Les pianos Steinway ont également participé au débarquement...

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Christof
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Les pianos Steinway ont également participé au débarquement...

Message par Christof »

En cette période de commémoration du débarquement, je suis tombé par hasard sur cette information, à savoir qu'en 44 n'ont pas seulement débarqué les soldats américains mais aussi des pianos Steinway "Victory".
(Je ne sais si il y a déjà eu un fil sur le sujet, en tous cas, je n'ai rien trouvé par le moteur de recherche du forum).

J'ai donc voulu en savoir plus (et pardon à ceux qui dans le forum connaissent déjà tout cela)...

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Il faut savoir que lorsque les États-Unis sont entrés dans le conflit en 1941 après l'attaque de Pearl Harbor, les approvisionnements en matières premières ont été détournés vers l’effort de guerre. Et cela comprenait les métaux qui étaient des composants clés dans les pianos, comme le métal, laiton, cuivre et fer (chaque piano en contenait minimum 150 kilos). Les fabricants de pianos devaient donc fabriquer autre chose ou cesser leurs activités. Ainsi l'usine Steinway avait commencé à remplacer sa production new-yorkaise de pianos pour le grand public par la fabrication de cercueils, de pièces pour transports de troupes, des pièce pour les planeurs, tandis que la Baldwin Piano Company se mit à produire des ailes d'avions en bois..

Mais en 1942, l'armée américaine qui commence déjà à préparer le futur débarquement en France, commande 4000 Steinway droits, prévoyant que la présence de musiciens et de pianos sur tout terrain d'opération pourraient soutenir le moral des troupes, dans une guerre prévue pour être longue. C'est alors que Steinway invente son modèle "Victory" Vertical, piano droit de 1,016 mètre de hauteur, qui ne contenait que 12 kg de métal. Pesant 250 kg, ce modèle était conçu pour supporter les conditions proches des champs de bataille du monde entier : assez résistant aux chocs, pouvant encaisser de forts écarts de température. Il était livré en différente couleurs, vert olive, bleu, gris, selon les corps d'armée, avec son caisson d'expédition solide.
Steinway en produira finalement 2436 (en tout 3000 entre 1941 et 1953)
Pour la petite histoire, il faut savoir que quatre des fils de Théodore Steinway (président à l'époque de la firme) débarqueront le 6 juin 1944 sur les plages de Normandie).

Si certains de ces pianos ont été débarqués par bateaux, pas mal d'entre eux ont été livrés aussi par bombardiers et largués par parachute (avec équipement de réglage et instructions) ; d'autres ont été chargés sur des sous-marins encore en construction dans l'espoir que la musique empêcherait les marins de devenir «fous» pendant un long déploiement sous-marin.
Tout au long des années du conflit, les troupes en Europe, en Afrique et dans le Pacifique sud ont donc reçu l'un des paquets les plus inattendus.

"Quiconque étant capable de jouer d'un instrument, qu'il soit bon ou mauvais, jouait ". Les gars ont adoré. C’était une belle camaraderie, et cela a empêché beaucoup d'entre nous de devenir fous", ont pu expliquer des militaires.

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Les pianos ont finalement provoqué une forte cohésion, une grande camaraderie, mais aussi ont été de très grands ambassadeurs pour le renom de Steinway. Après la guerre certains de ces pianos sont restés dans les casernes de troupes américaines, d’autres ont été conservés dans les musées tel le mémorial de la Paix à Caen.

Le 6 juin 1944, les GI's qui débarquaient sur les plages de Normandie ne transportaient donc pas que les armes de la libération ils emportaient aussi le Jazz dans leurs bagages* (nb : a aussi été connue alors la musique country, que pas mal de GI's chantaient et jouaient à la guitare).
Déjà, pendant le 1er conflit mondial, le chef d'orchestre Jim Europe avait été chargé, en 1917, de former l'orchestre du 15e régiment d'infanterie de la garde nationale de l'état de New York. A sa tête, il avait rencontré un immense succès dans toute la France. Après l'entrée en guerre des États Unis, en 1941, les Jazzmen vont s'illustrer aux côtés des troupes. En premier lieu, bien sûr, Glenn Miller. En 1942, il s'engage dans l'armée de l'air et donne plus de 800 concerts avec son "Glenn Miller Army Air Force Band". Le 15 décembre 1944, il quitte l'Angleterre pour se produire à Paris, à l'Olympia. L'avion n'arrivera malheureusement jamais.

