Poisson de 1er novembre?
- Athos
- Messages : 390
- Enregistré le : mer. 06 avr., 2016 7:30
- Mon piano : Yamaha CLP585
- Localisation : Lyon
Re: Poisson de 1er novembre?
Je me suis désabonné de la mailing list Change.org.
Un peu marre qu'on me dise comment penser...
Je viens de lire ça : http://www.rue89lyon.fr/2013/10/15/avec ... -business/
Comparable aux désormais incontournables "réseaux sociaux"...
Réseaux sociaux........., rien que le nom me fait rire !!!
Sinon, j'avoue que le mot "nègre" employé dans un contexte littéraire n'amenait chez moi aucune image de personne d'origine africaine,
tellement l'expression est ancienne.
Maintenant, faudrait demander aux principaux intéressés et pas décider à leur place peut-être .
Un peu marre qu'on me dise comment penser...
Je viens de lire ça : http://www.rue89lyon.fr/2013/10/15/avec ... -business/
Comparable aux désormais incontournables "réseaux sociaux"...
Réseaux sociaux........., rien que le nom me fait rire !!!
Sinon, j'avoue que le mot "nègre" employé dans un contexte littéraire n'amenait chez moi aucune image de personne d'origine africaine,
tellement l'expression est ancienne.
Maintenant, faudrait demander aux principaux intéressés et pas décider à leur place peut-être .
-
- Messages : 7797
- Enregistré le : jeu. 25 juin, 2015 17:44
- Mon piano : Yamaha GA1
- Localisation : Oise
Re: Poisson de 1er novembre?
En fait dans une expression, un peu comme dans l'apparence d'un artiste (voir le post sur Katia) le problême est autant dans le regard ou dans la manière d'employer une expression que l'expression elle-même ou "l'objet" du regard
C'est un problême comparable dans l'humour (rappelons nous Desproges :"on peut rire de tout mais pas avec n'importe qui")
C'est un problême comparable dans l'humour (rappelons nous Desproges :"on peut rire de tout mais pas avec n'importe qui")
Re: Poisson de 1er novembre?
Du coup comme j'étais intriguée par cette pétition, j'ai consulté le Dictionnaire historique de la langue française d'Alain Rey : l'acception du terme au sens de "nègre littéraire" apparaît au XVIIIème siècle, par analogie au travail de l'esclave, qui prête sa force de travail au Blanc (comme on pouvait s'en douter) ; aucun sens péjoratif n'est signalé (et le terme "nègre" au XVIIIème siècle ne signifie rien d'autre qu' "esclave noir" = il renvoie à une réalité de l'époque, il n'a pas de sens raciste). Donc je ne vois vraiment pas en quoi ce terme, dans cette acceptation, peut être gênant. Au contraire, il dénonce l'usurpation du travail de celui qui écrit par celui qui signe et qui s'enrichit, tout comme il témoigne encore aujourd'hui de l'usurpation de la force de travail de l'esclave noir par le Blanc qui fouette et qui s'enrichit. En fin de compte, ce terme gêne surtout les éditeurs, qui souhaiteraient peut-être l'édulcorer pour mieux nous faire accepter cette logique marchande (précisément celle que Christof vient de dénoncer)... mais je vais peut-être un peu trop loin...
A bien y réfléchir, le mot "tête de nègre" me gêne davantage : bien qu'il ne désigne qu'une anecdotique pâtisserie, il stigmatise clairement de manière physique les Noirs et est donc chargé de connotations racistes, je ne m'étonne pas qu'il ait disparu de nos boulangeries.
En tout cas, ne jetons pas tous nos mots à la poubelle : ils sont chargés de notre histoire, et certains en témoignent plutôt intelligemment.
PS : J'entérine le hors-sujet et je ne trouve aucune pirouette comme Christof pour m'en sortir
A bien y réfléchir, le mot "tête de nègre" me gêne davantage : bien qu'il ne désigne qu'une anecdotique pâtisserie, il stigmatise clairement de manière physique les Noirs et est donc chargé de connotations racistes, je ne m'étonne pas qu'il ait disparu de nos boulangeries.
En tout cas, ne jetons pas tous nos mots à la poubelle : ils sont chargés de notre histoire, et certains en témoignent plutôt intelligemment.
PS : J'entérine le hors-sujet et je ne trouve aucune pirouette comme Christof pour m'en sortir
Modifié en dernier par Lazur84 le sam. 04 mars, 2017 18:15, modifié 1 fois.
- Christof
- Messages : 6919
- Enregistré le : lun. 18 avr., 2016 17:08
- Mon piano : Yamaha G3
- Localisation : Paris 75020
Re: Poisson de 1er novembre?
"ne jetons pas tous nos mots à la poubelle : ils sont chargés de notre histoire, et certains en témoignent plutôt intelligemment"Lazur84 a écrit : En tout cas, ne jetons pas tous nos mots à la poubelle : ils sont chargés de notre histoire, et certains en témoignent plutôt intelligemment.
PS : J'entérine le hors-sujet et je ne trouve aucune pirouette comme Christof pour m'en sortir
Un beau message, qui ne finit pas en queue de poisson (de 1er novembre).
- Arabesque44
- Messages : 3786
- Enregistré le : lun. 07 oct., 2013 18:11
- Mon piano : Bechstein 175 Yamaha 155P
- Localisation : Nantes
Re: Poisson de 1er novembre?
La langue française est assez grande et belle pour évoluer toute seule, c'est ce qu'elle a fait depuis des siècles!
Savez-vous qu'au XVIème siècle par exemple, une "garce" était une jeune fille, sans aucune connotation péjorative? ( simple féminin de garçon)
Et peut-être que dans deux siècles, on pourra dire de nouveau "garce" sans que ce soit insultant.
Les changements ne devraient pas être imposés par des décrets et des pétitions, encore moins par une forme de terrorisme intellectuel.
Ils se font pour la plupart d'eux-mêmes, dès que le contexte ne permet plus d'établir facilement un lien entre les mots et leur signification!
