Que faire: congeler? Persévérer? L’un après l’autre?

[ChristL]

Bonjour à tous,
Je travaille depuis un semestre maintenant le troisième mouvement de la tempête, et je suis en phase de questionnement! J’ai toujours 3 ou4 morceaux en chantier, et malgré tout je commence à me lasser de cette sonate, ou plutôt de ma stagnation...
La pièce est au dessus de mon niveau, je crois que je ne la joue « pas mal » mais « pas bien »
Main gauche parfois irrégulière, accrochages, dosage de pedale, passages imprécis,tempo encore un peu lent, et je ne parle pas de la musicalité dont le travail est de toutes façon sans limites .
Parfois je me dis « allez Christelle on joue lentement sans pedale et avec le métronome »
Parfois je me dis «Christelle, cette tempête met en danger ta santé mentale. Il est temps de la congeler en espérant un produit amélioré après décongélation... »
Parfois, je commence une page, j’accroche, je râle, et je joue autre chose .
Ma prof trouve que j’avance, mais je la soupçonne de vouloir m’encourager.
J’ai eu le même sentiment de frustration abec l’alouette de Glinka, que je n’ai jamais parfaitement maîtrisée techniquement et que je ne joue plus, finalement. Et c’est dommage.
Pensez vous qu’il faille la mettre de côté?
Ou bien la travailler très lentement quelques semaines avant de se relancer dans la montée du tempo ?
Est ce qu’on arrive facilement à reprendre un morceau difficile abandonné quelques temps?
Je précise que je n’ai aucun impératif d’audition ou autre, je pratique le piano à mon modeste niveau et pour mon seul plaisir!
En vous remerciant de votre retour,
Musicalement,

[Sylma]

Bonjour,
Je crois qu'il est important que vous retrouviez le plaisir de jouer, manifestement cette tempête vous malmène; peut-être devriez-vous la laisser 'décanter' quelque temps (pas trop longtemps pour ne pas perdre le bénéfice du travail fait) il est possible que lorsque vous la reprendrez, vous soyez étonnée de ce que ce temps de latence a apporté.
Arrêter puis reprendre c'est un risque aussi, parce que cela demande parfois un travail de réactivation qui peut être décourageant, donc mettre en pause mais pas trop longtemps. Et puis retrouver le goût de travailler un morceau c'est fondamental, apprendre sans plaisir c'est aussi aberrant que d'apprendre sans travailler.
C'est trèsformateur de s'attaquer de temps en temps des pièces au dessus de notre niveau, cela fait avancer, mais c'est parfois un peu douloureux et frustrant
Choisir une pièce plus facile c'est aussi pouvoir se concentrer sur la musicalité, se ressourcer avec un travail plus payant et donc plus valorisant pour progresser. Je pense qu'il est bon d'alterner ou d'avoir des morceaux de niveaux différents qui soient des 'zones de repos' les uns par rapport aux autres.
Et puis le répertoire piano est tellement riche en trésors de tous niveaux!
Bonne continuation.

[lullablue]

bonjour,
je suis d'accord avec Sylma,
je pense que tu devrai faire une pause dans cette tempête.
j'avais bossé un morceau (courant limpide de burgmuller) et j'avais du mal avec la partie centrale qui ne voulait pas rester dans ma tête, j'avais beau la travailler MS lentement, impossible. j'avais donc laisser tomber. je l'ai repris 6 mois plus tard, et hop, c'était bien plus facile.
parceque j'avais bossé d'autres morceaux plus abordables entre temps .
je suis sure que quand tu reviendras à ce morceau, ce sera bien + simple.

[mh_piano]

J’ai toujours 3 ou4 morceaux en chantier, et malgré tout je commence à me lasser de cette sonate, ou plutôt de ma stagnation...
La pièce est au dessus de mon niveau, je crois que je ne la joue « pas mal » mais « pas bien »

Sentiment bien connu...

