Vos derniers concerts...

[Oupsi]

Merci pour ce compte rendu.
Les deux oeuvres que tu as bien aimées sont écoutables sur YT par cette même formation.


Diego Vega, Quatuor

Leo Brouwer, 3e Quatuor

[JPS1827]

A noter que les Cuarteto Latinoamericano a enregistré une belle intégrale des quatuors de Villa-Lobos
https://www.youtube.com/watch?v=ka3picJ ... IAbrHI60Xl

[jean-séb]

Il faut dire que cette formation, le Cuarteto, est couverte de récompenses et de lauriers, je pense tant par la qualité de l'exécution que par le choix très varié des oeuvres.
Un de leurs derniers projets est une renaissance du répertoire sépharade judeo-espagnol :
http://diariojudio.com/comunidad-judia- ... no/133920/

[Envrac]

Hier soir, je suis allé au concert de Jonathan Biss et l’Orchestre de Chambre de Paris au Théâtre des Champs Elysées. Au programme le premier concerto de Beethoven, un nouveau concerto de la compositrice anglaise Sally Beamish et la symphonie Héroïque de Beethoven.
Jonathan Biss n’est pas un pianiste que je suis, mais il m’a plu. Il a joué avec beaucoup de délicatesse, c’était carrément dans le style d’un Beethoven toujours sous l’influence de Mozart. Je compte aller le voir en récital prochainement si le billet n’est pas trop cher. Par contre, je n’aimais pas du tout comment, pour mettre la pédale, il tapait souvent du pied. Pourquoi est-ce que tant de pianistes font ça d’ailleurs ?
Beamish a introduit elle-même son concerto intitulé City Stanzas dans un français pas mal du tout (avec son petit accent anglais). Il s’avère que c’est inspiré de la ville et du concerto de Beethoven. Perso, je n’ai pas pu remarquer le rapport entre les deux œuvres ; ça sonnait plutôt comme du Ravel ou du Bartok que du Beethoven. Mais bon, c’était plutôt sympa même si pas hyper original.

[Virgule]

Je n'ai pas de petit extrait perso, mais j'en ai quand même un pour illustrer mon propos.

Samedi dernier 11 novembre, nous étions à Montréal pour entendre Valery Gergiev et l'orchestre du Mariinsky à la Maison symphonique. C'était leur 3e visite à Montréal mais pour moi c'était une première. En première partie, je me suis assez rapidement ennuyée en écoutant une interprétation sans doute magnifique d'une oeuvre que je n'aime pas du tout: Une vie de héros de R. Strauss. Qu'est-ce que c'est long, plus qu'assez pour que je puisse porter une attention méticuleuse à la sonorité de tous les pupitres... Quel ensemble dans les attaques !

La seconde partie m'a enthousiasmée. D'abord, et surtout je dirais, le concerto pour piano no. 2 de Rodion Chtchédrine, que je découvrais sous les doigts de Denis Matsuev et que j'ai aussitôt baptisé 'concerto pour doigts d'acier'. D'habitude je n'aime pas trop ce géant extraverti et tapageur, mais là il m'a complètement emportée, ma joie n'a cessé de croître, de découverte en surprise jusqu'à exploser . Cependant, déjà en l'écoutant je me disais 'voilà un concerto à entendre en concert, je ne pense pas que j'aimerais l'écouter sur disque'. Il y avait une électricité incroyable... Et Matsuev semblait adorer cette oeuvre et prendre un immense plaisir à la jouer - c'était complètement irrésistible !

Une découverte ? Visite sur internet après le concert: j'apprends que Marc-André Hamelin l'a enregistré! Mais bon, je n'ai pas écouté tout Hamelin. Sauf qu'en arrivant chez moi, je découvre que j'ai carrément acheté le disque contenant ce concerto ! Disque acheté pour son complétement, le concerto avec trompette de Chostakovitch. Donc j'ai dû écouter le Chtchédrine une seule fois, sans accrocher, à l'achat (en 2003 - tiens j'aurais cru que c'était plus ancien !).