Savez-vous qu'au XVIème siècle par exemple, une "garce" était une jeune fille, sans aucune connotation péjorative? ( simple féminin de garçon)
Et peut-être que dans deux siècles, on pourra dire de nouveau "garce" sans que ce soit insultant.
Les changements ne devraient pas être imposés par des décrets et des pétitions, encore moins par une forme de terrorisme intellectuel.
Ils se font pour la plupart d'eux-mêmes, dès que le contexte ne permet plus d'établir facilement un lien entre les mots et leur signification!
Re: Poisson de 1er novembre?
Peut-être, Arabesque, mais de mon point de vue, c'est un escargot gros pépère qui avait besoin d'être mangé il y a longtemps par les affamés ! C'est quand même la seule langue au monde qui a une académie pour la diriger "dans le bon sens" donc on ne laisse pas évoluer toute seule en France. Pourquoi pas pour réfléter comment on est (ou si je rêve, comment on doit être) pour notre peuple, nos enfants ?
Bon, je n'aime pas être dans une politique identitaire mais l'auteur de pétition est un des principaux intéressés. Moi je suis juste sensible aux sentiments des autres qui sont intéressés surtout quand ils s'expriment, je comprends (étant Asiatique) que l'expression mongoloide ou mongolisme, déjà abandonné dans tous les sens aux Etats-Unis, est une expression raciste qui heurte, et oui, je préfère que les gens écoutent les "principaux intéressés" au lieu de dire "mais on veut garder nos anciennes expressions, même si vous, le principal concerné, sent insulté, parce que..."Athos a écrit :Maintenant, faudrait demander aux principaux intéressés et pas décider à leur place peut-être .
Si plus que la majorité des Français noirs ne voulaient plus cette expression, que direz-vous deux ? Car "nègre" dans Larousse s'agit quand même des noirs (l'étymologie du mot m'apparait clair) et c'est impossible qu'en entendant "nègre" qu'on en pense pas "noir". Je ne suis persuadée ni que cette expression ne gêne pas les Noirs ni qu'ils veulent la garder dans la langue actuelle au lieu d'une autre expression pas (ou moins) chargé. Et non, ce n'est pas "la même chose" s'il y a une expression qui heurte et qui blesse et une autre qui ne blesse pas. Bref, je ne comprends pas pourquoi ceux qui ne sont pas ciblés d'emblée par cette expression peuvent la défendre contre le gré des noirs. Je rappelle qu'il ne s'agit pas d'un anachronisme bizarre et lointain, que le racisme n'est pas derrière nous, malheureusement. Et c'est pourquoi la langue d'aujourd'hui est important, ça influence les pensées. J'imagine mon fils qui apprend cette expression, et bien, j'expliquerais tous que vous avez écrit, mais je serais navrée que c'est toujours d'usage commun dans notre langue.Christof a écrit :PS : remplacer "nègre" par "écrivain fantôme" ou "prête-plume" (comme le propose la pétition), ce serait exactement la même chose - dans un autre domaine - que ce qu'explique si bien lazur84 dans son message ci-dessus. Une façon de se donner bonne conscience à bon compte et noyer le poisson (de 1er novembre... j'essaie de ne pas trop être hors sujet).
“Wrong doesn't become right just because it's accepted by a majority.” - Booker Washington
- Cadenza
- Messages : 1786
- Enregistré le : dim. 29 mai, 2016 7:42
- Mon piano : Yamaha M1A
- Localisation : Québec et discord.gg/9JmQKAm
- Contact :
Re: Poisson de 1er novembre?
Wow! Je vais de découvertes en découvertes!
Je n'avais jamais entendu cette expression. Je suis donc allée voir dans Antidote (un logiciel de correction orthographique que j'utilise notamment au travail et que je trouve franchement bien fait!) pour y voir la définition de «nègre».
J'ai donc lu :
Ok, je sors vraiment du sujet. Mais mes recherches ne m'ont pas permis de trouver réponse. Avez-vous une idée si Debussy référait à un petit homme à la peau noire ou bien s'il référait à une langue rudimentaire, simplifiée?
-
Et de façon générale, merci pour ce sujet. J'apprends plein de choses et c'est vraiment intéressant!
Je n'avais jamais entendu cette expression. Je suis donc allée voir dans Antidote (un logiciel de correction orthographique que j'utilise notamment au travail et que je trouve franchement bien fait!) pour y voir la définition de «nègre».
J'ai donc lu :
Et là, de me questionner sur la signification du titre de la pièce de Debussy du même nom!VIEILLI ou OFFENSANT – Personne à la peau très foncée; Noir.
ANCIENNEMENT – Esclave noir. Traite des nègres.
Personne qui écrit un ouvrage pour le compte d’un écrivain célèbre ou d’une personnalité. Le nègre d’Untel. On soupçonne son dernier livre d’avoir été écrit par un nègre.
LOUISIANE, ANTILLES, FAMILIER – Homme. Lâche pas la patate, mon nègre!
Locutions (8)
nègre blanc
Dont l’ambiguïté vise à concilier les parties. Motion nègre-blanc.
nègre blanc
Noir à peau claire.
QUÉBEC, VIEILLI, PÉJORATIF – Canadien français considéré comme main-d’œuvre bon marché au service d’un patron anglais.
nègre marron
Esclave noir en fuite.
petit nègre
Français rudimentaire et incorrect, à la syntaxe simplifiée. C’est du petit nègre.
nègre en chemise
Dessert au chocolat recouvert d’une crème anglaise.
un combat de nègres dans un tunnel
VIEILLI, FAMILIER, FIGURÉ – Une situation où l’on ne distingue pas les éléments impliqués.
plan de nègre
QUÉBEC, ACADIE, FAMILIER – Projet extravagant, irréalisable.
travailler comme un nègre, travailler comme un bœuf, travailler comme un cheval, travailler comme un mercenaire ou travailler comme une bête de somme
FIGURÉ – Travailler très fort. Jean a travaillé comme un bœuf toute la journée pour finir la construction du cabanon à temps. Le paysan travaillait comme une bête de somme pour labourer la terre. L’employé travailla comme un cheval pendant un mois pour satisfaire son patron. Les femmes ont travaillé comme des mercenaires pour obtenir le droit de vote. Ils travaillent comme des nègres chaque jour et ne récoltent que les restants.
