Merci aussi à Mieuvotar, je suis tres contente que vous ayez fait enfin fait connaissance à l'autre bout du monde.
“Wrong doesn't become right just because it's accepted by a majority.” - Booker Washington
Re: Les Amateurs virtuoses !
Félicitations à Nox, Okay, merci Nox et Mieuvotar pour ces récits prenants, d'autant plus agréables à lire qu'ils racontent de belles histoires d'obstacles surmontés et de musique radieuse et heureuse!
Bravo et chapeau bas!
Bravo et chapeau bas!
Re: Les Amateurs virtuoses !
Chapitre 5 - Dernier jour, et concert d'Olivier
C'est déjà le dernier jour, mais en fait nous y pensons peu. Nous sommes tous focalisés sur le concert de ce soir.
Pendant qu'Olivier passe en mode "ermite", et occupe sagement sa journée en alternant repos et répétitions, je décide de passer une dernière fois en mode touriste, et accompagné de Tristan et de la compagne d'Olivier, direction la vieille ville chinoise et le jardin de Yu, le quartier le plus typique et le plus touristique de la ville.
La magnifique architecture traditionnelle chinoise, parsemée de temples superbes et de boutiques achalandées, nous occupe une bonne partie de la journée, même si Tristan, qui prépare un concert à Londres, doit s'éclipser en début d'après-midi pour travailler (quand même, hein, un niveau pareil ça se mérite !).
Nous rentrons en fin d'après-midi fatigués mais heureux, bras et têtes chargés de souvenirs. Mais pas le temps de se prélasser, car dès 17h le soleil couchant nous rappelle que la soirée se dessine.
A 19h15, nous nous rendons sur le lieu du concert, plein à craquer. Il y a bien 600 personnes qui attendent tranquillement le début des hostilités.
C'est un pianiste professionnel américain, Kimball Gallagher, qui doit ouvrir la soirée avec le 2ème concerto de Chopin.
En attendant, Tristan, Julien et moi goûtons encore pour quelques heures aux plaisirs coupables de la célébrité, on nous reconnait, on nous demande des autographes, des photos...ça fait plaisir !
L'orchestre s'installe, la soirée commence après une brève présentation.
C'est parti pour un beau concerto de Chopin. Kimball maîtrise son sujet, il n'y a rien à redire. Quelques loupés de l'orchestre vite rattrapés par une chef expérimenté, quelques approximations dans les traits de piano qui n'altèrent pas la ligne mélodique. Kimball et la chef d'orchestre tiennent bon. Et après un premier mouvement tenu d'une main de maître, un second mouvement très poétique bien réussi (même le redoutable récitatif !), arrive un final pris à un tempo très entraînant. Sûrement une des versions les plus rapides que j'ai entendues de ce dernier mouvement. Et c'est finalement un concerto bien tenu, et à juste titre bien applaudi.
Petit entracte avant le second concerto, celui d'Olivier. Tristan et moi partons nous promener autour du studio de répétition, espérant pianoter un peu. Nous croisons Olivier qui en sort, et s'inquiète un peu de la dureté du piano, de la sonorisation etc...mais il semble déjà ailleurs. Il nous quitte pour rejoindre la scène.
A peine le temps de jouer quelques notes avec Tristan et nous repartons nous installer pour enfin entendre ce fameux 3ème concerto de Rachmaninoff.
Présentation, arrivée d'Olivier, il s'installe, silence. La chef lève sa baguette, et les premières notes retentissent.
Première surprise : c'est lent, plus lent que ce que j'aurais pensé. Olivier joue-t-il la sécurité ? C'est mal le connaître. A peine l'exposition du piano terminée, les premières kyrielles de notes décollent d'un coup pendant que l'orchestre reprend le fameux thème.
Je me rends compte à ce moment là à quel point la mise en place du piano et de l'orchestre est difficile dans ces premières pages. On sent un peu de fragilité encore, et par instant on craint un peu. Mais la chef dirige avec autorité, ses gestes sont sûrs, précis, et Olivier tient à présent son concerto d'une main de fer. Dès que l'orchestre ralentit, Olivier garde le cap, et la chef rappelle ses troupes à l'ordre.