Voilà un petit extrait avec les mêmes interprètes mais ailleurs (c'était meilleur samedi):



Matsuev jouait aussi avec partition à Montréal. Cet extrait donne une idée un peu biaisée de l'ensemble, pas toujours aussi tapageur ni toujours aussi jazzé. En fait, si vous voulez entendre une interprétation moins exaltée du concerto en entier, sans doigts d'acier, il y a celle-ci, avec Nikolai Petrov et Svetlanov:
www.youtube.com/watch?v=AR5d9o3KBhc

Ça m'étonne beaucoup d'avoir autant embarqué dans cette musique, moi qui n'aime pas le jazz... Cette interprétation de Petrov sonne en effet très jazz, mais la version de Matsuev sonnait souvent plus musique moderne, à la Bartok plus qu'à la Gershwin. Je pense que ce sont les interprètes qui ont été vraiment emballants samedi ! La montée en puissance en finale par exemple (vers 20 min dans cette vidéo) était absolument extraordinaire, autant par l'orchestre que le pianiste, avec une cohésion... c'est indescriptible.

Je lis sur internet que c'est le compositeur lui-même qui a créé ce concerto. Curieuse de savoir quels doigts d'acier il a, je fouille YT et découvre qu'il y a plein de vidéos où on l'entend. Dont celle-ci, où il joue son premier concerto pour piano en 1975 avec Svetlanov au baton:



Pas vraiment des doigts d'acier en fait n'est-ce pas ?... Mais il n'a pas non plus l'air d'être un pianiste extraordinaire. Pas sûre qu'il m'aurait convaincue dans le 2... Malgré ses doigts d'acier, Matsuev, lui, était absolument convainquant, ça ne me heurtait pas du tout - ça convenait à cette musique. Etonnant !

Pour le reste du concert (magnifique Oiseau de feu de Stravinsky et une superbe ouverture d'opéra de Verdi en bis !), je vous réfère au compte rendu de C. Huss ici:
http://www.ledevoir.com/culture/musique ... ry-gergiev
Bon, je ne me retrouve pas du tout dans ses explications relatives au placement des pupitres ou au son de la Maison symphonique, mais je n'y suis pas allée très souvent, lui oui. Quant à son commentaire sur le sanatorium, il est obsessif lui (et râleur). Il voudrait être au concert comme dans son salon ! J'ai à peine remarqué quelques toux pas très loin de moi. Le volume général du Mariinsky les couvrait sans problème... Pour moi un très beau concert qui valait vraiment le déplacement !

[Oupsi]

Merci pour ces comptes rendus, très intéressants et documentés!

[katy]

Dimanche dernier, 12 novembre, j'ai eu l'occasion d'entendre le pianiste Philippe Bianconi à Erstein. C'est la deuxième année que se tient là-bas un grand festival de piano, et que des têtes d'affiches se déplacent en Alsace... malheureusement des problèmes logistiques m'obligent à des choix drastiques. 3 concerts pour moi l'année dernière, deux cette année.
Le cadre est déprimant au possible : une vaste zone industrielle située à la périphérie d'une petite ville sans intérêt. Où est implanté le groupe Würth, qui a fait construire à côté de l'entreprise un musée d'art moderne contenant un bel auditorium. Il y a certes un peu de verdure autour mais bon... une zone industrielle reste une zone industrielle...Il fallait vraiment trouver cet endroit-là, dans notre si belle région... Il faut quand même remercier le pianiste Vincent Larderet que je n'ai malheureusement pas eu l'occasion d'entendre, de faire venir tout ce beau monde là...
Je connaissais Philippe Bianconi par le disque et en avais l'image d'un pianiste au jeu scrupuleux mais un peu sec. Et ce n'est absolument pas ce que j'ai entendu dimanche. Il a donné un programme difficile : Schumann, Papillons et Davidsbündlertänze en première partie, deux œuvres de Saint-Saëns totalement méconnues en 2ème : souvenirs d'Italie et Valse Canariotte (musique de salon que le pianiste joue avec malice et gourmandise, virtuosissime) suivies de la Ballade de Fauré, op. 19, puis un choix de préludes de Debussy et pour finir l'Ile joyeuse. D'emblée j'ai été frappée par la poésie et la délicatesse de son jeu, la qualité du toucher avec des P, PP , PPP bien étagés... Une impression de solidité, d'aisance aussi après l'une ou l'autre prestation assez hasardeuses dans les mêmes lieux : ni fatigue, ni baisse de tension, tout le programme est magnifiquement conduit et réalisé. De tous ceux que j'ai entendus là-bas, c'est de loin lui qui a su le mieux gérer l'acoustique de l'auditorium, c'est aussi la plus belle technique pianistique que j'ai pu y entendre : on a eu là, de bout en bout, du très beau piano, précis, tout en nuances et en en finesse, et un aussi un bel élan dans un programme qui visiblement lui correspond bien. Un grand professionnel donc, et un magnifique musicien, un véritable poète.
Généreusement applaudi, il nous a offert en bis Poissons d'or de Debussy et le dernier des chants de l'aube de Schumann. Un artiste qui mérite le déplacement, dont le jeu m'a semblé plus épanoui et libéré que sur ses disques.