Est ce qu'on arrive facilement à reprendre un morceau difficile abandonné depuis quelques temps ? Non ! Enfin en général... La facilité à reprendre un morceau laissé de côté un moment dépend je crois 1/ du niveau de maîtrise atteint dans le morceau, 2/ du niveau du pianiste.
Il faut donc être très motivé pour faire ça quand on a un niveau intermédiaire, et il faut arbitrer alors entre "reprendre un morceau déjà travaillé" et "apprendre un nouveau morceau". Cela peut valoir la peine après 2 ou 3 ans car si on travaille pendant ce temps, on a des chances d'avoir progressé et d'arriver à une interprétation plus satisfaisante. Mais il ne faut pas rêver non plus, la difficulté ne devient pas forcément facilité en 2 ans.

En même temps s'acharner sur un morceau où on stagne n'est guère motivant.

Alors entre ces 2 alternatives que reste-t-il ?

Il est possible de continuer de travailler le morceau en variant la manière de travailler, ce qui peut permettre de contrer la lassitude, et pendant un moment ne pas chercher à le jouer en entier ni au tempo, mais choisir chaque jour un passage particulier, un problème à travailler en profondeur, comme s'il s'agissait d'un exercice technique.

Une autre solution est aussi de tenter de "maintenir" le morceau pendant un moment sans plus chercher à l'améliorer, en le jouant pour mémoire en espaçant de plus en plus la "révision" : un jour sur deux pendant une semaine, puis un jour sur trois, un jour par semaine, une fois toutes les 2 semaines, une fois par mois. Mieux vaut tenir un agenda pour respecter ce rythme. Et revenir à une plus grande fréquence ou un peu de travail si ça se dégrade trop.

[Oukee]

...

[Oukee]

Laisser reposer le morceau quelques temps est une bonne option je crois, pour le mental surtout. Rien de pire que d’attaquer le travail d’une pièce à reculons.
Personnellement, j’attaquerai une autre œuvre de Beethoven, pour rester dans le même univers musical et technique et te confronter autrement aux difficultés de son écriture. Les variations par exemple comportent des morceaux pour tous les niveaux et sont très intéressantes.
Tu reviendras à la Tempête quand l’envie te reprendras de la jouer : c’est difficile de dire quand, mais cela se produira, pas de doute la dessus.

[Sylma]

Il est possible de continuer de travailler le morceau en variant la manière de travailler, ce qui peut permettre de contrer la lassitude, et pendant un moment ne pas chercher à le jouer en entier ni au tempo, mais choisir chaque jour un passage particulier, un problème à travailler en profondeur, comme s'il s'agissait d'un exercice technique.

Oui exactement, personnellement je fais ça pour entretenir un morceau; il y a tellement de choses qui peuvent apparaître 'à tête reposée'; de plus ça évite de saturer surtout si la pièce est longue.
Et je voulais rajouter, choisir peut-être en alternative une pièce relativement courte.

[ChristL]

Je vous remercie tous de vos réponses.

On ne peut pas dire que je perds plaisir à jouer et à travailler, mais je ressens une sorte de résignation mélancolique à force de buter chaque jour sur les mêmes défauts ( encore ce même passage imprécis, encore cette basse qui n'est pas dans la pédale, encore ce début de phrase pas terrible...)
Heureusement, je termine "Rêverie " de Debussy, et la troisième consolation de Listz, qui sont plus courtes et plus faciles, je prévois de commencer un nocturne de Chopin (le N°1) , et j'entretiens mon modeste répertoire avec beaucoup de plaisir.
J'ai peur de me décourager si je mets la tempête de côté et que la reprise est pénible avec des difficultés sur les passages actuellement acquis. D'ailleurs je vois bien, notamment avec le Clair de Lune de Debussy et une sonate de Scarlatti, que si je n'entretiens pas très régulièrement les passages techniques, mes doigts les perdent alors que je pensais la chose définitivement acquise...C'est ce que je trouve ingrat dans la pratique du piano, entre la satisfaction de bien interpréter une pièce, par coeur et sans efforts, et le retour au travail technique pour garder l'aisance musicale, il n'y a qu'un pas...(ou plutot quelques semaines.)

