Vos derniers concerts...

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Envrac
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Message par Envrac »

Dans ce paragraphe que je cite, tu débutes par 'there were some things that I didn't like'. Est-ce que ça concerne tout le paragraphe (en principe oui) ? Devons-nous comprendre que tu n'as pas aimé sa façon de mettre en évidence la basse ?
Non, je parlais juste du voicing. J’ai suivi avec intérêt que qu’il faisait de la basse et j’ai beaucoup apprécié.
Lee, ce que je comprends du texte d'Envrac, c'est qu'il déplore non pas le fait de jouer différemment la reprise, mais le fait d'en changer l'étagement des plans sonores (mais je me trompe peut-être ?)
En l’occurrence, oui. C’était le changement du voicing (ça s’appelle comment en français, d’ailleurs ?) qui me perturbait. Ça me rappelle, d'ailleurs, un enregistrement live de Michelangeli dans les variations de Paganini de Brahms où il a fait la même chose en variation No.11 du livre I, inversant l’accent de la voix soprano à la tenor. En ce qui concerne les nuances émotionnelles jouées différemment aux reprises, c’est discutable. Pour ma part, je trouvais presque toujours une seule façon d’interpréter un tel passage, une sorte de « cadre » qui ne variait jamais, quoique sur le coup, mes flux émotionnels pouvaient m’apporter à changer les nuances inconsciemment. Je n’ai jamais souscrit à l’idée qu’il fallait jouer une reprise différemment pour être « créatif » ou juste « parce que ». Pour la musique baroque c’est autre chose, là j’aime bien qu’on varie les ornementations des reprises.
Virgule
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Message par Virgule »

Envrac a écrit : sam. 06 oct., 2018 18:59 C’était le changement du voicing (ça s’appelle comment en français, d’ailleurs ?) qui me perturbait. Ça me rappelle, d'ailleurs, un enregistrement live de Michelangeli dans les variations de Paganini de Brahms où il a fait la même chose en variation No.11 du livre I, inversant l’accent de la voix soprano à la tenor. En ce qui concerne les nuances émotionnelles jouées différemment aux reprises, c’est discutable. Pour ma part, je trouvais presque toujours une seule façon d’interpréter un tel passage, une sorte de « cadre » qui ne variait jamais, quoique sur le coup, mes flux émotionnels pouvaient m’apporter à changer les nuances inconsciemment. Je n’ai jamais souscrit à l’idée qu’il fallait jouer une reprise différemment pour être « créatif » ou juste « parce que ». Pour la musique baroque c’est autre chose, là j’aime bien qu’on varie les ornementations des reprises.
Je pense que le voicing correspond à ce qu'on appelle en français l'étagement des plans sonores (quelqu'un peut confirmer ?), en tout cas je lis souvent cette expression dans les revues spécialisées et le contexte m'amène à comprendre qu'il s'agit de la même chose. Je dois dire que dans ce cas particulier, on devrait adopter en français le terme anglais une bonne fois pour toutes ! (c'est nettement plus justifiable que pour, par exemple, le shopping ou le parking, qu'on emploie pourtant...). Le mot anglais est non seulement beaucoup plus court, mais il est plus explicite: il est clair qu'on parle des voix. Mais on peut peut-être arguer que les plans sonores ne sont pas nécessairement des voix ?

Perso j'avoue que j'ai du mal à jouer différemment une reprise juste parce qu'il 'le faut' et je trouve que si tout ce qu'on fait c'est jouer piano une reprise initialement jouée forte (ou inversement), ça ne sert à rien. Mais j'ai rarement du mal à jouer une reprise différemment - au moins un peu - et surtout, quand j'écoute une interprétation professionnelle, si le/la pianiste joue la reprise exactement comme la première fois, ça me frappe et m'ennuie parfois - je me dis 'mais pourquoi reprendre, au juste ?' Même dans les sonates de Schubert, où je répondrais volontiers 'juste parce que c'est tellement beau !', la plupart des pianistes ne font pas les reprises. Pourtant il ne faut pas grand chose pour faire une différence et rares sont les oeuvres qui ne peuvent être nuancées de plusieurs façons. Si on lit un poème, ne va-t-on pas changer nos inflexions en répétant une strophe qui revient plusieurs fois ? Et a-t-on déjà envisagé de ne pas redire un texte que l'auteur a choisi de répéter ?
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Message par Okay »

Merci beaucoup pour ces comptes rendus détaillés et impliqués ! Je n’ai jamais entendu Schiff mais ça donne envie...