Petit à petit, on a l'impression de le voir - presque physiquement - s'enfoncer dans son concerto, comme un plongeur s'enfonce dans la mer. Il est dans son élément, il est parti. J'en suis certain, rien ne l'arrêtera plus maintenant. Il semble serein, et le piano semble répondre à chacune de ses intentions.
Quand la cadence arrive, majestueuse et imposante, le concerto prend une nouvelle dimension. Après le grondement des accords, la main de feu se fait de velour pour étendre avec une douceur magnifique un tapis de petites notes sur lequel vient se poser le son feutré des bois. C'est absolument magnifique, et l'orchestre, semblant transcendé lui aussi par l'énergie musicale d'Olivier, se surpasse. Car du propre aveu d'Olivier après la soirée, certains passages qui n'étaient jamais passés en répétition sont passés par miracle au moment du concert.
Le second mouvement est du même tonneau, imposant et magnifique. La redoutable valse qui le conclut est envoyée avec une netteté et une facilité (apparente) confondante ! Certes l'orchestre n'est pas toujours très juste, il y a quelques approximations, mais on est bien au-delà de tout ça !
Le dernier mouvement, flamboyant, explose à un tempo fou ! Mais après ce qu'on vient d'entendre, on ne craint plus rien. Ca ne peut que passer...et ça passe, magnifiquement.
La partie centrale, légère et mordante à souhait, fait vibrer le public d'habitude si indiscipliné. Le paroxysme est proche, la course au final démarre dans un tonnerre de basses, s'élève, puis retombe jusqu'à l'explosion des derniers accords !
Le public ne s'y trompe pas, et les dernières notes résonnent encore quand les cris et les applaudissements - une prouesse de la part d'un public si réservé ! - rententissent.
Il l'a fait, et de quelle manière !
Cette version n'a rien à envier aux enregistrements qui trônent sur mon étagère. Quelle maîtrise, quelle musicalité ! ... Quel pianiste !
Même le très réservé et très fier organisateur chinois, si avare en compliments, ne peut s'empêcher de rire et de prendre Olivier par l'épaule : "C'est fait.....est vraiment bien fait !".
Olivier peut savourer. Ce qu'il a accompli là, toutes l'énergie des derniers jours, toutes ces émotions accumulées...ca en valait la peine, définitivement.
Heureux, mais épuisés, nous profitons calmement de la soirée.
Au petit matin, je lance un au revoir fatigué mais reconnaissant à Shanghaï.
C'est à n'en pas douter une étape importante de mon parcours pianistique. Je ne sais pas quelle sera la suivante, ni même s'il y en aura une (les enfants grandissent !), mais celle là je m'en souviendrai toute ma vie.
Vraiment, aucun doute : ça en valait la peine.
FIN
C'est déjà le dernier jour, mais en fait nous y pensons peu. Nous sommes tous focalisés sur le concert de ce soir.
Pendant qu'Olivier passe en mode "ermite", et occupe sagement sa journée en alternant repos et répétitions, je décide de passer une dernière fois en mode touriste, et accompagné de Tristan et de la compagne d'Olivier, direction la vieille ville chinoise et le jardin de Yu, le quartier le plus typique et le plus touristique de la ville.
La magnifique architecture traditionnelle chinoise, parsemée de temples superbes et de boutiques achalandées, nous occupe une bonne partie de la journée, même si Tristan, qui prépare un concert à Londres, doit s'éclipser en début d'après-midi pour travailler (quand même, hein, un niveau pareil ça se mérite !).
Nous rentrons en fin d'après-midi fatigués mais heureux, bras et têtes chargés de souvenirs. Mais pas le temps de se prélasser, car dès 17h le soleil couchant nous rappelle que la soirée se dessine.
A 19h15, nous nous rendons sur le lieu du concert, plein à craquer. Il y a bien 600 personnes qui attendent tranquillement le début des hostilités.
C'est un pianiste professionnel américain, Kimball Gallagher, qui doit ouvrir la soirée avec le 2ème concerto de Chopin.
En attendant, Tristan, Julien et moi goûtons encore pour quelques heures aux plaisirs coupables de la célébrité, on nous reconnait, on nous demande des autographes, des photos...ça fait plaisir !
