Les concerts « et voilà » 25-26-27 janvier

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Doubidoudom
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Les concerts « et voilà » 25-26-27 janvier

Message par Doubidoudom »

Je change l’intitulé de ce qui étaient les soirées musicales au Musée de Montmartre. Si ce lieu est toujours magique (les premières chutes de neige dans cet endroit préservé l’ont enchanté), les deux autres lieux disposent aussi de bons pianos et de conditions d’écoute confortables et intimes. L’entrée y est de plus entièrement gratuite même si la réservation pour le musée est très raisonnable : 6€.

le week-end prochain vous pourrez donc entendre une histoire rapide et subjective de la musique espagnole, depuis les chants sépharades du 1er millénaire à Manuel de Falla, Racontée par DOm Paulin
Avec DOm Paulin : Piano
Salma Sadak : Voix
Sophie Maréchal : Guitare
Autour de l'an mille, l'Espagne andalouse connu une période de grand rayonnement culturel sous domination musulmane. Juifs, chrétiens et musulmans vivaient ensemble en toute quiétude, et la musique espagnole s'est énormément enrichie de ce métissage sonore. Puis, si les musiques folkloriques ont continué à prospérer, la musique savante s'est un peu endormie. Il faut attendre la fin du XIXème siècle pour qu'elle reprenne de l'ampleur avec Granados, de Falla, Albéniz, et influençant aussi les compositeurs français comme Debussy, Ravel ou Chabrier.

Vendredi 25 Janvier à 19h
au Musée de Montmartre
12 rue Cortot
75018 paris

Samedi 26 janvier à 16h30
à la médiathèque de Romainville
Rue Albert Giry

Dimanche 27 janvier à 17h
à l'espace 93
93 rue de la Chapelle

Toutes les infos ainsi que les réservations sur le site de Et voilà!


http://etvoila.art/
Mailing MdM Janvier 2019.pdf
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Modifié en dernier par Doubidoudom le sam. 09 févr., 2019 5:45, modifié 1 fois.
Je suis aveugle mais on trouve toujours plus malheureux: j'aurais pu être noir. Ray Charles
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Christof
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Re: Les concerts « et voilà » 25-26-27

Message par Christof »

Concert du 25 janvier
Le lien pour écouter le concert se trouve en bas de cet article

Avec un peu de retard, voici mon compte-rendu de ce concert.
Comme expliqué en haut de cette page par Doubidoudoum (Dom Paulin), avec ce présent concert concocté par l'Association "Et voilà", nous continuons le tour des voyages musicaux en pays européens (thème de l’année) pour arriver aujourd'hui en Espagne.

Petite introduction historique pour mieux planter le décor
La culture musicale en Espagne est très différente de celle des autres pays européens (comme par exemple l'Autriche, thème du concert précédent du mois de novembre).
Cette différence provient notamment que chaque région en Espagne était dotée d'une autonomie, d'un état d’esprit différent, construisant des mondes différents entre l’Andalousie, la Galicie, le Pays basque, la Castille...

Un pays occupé :
Par les différentes occupations qu'elle a subies, l'Espagne a été traversée de nombre de cultures très différentes : d'abord les Wisigoths, en provenance du nord de l’Allemagne, amenant la liturgie de transmission orale. A noter d’ailleurs que plus tard, l’écriture des notes sur papier à énormément restreint le mode musical : au départ, les chanteurs suivaient des modes musicaux qui n’étaient pas figés dans le marbre. Mais à partir du moment où a été écrite la musique sur papier, on est arrivé à une gamme diatonique alors que toute la culture orientale, la culture espagnole – et même la culture chrétienne avant le XIe siècle - étaient aussi basée sur des monodies, mais sur une échelle travaillant souvent au quart de ton. L’écriture musicale a en quelque sorte figé la musique. Il y a donc eu les arabes, les wisigoths, mais aussi les gitans (on pense qu’ils viennent de l’Inde) qui, pour nombre d’entre eux, se sont installés en Andalousie (ce qui a donné le flamenco par exemple).