Oui, le voicing c’est bien la manière d’organiser les plans sonores. Mais je tiens au français tant que je peux compter sur sa précision, et ici on utilise tout de même avec bonheur les mots polyphonie et surtout contrepoint !

La réflexion sur les reprises est intéressante... on peut penser à Mozart dont on sait qu’il les variait avec des ornements improvisés. Mais pour l’auditeur, la première fois est la découverte du matériau et la seconde ne peut plus l’être, donc même si on joue exactement pareil c’est déjà quoi qu’il arrive différent. Si on veut vraiment changer, je dirais qu’il y a deux manières de l’envisager :
- première fois sobre et directe, reprise pointant certains éléments
- première fois où l’on découvre, reprise plus certaine
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Message par Virgule »

Okay a écrit : lun. 08 oct., 2018 20:46 Oui, le voicing c’est bien la manière d’organiser les plans sonores. Mais je tiens au français tant que je peux compter sur sa précision, et ici on utilise tout de même avec bonheur les mots polyphonie et surtout contrepoint !
[...]
Mais pour l’auditeur, la première fois est la découverte du matériau et la seconde ne peut plus l’être, donc même si on joue exactement pareil c’est déjà quoi qu’il arrive différent. Si on veut vraiment changer, je dirais qu’il y a deux manières de l’envisager :
- première fois sobre et directe, reprise pointant certains éléments
- première fois où l’on découvre, reprise plus certaine
Merci Okay pour la confirmation de l'expression française pour traduire voicing. Et merci pour tes suggestions à propos de comment envisager de varier une reprise, je trouve ça très éclairant ! Quant à l'argument de la première écoute, il valait très certainement à l'époque où les oeuvres concernées ont été composées (moins pour les plus récentes), d'autant que les enregistrements n'existaient pas. Aujourd'hui, peut-être moins, car finalement, rares sont les auditeurs d'un concert (a fortiori d'un cd) qui n'ont jamais entendu les oeuvres au programme (et j'ajoute: hélas, puisque c'est surtout parce que les organisateurs de concerts sont frileux).
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Okay
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Message par Okay »

Virgule a écrit : lun. 08 oct., 2018 23:41 rares sont les auditeurs d'un concert (a fortiori d'un cd) qui n'ont jamais entendu les oeuvres au programme (et j'ajoute: hélas, puisque c'est surtout parce que les organisateurs de concerts sont frileux).
C’est bien vrai, mais je me demande qui est l’œuf ou la poule... l’obessession d’un programmateur est de remplir sa salle et c’est bien légitime.
Mais du coup, faut-il titiller le public avec un brin d’audace pour tenter de renouveler un peu les choses et peut-être re-stimuler les habitudes, ou bien est-ce un défi ayant peu de sens, puisque le public se déplacera de toute façon davantage s’il anticipe un terrain connu ?
A mon avis, le deuxième cas l’emporte... ce qui n’interdit pas de distiller des curiosités à dose non prohibitive...
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Message par Envrac »

Encouragé par vos retours sur mon compte-rendu du concert d’Andras Schiff, j’ai tenté de traduire celui que j’avais écrit après le concert d’Arcadi Volodos. J’ignore les noms français de pas mal de termes musicaux comme, « dynamic range », « dynamic control », « orchestral playing », « rests », et « inner voices » pour en citer quelques-uns, mais j’ai quand même essayé de les traduire.

Arcadi Volodos, 18 Juin, Théâtre des Champs Elysées

Programme :

Schumann – Papillons
Brahms – 8 Klavierstücke Op 76
Schubert – Sonate en Si-bémol majeur, D.960
trois bis (Brahms – Intermezzi Op 117, No.1 et No.2, Schubert D.959 – II. Andantino)

Quoique j’aie passé un bon moment, je n’ai pas entendu du génie ou même de la grandeur au concert d’Arcadi Volodos, le 18 Juin au Théâtre des Champs Elysées, du moins pas dans l’interprétation.