Ok, je sors vraiment du sujet. Mais mes recherches ne m'ont pas permis de trouver réponse. Avez-vous une idée si Debussy référait à un petit homme à la peau noire ou bien s'il référait à une langue rudimentaire, simplifiée?
-
Et de façon générale, merci pour ce sujet. J'apprends plein de choses et c'est vraiment intéressant!
Mon parcours musical, du jour 1 (février 2016), avec ses hauts et ses bas. ;)
Re: Poisson de 1er novembre?
Je soupçonne que ma culture d'origine ressemble à la tienne, et cette expression (ces expressions) ne s'utilisent plus au Canada...
“Wrong doesn't become right just because it's accepted by a majority.” - Booker Washington
- Christof
- Messages : 6919
- Enregistré le : lun. 18 avr., 2016 17:08
- Mon piano : Yamaha G3
- Localisation : Paris 75020
Re: Poisson de 1er novembre?
Ouh la la, on dirait que c'est ma fête...Christof a écrit :PS : remplacer "nègre" par "écrivain fantôme" ou "prête-plume" (comme le propose la pétition), ce serait exactement la même chose - dans un autre domaine - que ce qu'explique si bien lazur84 dans son message ci-dessus. Une façon de se donner bonne conscience à bon compte et noyer le poisson (de 1er novembre... j'essaie de ne pas trop être hors sujet).
Lee a écrit
"Si plus que la majorité des Français noirs ne voulaient plus cette expression, que direz-vous deux ? Car "nègre" dans Larousse s'agit quand même des noirs (l'étymologie du mot m'apparait clair) et c'est impossible qu'en entendant "nègre" qu'on en pense pas "noir". Je ne suis persuadée ni que cette expression ne gêne pas les Noirs ni qu'ils veulent la garder dans la langue actuelle au lieu d'une autre expression pas (ou moins) chargé. Et non, ce n'est pas "la même chose" s'il y a une expression qui heurte et qui blesse et une autre qui ne blesse pas. Bref, je ne comprends pas pourquoi ceux qui ne sont pas ciblés d'emblée par cette expression peuvent la défendre contre le gré des noirs. Je rappelle qu'il ne s'agit pas d'un anachronisme bizarre et lointain, que le racisme n'est pas derrière nous, malheureusement. Et c'est pourquoi la langue d'aujourd'hui est important, ça influence les pensées. J'imagine mon fils qui apprend cette expression, et bien, j'expliquerais tous que vous avez écrit, mais je serais navrée que c'est toujours d'usage commun dans notre langue.
-
- Messages : 7797
- Enregistré le : jeu. 25 juin, 2015 17:44
- Mon piano : Yamaha GA1
- Localisation : Oise
Re: Poisson de 1er novembre?
Tu trouveras sans doute quelques éléments de réponse dans cet articleJouishy a écrit : Ok, je sors vraiment du sujet. Mais mes recherches ne m'ont pas permis de trouver réponse. Avez-vous une idée si Debussy référait à un petit homme à la peau noire ou bien s'il référait à une langue rudimentaire, simplifiée?
Et de façon générale, merci pour ce sujet. J'apprends plein de choses et c'est vraiment intéressant!
http://musique.histoire.free.fr/michel- ... gg-debussy
- Cadenza
- Messages : 1786
- Enregistré le : dim. 29 mai, 2016 7:42
- Mon piano : Yamaha M1A
- Localisation : Québec et discord.gg/9JmQKAm
- Contact :
Re: Poisson de 1er novembre?
Oh, par chez moi, on dit régulièrement un «plan de nègre» pour «une mauvaise idée».Lee a écrit :Je soupçonne que ma culture d'origine ressemble à la tienne, et cette expression (ces expressions) ne s'utilisent plus au Canada...
Merci, je vais aller lire avec intérêt!pianojar a écrit :Tu trouveras sans doute quelques éléments de réponse dans cet articleJouishy a écrit : Ok, je sors vraiment du sujet. Mais mes recherches ne m'ont pas permis de trouver réponse. Avez-vous une idée si Debussy référait à un petit homme à la peau noire ou bien s'il référait à une langue rudimentaire, simplifiée?
Et de façon générale, merci pour ce sujet. J'apprends plein de choses et c'est vraiment intéressant!
http://musique.histoire.free.fr/michel- ... gg-debussy
Mon parcours musical, du jour 1 (février 2016), avec ses hauts et ses bas. ;)
Re: Poisson de 1er novembre?
En lisant vos écrits et d'autres des Français, je me demande si peut-être, tout simplement, la langue française et la culture francophone n'est pas faite pour l'égalité ou l'aspiration d'égalité.
“Wrong doesn't become right just because it's accepted by a majority.” - Booker Washington
Re: Poisson de 1er novembre?
Tu soulèves un point que je n'ai pas adressé, je trouve différent quand un terme appliqué aux personnes est repris pour le transformer, ce n'est pas vraiment la même chose. On voit souvent dernièrement chez les resistants, qui tournent exactement la phrase des oppresseurs en point de force pour ce qu'ils veulent dire. Et non, cette "réformette" ne s'agit pas de la mauvaise conscience des Blancs, AU CONTRAIRE, il s'agit d'un Noir qui veut un changement, et apparemment les Blancs qui n'ont pas de mauvaise conscience et veulent garder cette expression malgré la gêne que ça produit.Lazur84 a écrit :Pour parler de choses que je connais mieux, je signale que dans le même temps, Senghor et Césaire inventent le concept de négritude : il s'agit pour les Noirs, par l'emploi de ce terme, de revendiquer 350 ans d'esclavage, de s'emparer de leur histoire, de ne plus avoir honte d'être des "nègres" car cette honte est précisément celle que leur renvoient les Blancs. Bref, être fier d'être nègre, c'est retrouver sa dignité.