Et donc pendant toute cette période, au début du premier millénaire, ces trois cultures ont vécu ensemble, relativement en paix. Arrive alors la reconquête chrétienne, notamment avec Isabelle de Castille, reconquérant toute l’Espagne. Les musulmans et les juifs ont alors été jetés dehors. Il n’est plus resté que les chrétiens. A partir de ce moment, XVe siècle, la musique a suivi une évolution totalement différente. C’est aussi à cette époque qu'ont été promulgués des édits du pape déclarant que la seule liturgie possible était celle de Rome, ce qui n’a pas été accepté en Espagne : les prêtres espagnols sont restés sur des liturgies byzantines, donc différentes de la liturgie italienne, jusqu’à ce qu'ils soient rattrapés par l'influence de l’Italie qui a essaimé partout (opéras, airs à la mode).

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En savoir plus sur la reconquête :
(tiré de Wikipédia))

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Au XVe siècle, le territoire espagnol est divisé en trois royaumes chrétiens, la Navarre, la Castille (désormais unie au royaume de León), et l’Aragon. Le dernier royaume, celui de Grenade, est musulman et vassal du royaume de Castille.

La fin du Moyen Âge et le début de l'ère moderne se traduisent en Espagne par le mariage des Rois catholiques, Ferdinand II d’Aragon et Isabelle de Castille qui permet l'union des royaumes d'Aragon et de Castille, union qui elle-même vise l'unification territoriale, politique et sociale de toute l'Espagne. Les royaumes chrétiens sont désormais tous unis : l’Aragon, la Castille et León, réunis au sein d’un seul État, signe l’émergence d’une nouvelle grande puissance.

Le royaume de Grenade, alors sous la forme de l'émirat de Grenade, est reconnu comme le vassal de la Castille depuis 1246 et doit lui payer un tribut. De temps en temps éclatent des conflits dus au refus de payer qui se terminent par un nouvel équilibre entre l'émirat maure et le royaume catholique. En 1483, Muhammad XII devient émir en dépossédant son propre père, événement qui déclenche les guerres de Grenade. Un nouvel accord avec la Castille provoque une rébellion dans la famille de l'émir et la région de Malaga se sépare de l'Émirat. Málaga est prise par la Castille et ses 15 000 habitants deviennent prisonniers, ce qui effraie Muhammad.
Ce dernier, pressé par la population affamée et devant la suprématie des Rois catholiques qui possèdent de l'artillerie, capitule le 2 janvier 1492, terminant ainsi onze ans d'hostilité pour Grenade et sept siècles de présence du pouvoir islamique en Espagne. Vaincu, Muhammad signe un traité et livre la ville au roi Ferdinand d’Aragon et à la reine Isabelle de Castille. La reddition de Boabdil met fin au royaume musulman de Grenade20. La présence des populations musulmanes, les mudéjars (musulmans sous domination chrétienne) prend fin en 1609, lorsqu'elles sont totalement expulsées d'Espagne par Philippe III.
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Le concert

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Avec:
Dom Paulin : piano (mais aussi, suivant les morceaux : percussions, guitare, chant)
Salma Sadak : voix
Sophie Maréchal : guitare

Le concert débute par un chant juif sépharade (chant-guitare) du bassin méditerranéen - donc plus large que le juif espagnol-, juifs qui ont transmis cette culture, culture d'ailleurs assez proche de la musulmane, musicalement parlant.

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Avant le XVe siècle

Les deux chants suivants (chant guitare et chant et deux guitares) andalou ou arabo-andalou sont légèrement différents du premier, mais finalement pas tant que cela (nb. Ces trois chants se situent avant la période de la reconquête…).

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A partir du XVe siècle
Maintenant, nous changeons d’univers. La reconquête est passée par là. Les rois chrétiens étaient plus austères. La reine de Castille avait une autre démarche par rapport à la musique. Il faut également noter les progrès et les évolutions dans la fabrication des instruments (guitare qui évolue, arrivée des claviers (orgues liturgiques, clavecins…)).

Si on considère les compositeurs espagnols de musique savante (musique écrite sur du papier), il n’y avait finalement pas grand monde à cette époque. La musique savante s’est séparée de la musique traditionnelle avec l’apparition de la polyphonie et, petit à petit, on est passé à une vraie verticalité dans l'écriture (mélodie + accompagnement). Mais avec l’Espagne, nous sommes chanceux car la musique non savante s’est transmise de façon orale (les juifs ont beaucoup conservé la langue du XIe siècle et conservé les chants, les musulmans aussi), d’une manière quasi inchangée : la tradition orale, très codifiée, a perduré. Ainsi, il est possible de savoir à quoi ressemblait la musique à cette époque, bien qu'il n'existe finalement aucune trace écrite en ce domaine (le peu de traces écrites pouvant tout de même exister ne sert d'ailleurs à rien car elles ne sont que des approximations).