[katy]

Au sujet de ces œuvres de Saint-Saëns, que je ne connaissais pas, je vous mets les liens (mais pas par Bianconi)... Très rigolo... Délicieusement kitsch !

[Envrac]

Jeudi soir, c’était le deuxième concerto de Liszt joué par Jean-Yves Thibaudet et l'ONF à la Maison de la Radio.
C’est probablement mon concerto préféré, quelle joie d’enfin l’entendre en live !
L’interprétation de Thibaudet était plutôt « standard » mais j’ai adoré tout de même, surtout la fin « Allegro animato » avec les doubles glissandi.
Liszt est vraiment génial.
Dans la seconde partie ils ont joué Ainsi Parlait Zarathoustra de Strauss, aussi une première pour moi.
Je n'avais pas un bon emplacement mais le son de mon enregistrement n’est pas mal quand même.

[katy]

J'imagine que Thibaudet portait à nouveau un de ses extravagants costumes, représentant sans doute 2 ou 3 de mes salaires ?
C'est rigolo, je l'ai vu jouer ce concerto il y a 3 ans environ au festival de Colmar. Ce fut pour moi une relative déception : aucun reproche à lui faire, un jeu magnifique, très perlé, très "école française" si on peut dire... mais effectivement, un côté bon chic bon genre, assez standardisé... Bref pas un mauvais souvenir, mais à vrai dire le genre de concerts qui ne laissent pas particulièrement de souvenir...
Il faut dire que moi je ne suis vraiment pas fan des concertos de Liszt, et que seul Debargue, vu en Allemagne, pour moi a réussi à en faire quelque chose...

[Envrac]

J'imagine que Thibaudet portait à nouveau un de ses extravagants costumes, représentant sans doute 2 ou 3 de mes salaires ?

En fait, pas du tout (ce qui m’a surpris). Il portait même pas de chaussettes rouges !
Sinon, hier soir je me suis rendu à la Salle du premier conservatoire pour un concert d’Anaïs Constans, Edna Stern, Jean-Philippe Sarcos et le Palais royal.
Je n’étais là que pour Edna Stern qui est une de mes pianistes préférées, parce que j’aime pas trop les instruments d’époque.
Elle a joué le 23eme concerto de Mozart KV488 sur un piano-forte viennois de 1805 si je ne me trompe pas. Au final, le piano ne sonnait pas si mal que ça et jai adoré son interprétation ; c’est vraiment une âme sœur musicale. En plus, elle était trop jolie en robe blanche.
J’avais la poisse d’être assis à côté d’une dame qui n’arrêtait pas de tousser tout au long du concert, ça a un peu gâché mon enregistrement, mais bon.

[katy]