Alors je ne sais pas si Césaire s'est exprimé sur l'opportunité lexicale de transformer "nègre" en "prête-plume", mais je ne peux m'empêcher de penser qu'au mieux, il aurait rigolé, et qu'au pire, il aurait été très agacé car cette réformette reflète surtout la mauvaise conscience des Blancs
Le CRAN (Conseil Représentatif des Associations Noires de France) soutient la pétition.
“Wrong doesn't become right just because it's accepted by a majority.” - Booker Washington
Re: Poisson de 1er novembre?
Oui tu as raison sur ce point : la langue française a bel et bien ce côté conservateur et élitiste, qui la conduit à garder ses mots, sa syntaxe et son orthographe hérités dans leurs grandes lignes des recherches des humanistes du XVIème siècle : ils ont construit en particulier une orthographe compliquée, parce qu'ils voulaient montrer que le français descendait du grec et du latin, langues des civilisations qu'ils admiraient tant (je pourrais faire de longs développements sur le sujet, mais bon... cela n'est pas vraiment le cadre). Alors oui, cette "fierté" française est aussi son plus gros défaut : contrairement aux autres langues vivantes (je pense surtout à l'anglais, et même à l'allemand) notre langue peut sembler peu dynamique : elle crée peu de nouveaux mots, et dès que quelques esprits pragmatiques proposent une réforme de l'orthographe (ce qui arrive régulièrement depuis une centaine d'années...), les élites (qui n'ont pas de problème, elles, avec la langue) s'insurgent. De ce point de vue, la langue française est un gros escargot, c'est sûr (notons tout de même que les Québécois la dynamisent bien plus, ils devraient d'ailleurs fonder une Contre-Académie !)Lee a écrit :Peut-être, Arabesque, mais de mon point de vue, c'est un escargot gros pépère qui avait besoin d'être mangé il y a longtemps par les affamés ! C'est quand même la seule langue au monde qui a une académie pour la diriger "dans le bon sens" donc on ne laisse pas évoluer toute seule en France.
Bien sûr, puisque ces deux termes stigmatisent des traits physiques : ils véhiculent inconsciemment des préjugés racistes.Lee a écrit :je comprends (étant Asiatique) que l'expression mongoloide ou mongolisme, déjà abandonné dans tous les sens aux Etats-Unis, est une expression raciste qui heurte,
Je ne comprends pas le problème. Evidemment que "nègre" veut dire "noir" (noir en français vient du latin negrum qui signifie... noir).Lee a écrit :Car "nègre" dans Larousse s'agit quand même des noirs (l'étymologie du mot m'apparait clair) et c'est impossible qu'en entendant "nègre" qu'on en pense pas "noir".
Ce raisonnement me gêne vraiment, parce qu'il est fondé sur une logique communautaire. Quand je défendais ce point de vue, je ne raisonnais ni en tant que blanche ni en tant que noire, mais en tant qu'être humain. La logique qui envisage les Noirs / les Blancs comme des groupes compacts et uniformes dont tous les individus pensent la même chose ne me convient pas. Et comme dit précédemment, je renvoie à Césaire : il était noir, il aimait le mot "nègre".Lee a écrit :Je ne suis persuadée ni que cette expression ne gêne pas les Noirs ni qu'ils veulent la garder dans la langue actuelle au lieu d'une autre expression pas (ou moins) chargé. Et non, ce n'est pas "la même chose" s'il y a une expression qui heurte et qui blesse et une autre qui ne blesse pas. Bref, je ne comprends pas pourquoi ceux qui ne sont pas ciblés d'emblée par cette expression peuvent la défendre contre le gré des noirs.
C'est précisément la raison pour laquelle j'expliquais que selon moi, le terme "nègre" dans le sens "nègre littéraire" permettait de commémorer à sa façon l'esclavage, et donc de continuer de faire réfléchir à l'exclusion : c'est bien dans ce sens que ce terme n'est pas un anachronisme.Lee a écrit :Je rappelle qu'il ne s'agit pas d'un anachronisme bizarre et lointain, que le racisme n'est pas derrière nous, malheureusement
"Et c'est pourquoi la langue d'aujourd'hui est important, ça influence les pensées. J'imagine mon fils qui apprend cette expression, et bien, j'expliquerais tous que vous avez écrit, mais je serais navrée que c'est toujours d'usage commun dans notre langue."
Bien sûr. Mais un mot n'a pas qu'un sens en synchronie ( = tous les sens qu'ils peut prendre dans la langue moderne), il a aussi un sens en diachronie ( = les différents sens du mot dans l'histoire). Sans utiliser ces "gros mots", c'est ce que j'explique aussi à mes fils, et cela ne me gêne pas parce que cela permet de réfléchir à la langue, donc aux idées.
Re: Poisson de 1er novembre?
Et bien, je serais intéressée par sa défense de l'expression "nègre littéraire" s'il avait défendu, mais encore une fois, je trouve que c'est différent quand le victim ou cible des mots détourne le sens et utilise le mot autrement.Lazur84 a écrit :Ce raisonnement me gêne vraiment, parce qu'il est fondé sur une logique communautaire. Quand je défendais ce point de vue, je ne raisonnais ni en tant que blanche ni en tant que noire, mais en tant qu'être humain. La logique qui envisage les Noirs / les Blancs comme des groupes compacts et uniformes dont tous les individus pensent la même chose ne me convient pas. Et comme dit précédemment, je renvoie à Césaire : il était noir, il aimait le mot "nègre".Lee a écrit:Je ne suis persuadée ni que cette expression ne gêne pas les Noirs ni qu'ils veulent la garder dans la langue actuelle au lieu d'une autre expression pas (ou moins) chargé. Et non, ce n'est pas "la même chose" s'il y a une expression qui heurte et qui blesse et une autre qui ne blesse pas. Bref, je ne comprends pas pourquoi ceux qui ne sont pas ciblés d'emblée par cette expression peuvent la défendre contre le gré des noirs.