Petit saut au XVIIe siècle
A cette époque, cela bouge, mais avec les Italiens. Il n’y avait pas vraiment de musique savante écrite en Espagne. On entendait de la musique traditionnelle dans les fêtes. Beaucoup d’Italiens, pauvres, ont émigré à l’étranger, et donc aussi en Espagne. Exemple avec Domenico Scarlatti.
Rappelons qu’Alessandro, son père, a été l’inventeur de l’opéra. A 30 ans, Domenico, recommandé par le roi du Portugal, file à Lisbonne (où il a été maître de chapelle pendant dix ans), puis s’installe en Espagne et y a fini sa vie. Durant cette période, il écrit ses 555 sonates, dont Dominique a choisi de nous jouer la K141 en raison de l’effet «mandoline» (avec la répétition des notes) et de consonances pas vraiment italiennes
(nb. : on entend le morceau dans le deuxième lien tout en bas, Dominique n’ayant pas été satisfait de la version jouée a préféré renvoyer une deuxième version enregistrée tout exprès ensuite).


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Fin XVIIIe début XIXe
Ici un exemple avec le compositeur catalan Mateo Ferrer (né en 1788, mort en 1864) dont Dominique nous joue au piano un extrait d’une de ses sonates (sonate en ré majeur). Ferrer était organiste, et compositeur. Nous sommes ici dans un style très classique: il est espagnol, mais pourrait être français, anglais ou allemand par rapport à la musique.

XIXe siècle
C’est vraiment au XIXe siècle que l’on peut entendre de la musique savante «espagnole» , moment où les compositeurs (surtout catalans et andalous) s'intéressent à nouveau aux musiques traditionnelles. Le poète, Federico Garcia del Lorca, très éclectique a aussi composé de la musique pour piano, opéra (par exemple le drame en trois actes «La basa de Bernarda Alba». Il a été recueillir autour de lui des chants, dans tout le pays, et en a fait des adaptations.

Ici deux chants nous sont interprétés : le premier, «Nana de Sevilla», accompagné à la guitare, est une berceuse. Voilà ce qu'en a dit Garcia Lorca : «il y a quelques années, me promenant dans les alentours de Grenade, j’entendis chanter une femme du village qui endormait son enfant. J’avais toujours remarqué la tristesse aigüe des berceuses de notre pays mais jamais je n’avais rencontré cette vérité si concrète comme ce jour-là. En m’approchant de la chanteuse, pour noter la chanson, j’ai observé que c’était une belle andalouse gaie et sans le moindre tic de mélancolie. Mais une tradition vive travaillait en elle : elle exécutait fidèlement l’ordre comme si elle écoutait les vieilles voix impérieuses qui glissaient dans son sang. Depuis lors, j’ai essayé de recueillir les berceuses, partout en Espagne et voulu savoir comment les femmes de mon pays endormaient leurs enfants. Et après un temps, j’ai eu l’impression que l’Espagne emploie ces mélodies pour imprégner le premier sommeil de ses enfants» .

La seconde berceuse, «Andara leo », chant accompagné aussi à la guitare a été choisi dans ce concert par l’intérêt que montre l’usage des chants traditionnels, où ici les paroles ont été réécrites pendant la guerre d’Espagne par les révolutionnaires espagnols.

Puis trois autres chansons (ici interprétées chant + guitare) du compositeur Joaquín Rodrigo (né en 1901, mort en 1999, très connu pour son concerto d’Aranjuez).
- La première est un chant de Noël,
- La deuxième est l'histoire d’une femme qui meurt d’un chagrin d’amour,
- La troisième est chant d’amour plus gai.