Je pense que pour mieux apprécier le jeu d’Arcadi Volodos, il faut être placé dans le deux premiers rangs, parce que beaucoup de ce qu’il fait est extrêmement subtil et on risque de ne pas l’entendre si on est loin du piano. Je pense qu’il a la plus grande gamme dynamique de tous les pianistes que j’ai pu entendre en concert. Il peut tout faire; des pianissimos presque inaudible, des fortissimos fracassants et tout ce qu'il y a entre les deux. En plus, il a le meilleur contrôle de dynamiques que j’ai jamais entendu. C’est comme s’il est capable de jouer à la dynamique précise qu’il entend dans sa tête. Ceci est particulièrement impressionnant dans les pianissimos, où il est capable de nuances presque infinitésimales. Il est aussi doté d’un jeu d’orchestre (je ne sais pas si c’est la bonne expression en français). Pour lui, toute musique se consiste de voix qui jouent entre eux en contrepoint. Je ne peux qu’imaginer ce que c’est d’entendre ce qu’il entend. Il doit être une de ces personnes qui sont capables d’entendre une symphonie et de la transcrire d’oreille.

Il a mis à profit ses capacités de contrôle de dynamique et de jeu d’orchestre tout au long du récital. Par exemple, dans le dernier mouvement de D.960, il a fait ressortir légèrement des voix internes qu’on n’entend jamais dans les interprétations d’autrui. Ainsi, il a subtilement mis en valeur des lignes de basse tout au long du concert, par exemple dans pièce numéro 10 de Papillons. Il a même fait des choses tellement subtiles que ça aurait été impossible pour tous sauf ceux placés dans les deux premiers rangs de les remarquer. Même là, il fallait être très attentif. Par exemple, dans Papillons, il ne relevait pas complètement la pédale à la fin des pièces terminant en silences pour mieux unifier l’œuvre. Puis, à la fin de l’œuvre il y a un ‘la’ qui est lié pendant 6 mesures, auquel moment il était presque inaudible. Au lieu de l’enlever pendant les silences de la mesure qui suivait, il l’a gardé, sachant que ce ‘la’ allait réapparaitre dans l’accord de septième de dominante qui figure dans la cadence qui clôt l’œuvre. J’avais donc toujours ce ‘la’ dans les oreilles quand il l’a rejoué dans cette cadence finale. Je ne sais pas s’il y a vraiment de valeur musicale dans cet effet, et ce n’est pas strictement ce qu’a écrit Schumann, mais j’ai quand même trouvé ça cool.

Par contre, je n’ai pas toujours aimé ses choix interprétatives. Par exemple, dans le Schumann il n’a pas joué toutes les reprises. Je ne pense pas qu’on ait un choix libre de quelles reprises on respecte et quelles on ne respecte pas ; soit on les joue toutes, soit on ne les joue pas du tout, sinon ça transforme la structure du morceau. Il a aussi trop insisté sur l’una corda dans le premier mouvement de la D.960. Heureusement, il a respecté la reprise de l’exposition, que beaucoup de pianistes tels que Piemontesi et Ranki ne respectent pas. Perso, je trouve cette reprise primordiale, même si cela peut mener à une exposition de plus de 10 minutes, parce que ça renforce l’effet de la modulation au mode mineur lors du développement (et après 10 minutes, on la mérite).

Curieusement, ses gammes n’étaient pas à la hauteur de ce que je m’attendais de lui. Ce n’était pas un programme bourré de gammes mais quand elles s’étaient présentées, elles étaient souvent ratées. Je ne m’attendais pas cela de Volodos, qui est un des meilleurs techniciens vivants. En plus, l’attaque de quelques-uns de ses accords était inégale. A un certain moment pendant D.960, j’ai même pensé qu’il allait en jouer un en arpège, c’était tellement inégal. Et pourtant, dans la partie centrale orageuse de l’Andantino de la D.959, offert en bis, il a joué une gamme de mi mineur naturel tellement vite qu’elle était quasi-glissando, sans raté une seule note. C’était bizarre.
pianojar
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Message par pianojar »

Merci pour ces compte-rendus très complets qui sont encore plus intéressants lorsqu'on a joué soi-même une partie des oeuvres
Modifié en dernier par pianojar le ven. 23 nov., 2018 15:27, modifié 1 fois.
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Lee
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Message par Lee »

:D Je suis très contente de te lire Envrac ! Merci, j'ai toujours voulu écouter Volodos en concert.