Le communautarisme est une accusation comme les accusations contre le politiquement correct, on met cette étiquette et tout le monde dit "c'est mauvais" sans vraiment bien évaluer ce que c'est. En fait je ne comprends toujours pas ce que ça veut dire et si ça peut appliquer à tout le monde y compris quelqu'un qui pense qu'en débarrassant des minorités que tout ira bien.
Je pars simplement d'un evidence : ceux qui ont subi quelque chose (le racisme) comprennent forcement mieux que ceux qui ne l'ont pas subi et sont mieux placés pour le juger ou le voir claire. Il est peut-être juste un hasard que je suis une minorité d'une sorte ou une autre n'importe où que je me trouve, et que je vois toujours les choses de point de vue des minorités qui s'expriment alors que d'autres qui "passent inaperçus" ne sont pas d'accord avec moi ou avec ceux qui trouvent quelque chose raciste contre eux.
EDIT : et juste après avoir écrit tout ça, j'ai pris ma bouteille de rhum pour ajouter à mon Grog, et je vois sur la bouteille "Negrita".
“Wrong doesn't become right just because it's accepted by a majority.” - Booker Washington
Re: Poisson de 1er novembre?
Pas si différent en fait, dans le sens où ces gens nous montrent qu'on peut penser aux mots autrement.Lee a écrit :Et bien, je serais intéressée par sa défense de l'expression "nègre littéraire" s'il avait défendu, mais encore une fois, je trouve que c'est différent quand le victim ou cible des mots détourne le sens et utilise le mot autrement.
Le communautarisme n'est pas une étiquette, c'est un fait social. Il est de culture anglo-saxonne, il existe depuis au moins le XVIIIème siècle en Angleterre puisque Voltaire en parle dans ses Lettres philosophiques (le terme n'existe pas évidemment à l'époque, mais Voltaire, contraint à l'exil en Angleterre, découvre avec une certaine admiration le climat de relative tolérance dans lequel vivent les communautés des Quakers, des Presbytériens, des Anglicans, etc. alors que la France connaît au même moment un climat d'extrême intolérance religieuse). En France, la culture est, depuis la Révolution et la séparation de l'Eglise et de l'Etat, plutôt jacobine et centralisatrice, elle vise à inculquer les mêmes valeurs laïques à tous. Dans le contexte actuel, force est de constater les limites des deux systèmes : minorités représentatives mais non représentées au Etats-Unis d'un côté par exemple, échec de "l'intégration à la française" de l'autre... qui favorise le communautarisme.Lee a écrit :Le communautarisme est une accusation comme les accusations contre le politiquement correct, on met cette étiquette et tout le monde dit "c'est mauvais" sans vraiment bien évaluer ce que c'est. En fait je ne comprends toujours pas ce que ça veut dire et si ça peut appliquer à tout le monde y compris quelqu'un qui pense qu'en débarrassant des minorités que tout ira bien.
Je ne peux pas te contredire, les victimes du racisme le ressentent plus intensément que les autres, c'est évident, tout comme les femmes ressentent plus le sexisme que les hommes. Mais je continue de penser qu'il n'est pas souhaitable de laisser la primauté de la réflexion à un côté plutôt qu'à un autre, parce que cela revient pour moi à raisonner en fonction de nos différences (ce que j'appelais le communautarisme) alors la cause est commune. Si on me dit que la majorité des Noirs de France se sent blessée par le terme "nègre littéraire" (bon, on n'a pas de chiffres, mais admettons) et que pour cette raison on a remplacé ce terme, cela ne m'empêchera pas de dormir, mais je continuerai de penser que c'est parce que ce mot a été mal compris, qu'on n'a pas réussi à le réinvestir de manière positive et qu'on signe un peu là l'échec d'une réflexion sur les mots et d'une redynamisation de la langue, et donc des idées. "Prête-plume" est joli, c'est vrai, mais il est anodin et univoque ; or je crois que j'aime bien les termes équivoques, ils me rappellent que la réalité est plus complexe qu'il n'y paraît, ils montrent tout le prisme des idées et toutes les strates de l'histoire.Lee a écrit :Je pars simplement d'un evidence : ceux qui ont subi quelque chose (le racisme) comprennent forcement mieux que ceux qui ne l'ont pas subi et sont mieux placés pour le juger ou le voir claire. Il est peut-être juste un hasard que je suis une minorité d'une sorte ou une autre n'importe où que je me trouve, et que je vois toujours les choses de point de vue des minorités qui s'expriment alors que d'autres qui "passent inaperçus" ne sont pas d'accord avec moi ou avec ceux qui trouvent quelque chose raciste contre eux.
Bon, on ne tombera pas d'accord, ce n'est pas grave. J'ai apprécié ce débat en tout cas.
PS : Ton rhum Négrita me fait penser que mes enfants boivent du Banania. Je notais ce matin qu'il y avait toujours le bonhomme noir sur la boîte : il a les lèvres un peu moins épaisses, il ne dit plus "y a bon" mais "C'est tout bon" ... bref, peu de progrès... Mais bon, on ne va pas compter sur le marketing pour faire avancer les idées !
