Ecoute comparative et objective : quelles différences remarquez-vous ?

Théorie, jeu, répertoire, enseignement, partitions
Virgule
Messages : 994
Enregistré le : mer. 07 oct., 2015 5:36
Mon piano : Yamaha M110T
Localisation : Québec

Re: Ecoute comparative et objective : quelles différences remarquez-vous ?

Message par Virgule »

pianojar a écrit : sam. 09 sept., 2017 17:19
Et c'est seulement cette (re)connaissance des codes qui vont permettre d'affiner notre perception de la musique
Si à un moment donné on ne fait pas l'effort de vouloir appréhender ces codes,on va souvent rester à la "surface" de la musique
Oui c'est exactement ce que je voulais dire, on ne peut pas apprécier la poésie si on ne comprend pas bien la langue. Mais pour moi, les codes c'est la tradition (et non la grammaire qui, elle, change peu, surtout en musique); c'est la tradition qui transmet les codes - et cette tradition, par exemple d'interprétation de Beethoven au piano, peut en fait remonter au compositeur lui-même et nous être parvenue via les générations d'élèves (Beethoven :arrow: Czerny :arrow: Liszt :arrow: Tausig :arrow: Barth :arrow: Kempff, grand béthovénien), mais bien entendu cette tradition se modifie au fil des années et elle évolue selon les personnalités, donc il ne faut pas se faire d'illusions, quand on arrive au musicien contemporain descendant de cette filiation, ce n'est plus 'comme le compositeur le jouait'. Comparez par exemple, dans Beethoven, Wilhelm Kempff à Richter, Horowitz ou Gilels... qui proviennent de la même filiation, sauf que ces derniers ont été élèves de H. Neuhaus, lui-même élève de Barth tout comme Kempff...

Bien sûr que ces codes sont contraignants. Reste que ces codes, cette tradition, on doit les connaître pour apprécier cette musique et a fortiori si on veut en déroger tout en restant compréhensible pour les auditeurs. La créativité (de 'notre Lucas' dans Scarlatti, selon ton exemple) n'a de sens qu'en référence au bagage commun. Si Lucas peut jouer Scarlatti sans respecter les codes officiels puristes du 'comment on joue Scarlatti' et nous convaincre que c'est intéressant, et nous séduire, c'est bien parce qu'il le joue néanmoins d'une façon reconnaissable dans le cadre plus large de la grande tradition d'interprétation du classique. Et si on reconnaît Für Elise dans ce que joue Clayderman (même si on le rejette), c'est aussi en référence à notre bagage commun de connaissances de la musique classique.
Virgule
Messages : 994
Enregistré le : mer. 07 oct., 2015 5:36
Mon piano : Yamaha M110T
Localisation : Québec

Re: Ecoute comparative et objective : quelles différences remarquez-vous ?

Message par Virgule »

JPS1827 a écrit : sam. 09 sept., 2017 18:09 Moi c'est plutôt ce qui m'ennuie, qu'on sacrifie aux codes de reconnaissance. Les musiciens peuvent adopter la tenue qu'ils veulent, arriver en doudoune et en boots comme Scott Ross dans une cave du Marais dans les années 80 disant "c'est bien moi l'artiste, il n'y a pas de gag, j'ai traversé les tempêtes de neige pour arriver ici ce soir", nous annonçant qu'il va nous jouer D'Anglebert, une musique ennuyeuse et peu variée selon lui, non mesurée "comme les préludes de Louis Couperin que vous ne connaissez sûrement pas" (et effectivement je ne les connaissais pas du tout à cette époque), à laquelle il va essayer de nous intéresser… mais il nous a intéressé effectivement, c'était un magnifique concert.
Oui JPS, mais là tu parles de codes vestimentaires... J'ai entendu Scott Ross à l'orgue et au clavecin, plusieurs fois à Québec, y compris en jeans et chemise à carreaux à la salle de concert officielle de l'université. Je ne connais pas très bien les codes d'écoute et d'interprétation du baroque sur ces instruments, mais pour autant que je me souvienne, Scott Ross ne dérogeait pas vraiment aux codes d'interprétation. Il n'a jamais créé la controverse que je sache (sauf peut-être pour ses vêtements). Il était juste un interprète absolument génial, vivant, dansant...

Il y avait à une époque des récitals d'orgue à l'église Saint-Jean-Baptiste de Québec. J'y avais entendu un concert du titulaire, si je me souviens bien, qui nous avait joué du Bach. Je n'avais pas de coussin sur le très dur banc d'église et même si je n'avais pas l'impression de m'ennuyer, pendant le concert je n'ai jamais oublié combien j'avais mal au c... :oops:. Pas longtemps après (possiblement au concert suivant), Scott Ross a donné un récital tout Bach sur le même orgue, et sur le même banc d'église je n'ai jamais, pour une seconde, senti mes fesses. Ce n'est qu'après le concert que j'ai pris conscience de ne pas avoir remarqué ce banc qui pourtant n'avait pas changé. J'ajoute, à la décharge de ce pauvre titulaire d'orgue, que s'il ne m'avait pas captivée dans Bach, quand il a poursuivi avec une oeuvre moderne (j'ai oublié quoi) qu'il aimait manifestement passionnément, il m'a captivée autant que Scott Ross dans Bach, et avec le même effet apaisant sur mon postérieur.
Répondre