* Dans son film "Cinq jours en juin", Michel Legrand qui raconte un épisode important de sa vie quand il avait quinze ans, montre d'ailleurs dans une des scènes un GI jouer du blues sur un de ces pianos Victory. C'est la première fois à l'époque qu'il entendait ce genre de musique (j'en avais déjà parlé dans un fil sur le forum, mais impossible de le retrouver). J'ai eu la chance de pouvoir en parler avec lui à une époque. Il m'avait raconté, qu'au départ, il prévoyait qu'il jouerait lui-même à ce moment-là sur la bande son ce qu'on entendrait au piano. Mais quand le piano est arrivé (la scène se passe dans une cour de ferme, et il y a avait là pas mal d'acteurs qui attendaient pour le tournage, et parmi eux, un figurant, noir américain qui, voyant le piano, et que tout le monde attendait (on attend énormément durant un tournage au cinéma) s'est mis à jouer pour distraire tout le monde. Un blues... Et Michel Legrand a trouvé cela tellement super, un son tellement "jazz", qu'il lui a demandé alors d'être le pianiste de cette scène et a gardé le son original et sa musique originale.
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fugue
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Re: Les pianos Steinway ont également participé au débarquement...

Message par fugue »

Moi je ne connaissais pas. Merci pour ce bout d'histoire très intéressant!
Comme d'habitude, tu racontes toujours aussi bien :D
Aurele27
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Re: Les pianos Steinway ont également participé au débarquement...

Message par Aurele27 »

Moi non plus je ne connaissais pas! Merci Christophe pour ces infos 🤗
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Julien_Rubato
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Re: Les pianos Steinway ont également participé au débarquement...

Message par Julien_Rubato »

Très intéressant ! Merci pour la petite histoire très bien raconté sois dites en passant !
Y'a t'il moyen d'entendre le son de ce type de piano quelques part ?
“Quand les peines de cœur se transforment en maladies, nous sommes perdus.” Frédéric Chopin
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quazart
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Re: Les pianos Steinway ont également participé au débarquement...

Message par quazart »

Un piano livré par parachute, c'est ça qu'il me faut :lol: :lol: :lol:

Blague à part, j'ignorais totalement cette histoire, merci Christof pour la découverte !
Ca ma rappelle un peu le bout de film de guerre montrant Guilels jouant sur un aérodrome pour les aviateurs russes. Il n'ont pas eu les pianos, mais pour l'interprète, ils ont été gâtés !
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floyer
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Re: Les pianos Steinway ont également participé au débarquement...

Message par floyer »

Merci Christof pour ce partage.
quazart a écrit : jeu. 06 juin, 2019 20:07 Un piano livré par parachute, c'est ça qu'il me faut
Effectivement, une ouverture dans le toit, la dépose du piano et c’est fini. Pas besoin de calculer les dimensions des escaliers ou sa résistance au poids. ;)
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mh_piano
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Re: Les pianos Steinway ont également participé au débarquement...

Message par mh_piano »

quazart a écrit : jeu. 06 juin, 2019 20:07 Un piano livré par parachute, c'est ça qu'il me faut :lol: :lol: :lol:

Blague à part, j'ignorais totalement cette histoire, merci Christof pour la découverte !
Ca ma rappelle un peu le bout de film de guerre montrant Guilels jouant sur un aérodrome pour les aviateurs russes. Il n'ont pas eu les pianos, mais pour l'interprète, ils ont été gâtés !
:lol: :lol: :lol:
Et je me joins aux autres pour remercier Christof pour cette information que je ne connaissais pas.
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Re: Les pianos Steinway ont également participé au débarquement...