Et puis pour les amateurs de littérature, je rappelle cet extrait de 1984, d'Orwell :
C’est une belle chose, la destruction des mots. Naturellement, c’est dans les verbes et les adjectifs qu’il y a le plus de déchets, mais il y a des centaines de noms dont on peut aussi se débarrasser. Pas seulement les synonymes, il y a aussi les antonymes. Après tout, quelle raison d’exister y a-t-il pour un mot qui n’est que le contraire d’un autre ? Les mots portent en eux-mêmes leur contraire. Prenez « bon », par exemple. Si vous avez un mot comme « bon » quelle nécessité y a-t-il à avoir un mot comme « mauvais » ? « Inbon » fera tout aussi bien, mieux même, parce qu’il est l’opposé exact de bon, ce que n’est pas l’autre mot. Et si l’on désire un mot plus fort que « bon », quel sens y a-t-il à avoir toute une chaîne de mots vagues et inutiles comme « excellent », « splendide » et tout le reste ? « Plusbon » englobe le sens de tous ces mots, et, si l’on veut un mot encore plus fort, il y a « double-plusbon ». Naturellement, nous employons déjà ces formes, mais dans la version définitive du novlangue, il n’y aura plus rien d’autre. En résumé, la notion complète du bon et du mauvais sera couverte par six mots seulement, en réalité un seul mot. Voyez-vous, Winston, l’originalité de cela ? Naturellement, ajouta-t-il après coup, l’idée vient de Big Brother.
Au nom de Big Brother, une sorte d’ardeur froide flotta sur le visage de Winston. Syme, néanmoins, perçut immédiatement un certain manque d’enthousiasme.
– Vous n’appréciez pas réellement le novlangue, Winston, dit-il presque tristement. Même quand vous écrivez, vous pensez en ancilangue. J’ai lu quelques-uns des articles que vous écrivez parfois dans le Times. Ils sont assez bons, mais ce sont des traductions. Au fond, vous auriez préféré rester fidèle à l’ancien langage, à son imprécision et ses nuances inutiles. Vous ne saisissez pas la beauté qu’il y a dans la destruction des mots. Savez-vous que le novlangue est la seule langue dont le vocabulaire diminue chaque année ?
Winston l’ignorait, naturellement. Il sourit avec sympathie, du moins il l’espérait, car il n’osait se risquer à parler.
Syme prit une autre bouchée de pain noir, la mâcha rapidement et continua :
– Ne voyez-vous pas que le véritable but du novlangue est de restreindre les limites de la pensée ? À la fin, nous rendrons littéralement impossible le crime par la pensée car il n’y aura plus de mots pour l’exprimer. Tous les concepts nécessaires seront exprimés chacun exactement par un seul mot dont le sens sera délimité. Toutes les significations subsidiaires seront supprimées et oubliées. Déjà, dans la onzième édition, nous ne sommes pas loin de ce résultat. Mais le processus continuera encore longtemps après que vous et moi nous serons morts. Chaque année, de moins en moins de mots, et le champ de la conscience de plus en plus restreint. Il n’y a plus, dès maintenant, c’est certain, d’excuse ou de raison au crime par la pensée. C’est simplement une question de discipline personnelle, de maîtrise de soi-même. Mais même cette discipline sera inutile en fin de compte. La Révolution sera complète quand le langage sera parfait. Le novlangue est l’angsoc et l’angsoc est le novlangue, ajouta-t-il avec une sorte de satisfaction mystique. Vous est-il jamais arrivé de penser, Winston, qu’en l’année 2050, au plus tard, il n’y aura pas un seul être humain vivant capable de comprendre une conversation comme celle que nous tenons maintenant ?
- Cadenza
- Messages : 1786
- Enregistré le : dim. 29 mai, 2016 7:42
- Mon piano : Yamaha M1A
- Localisation : Québec et discord.gg/9JmQKAm
- Contact :
Re: Poisson de 1er novembre?
Il existe déjà un pendant québécois à l'Académie français : l'office québécois de la langue française!
Je consulte énormément leur site internet dans le cadre de mon travail (je fais beaucoup de correction de textes pour le bureau, rapports, présentations powerpoint, etc.) : leur banque de dépannage linguistique et, un peu plus rarement, le grand dictionnaire terminologique (surtout pour vérifier si l'emploi d'un terme donné est considéré comme un anglicisme et, le cas échéant, le bon terme à utiliser en français. Exemple, ou encore le cas très classique du courriel). Le logiciel Antidote est un bon complément, qui reconnaît beaucoup d'anglicisme dans les formulations («adresser un problème», «faire du sens», etc.) et soulève aussi les régionalismes (pertinent quand l'on s'adresse à un auditoire plus large de la francophonie).
Exemple avec «adresser», que Lee a utilisé plus haut ( ) :
Au passage, je dois dire que je trouve la chaîne youtube de Linguisticae très intéressante sur ces questions de l'évolution de la langue française. Ses vidéos m'ont convaincue de la nécessité de l'évolution de l'orthographe, moi qui ait tendance à être plutôt conservatrice en ce domaine (un rare domaine où je suis conservatrice d'ailleurs ), surtout lorsqu'il a parlé du cas d'un autre peuple (je ne me souviens plus du détail de l'exemple, mes excuses) qui en était venu à apprendre une langue écrite qui n'avait plus rien à voir avec la langue parlée, car l'écrit n'avait pas suivi l'usage. L'argument aussi à l'effet qu'avoir un code écrit trop complexe oblige à y perdre plus de temps lors de l'enseignement, temps qui pourrait être plus efficacement investi dans l'apprentissage d'autres matières, me semblait aussi très intéressant. En effet, avoir une langue plus simple à l'écrit permettrait qu'on y passe moins de temps à l'enseigner, pour utiliser ce temps à enseigner autre chose, comme les mathématiques, les sciences, la littérature ou la musique.
Je vous recommande, si vous ne connaissez cette chaîne, d'aller la découvrir. Il y a là une grande richesse de connaissances sur la linguistique, discipline dont j'ignorais l'existence il y a quelques années!
Je consulte énormément leur site internet dans le cadre de mon travail (je fais beaucoup de correction de textes pour le bureau, rapports, présentations powerpoint, etc.) : leur banque de dépannage linguistique et, un peu plus rarement, le grand dictionnaire terminologique (surtout pour vérifier si l'emploi d'un terme donné est considéré comme un anglicisme et, le cas échéant, le bon terme à utiliser en français. Exemple, ou encore le cas très classique du courriel). Le logiciel Antidote est un bon complément, qui reconnaît beaucoup d'anglicisme dans les formulations («adresser un problème», «faire du sens», etc.) et soulève aussi les régionalismes (pertinent quand l'on s'adresse à un auditoire plus large de la francophonie).