:lol: J'ai apprécié l'histoire des gammes. Peut-être qu'une fois son nom était bien établi et grand, il ne travaille plus les gammes et ça s'entend...c'est édifiant pour une personne qui cherche la justification de ne pas les travailler. :|
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Okay
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Re: Vos derniers concerts...

Message par Okay »

J'ai eu la grande chance d'entendre Volodos en concert privé quelques jours avant qu'il ne se produise au TCE. Peut-être en effet car je me trouvais à quelque mètres du piano, j'ai été absolument subjugué par sa D.960, notamment par ses dynamiques hallucinantes. En tout cas les deux gammes en mains parallèles du finale (périlleuses en raison de leur point de départ...) étaient impeccables !
Il est plus que très fort... c'est vraiment l'un des tout plus grands pianistes aujourd'hui, et peut-être de tous les temps...
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Message par scaramouche75 »

Même avis qu’Okay. J’assistais à ce concert privé en juin dernier où Arcadi Volodos a joué quelques intermezzi de Brahms, puis la sonate D960 de Schubert. J’avais le privilège d’être placée tout près de lui, au 1er rang, et à mes oreilles (et mes yeux) les gammes de la D960 étaient juste parfaites de clarté sonore et de régularité.
De ce merveilleux récital, j’ai retenu particulièrement son ineffable toucher introspectif, et un miracle de nuances infinitésimales.
De l’utilisation de la pédale , n’ayant pas –et de loin- les connaissances d’Envrac, d’Okay, et d’autres .. je ne peux juger.
Peut-être était-il moins en forme pour son récital au TCE, d’ailleurs il a dû annuler un mois plus tard son concert à La Roque d’Anthéron pour raison de santé.
Mais je crois qu’Envrac a raison lorsqu’il écrit :
« Je pense que pour mieux apprécier le jeu d’Arcadi Volodos, il faut être placé dans le deux premiers rangs, parce que beaucoup de ce qu’il fait est extrêmement subtil et on risque de ne pas l’entendre si on est loin du piano »
L’an passé à La Roque j’étais placée assez haut dans les gradins et je n’entendais plus très bien les pianissimi des sonates de Schubert qu’il avait interprêtées.
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Re: Vos derniers concerts...

Message par Virgule »

Okay a écrit : mar. 09 oct., 2018 1:02
Virgule a écrit : lun. 08 oct., 2018 23:41 rares sont les auditeurs d'un concert (a fortiori d'un cd) qui n'ont jamais entendu les oeuvres au programme (et j'ajoute: hélas, puisque c'est surtout parce que les organisateurs de concerts sont frileux).
C’est bien vrai, mais je me demande qui est l’œuf ou la poule... l’obessession d’un programmateur est de remplir sa salle et c’est bien légitime.
Mais du coup, faut-il titiller le public avec un brin d’audace pour tenter de renouveler un peu les choses et peut-être re-stimuler les habitudes, ou bien est-ce un défi ayant peu de sens, puisque le public se déplacera de toute façon davantage s’il anticipe un terrain connu ?
A mon avis, le deuxième cas l’emporte... ce qui n’interdit pas de distiller des curiosités à dose non prohibitive...
Depuis quelques années, notre directrice du Club musical (qui organise une série de concerts chaque année) semble avoir trouvé la recette: pour un ou deux concerts par an, elle invite des stars qui vont à coup sûr attirer beaucoup de non-abonnés, peu importe leur répertoire - et consent à ce qu'ils jouent 'autre chose'. Ça fonctionne surtout en musique de chambre, moins en récital piano. L'an dernier par exemple, Janine Jansen et ses amis (dont Martin Fröst et 'notre Lucas') ont fait salle comble avec un répertoire tout XXe siècle (Bartok, Szymanowski, Messiaen). Réjouissant, non ? L'année précédente, Sol Gabetta et Bertrand Chamayou avaient joué la sonate de Britten devant une salle où on aurait entendu voler une mouche (et qui écoutait, d'après les applaudissements), vraiment un record de tous les temps au Club musical !! Ça marche mieux avec les cordes que le piano, le public n'est pas le même. Mais quand on veut, il y a moyen. C'est vrai que le nombre d'abonnés est en chute libre, mais il l'était déjà (beaucoup de vieux abonnés sont maintenant trop vieux pour venir) et les non-abonnés qui s'intéressent à ces répertoires sont encore jeunes... mais s'abonneront peut-être un jour!