L'orchestre s'installe, la soirée commence après une brève présentation.
C'est parti pour un beau concerto de Chopin. Kimball maîtrise son sujet, il n'y a rien à redire. Quelques loupés de l'orchestre vite rattrapés par une chef expérimenté, quelques approximations dans les traits de piano qui n'altèrent pas la ligne mélodique. Kimball et la chef d'orchestre tiennent bon. Et après un premier mouvement tenu d'une main de maître, un second mouvement très poétique bien réussi (même le redoutable récitatif !), arrive un final pris à un tempo très entraînant. Sûrement une des versions les plus rapides que j'ai entendues de ce dernier mouvement. Et c'est finalement un concerto bien tenu, et à juste titre bien applaudi.
Petit entracte avant le second concerto, celui d'Olivier. Tristan et moi partons nous promener autour du studio de répétition, espérant pianoter un peu. Nous croisons Olivier qui en sort, et s'inquiète un peu de la dureté du piano, de la sonorisation etc...mais il semble déjà ailleurs. Il nous quitte pour rejoindre la scène.
A peine le temps de jouer quelques notes avec Tristan et nous repartons nous installer pour enfin entendre ce fameux 3ème concerto de Rachmaninoff.
Présentation, arrivée d'Olivier, il s'installe, silence. La chef lève sa baguette, et les premières notes retentissent.
Première surprise : c'est lent, plus lent que ce que j'aurais pensé. Olivier joue-t-il la sécurité ? C'est mal le connaître. A peine l'exposition du piano terminée, les premières kyrielles de notes décollent d'un coup pendant que l'orchestre reprend le fameux thème.
Je me rends compte à ce moment là à quel point la mise en place du piano et de l'orchestre est difficile dans ces premières pages. On sent un peu de fragilité encore, et par instant on craint un peu. Mais la chef dirige avec autorité, ses gestes sont sûrs, précis, et Olivier tient à présent son concerto d'une main de fer. Dès que l'orchestre ralentit, Olivier garde le cap, et la chef rappelle ses troupes à l'ordre.
Petit à petit, on a l'impression de le voir - presque physiquement - s'enfoncer dans son concerto, comme un plongeur s'enfonce dans la mer. Il est dans son élément, il est parti. J'en suis certain, rien ne l'arrêtera plus maintenant. Il semble serein, et le piano semble répondre à chacune de ses intentions.
Quand la cadence arrive, majestueuse et imposante, le concerto prend une nouvelle dimension. Après le grondement des accords, la main de feu se fait de velour pour étendre avec une douceur magnifique un tapis de petites notes sur lequel vient se poser le son feutré des bois. C'est absolument magnifique, et l'orchestre, semblant transcendé lui aussi par l'énergie musicale d'Olivier, se surpasse. Car du propre aveu d'Olivier après la soirée, certains passages qui n'étaient jamais passés en répétition sont passés par miracle au moment du concert.
Le second mouvement est du même tonneau, imposant et magnifique. La redoutable valse qui le conclut est envoyée avec une netteté et une facilité (apparente) confondante ! Certes l'orchestre n'est pas toujours très juste, il y a quelques approximations, mais on est bien au-delà de tout ça !
Le dernier mouvement, flamboyant, explose à un tempo fou ! Mais après ce qu'on vient d'entendre, on ne craint plus rien. Ca ne peut que passer...et ça passe, magnifiquement.
La partie centrale, légère et mordante à souhait, fait vibrer le public d'habitude si indiscipliné. Le paroxysme est proche, la course au final démarre dans un tonnerre de basses, s'élève, puis retombe jusqu'à l'explosion des derniers accords !
Le public ne s'y trompe pas, et les dernières notes résonnent encore quand les cris et les applaudissements - une prouesse de la part d'un public si réservé ! - rententissent.
Il l'a fait, et de quelle manière !
Cette version n'a rien à envier aux enregistrements qui trônent sur mon étagère. Quelle maîtrise, quelle musicalité ! ... Quel pianiste !
Même le très réservé et très fier organisateur chinois, si avare en compliments, ne peut s'empêcher de rire et de prendre Olivier par l'épaule : "C'est fait.....est vraiment bien fait !".