Quelques mots sur la clôture, en feux d'artifice, du festival d'Erstein dimanche dernier : on attendait Nelson Goerner... lequel a fait salle comble naturellement ! Le pianiste rôdait un programme qu'il doit donner en décembre au théâtre des Champs Elysées : sonate D. 664 de Schubert (celle que Debargue appelle l'"horizontale" par rapport à la D. 784 qu'il qualifié de "verticale"), les deux livres des Variations Paganini de Brahms et là ce n'était que la première partie ! En 2me partie, 2 nocturnes de Chopins et la 3ème sonate.
Je ne l'avais jamais vu. Ce qui frappe d'emblée, chez lui, c'est une présence, une autorité souveraine chez ce petit homme avant même qu'il se mette à jouer : on sent d'emblée qu'on a affaire à un seigneur. Et puis, tout de suite, on est pris à la gorge par le son. Son qu'il ne cessera de sculpter, de modeler, dans un dialogue amoureux avec le piano, et cette magie sonore a trouvé son apogée dans un unique bis : un prélude de Debussy, Les sons et les parfums tournent dans l'air du soir, quelques courtes minutes parmi les plus bouleversantes et surnaturelles que j'ai entendues de ma vie. On n'était plus sur terre. En fait suite à 3 prestations décevantes entendues dans ces lieux l'an dernier je me demandais si cet auditorium était bien conçu et si le piano était bon. Mais les prestations de Bianconi et de Goerner prouvaient bien qu'il y a les grands, les très grands, ... et les réputations surfaites...!!
Et la clarté absolue de son jeu, l'art du chant,de la polyphonie sont tout aussi miraculeux...et révèlent des moyens sans limite.
A vrai dire le programme ne me convenait guère car je déteste les Variations Paganini, quant à la 3ème sonate de Chopin, à force de suivre des concours, d'aller au concert, (combien se perdent dans le premier mouvement ) je suis un peu saturée... Mais bon, J'ai vite compris que Goerner est de ces artistes dont on se fiche des programmes... on prend ce qu'il donne et on remercie ! Les variations Paganini étaient éblouissantes, avec là aussi des recherches sonores fascinantes... et semblaient représenter pour lui une promenade de santé... et la partie Chopin était un pur miracle, et renouvelait entièrement mon écoute de ces oeuvres archi rebattues...
Bref, pour un moi un des plus beaux récitals que j'ai entendus de ma vie. Un grand seigneur.

[Envrac]

Samedi soir, je suis allé au concert d’une jeune pianiste dont on en parle peu, Lise de la Salle.
J'y ai passé un très bon moment, j’espère avoir l’opportunité de la voir plus souvent en récital maintenant qu’elle est revenue vivre à Paris.

[jean-séb]

Son récent disque a quand même bénéficié d'une bonne promotion sur les antennes de France Musique et Radio Classique. Je crois me rappeler qu'elle avait dit lors d'une émission sur France Musique qu'elle avait vécu quelques années aux Etats-Unis mais avait maintenant décidé de revenir en France. Je ne sais pas si cet éloignement est la cause ou la conséquence de sa notoriété moindre chez nous.

[Virgule]

Décidément ce fil est de plus en plus intéressant ! Merci à tous pour vos comptes rendus passionnants !

Dimanche dernier, 12 novembre, j'ai eu l'occasion d'entendre le pianiste Philippe Bianconi à Erstein.[ ...]
Je connaissais Philippe Bianconi par le disque et en avais l'image d'un pianiste au jeu scrupuleux mais un peu sec. Et ce n'est absolument pas ce que j'ai entendu dimanche. [...]. D'emblée j'ai été frappée par la poésie et la délicatesse de son jeu, la qualité du toucher avec des P, PP , PPP bien étagés... [...] De tous ceux que j'ai entendus là-bas, c'est de loin lui qui a su le mieux gérer l'acoustique de l'auditorium, c'est aussi la plus belle technique pianistique que j'ai pu y entendre : on a eu là, de bout en bout, du très beau piano, précis, tout en nuances et en en finesse, et un aussi un bel élan dans un programme qui visiblement lui correspond bien. Un grand professionnel donc, et un magnifique musicien, un véritable poète.

Quelques mots sur la clôture, en feux d'artifice, du festival d'Erstein dimanche dernier : on attendait Nelson Goerner... lequel a fait salle comble naturellement ! [...]
Je ne l'avais jamais vu. Ce qui frappe d'emblée, chez lui, c'est une présence, une autorité souveraine chez ce petit homme avant même qu'il se mette à jouer : on sent d'emblée qu'on a affaire à un seigneur. Et puis, tout de suite, on est pris à la gorge par le son. Son qu'il ne cessera de sculpter, de modeler, dans un dialogue amoureux avec le piano, et cette magie sonore a trouvé son apogée dans un unique bis : un prélude de Debussy, Les sons et les parfums tournent dans l'air du soir, quelques courtes minutes parmi les plus bouleversantes et surnaturelles que j'ai entendues de ma vie. On n'était plus sur terre.