Ceci dit, à Québec l'offre de stars n'est pas énorme, on prend ce qui est offert. Paris c'est une autre histoire et on peut y choisir la star en fonction du programme. Mais à Paris, il doit bien y avoir un public pour les programmes plus audacieux, non ?
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coignet
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Message par coignet »

Je peux me tromper bien sûr, mais il me semble qu'il y a plusieurs décennies que jouer Bartok, Szymanowski, Messiaen ou Britten revient à jouer de grands classiques.
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Lee
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Message par Lee »

J'avais l'impression au Canada et aux Etats-Unis, que quasiment chaque concert classique avait toujours une oeuvre plus moderne ou contemporaine parmi les morceaux baroques ou classiques ou romantiques même quand il s'agissait des tubes.

J'ai des souvenirs des expressions en désarroi de mon père qui est venu pour écouter Beethoven. Pour lui, ces morceaux chaque fois étaient une souffrance, comme un mauvais plat à avaler avant le dessert. Pour moi, ça dependait, c'est comment j'ai découvert Adagio de Barber (avant que le film l'a rendu une tube) et Vaughan Williams. Les autres étaient plus durs, je n'aimais pas et je n'ai pas retenu les noms.
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Message par Envrac »

Virgule a écrit : jeu. 11 oct., 2018 4:25
Ceci dit, à Québec l'offre de stars n'est pas énorme, on prend ce qui est offert. Paris c'est une autre histoire et on peut y choisir la star en fonction du programme. Mais à Paris, il doit bien y avoir un public pour les programmes plus audacieux, non ?
Si, par exemple en Mars, Aimard a joué le catalogue d’oiseaux de Messiaen et c’était magique ! Une autre fois j’étais allé voir Khozyainov jouer un récital d’oeuvres ayant un lien avec Napoléon aux musée de l’armée. J’ai donc entendu des œuvres qu’on entend jamais tels que La Grande Bataille d’Austerlitz de Jadin et deux polonaises de Oginski.
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Re: Vos derniers concerts...

Message par Virgule »

Lee a écrit : jeu. 11 oct., 2018 8:18 J'avais l'impression au Canada et aux Etats-Unis, que quasiment chaque concert classique avait toujours une oeuvre plus moderne ou contemporaine parmi les morceaux baroques ou classiques ou romantiques même quand il s'agissait des tubes.
En fait, il y a très souvent des oeuvres modernes, et même contemporaines, aux concerts de nos orchestres symphoniques - il me semble avoir lu qu'il y a même chez nous une obligation pour nos orchestres (en partie subventionnés) de jouer un certain nombre d'oeuvres de compositeurs canadiens au cours d'une année (ça n'équivaut pas à une par concert, loin de là). Mais invariablement ces oeuvres plus récentes ou moins connues sont brèves (genre 10 minutes au mieux) et jouées en début de concert, avant le concerto. Elles sont au programme, mais n'en constituent jamais l'oeuvre principale. Il est extrêmement rare chez nous qu'un concert comme celui de Janine Jansen et al. n'inclue que des oeuvres modernes. C'est même rare qu'un concert présente une oeuvre longue, telle la sonate de Britten jouée par Gabetta et Chamayou, même une seule parmi d'autres plus classiques (Beethoven et Chopin, dans ce cas précis).
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Re: Vos derniers concerts...