Olivier peut savourer. Ce qu'il a accompli là, toutes l'énergie des derniers jours, toutes ces émotions accumulées...ca en valait la peine, définitivement.
Heureux, mais épuisés, nous profitons calmement de la soirée.
Au petit matin, je lance un au revoir fatigué mais reconnaissant à Shanghaï.
C'est à n'en pas douter une étape importante de mon parcours pianistique. Je ne sais pas quelle sera la suivante, ni même s'il y en aura une (les enfants grandissent !), mais celle là je m'en souviendrai toute ma vie.
Vraiment, aucun doute : ça en valait la peine.
FIN
- BM607
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Re: Les Amateurs virtuoses !
Superbe récit encore une fois Nox, très vivant et très coloré, mêlant visite de la ville, contacts humains, et musique, un grand bravo pour ça aussi, merci.
Et merci pour la précision du texte, on s'y serait cru.
Et bravo à Okay aussi.
BM
Et merci pour la précision du texte, on s'y serait cru.
Et bravo à Okay aussi.
BM
Je ne crains pas le suffrage universel, les gens voteront comme on leur dira.
A. de Tocqueville
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- Armag
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Re: Les Amateurs virtuoses !
Merci Nox pour ce très beau récit.
- amalfi
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Re: Les Amateurs virtuoses !
Un grand bravo à toute la délégation. Et merci pour pour ce compte-rendu très prenant.
Re: Les Amateurs virtuoses !
Merci beaucoup Nox d'avoir pris le temps de rédiger ce journal si vivant ! Je ne sais vraiment quoi ajouter, si ce n'est dire que j'ai exactement vécu les choses comme tu les rapportes, et que ça m'a fait aussi très plaisir de retrouver Mieuvotar à 10000 bornes de la maison !
Je rajouterais juste dans les aspects extra-musicaux, que j'ai mis 4 bonnes journées à ne plus sentir le jetlag, qui m'a été très pénible. Toucher le piano les 2 premiers jours était comme jouer alcoolisé, même si j'avais dormi...
Il est vrai que me concernant, cette semaine s'est vite retrouvée très centrée sur l'orchestre. Cela m'a d'ailleurs privé de tous les concerts car les répétitions tombaient en même temps si bien que je n'ai pu écouter absolument personne... Heureusement qu'on était monté dans les rooftops avant la découverte de leur non préparation ! C'est vrai que cet orchestre m'a donné de sacré sueurs froides : je n'ai quasiment pas dormi de la nuit après la première "répétition". En fait après ça, j'ai décidé de "refuser" de vivre en Asie : m'alimenter strictement de plats occidentaux (une tentative de dim sums ne m'ayant pas spécialement réussi...), et je me suis réglé sur des journées environ 12h-4h, ce qui me convient de toute façon mieux et permet d'avoir un bon pic de forme à l'heure d'un concert !
Puis j'ai été assez stupéfait de la progression des musiciens. Au final ça a tenu la route sans incident majeur (en effet, j'ai collaboré avec une chef vraiment top), si bien qu'il reste tout de même frustrant de constater un tel potentiel latent, et d'imaginer ce que cela aurait pu être s'ils avaient été préparés en amont. Je me suis même surpris à prendre le risque d'avancer assez fort dans le finale, et ils ont suivi ! Après la quasi demi-heure des deux premiers mouvements, j'ai ressenti le feu dans la cadence de la fin du 2e mouvement, venue rapide et nette. Donc j'y suis allé, car je sais que même si la première partie du finale est un moment plein d'épines pour le soliste, c'est rythmiquement très droit, balisé d'accents qui suivent le schéma harmonique, donc le risque de faire dérailler l'orchestre est en réalité très faible (ça restait "mon" problème).