Bianconi, je le connais peu, je crois que j'ai un seul cd de lui, que je n'ai plus écouté depuis longtemps mais dont je garde un bon souvenir. Ton superbe compte rendu me donne non seulement envie de le ré-écouter mais aussi, de courir l'entendre si l'occasion se présente . C'est dommage, j'aurais pu l'entendre à Lille en juin dernier, mais il y avait conflit d'horaire avec d'autres choix.

Quant à Nelson Goerner, il m'enchante, sur disque ou sur vidéo, un très grand pianiste. En live, je n'ai eu qu'une fois l'occasion de l'entendre, à Lille Piano Festival justement, et j'ai été un peu déçue. Il y jouait le 2e concerto de Prokofiev avec l'Orchestre National de Belgique (assez quelconque), sur un piano Yamaha (peut-être CFX, je ne sais pas) qui ne sonnait pas bien du tout, ni sous ses doigts, ni sous ceux de Lucas ni ceux de Louis Lortie ou de Nicholas Angelich. En plus, je ne l'attendais pas vraiment dans Prokofiev et il ne m'a vraiment pas convaincue qu'il devrait y retourner... Mais dans le répertoire dans lequel tu l'as entendu à Erstein, oui, il devait être magnifique. Son Chopin est un pur enchantement, aussi bien sur piano moderne que sur piano d'époque (www.youtube.com/results?search_query=Ch ... te+Goerner). Ce concert en particulier (www.youtube.com/watch?v=KhQRBt7YTiU), sur Erard et avec le grand Brüggen, est une merveille (dispo sur cd). Dire qu'il n'a même pas atteint la finale au Chopin 1995, juste un prix de consolation au second tour... J'espère pouvoir un jour l'entendre en récital, sur Steinway ou Erard, qu'importe, mais sur un bon piano.

Merci Katy pour ces très beaux comptes rendus. C'est un plaisir de te lire, tu as vraiment le tour de décrire les concerts comme si on y était !

[Virgule]

Lundi soir 4 décembre, au Palais Montcalm de Québec, concert de musique de chambre avec Janine Jansen, Martin Fröst, Torleif Thedéen et Lucas Debargue

Superbe concert ce soir, avec des artistes formidables de talent et d’engagement. Un programme pas nécessairement facile pour bien des gens et pourtant, c’était quasi à guichet fermé (il restait moins d’une centaine de places sur environ 1100). Les oeuvres, je les connaissais. Par contre, si je connaissais tous les musiciens au moins de nom et un peu aussi au disque, c’est seulement l’été dernier, au Festival de Verbier (retransmis en live par Medici tv) que je les ai vraiment découverts (sauf Lucas bien sûr). Et qu’ils m’ont emballée.

Le concert débute avec Contrastes, de Bartok, pour clarinette, violon et piano. Oeuvre pas nécessairement représentative du compositeur, malgré qu’on y entende des échos de musique hongroise traditionnelle, et qui n’est pas ma préférée, même si Bartok, lui, est un de mes favoris. C’est quand même musicalement très intéressant, joué aussi magistralement et avec beaucoup de conviction et d’énergie par un trio de solistes vedettes dont la réputation n’est pas usurpée. L’oeuvre est une commande de Benny Goodman (célèbre clarinettiste de jazz) et en conséquence, Martin Fröst a la part du lion, côté virtuosité et intérêt, bien que la violoniste ne soit pas en reste. Partie tranquille pour notre Lucas par contre, car Bartok, pianiste virtuose, ne voulait pas faire d’ombre à son commanditaire. Petite déception pour moi, non seulement je ne vois pas les mains de Lucas (ma place d’abonnée est juste à droite du centre) mais je ne vois même pas son visage, caché par le lutrin de la violoniste.