Message par Virgule »

Je pense que ce n'est pas tant la 'modernité' d'une oeuvre qui rebute les auditeurs que son accessibilité, plus explicitement son urtonalité :mrgreen:. Pour illustrer, je vous fais un compte rendu d'un de mes derniers concerts.

Récemment nous avons eu à l'OSQ un concert dont le programme en a surpris plusieurs - dont moi. Je ne vais généralement aux concerts symphoniques que parce qu'un soliste en concerto m'intéresse. Cette fois, le soliste était Cédric Tiberghien, qui interprétait le concerto no.3 de Beethoven avec au bâton un chef invité connu des Français d'IDF: Enrique Mazzola. Je n'avais pas remarqué que le programme incluait une oeuvre d'Eric Tanguy (Matka, en première nord-américaine). Au pré-concert (à l'assistance modeste), j'ai eu la bonne surprise de découvrir que le compositeur lui-même était présent, pour nous présenter son oeuvre et nous parler de Sibelius, qu'il admire et qui était au programme en seconde partie. Matka a été jouée après le concerto plutôt qu'avant et a été très bien reçue par le public, qui pour la plupart ignorait que le compositeur était dans la salle. L'oeuvre est courte, certes, mais elle est surtout tonale et pleine de couleurs, très accessible (ce sur quoi Mazzola avait d'ailleurs insisté en nous la présentant). Après son interprétation (et son succès), Mazzola a fait monter Tanguy sur scène et le public l'a très chaleureusement applaudi.

Quant au concerto de Beethoven du pianiste qui m'avait amenée là, il ne m'a pas emballée. Comme je connais Tiberghien au disque, notamment dans Bartok, j'étais curieuse de l'entendre en live. J'ai beaucoup apprécié son engagement et le fait qu'il écoutait visiblement l'orchestre, qu'il était dans un échange avec le chef, mais j'ai retrouvé en live ce côté très carré de son jeu, que je n'avais pas apprécié dans son Bartok au disque et qui semble finalement être propre à sa personnalité plutôt que juste sa vision de Bartok. Bon, c'était quand même intéressant car très bien joué, il était très investi. Mais ce n'est pas un coup de coeur.

Ce qui fut un coup de coeur, par contre, fut l'interprétation absolument magistrale du Finlandia de Sibelius, par un OSQ que j'avais peine à reconnaître ! L'effet Mazzola ? Au moins en partie en tout cas. S'il revient j'irai l'entendre peu importe ce qu'il dirige ! Si vous le pouvez, je vous encourage à aller l'entendre, il dirige l'Orchestre National d'Île-de-France.
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Okay
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Re: Vos derniers concerts...

Message par Okay »

Martha hier dans le 1er concerto de Liszt à la Philarmonie de Paris... que je suis privilégié d'avoir pu m'y trouver !
C'était la première fois que je pouvais l'entendre en live. Depuis à peu près le 10e rang, son art et son piano sont tout aussi stupéfiants que l'image légendaire qu'on peut s'en faire au travers des enregistrements et vidéos. Un phénomène, un miracle pianistique absolu, jamais rien entendu de pareil.

Une impression de spontanéité désarmante, de facilité totale, une imagination musicale de chaque instant, grâce à un jeu qui certes avance comme toujours (mais l'orchestre s'est volontiers laissé bousculer et emboîtait le pas !), mais surtout, colore sans cesse, renouvelle les timbres en s'amusant de ses propres prodiges sonores et des pirouettes lisztiennes. C'est juste fabuleux, jouer à presque 80 ans avec une énergie et une fougue hors du commun, et insuffler cette vie là à la musique avec autant de puissance de conviction et paradoxalement, surement sans chercher à convaincre qui que ce soit.
Devant l'enthousiasme de la salle comble, elle a fini par concéder un premier bis... le Traumes Wirren des Fantasiestücke opus 12 de Schumann, donné comme sur un coup de tête, le public ayant eu à peine le temps de réaliser qu'elle se rasseyait au piano, avec une célérité et une légèreté difficilement imaginables, matérialisant si j'ose dire l'hallucination du compositeur. Et enfin une poétique 1ère scène d'enfants du même Schumann, en guise d'au revoir.