J'ai énormément appris et progressé en quelques jours. Mener cette oeuvre là dans des conditions assez dantesques débloque réellement un pallier d'expérience, agrandit la zone de confort, certes assez brutalement, mais de manière très effective ! Maintenant, je peux dire que je sais vraiment jouer avec un orchestre, qui contrairement à ce que j'imaginais est une compétence à part entière, distincte du solo, de l'accompagnement et de la musique de chambre. Je pense que c'est en fait beaucoup plus proche de la direction... et c'est aussi entre train de changer ma manière de jouer seul, de me pousser à aller plus loin dans la manière de structurer ce que je joue, pour être encore plus lisible, en utilisant plus ostensiblement les outils qui permettent d'être compris de ses éventuels partenaires de scène et du public. La maxime "ce qui se conçoit bien s'énonce clairement" prend un relief tout à fait inédit.
Je rajouterais juste dans les aspects extra-musicaux, que j'ai mis 4 bonnes journées à ne plus sentir le jetlag, qui m'a été très pénible. Toucher le piano les 2 premiers jours était comme jouer alcoolisé, même si j'avais dormi...
Il est vrai que me concernant, cette semaine s'est vite retrouvée très centrée sur l'orchestre. Cela m'a d'ailleurs privé de tous les concerts car les répétitions tombaient en même temps si bien que je n'ai pu écouter absolument personne... Heureusement qu'on était monté dans les rooftops avant la découverte de leur non préparation ! C'est vrai que cet orchestre m'a donné de sacré sueurs froides : je n'ai quasiment pas dormi de la nuit après la première "répétition". En fait après ça, j'ai décidé de "refuser" de vivre en Asie : m'alimenter strictement de plats occidentaux (une tentative de dim sums ne m'ayant pas spécialement réussi...), et je me suis réglé sur des journées environ 12h-4h, ce qui me convient de toute façon mieux et permet d'avoir un bon pic de forme à l'heure d'un concert !
Puis j'ai été assez stupéfait de la progression des musiciens. Au final ça a tenu la route sans incident majeur (en effet, j'ai collaboré avec une chef vraiment top), si bien qu'il reste tout de même frustrant de constater un tel potentiel latent, et d'imaginer ce que cela aurait pu être s'ils avaient été préparés en amont. Je me suis même surpris à prendre le risque d'avancer assez fort dans le finale, et ils ont suivi ! Après la quasi demi-heure des deux premiers mouvements, j'ai ressenti le feu dans la cadence de la fin du 2e mouvement, venue rapide et nette. Donc j'y suis allé, car je sais que même si la première partie du finale est un moment plein d'épines pour le soliste, c'est rythmiquement très droit, balisé d'accents qui suivent le schéma harmonique, donc le risque de faire dérailler l'orchestre est en réalité très faible (ça restait "mon" problème).
J'ai énormément appris et progressé en quelques jours. Mener cette oeuvre là dans des conditions assez dantesques débloque réellement un pallier d'expérience, agrandit la zone de confort, certes assez brutalement, mais de manière très effective ! Maintenant, je peux dire que je sais vraiment jouer avec un orchestre, qui contrairement à ce que j'imaginais est une compétence à part entière, distincte du solo, de l'accompagnement et de la musique de chambre. Je pense que c'est en fait beaucoup plus proche de la direction... et c'est aussi entre train de changer ma manière de jouer seul, de me pousser à aller plus loin dans la manière de structurer ce que je joue, pour être encore plus lisible, en utilisant plus ostensiblement les outils qui permettent d'être compris de ses éventuels partenaires de scène et du public. La maxime "ce qui se conçoit bien s'énonce clairement" prend un relief tout à fait inédit.
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Re: Les Amateurs virtuoses !
Merci pour le partage de ces riches expériences que vous nous faites vivre par procuration (mais intensément grâce à ce récit si vivant), un grand bravo à tous les deux. Vivre de tels moments se mérite, je salue donc aussi votre courage car vous osez vous mettre en danger, mais c'est souvent ainsi qu'on arrive à se sublimer. C'est donc certainement une étape importante dans votre parcours et aussi l'assurance de souvenirs magnifiques à jamais ancrés dans vos mémoires. Bravo
C'est sympa de parler mais jouons maintenant...
http://www.youtube.com/user/andante5133
http://www.youtube.com/user/andante5133
Re: Les Amateurs virtuoses !
Merci beaucoup à tous ! Grâce aux vidéos de portable de Nox, j'ai monté un clip de presque 10 minutes qui permet d'un peu se rendre compte de ce concert de clôture.