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XXe siècle
Nous arrivons maintenant à un autre compositeur très important, Manuel de Falla (né en 1876, mort en 1946), compositeur considéré comme «international» (il y avait eu avant lui Albéniz, qui était allé à Paris).
Lorsqu’il a séjourné en France après un concours où il devait rester une semaine (il y restera 7 ans), de Falla est entré alors dans le cercle des musiciens français en rencontrant Dukas, Debussy, Ravel. Il s’est donc imprégné de cette culture française. C'est aussi à ce moment qu’il se replonge dans la culture de la musique espagnole en écrivant un recueil de chants populaires (qu’il avait récoltés sur partitions). Recueil de sept chansons traditionnelles, dans le sens où il s’est inspiré de mélodies anciennes qu’il n’a pas reprises à la lettre, mais dans l’esprit.

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Dom, Salma et Sophie ont alors décidé de nous interpréter quatre de ces chansons : les deux premières chant-guitare, et les deux suivantes avec piano (elles étaient initialement écrites chant-guitare).

Quand Debussy est mort, on a fait appel à des compositeurs pour lui rendre hommage. Dans le livret final on y trouve des compositions de Satie, Roussel…, mais aussi Manuel de Falla (joué à la guitare).
Quant à Debussy, lorsqu'il a composé "La soirée dans Grenade", il n’était (et n'est) jamais allé en Espagne. De Falla a déclaré que c’était un miracle car Debussy avait écrit à partir d’impressions, d’intuitions de ce qu’est l’Espagne, tout en conservant son style propre. De Falla était très admiratif de cet œuvre qui, pour lui, décrivait parfaitement l’Espagne. Dans ce morceau (que nous joue Dom), Debussy avait d’ailleurs fait un clin d’œil à la composition de de Falla, en citant un des motifs tiré de l’œuvre du compositeur.

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Fin du concert avec un retour au XVe siècle

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Et pour finir, Dominique, Salma et Sophie nous emmènent de nouveau fin du XVe, interprétant à 3 voix), une chanson espagnole.
Il en existait des centaines de ce type, il existait une très forte tradition polyphonique orale.


Écouter le concert
Pour les Pmistes pressés, qui n'auraient pas envie de réécouter toutes les explications (que vous avez pu lire au-dessus et j'en ai rajouté un peu), voici les minutages où vous pourrez écouter directement les morceaux :
- Les deux premiers chants : 0.07’30 et 0.09’50
- Sonate en ré de Matéo Ferrer : 0.28’46
- Les berceuses (Garcia Del Lorca) : 0.36’40 puis 0.40’38
- Les trois chants suivant (Joachin Rodrigo : 0.43'26, puis 0.45'00, puis 0.47.33
- Quatre chansons suivantes (Manuel de Falla) : 0.51’50 ; 0.53’24 ; 0.54’49 et 0.57’06
- Motif repris par Debussy : 1.00’08
- Morceau à la guitare (de Falla) : 1.02’20
- Morceau de Debussy "La soirée dans Grenade" : 1.11’53

Tout écouter (sauf le Scarlatti)
La sonate K141 de Scarlatti


En conclusion
A destination des nouveaux Pmistes qui auraient rejoint récemment le forum, je remets ici quelque chose que j'avais pu écrire dans un autre fil, où il avait été posé la question de savoir quelles qualités devrait recéler un concert de musique classique pour attirer le plus grand nombre, tout public, de 7 à 77 ans (et plus). Et à mon avis, vous avez ici la réponse : "Des musiciens talentueux, chaleureux, simples et authentiques. Et puis ce don qu'a Doubidoudom pour vous raconter.
Je ne voudrais maintenant rater ces rencontres sous aucun prétexte (il y en a une par mois). Elles sont un véritable trésor".


On peut aussi réécouter tous les anciens concerts ici et ici.

Et si vous souhaitez soutenir ces concerts et l'Association "Et voila", c'est ici.
Et pour toutes informations, réservation pour assister au concert, consulter le site Et voilà!
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JPS1827
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Re: Les concerts « et voilà » 25-26-27 janvier

Message par JPS1827 »

Je n'avais pas vu que tu avais fini par poster le CR du concert. C'était un super concert de mon point de vue. Pour ceux qui ont peu de temps je recommande l'écoute des chansons de Rodrigo et Falla, et Scarlatti bien sûr.
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Doubidoudom
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Re: Les concerts « et voilà » 25-26-27 janvier

Message par Doubidoudom »

Merci JPS et Christof
Je suis aveugle mais on trouve toujours plus malheureux: j'aurais pu être noir. Ray Charles
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