Message par jean-séb »

Encore un beau fil, à la fois pianistique et historique, merci Christof.
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Arabesque44
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Re: Les pianos Steinway ont également participé au débarquement...

Message par Arabesque44 »

merci aussi de rappeler le film quasi autobiographique de Michel Legrand, dont j'avais oublié le titre. Dommage qu'on ne l'ait pas reprogrammé dernièrement.
Lazur84
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Re: Les pianos Steinway ont également participé au débarquement...

Message par Lazur84 »

Merci pour cette belle anecdote, des Steinway livrés par parachute, je vais faire de beaux rêves ! C'est toujours troublant de voir que le pire crée parfois le meilleur... Les humains sont désarmants (mais je les préfèrerais désarmés)
comte de foix
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Re: Les pianos Steinway ont également participé au débarquement...

Message par comte de foix »

Super article, et sujet passionnant!

Si je peux me permettre une petite digression : dans le même esprit, le spitfire version XXX, modifié pour transporter des fûts de bière depuis l'Angleterre! Et à l'atterrissage elle était bien fraîche après un long voyage en altitude. Par contre il fallait un bon pilote pour poser le très délicat spitfire sans casser les fûts...La douane a voulu taxer la bière qu'une brasserie offrait pour les troupes mais les officiers fermaient les yeux sur des allers-retours de Spitfire pour "maintenance".
Modification-XXX-Spitfire-Mk-IX-with-beer-kegs.jpg
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quazart
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Re: Les pianos Steinway ont également participé au débarquement...

Message par quazart »

Mais celui qui se précipitait sur le fût risquait gros à l'ouverture, non ? :mrgreen:

Ca me rappelle l'histoire du tonnelier qui... heu... non, rien :oops: :arrow:
Modifié en dernier par quazart le jeu. 06 juin, 2019 23:35, modifié 1 fois.
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Oupsi
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Re: Les pianos Steinway ont également participé au débarquement...

Message par Oupsi »

Merci, une belle histoire d'inventivité humaine dans la tourmente.
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quazart
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Re: Les pianos Steinway ont également participé au débarquement...

Message par quazart »

floyer a écrit : jeu. 06 juin, 2019 20:19 Effectivement, une ouverture dans le toit, la dépose du piano et c’est fini. Pas besoin de calculer les dimensions des escaliers ou sa résistance au poids. ;)
L'ouverture dans le toit est préparée, comme dirait un de nos amis : yapluka ôter les ardoises et le latis !!! mais pour la précision, je pense tout de même avoir une légère préférence pour la grue...
roulroul
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Re: Les pianos Steinway ont également participé au débarquement...

Message par roulroul »

Fil super intéressant, je ne connaissait pas cet aspect de la guerre, pianos, et même fut de bières ! Les pianos devaient être sacrément protégés pour être largués en parachute, même démontés. Ça montre aussi la machine de guerre des alliés coté matos qui ne négligeaient aucun aspect pour préparer au mieux le débarquement.
Plus étonnant, dans les sous marins, ou la place était comptée, et ou les compartiments de service étaient plutôt remplis de bouffe...
Mais il fallait bien garder le moral des marins, je me demande si ça a existé aussi coté Kriegsmarine.....
Edit : il s' agit de sous marins en construction, donc pas encore en service, j' avais mal lu, mais ça a pu exister....

Article extrait de Libération :
Alors, avec des pavés arrachés à la chaussée, des sacs de sable, de vieux meubles, un piano sacrifié, des matelas pliés et même des panneaux de la loterie nationale sur lesquels on peut lire «tirage ce soir», elle érige avec ses voisins la muraille improvisée.
La c'est moins drôle, bousiller un piano pour la libération de Paris, mais c’était la guerre.

Je reviens au sujet d' origine : Article super bien commenté, et enrichissant, bravo.
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Christof
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Re: Les pianos Steinway ont également participé au débarquement...