Suivent les Mythes de Szymanowski, pour violon et piano. Tout de go je vous l’annonce: c’est ce que j’ai le plus aimé de la soirée. Je connaissais et aimais l’oeuvre au disque, entendue d’abord jouée par un très jeune Krystian Zimerman avec Kaja Danczowska, puis par Isabelle Faust, mais c’est ma première écoute en concert. Ici, la partie piano est très conséquente et virtuose. Connaissant les affinités de Lucas pour Szymanowski, je ne m’étonne pas qu’il y excelle. Joué ainsi, avec passion, par deux artistes engagés l’un et l’autre comme si leur vie en dépend, c’est vraiment emballant. Et comme madame Jansen a déplacé son lutrin, je vois maintenant très bien notre Lucas plongé cul par-dessus tête dans l’émotion de la musique, tout comme l’est Janine Jansen, une artiste tout aussi entière qui se donne aussi corps et âme. Musique et interprétation convaincantes et très émouvantes, j’en ai même des frissons à certains moments. À la fin, mon voisin (organiste professionnel retraité) me fait un très grand plaisir en me disant qu’il est particulièrement impressionné par le pianiste, qu’il ne connaissait pas.

Intermission, on sort. Dans l’allée, j’entends derrière moi une voix qui m’est familière. Je me retourne et je reconnais… Jouishy ! On se présente, on discute un peu du concert, on se reverra après, lors de la séance de signatures. J’en suis aussi étonnée qu’elle, mais oui, j’ai reconnu sa voix avant de la voir, malgré que je n’aie pas écouté ses vidéos si souvent que ça. Le cerveau humain a une capacité d’analyse de l’information sonore incroyable - et c’est pour ça, justement, pour la reconnaissance individuelle de la voix, pour l’analyse subtile des inflexions, de l’expression des émotions. Jouishy, si tu me lis: tu as écris dans le fil sur l’oreille absolue que chez l’humain, la vision est plus importante que l’ouïe - non ! je pense que notre capacité de discrimination sonore est beaucoup plus grande que visuelle et beaucoup plus importante pour la survie !

Retour au concert: le Quatuor pour la fin du temps de Messiaen. L’ayant écouté plusieurs fois sur Medici puis sur le nouveau cd de nos concertistes, je l’ai bien dans l’oreille. C’est évidemment superbement joué, mais pas tout à fait aussi envoutant qu’à Verbier. On perçoit même des signes de fatigue chez les musiciens (sauf peut-être chez Fröst, quoique je pense avoir entendu un canard, mais pas sûre). L’engagement n’en est pas moins total et la Danse de la fureur pour les sept trompettes (jouée à l’unisson avec rythme syncopé, tout un défi !) est impeccable de précision et d’élan. Mais le dernier mouvement surtout (solo violon piano) révèle chez Lucas comme chez Janine Jansen quelques flottements - pas des fausses notes, non, mais peut-être une légère baisse de tension et de précision dans le contrôle des nuances, indices d’une fatigue bien compréhensible. Ces musiciens sont encore à l’heure européenne, il est donc 4 heures du matin pour eux… Et ils repartent pour Toronto mardi matin. Chapeau bas, ce fut un concert remarquable.

Et en plus, ils doivent signer des cds après ! Dur pour eux, mais... comment résister à la tentation de parler à Lucas ? Je ne résiste pas - et il est comme toujours, gentil et de bonne humeur, malgré la fatigue. Il me lance en riant: je vous l’avais bien dit que j’allais venir chez vous !

[pianojar]

Merci beaucoup pour ce long et intéressant compte-rendu

N'ayant pas tes capacités d'analyse et ta plume voici un lien pour le dernier concert auquel j'ai assisté avec un certain nombre de Pmistes grâce à une organisatrice hors pair qui se reconnaitra

Le concert-spectacle s'y joue encore et je vous invite fortement à y aller vu la qualité de la musique et la modicité du prix des places

Parlez pas de Mahler

[jean-séb]

Oui, excellente occasion de faire un peu de publicité au Centre de musique de chambre de Paris qui organise depuis deux ans je crois une série de manifestations musicales plus sympathiques les unes que les autres dans l'écrin sonore qu'est la salle Cortot. Il y a par exemple les fameux dimanches matin qui réunissent croissants et cantate de Bach avec choral final chanté avec le public.
Là, le concert était double. D'une part, l'excellent quatuor féminin Zaïde dans le magnifique quatuor de Franck, si intense, et parfaitement intégré par les interprètes qui viennent de l'enregistrer. Sur la photo, la violoncelliste si souriante est d'une famille éminemment musicienne puisque son tonton, qui était au concert, est un des piliers de PM !