Modifié en dernier par Okay le mer. 24 oct., 2018 16:57, modifié 2 fois.
- Moderato Cantabile
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Re: Les Amateurs virtuoses !
Merci beaucoup Nox pour la fin magnifique de l'histoire.
Quelle chance de pouvoir vivre un peu avec toi cette incroyable aventure. Tu écris tellement bien qu'on s'y croirait !
Et je suis sûre que ton aventure pianistique te réserve encore de belles surprises ...
Merci aussi à toi Okay de venir y ajouter ton propre récit ainsi que ce clip qui donne effectivement une assez nette idée de cet extraordinaire concert.
Ce qui t'est arrivé là, c'est juste bluffant ! Tu m'avais dit à quel point tu aimais jouer avec orchestre , cette expérience confirme donc ce goût et l'aisance avec laquelle tu te coules dans cette nouvelle forme, avec bénéfices en retour !
Tes ailes ne cessent de grandir, tu voles déjà très haut et ce n'est que le début ...
Bravo ,bravo, bravissimo !!
Quelle chance de pouvoir vivre un peu avec toi cette incroyable aventure. Tu écris tellement bien qu'on s'y croirait !
Et je suis sûre que ton aventure pianistique te réserve encore de belles surprises ...
Merci aussi à toi Okay de venir y ajouter ton propre récit ainsi que ce clip qui donne effectivement une assez nette idée de cet extraordinaire concert.
Ce qui t'est arrivé là, c'est juste bluffant ! Tu m'avais dit à quel point tu aimais jouer avec orchestre , cette expérience confirme donc ce goût et l'aisance avec laquelle tu te coules dans cette nouvelle forme, avec bénéfices en retour !
Tes ailes ne cessent de grandir, tu voles déjà très haut et ce n'est que le début ...
Bravo ,bravo, bravissimo !!
"Il faut que cela soit si gai , si gai , que l'on ait envie de fondre en larmes ."
- jean-séb
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- Enregistré le : lun. 16 oct., 2006 20:36
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Re: Les Amateurs virtuoses !
Attention quand même ! Baudelaire :Moderato Cantabile a écrit : ↑mer. 24 oct., 2018 11:13Tes ailes ne cessent de grandir, tu voles déjà très haut et ce n'est que le début
Ses ailes de géant l'empêchent de marcher.
- Moderato Cantabile
- Messages : 1573
- Enregistré le : ven. 01 juil., 2011 13:48
- Mon piano : Erard 1 - Seiler 206
Re: Les Amateurs virtuoses !
Cher Jean-séb , c'est une insulte que tu me fais là !
A quoi crois-tu donc que je pensais en l'écrivant , tabarnak !!
Mais il me semble que le cliché de l'artiste maudit doit être brisé :
Qu'importe donc de marcher lorsque l'on sait voler ??
A quoi crois-tu donc que je pensais en l'écrivant , tabarnak !!
Mais il me semble que le cliché de l'artiste maudit doit être brisé :
Qu'importe donc de marcher lorsque l'on sait voler ??
"Il faut que cela soit si gai , si gai , que l'on ait envie de fondre en larmes ."
- jean-séb
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- Enregistré le : lun. 16 oct., 2006 20:36
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- Localisation : Paris
Re: Les Amateurs virtuoses !
Il faut se poser de temps à autre pour ne pas s'épuiser en vol (à part les martinets) ! Mais bien sûr, j'ai vu les limites de la métaphore et ne crains pas que notre ami Okay se prenne les pieds dans ses ailes !
- JPS1827
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- Enregistré le : lun. 25 avr., 2011 11:27
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Re: Les Amateurs virtuoses !
Un grand bravo pour cette belle interprétation ! il faut vraiment y arriver en si peu de temps ! tu vas retrouver souvent cette situation, les orchestres ne regardent en général même pas la partition avant les répétitions avec le soliste. J'espère que tu pourras rejouer ce concerto dans des conditions moins stressantes
Re: Les Amateurs virtuoses !
Merci beaucoup !