Allez l'écouter dès que vous le pouvez, on n'a plus Gilels ou Horowitz, mais Martha, on peut toujours aller l'entendre !
Modifié en dernier par Okay le mar. 23 oct., 2018 11:28, modifié 1 fois.
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Re: Vos derniers concerts...

Message par Virgule »

Okay a écrit : lun. 22 oct., 2018 15:03 Martha hier dans le 1er concerto de Liszt à la Philarmonie de Paris... que je suis privilégié d'avoir pu m'y trouver !
C'était la première fois que je pouvais l'entendre en live. Depuis à peu près le 10e rang, son art et son piano sont tout aussi stupéfiants que l'image légendaire qu'on peut s'en faire au travers des enregistrements et vidéos. Un phénomène, un miracle pianistique absolu, jamais rien entendu de pareil.

Une impression de spontanéité désarmante, de facilité totale, une imagination musicale de chaque instant, grâce à un jeu qui certes avance comme toujours (mais l'orchestre s'est volontiers laissé bousculer et emboîtait le pas !), mais surtout, colore sans cesse, renouvelle les timbres en s'amusant de ses propres prodiges sonores et des pirouettes lisztiennes. C'est juste fabuleux, jouer à presque 80 ans avec une énergie et une fougue hors du commun, et insuffler cette vie là à la musique avec autant de puissance de conviction et paradoxalement, surement sans chercher à convaincre qui que ce soit.
Cher Okay, quelle magnifique déclaration d'amour =D> =D> !

Merci de me rappeler en des termes si évocateurs ce qu'est l'expérience d'entendre Martha en personne - car oui, tes mots décrivent très exactement ce que moi aussi j'ai entendu. J'ai eu cette chance plusieurs fois, ici-même à Québec 8), mais c'est la première fois qui reste mon plus grand souvenir, en 1996 avec Maisky. Elle était déjà mon idole depuis que je l'avais entendue en entrevue à la radio et que je m'étais précipitée aussitôt pour acheter son disque LP 'Martha Argerich spielt' - c'est loin !
Florestan
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Message par Florestan »

Merci Okay pour cette belle évocation. Je n'ai jamais entendu Martha Argerich en vrai, et ça donne envie de se donner un peu plus de mal pour le faire. C'est certainement une des musiciennes qui me fascinent le plus, et le temps passe…
(J'ai eu la chance inouïe de voir Richter peu avant sa mort, mais j'étais très jeune, beaucoup moins perméable que maintenant, je ne me souviens de rien musicalement (il avait joué les quatre ballades de Chopin…). Qu'est-ce que j'aimerais y retourner maintenant !)
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Message par katy »

Il me semble qu'entre le festival de Colmar et ce concert à Paris Martha n'a pas joué... puisqu'elle a annulé Verbier. Elle a donc bien pu se reposer. Ce que dit Okay rejoint mes propres impressions même si le répertoire était autre...: légèreté inouïe du toucher, souplesse infinie du jeu tout en miroitement et mobilité : l'impression de voir une magicienne. Quelle chance de l'avoir vue jouer Traumes Wirren... justement le disque que j'ai réussi à faire signer, c'est un live des fantasiestücke de Schumann auquel je tiens plus que tout ! Et son Traumes Wirren est une des choses les plus incroyables, pianistiquement, que je connaisse, au-delà de la prouesse technique...: c'est exactement l'évocation musicale d'un feu follet, transcendant totalement les limites de l'instrument. Moi je n'ai pas eu droit à du piano solo... je suis jalouse !! (mais bon, 2 concerts, je ne vais pas me plaindre...)
Effectivement il faut courir voir Martha, et il faut prendre le risque... quoiqu'il en coûte (et j'imagine qu'on prend un peu moins de risques avec un concerto dans une grande salle...)
J'ai vu que Vanessa Wagner était aussi là.
J'aimerais tant arriver à la revoir... mais bon entre mon agenda, la nécessité de se déplacer et ses annulations :?
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