(À nous Paris, #794)
Mais le plus original et passionnant de la soirée musical était la deuxième partie, "Parlez pas de Mahler", un OMNI, objet musical non identifié, qui réunissait humour, intelligence, musicalité, éclectisme, jeunesse enthousiaste et multiethnicité dans un spectacle diablement vivant et drôle et d'une rare qualité.
https://www.diapasonmag.fr/actualite/a- ... heur-27944
Je recommande chaleureusement ce spectacle et nul doute que je suivrai les autre manifestations avec le plus grand intérêt.
À noter dans ce spectacle la superbe et longue mélodie La Mort du Poète pour ténor et orchestre, de Jérôme Ducros, dans une esthétique très fin de siècle (XIXe-XXe) qui rappellera des souvenirs à ceux qui s'étaient intéressés au long fil consacré sur PM à l'affrontement musique contemporaine atonale/musique contemporaine tonale.
Ça se joue encore ce week-end : courez-y, vous ne le regretterez pas.

[Cadenza]

Je te lis, je te lis!
Je ne suis pas d'accord sur cette question ouïe vs vision, mais ce n'est pas vraiment le lieu d'en débattre.

J'ai trouvé vraiment agréable de pouvoir rencontrer la seule PMiste déclarée de la ville de Québec!

En annexe à un superbe concert en plus!

Tu vois, à te lire, je me dis : tu me disais hier que j'avais plus de connaissances que toi en théorie musicale. Mais tu as beaucoup plus de culture de la musique que moi, qui n'écoute du classique que depuis que je me suis mise au piano, il y a 22 mois. Je n'ai pas analysé la moitié de ce que tu as écrit dans ton compte rendu en écoutant ce concert (et nul doute que tu n'as pas écrit tout ce que tu as pu entendre!).

La passion des musiciens était communicative.
Toutes les pièces m'étaient, personnellement, auditivement inconnues (je connaissais l'oeuvre de Messiaen de nom, évidemment, mais ne l'avait jamais écoutée; j'ai écouté quelques oeuvres pour piano de Bartok; et Szymanowski, je n'avais jamais entendu le nom avant hier). Comme le peu que j'ai écouté de Bartok, j'ai bien aimé les dissonnances, et ait été bien impressionnée par le clarinettiste.

Quant au reste, ma faible expérience des concerts peut-être a fait en sorte que j'ai été impressionnée par quelques détails : du pizzicato à la main gauche tout en faisant un trait parfaitement legato avec l'archet; un son volontairement travaillé pour grincer un peu; des crescendo à la clarinette qui démarrent ultra-doux; des transitions très rapides entre des graves et des suraigus incisifs et doux à la fois; ...

Et j'ai particulièrement aimé le mouvement en duo violoncelle et piano du quatuor, bien qu'il ne semblait pas techniquement très complexe (mais demandait un contrôle du son important). J'ai trouvé l'ambiance de ce mouvement particulièrement prenante.

Et pour l'anecdote, j'ai trouvé amusant de constater que mon prof de piano était le tourneur de pages de Lucas Debargue.

[Lee]

Mais le plus original et passionnant de la soirée musical était la deuxième partie, "Parlez pas de Mahler", un OMNI, objet musical non identifié, qui réunissait humour, intelligence, musicalité, éclectisme, jeunesse enthousiaste et multiethnicité dans un spectacle diablement vivant et drôle et d'une rare qualité.
https://www.diapasonmag.fr/actualite/a- ... heur-27944
Je recommande chaleureusement ce spectacle et nul doute que je suivrai les autre manifestations avec le plus grand intérêt.
À noter dans ce spectacle la superbe et longue mélodie La Mort du Poète pour ténor et orchestre, de Jérôme Ducros, dans une esthétique très fin de siècle (XIXe-XXe) qui rappellera des souvenirs à ceux qui s'étaient intéressés au long fil consacré sur PM à l'affrontement musique contemporaine atonale/musique contemporaine tonale.
Ça se joue encore ce week-end : courez-y, vous ne le regretterez pas.

Merci, je l'ai raté l'autre jour, du coup après ton CR convaincant, j'y vais ce vendredi avec la famille si tout va bien.