Message par Christof »

Merci beaucoup à toutes et tous pour les commentaires.

Dommage, j'ai cherché partout une vidéo faisant entendre le son du piano Steinway Victory Vertical.... mais chou blanc.
Je ne m'avoue pas encore vaincu : je vais reregarder sur le film "5 jours en juin" (voir mon post tout en haut de la page) et enregistrerai le son de la scène à laquelle je pense. J'espère en fait (ma mémoire peut me jouer des tours) que, soucieux du détail, Michel Legrand avait bien eu le soin auprès des accessoiristes que ce soit bien un Victory qu'on entende. Mais finalement, peut-être s'agissait-il alors pour cette scène d'un simple piano droit, placé là dans la cour d'une ferme ? (à suivre)

En tous cas, voici 3 autres illustrations du Victory :

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Livré par parachute

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Un Victory restauré

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Production des Victory à la fabrique Steinway pendant la Seconde guerre mondiale

On peut se poser la question : pourquoi avoir parachuté des pianos, plutôt que des fiddles ou des harmonicas ?
C'est parce qu'aux États-Unis, le piano a toujours fait partie intégrante de la vie des américains à partir du début du XXème siècle. Il a toujours été le centre de récréation dans la maison, agissant comme un aimant pour rassembler les gens dans un cercle social. Le piano était le pilier de la musique de tous genres.
Avant la seconde guerre mondiale, ont dénombrait plus de piano dans les maisons américaines que de baignoires. Et, par exemple à New-York, pas mal de blocs d'appartement avaient été construits dès le départ en imaginant les volumes d'une pièce avec avancée, pour le piano.
Les musiciens étaient partout, les profs de piano aussi. Le piano, là-bas c'était pour toutes les classes de gens , pour tous les type de musique. La musique, on en entendait partout, dans les salle de concert, mais aussi dans les cafés, les boîtes, les soirées dansantes, les festivals folk, les honky tonks.

Le piano était vraiment fédérateur. Et donc à la guerre, parmi les soldats américains, pléthore savaient jouer du piano.
Le piano leur rappelait tous les bons moments passés en famille, au concert, ou dans les bars. Un peu comme lorsqu'on se regroupe autour de l'âtre et qu'on rêve devant les flammèches d'un feu
Et c'est aussi là que Steinway s'est fait son image de marque.
roulroul
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Re: Les pianos Steinway ont également participé au débarquement...

Message par roulroul »

Pompé sur le site Steinway, et traduit automatiquement :
«Ce Steinway est monté dans une forteresse volante!» Déclare une publicité pour un Steinway & Sons debout de 1943, une image du piano placée stratégiquement sous l'illustration d'un bombardier B-17. Pendant la Seconde Guerre mondiale, la charge utile habituelle du célèbre avion était de plusieurs milliers de livres de bombes. Mais dans des circonstances exceptionnelles, le B-17 a fait office d’avion cargo pour «G.I. pianos. ”Aussi connus sous le nom de“ Victory Verticals ”, les instruments étaient parachutés pour attendre des troupes dans ce que la publicité appelle“ des contrées lointaines du monde - Angleterre, Australie, Nouvelle-Guinée et ailleurs ”.
Destinés à élever le moral des troupes, les Victory Verticals de 40 pouces de hauteur ont été identifiés par leurs couleurs militaires (vert pâle, bleu et gris), leur absence de pattes avant (considérées comme trop délicates pour le champ de bataille) et leurs caisses d'expédition durables. Environ 2 500 de ces secteurs ont été transportés sur tous les théâtres de guerre, notamment en Asie, en Afrique, en Europe, en Amérique du Nord et dans le Pacifique Sud. Ils ont été joués par un orchestre de danse aux Philippines, une unité de service spécial en Alaska et par des interprètes de Bob Hope au violoniste Isaac Stern alors qu'ils effectuaient une tournée au nom de United Service Organizations (USO).
Un lien vers un article du Parisien qui traite d' une restauration de ce fameux piano :
http://www.leparisien.fr/velizy-villaco ... 987605.php
H.S / Un des fameux B17, dont certains étaient peints dans des couleurs vives, il faut dire que la Luftwaffe était plutôt absente dans le ciel en 1944...Je n' aurais pas aimé avoir un appareil de ce type au dessus de ma tête....
B17 Flight.jpg
B17 Flight.jpg (76.3 Kio) Vu 6539 fois
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Christof
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Re: Les pianos Steinway ont également participé au débarquement...