J'avoue que je ne réalisais pas que les choses pouvaient se passer autant à l'arrachée. Je savais que c'était souvent le cas en musique de chambre, avec les cordes qui peuvent parfois limite déchiffrer sur scène, mais je ne pensais pas que ça s'étendait aux orchestres. C'est aussi une explication au fait que les mêmes concertos soient toujours rejoués : en plus d'être moins risqués pour les organisateurs, on sera très sécurisé si l'orchestre joue une oeuvre déjà montée...
J'avoue que je ne réalisais pas que les choses pouvaient se passer autant à l'arrachée. Je savais que c'était souvent le cas en musique de chambre, avec les cordes qui peuvent parfois limite déchiffrer sur scène, mais je ne pensais pas que ça s'étendait aux orchestres. C'est aussi une explication au fait que les mêmes concertos soient toujours rejoués : en plus d'être moins risqués pour les organisateurs, on sera très sécurisé si l'orchestre joue une oeuvre déjà montée...
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- Messages : 7797
- Enregistré le : jeu. 25 juin, 2015 17:44
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Re: Les Amateurs virtuoses !
Ma foi si l'orchestre découvrait l'oeuvre ce n'est pas si mal et puis tu as l'air encore beaucoup plus à l'aise que lors de la première à Paris
En tout cas si stress il y avait, tu le gères de mieux en mieux !
En tout cas si stress il y avait, tu le gères de mieux en mieux !
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- Messages : 741
- Enregistré le : jeu. 16 juil., 2009 16:58
Re: Les Amateurs virtuoses !
Merci à Okay et surtout à Nox pour leurs récits respectifs c'est passionnant à lire
Juste une question au sujet de la vidéo car je n'assiste quasiment jamais à des représentations d'orchestre: est-ce usuel que le chef d'orchestre soit placé dans une position où il ne voit pas le soliste ? Je pensais qu'il y avait davantage d'échanges entre le chef et le pianiste
Juste une question au sujet de la vidéo car je n'assiste quasiment jamais à des représentations d'orchestre: est-ce usuel que le chef d'orchestre soit placé dans une position où il ne voit pas le soliste ? Je pensais qu'il y avait davantage d'échanges entre le chef et le pianiste
Re: Les Amateurs virtuoses !
Je me suis fait la même réflexion que toi sur le moment...mais vu la taille de la scène, c'est déjà bien qu'on ait pu trouver une place pour le chef d'orchestre
Blague à part, en général le chef est plutôt à gauche du soliste et un peu devant lui je crois, donc très facilement visible oui. mais là je pense qu'il n'y avait pas 50 configuration possible.
Blague à part, en général le chef est plutôt à gauche du soliste et un peu devant lui je crois, donc très facilement visible oui. mais là je pense qu'il n'y avait pas 50 configuration possible.
Re: Les Amateurs virtuoses !
Je ne passe pas souvent en ce moment (j'émerge difficilement des cartons), mais je suis heureux de l'avoir fait et de lire tant de bonnes nouvelles. Bravo à nos Okay et Nox pour cette performance à l'autre bout du monde, et félicitations à Nox pour avoir su gérer un tel problème et s'être fait plaisir. Merci également pour les récits très vivants, c'est sûr, ça fera des souvenirs inoubliables.
Re: Les Amateurs virtuoses !
En effet le chef est normalement placé adossé au piano, vers le début du couvercle. On ne peut pas se regarder beaucoup plus en fait. Mais le pianiste voit bien ses gestes, mais lui pour voir le pianiste, il doit de toute façon un peu se retourner.
Je reconnais que le positionnement inhabituel de ce concert (en effet en raison de la scène assez réduite) avait l’avantage que la chef pouvait voir mes mains en se tournant, ce qui permet de régler encore plus précisément certaines attaques. On s’est en fait pas mal regardés, mais c’est possible de faire un concert en ne regardant quasiment pas le chef si on lui propose quelque chose de très lisible.
Je reconnais que le positionnement inhabituel de ce concert (en effet en raison de la scène assez réduite) avait l’avantage que la chef pouvait voir mes mains en se tournant, ce qui permet de régler encore plus précisément certaines attaques. On s’est en fait pas mal regardés, mais c’est possible de faire un concert en ne regardant quasiment pas le chef si on lui propose quelque chose de très lisible.