Je crois que je vais arrêter de jouer cette tempête en entier, et me focaliser sur une page tous les 3 jours, en partant de la fin, tempo lent , en travaillant vraiment technique, sans essayer de produire une version aboutie pour le moment. On va voir dans un mois ce que ça donne, avant d'essayer de l'enchainer de nouveau, j'espère dans une version améliorée.

Je me sens plutôt seule dans ma passion pianistique, bien que ma prof soit excellente, et je suis heureuse de parcourir le forum régulièrement!
Bien à vous,

[Chtilli]

Bonjour Christelle, nous avons au moins deux points communs. Tout d'abord j'ai vécu exactement la même chose que vous avec mes deux derniers morceaux, des morceaux très durs pour moi, pour lesquels j'ai eu un véritable coup de cœur, mais qui m'ont demandé chacun 3 mois de travail acharné. dans les deux cas, je suis arrivé très près du but mais à un moment ça a été l'overdose et je n'ai plus eu envie de les jouer. Aujourd'hui le fruit de ce travail commence déjà à se perdre et je suis en train de les oublier sans les avoir enregistrés... ma seule consolation est de me dire que les techniques apprises, en revanche, m'ont énormément fait progresser, et ça ça ne disparaîtra pas... j'ai compris qu'il fallait que j'apprenne à reconnaître les morceaux que je pourrais apprendre plus rapidement que ça afin de ne pas me lasser avant d'arriver au bout.

j'ai ouvert un sujet à ce propos, peut-être trouverez-vous des éléments de réponse à vos questionnements : viewtopic.php?f=1&t=22650

Deuxième point commun : je suis justement en train de finir l'apprentissage de La tempête Allegretto, qui représente presque le morceau idéal dans le cadre de cette problématique, dommage qu'il fasse quand même 10 pages : le déchiffrage/apprentissage par cœur m'a pris "seulement" un mois, donc cette fois j'ai atteint la dernière mesure en ayant encore beaucoup d'énergie en réserve pour peaufiner les nombreux accrocs disséminés tout au long du morceau et peut-être arriver à quelque chose d'abouti, pour l'instant je n'ai pas envie de passer à autre chose, même si ça peut toujours me tomber dessus à l'improviste...

Si vous avez des questions sur La Tempête, je me ferai un plaisir d'essayer d'y répondre, courage !

[Tchege]

Bonjour,

Je travaille également le troisième mouvement de la tempête depuis quelques mois (j’ai l’impression qu’on est beaucoup dans ce cas là!).

C’est une pièce très exigeante, beaucoup plus qu’il n’y parait, et également assez longue. Je pense qu’elle peut nourrir beaucoup de frustration et qu’il est facile de prendre des « mauvaises habitudes » dessus, qui peuvent parfois donner l’impression de régresser. Couper quelques semaines/mois et y revenir après, avec un œil frais, peut être salvateur.

[Solfège]

C'est toujours intéressant de travailler des pièces un peu plus difficile mais lorsqu'on n'a pas d'impératifs précis tel que audition concours ou autre il faut savoir rester philosophe et ne pas hésiter à la mettre de côté pour se consacrer à d'autres morceaux. De toute façon ce qui est acquis n' est jamais perdu et vous vous en apercevrez le jour où vous la reprendrez. Non seulement après une remise en forme vous jouerez ce que vous avez appris sans problème mais les passages où vous avez eu des difficultés vous les jouerez également avec moins de difficultés. Lorsqu'on pratique le piano en tant que loisir il ne faut pas perdre de vue la notion du plaisir de jouer sur notre piano préféré. C'est certain qu'il faut un minimum de rigueur et d'organisation dans le travail si on veut progresser et accéder à des morceaux d'un certain niveau mais sans perdre de vue cette notion de plaisir et de détente que l'on doit ressentir après temps passé avec notre instrument.La progression se fera naturellement. Bonne continuation et bon piano. Salutations musicales.