Exemple avec «adresser», que Lee a utilisé plus haut ( ) :
Et mes excuses pour cette aparté.Constructions à proscrire (4)
adresser les besoins, les préoccupations, les inquiétudes de quelqu’un
Calque. — QUÉBEC – On écrit plutôt considérer, prendre en considération ses besoins, ses inquiétudes.
adresser quelqu’un, adresser un auditoire, une audience
Calque. — QUÉBEC – On écrit plutôt s’adresser à quelqu’un, prendre la parole ou faire un discours.
adresser un problème, une difficulté
Calque. — QUÉBEC – On écrit plutôt aborder, considérer un problème, une difficulté.
adresser une question, une tâche, un dossier
Calque. — QUÉBEC – On écrit plutôt s’attaquer à une question, à une tâche, à un dossier.
Au passage, je dois dire que je trouve la chaîne youtube de Linguisticae très intéressante sur ces questions de l'évolution de la langue française. Ses vidéos m'ont convaincue de la nécessité de l'évolution de l'orthographe, moi qui ait tendance à être plutôt conservatrice en ce domaine (un rare domaine où je suis conservatrice d'ailleurs ), surtout lorsqu'il a parlé du cas d'un autre peuple (je ne me souviens plus du détail de l'exemple, mes excuses) qui en était venu à apprendre une langue écrite qui n'avait plus rien à voir avec la langue parlée, car l'écrit n'avait pas suivi l'usage. L'argument aussi à l'effet qu'avoir un code écrit trop complexe oblige à y perdre plus de temps lors de l'enseignement, temps qui pourrait être plus efficacement investi dans l'apprentissage d'autres matières, me semblait aussi très intéressant. En effet, avoir une langue plus simple à l'écrit permettrait qu'on y passe moins de temps à l'enseigner, pour utiliser ce temps à enseigner autre chose, comme les mathématiques, les sciences, la littérature ou la musique.
Je vous recommande, si vous ne connaissez cette chaîne, d'aller la découvrir. Il y a là une grande richesse de connaissances sur la linguistique, discipline dont j'ignorais l'existence il y a quelques années!
Mon parcours musical, du jour 1 (février 2016), avec ses hauts et ses bas. ;)
Re: Poisson de 1er novembre?
@Jouishy merci, j'ai beaucoup utilisé ce dictionnaire avant quand j'ai fait un peu de travail de traduction. Actuellement je consulte Linguee plutôt.
Le fait qu'on peut toujours constater plusieurs usages racistes et pejoratives de "nègre" de nos jours actuels me fait penser que tes idées concernant garder cette expression (même si intellectuellement séduisantes) d'un idéel trop beau et éloigné de notre réalité :
La définition Larousse de communautarisme est nullissime : "Tendance du multiculturalisme américain qui met l'accent sur la fonction sociale des organisations communautaires (ethniques, religieuses, sexuelles, etc.)." Bon, je ne comprends toujours pas ce que ça veut dire, mais ce mot toujours me semble une matraque pour que les minorités fassent ce que la majorité veut, sans questions.
Au contraire, je trouve que si les personnes avec des expériences et des sentiments différentes veulent trouver une société pour bien vivre ensemble, basé sur l'égalité et le respect pour tous, on prendra en compte le fait que historiquement la majorité (les Blancs) avait le pouvoir pour tout décider, y compris la langue et ce que les minorités (les Noirs) pouvaient faire. Aujourd'hui pour avancer, l'opinion des personnes concernées par ce nom souvent pejoratif doit peser et nous pencher vers leur avis, sinon on risque d'encore repliquer la situation historique de la majorité en pouvoir qui décident pour la minorité même le mot qui leur décrit et contre leur gré.
Mon collègue vient d'Afrique de Sud, il a vécu plusieurs années à Londres puis à Paris. Il m'a dit hier que en Royaume-Unis qu'ils n'y pensent pas au multiculturalisme, ils le sont et ils le vivent bien alors qu'en France on y pense et on le questionne et on ne le vit pas bien.
Différent que toi, je ne dors pas bien pensant à l'existence de cette ancienne expression, la dureté des Français contre la considération de ceux qui sont le plus concernés, et l'usage négatif de "communautarisme" (pour exprimer contre le multiculturalisme ou finalement juste multi-autres). Je me demande où est ma place et la place de mon fils dans ce pays. À 5 ans il me racontait en larmes l'expression "tête de chinois !" hurlée à lui.
Mon autre pays est actuellement en train de devenir ce que 1984 raconte ("real facts" ou "real news" ou "fake news"). Et maintenant je vais retrouver ce passage que tu as cité en anglais pour me préparer psychologiquement à tout. Quand j'avais lu 1984, il me semblait impossible d'imaginer qu'il arriverait à mon pays, et je n'ai jamais imaginé vivre dans un autre. Je vis maintenant dans un pays qui veut toujours garder l'expression "nègre litteraire" malgré ses Noirs qui ne la veulent plus mais qui condamne un humouriste pour appeler un footballer un prostitué. Ça me dépasse.
J'ai trouvé quelque chose sur Césaire, j'espère qu'elle te fait encore de la réfléxion :Lazur84 a écrit :Pas si différent en fait, dans le sens où ces gens nous montrent qu'on peut penser aux mots autrement.
https://www.franceculture.fr/histoire/d ... -mot-negreAinsi, lorsque Léopold Sedar Senghor et Aimé Césaire ont fondé en 1935 leur revue, ils hésitent : faut-il l'appeler "L'Etudiant nègre" ou "L'Etudiant noir" ? Les deux intellectuels et poètes choisissent finalement la deuxième option, raconte Ndiaye :
Le mot "nègre" leur semblant trop péjoratif, même si les deux mêmes le détourneront pour fonder le concept de "négritude". L'inversion du stigmate leur semblait à l'époque de la revue trop difficile.