Message par Christof »

Dans le tout premier post, j'avais écrit cela :

* Dans son film "Cinq jours en juin", Michel Legrand qui raconte un épisode important de sa vie quand il avait quinze ans, montre d'ailleurs dans une des scènes un GI jouer du blues sur un de ces pianos Victory. C'est la première fois à l'époque qu'il entendait ce genre de musique (j'en avais déjà parlé dans un fil sur le forum, mais impossible de le retrouver). J'ai eu la chance de pouvoir en parler avec lui à une époque. Il m'avait raconté, qu'au départ, il prévoyait qu'il jouerait lui-même à ce moment-là sur la bande son ce qu'on entendrait au piano. Mais quand le piano est arrivé (la scène se passe dans une cour de ferme, et il y a avait là pas mal d'acteurs qui attendaient pour le tournage, et parmi eux, un figurant, noir américain qui, voyant le piano, et que tout le monde attendait (on attend énormément durant un tournage au cinéma) s'est mis à jouer pour distraire tout le monde. Un blues... Et Michel Legrand a trouvé cela tellement super, un son tellement "jazz", qu'il lui a demandé alors d'être le pianiste de cette scène et a gardé le son original et sa musique originale.
.

C'est incroyable comme la mémoire peut nous jouer des tours.
J'ai revisionné le film... Dans ma tête, le piano était dans la cour d'une ferme... En fait il y a bien un banquet dans la cour d'une ferme, mais le piano est en intérieur... Et ce n'est pas un Victory Steinway..
Dans l'histoire, Michel est en train de jouer du classique (toutes les fenêtres sont ouvertes) et des GI's en jeep passent par là. Un des soldats, qui a entendu le piano et reconnait du Chopin (dans l'histoire, c'est Michel Legrand âgé alors de 15 ans qui est censé jouer), demande qu'on s'arrête pour aller voir.
Michel Legrand m'avait raconté qu'il avait entendu l'acteur jouer pendant une pause alors que tout le monde attendait que les caméras soient prêtes, et là encore, dans ma tête, je pensais que le morceau qu'on entendait durant cette scène était un blues du propre cru de l'acteur noir américain. En fait, cela me revient maintenant... Michel Legrand (qui a écrit la musique du film), l'ayant entendu jouer pendant une pause et ayant trouvé son toucher et son superbes, lui a demandé alors d'interpréter le blues que lui, Michel Legrand, avait composé, et donc lui a montré ce blues. Donc c'est bien cet acteur qui le joue : Michel Legrand a alors gardé la bande son de cette scène telle quelle. Au tout départ, la caméra n'était pas censée montrer les mains de l'acteur qui avait été retenu au tout départ pour la scène... Mais comme Michel avait dégoté un vrai pianiste, il a préféré changer l'acteur et ainsi il pouvait montrer le pianiste en train de jouer.

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On voit sur cette photo le GI's avec le jeune Michel

J'ai repiqué la bande-son de la scène. Au début, l'américain demande au Michel du film (vu que le film raconte un des épisodes de sa jeunesse) si il sait jouer du jazz.. On entend alors le jeune Michel jouer... Le GI'S lui joue ensuite du blues. Et aussi du boogie. Puis rejoue le blues (à moins que là, ce soit le Michel Legrand réalisateur qui joue ?, car on ne voit plus le pianiste jouer. La musique est en fond.



A la fin de la scène les GI's partent en disant au jeune Michel : "on se reverra, sûrement quand tu viendras plus tard comme grand artiste aux Etats-Unis".

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