Le fait qu'on peut toujours constater plusieurs usages racistes et pejoratives de "nègre" de nos jours actuels me fait penser que tes idées concernant garder cette expression (même si intellectuellement séduisantes) d'un idéel trop beau et éloigné de notre réalité :
Ce que tu avais dit sur le communautarisme est intéressant par rapport l'histoire de la France qui m'est encore pas bien connu, mais je trouve que tu n'as pas vraiment expliqué ce qu'il est exactement. Enfin je ne dis pas forcément que telle communauté penserait d'une façon ou une autre, je trouve intéressant quand les opinions diffèrent et je trouve souhaitable d'y rester sensible.Lazur84 a écrit : une réflexion sur les mots et d'une redynamisation de la langue, et donc des idées. "Prête-plume" est joli, c'est vrai, mais il est anodin et univoque ; or je crois que j'aime bien les termes équivoques, ils me rappellent que la réalité est plus complexe qu'il n'y paraît, ils montrent tout le prisme des idées et toutes les strates de l'histoire.
La définition Larousse de communautarisme est nullissime : "Tendance du multiculturalisme américain qui met l'accent sur la fonction sociale des organisations communautaires (ethniques, religieuses, sexuelles, etc.)." Bon, je ne comprends toujours pas ce que ça veut dire, mais ce mot toujours me semble une matraque pour que les minorités fassent ce que la majorité veut, sans questions.
Au contraire, je trouve que si les personnes avec des expériences et des sentiments différentes veulent trouver une société pour bien vivre ensemble, basé sur l'égalité et le respect pour tous, on prendra en compte le fait que historiquement la majorité (les Blancs) avait le pouvoir pour tout décider, y compris la langue et ce que les minorités (les Noirs) pouvaient faire. Aujourd'hui pour avancer, l'opinion des personnes concernées par ce nom souvent pejoratif doit peser et nous pencher vers leur avis, sinon on risque d'encore repliquer la situation historique de la majorité en pouvoir qui décident pour la minorité même le mot qui leur décrit et contre leur gré.
Mon collègue vient d'Afrique de Sud, il a vécu plusieurs années à Londres puis à Paris. Il m'a dit hier que en Royaume-Unis qu'ils n'y pensent pas au multiculturalisme, ils le sont et ils le vivent bien alors qu'en France on y pense et on le questionne et on ne le vit pas bien.
Différent que toi, je ne dors pas bien pensant à l'existence de cette ancienne expression, la dureté des Français contre la considération de ceux qui sont le plus concernés, et l'usage négatif de "communautarisme" (pour exprimer contre le multiculturalisme ou finalement juste multi-autres). Je me demande où est ma place et la place de mon fils dans ce pays. À 5 ans il me racontait en larmes l'expression "tête de chinois !" hurlée à lui.
Mon autre pays est actuellement en train de devenir ce que 1984 raconte ("real facts" ou "real news" ou "fake news"). Et maintenant je vais retrouver ce passage que tu as cité en anglais pour me préparer psychologiquement à tout. Quand j'avais lu 1984, il me semblait impossible d'imaginer qu'il arriverait à mon pays, et je n'ai jamais imaginé vivre dans un autre. Je vis maintenant dans un pays qui veut toujours garder l'expression "nègre litteraire" malgré ses Noirs qui ne la veulent plus mais qui condamne un humouriste pour appeler un footballer un prostitué. Ça me dépasse.
“Wrong doesn't become right just because it's accepted by a majority.” - Booker Washington
- jean-séb
- Messages : 11173
- Enregistré le : lun. 16 oct., 2006 20:36
- Mon piano : Yamaha C3
- Localisation : Paris
Re: Poisson de 1er novembre?
Crois-tu que la majorité des blacks de France se soucient vraiment de ce mot ? J'en doute fort.Lee a écrit : Je vis maintenant dans un pays qui veut toujours garder l'expression "nègre litteraire" malgré ses Noirs qui ne la veulent plus
Il y a aussi des Africains qui revendiquent le terme nègre, comme dans cet article :
http://afrikhepri.org/le-dieu-noir-le-s ... te-part-i/
Ce qui compte, ce ne sont pas tant les mots que la façon dont on les dit, et ce n'est pas en changeant les mots qu'on change les préjugés.
Le mot "nègre" n'est d'ailleurs pas nécessairement chargé de connotations négatives dans la langue française : il désigne (ou désignait, si le politiquement correct a sévi) le major d'une promotion à Saint-Cyr.
Lorsque Camille Mortenol fut le premier Guadeloupéen à intégrer Polytechnique en 1880, il fut accueilli ainsi par ses camarades :
« Ah ! c'est toi le nègre. C'est bien, conscrard, continue ! Je t'ai reconnu à ta face luisante, aux reflets brillants, sur laquelle se détachent deux yeux blancs comme deux rostos de sapin dans tes ténèbres de la nuit. Si tu es nègre, nous sommes blancs ; à chacun sa couleur et qui pourrait dire quelle est la meilleure ? Si même la tienne valait moins, tu n'en aurais que plus de mérite à entrer dans la première École du monde, à ce qu'on dit. Tu peux être assuré d'avoir toutes les sympathies de tes ans. Nous t'avons coté parce que l'admission d'un noir à l'X ne s'était jamais vue ; mais nous ne songeons pas à te tourner en ridicule ; nous ne voyons en toi qu'un bon camarade auquel nous sommes heureux de serrer la main. »
-
- Messages : 7797
- Enregistré le : jeu. 25 juin, 2015 17:44
- Mon piano : Yamaha GA1
- Localisation : Oise
Re: Poisson de 1er novembre?
jean-séb a écrit : Ce qui compte, ce ne sont pas tant les mots que la façon dont on les dit, et ce n'est pas en changeant les mots qu'on change les préjugés.
Nous sommes bien d'accordpianojar a écrit :En fait dans une expression, un peu comme dans l'apparence d'un artiste (voir le post sur Katia) le problême est autant dans le regard ou dans la manière d'employer une expression que l'expression elle-même ou "l'objet" du regard