Le CONTEMPORAIN vu par les PMistes.

[Naphta]

Sauf erreur, je n'ai pas vu d'espace dédié au répertoire contemporain pour les versions des PMistes.
C'est donc avec une pièce qui a 100 ans (uh uh) que j'inaugure cet espace où chacun pourra proposer des morceaux dits "contemporains".
Alors, entendons-nous :
effectivement, les 6 petites pièces op 19 de Schoenberg (que je propose ici dans un enregistrement que je soumets à vos oreilles avisées et expertes) ont été éditées en 1913...c'est loin, mais pour beaucoup, les Viennois deuxième période "sonnent" encore TRÈS contemporains (c'est à dire en fait atonal, dissonant, etc). Toutefois ces pièces sont encore dans une veine expressionniste post-romantique, dans un langage certes atonal dodécaphonique, mais où on entend encore beaucoup d'éléments mélodiques qui pourraient renvoyer encore au langage tonal.
Aussi, pour éviter de multiplier les rubriques, et si vous êtes d'accord, on pourra glisser dans ce sujet :
- les compositeurs jugés encore proche de l'avant-garde du début 20ème.
- les compositeurs de l'avant-garde du milieu 20ème jusqu' à sa fin.
- mais aussi les compositeurs jugés "néo-classiques", des années 60 jusqu'à aujourd'hui.
- les compositeurs vivants aujourd'hui (sans distinction de langage utilisé).

Bon, je ne sais pas si c'est satisfaisant ; à discuter...

Voilà ma version (qui aurait pu être meilleure, mais bon, voilà) :

https://soundcloud.com/naphta-115276723 ... rg-6pieces

[jean-séb]

Bonne idée d'ouvrir ce fil.
Oui, je suis toujours frappé de ce que l'appréciation de l'art évolue lentement, peut-être encore plus lentement aujourd'hui que naguère, du fait que les moyens de reproduction nous permettent de rester autant qu'on veut dans le monde figé du passé, que ce soit pour la peinture ou la musique, ou probablement toute autre forme d'art. Oui, des œuvres du début du XXe siècle peuvent nous paraître encore très "nouvelles" et dérangeantes pour nos yeux et nos oreilles.
Je ne connais pas bien Schönberg, en dehors de ses œuvres encore très postromantiques comme l'admirable Nuit transfigurée. J'ai écouté attentivement ces pièces de l'opus 19 tout récemment, lorsque JPS les a jouées pour notre dernière réunion PM à Paris. Je suis tout de suite tombée sous le charme. Je trouve qu'il y a une sorte d'évidence, de simplicité dans ces petites pièces, extrêmement rafraîchissante.
J'ai écouté ta version et pour moi, je trouve ça très bien. Je trouve qu'il est évidemment plus difficile d'entendre dans un enregistrement le travail de pédale et de résonances très délicat que JPS m'avait permis d'entendre en direct, mais c'est évidemment une limitation matérielle. Bravo pour ton enregistrement et ton initiative.

[Naphta]

Merci Jean-Seb !
J'espère que ce fil pourra vivre un peu, et au delà du répertoire du 20ème. Cela dit, les pièces contemporaines sont souvent difficiles techniquement et peuvent rebuter les pianistes amateurs.
Oui, il faut du temps pour comprendre quelque fois une oeuvre ou une démarche. Le ready-made de Duchamp a créé une secousse sismique il y a 100 ans aussi, dont on mesure encore les répliques aujourd'hui.
Dans cet opus 19, Schoenberg travaille vraiment la couleur, le timbre, la dynamique.
Une oeuvre pour le piano, pas juste un exercice formel.
D'ailleurs Webern aussi, contrairement à ce qu'on peut imaginer, était un vrai coloriste de l'orchestre.

[Athos]

Voilà un sujet qui me plaira.

Mes goûts me portent plus vers le 20 ème siècle (et 21 ème) que le 19 ème (à part les très grands classiques, et encore, pas tous...).

Interprétation magnifique ! J'adore ces pièces, même si elles me sont inaccessibles (pour les jouer).
La difficulté technique est dans les notes, dans les rythmes aussi, difficile de compter !
Ces pièces ne sont pas récentes récentes, mais effectivement continuent de choquer certaines oreilles habituées (sclérosées ?) aux classiques / romantiques.
Dommage, mais après tout, chacun ses gouts.

Donc le seul petit bémol est que tu mets la barre très très haut, et que les suivants risquent d'être intimidés !
Bon, si tu avoues que tu es prof de piano, on se lancera avec moins de crainte !
Je me bats avec un Mikrokosmos sûrement trop dur pour moi en ce moment, pas près de le mettre en ligne...

Je n'entends pas que la piano est faux pour ma part, il a un très beau son de plus.
(et tu enregistres avec du matériel spécifique je suppose, pas juste un iphone ou un appareil photo).

[Line-Marie]

Il y a les dernières pièces écrites par Debussy, ses 12 études et En Blanc et noir qui peuvent être ajoutées.
Peu jouées par les pianistes de ce forum , certaines des Études sont accessibles en fin de second cycle.

[Naphta]

Merci Athos, ça fait plaisir !
Mais je ne pense pas avoir un niveau technique extraordinaire. J'ai des lacunes que j'essaie de combler par le travail en ce moment, surtout depuis que j'ai acquis récemment ce piano acoustique fait à Langlau (un Feurich) qui m'a permis de me replonger dans le répertoire de la musique dite "savante"; je n'aime pas beaucoup ce terme, mais il me permet de me positionner par rapport à ce que je fais ; je vis de la musique en composant et jouant principalement pour le spectacle vivant, mais en utilisant l'ordi et les synthés. Des pièces souvent "électronica" (là encore, le terme n'est pas satisfaisant, mais ça recouvre un spectre assez large de musiques qui renvoient à l'acousmatique, l'electro, le jazz, les musiques improvisées, le field recording, l'ambient, etc). Mon Nord ne me donnait pas très envie de rejouer ou apprendre de nouveaux morceaux du répertoire. Un piano acoustique comme un Langlau vous pousse à aller chercher des coloristes (Debussy, etc), à travailler le répertoire. Il me semble que le "classique" ou du moins la musique écrite, permet de progresser considérablement sur la maîtrise du clavier, du phrasé et du temps. Toutefois, le fait de travailler au théâtre, où un peu comme en danse, on doit très vite improviser des thèmes, suivre des comédiens, dialoguer avec eux, fait énormément progresser musicalement, aussi.
Strumpf disait sur soundcloud que le piano était un peu faux ; je pense qu'il a un peu bougé depuis un mois et demi maintenant.
Strumpf : pour répondre sur Debussy : il a un fil à lui, le veinard.
Debussy est pour moi, un des plus grands (sinon LE ?) ; il a su créer une véritable révolution du langage harmonique dont on n'a pas encore mesurer l'audace absolue et la singularité folle. Sa contamination du système tonal par son propre langage, sa propre vision interne, n'a pas d'équivalent ; ça ne fait pas système comme chez Schoenberg, mais c'est tout aussi révolutionnaire. Pourtant, il n'est pas considéré comme d' "avant-garde." Même si ses études peuvent flirter avec.

[Spianissimo]

Bonne idée que ce fil Naphta et bravo pour tes Schoenberg que je viens d'écouter, je ne ferai pas de critique étant donné que je ne me suis encore pas penché sur ce compositeur mais c'était plaisant à écouter. Je vais essayer d'alimenter ce fil de temps en temps, voici ce que j'ai en rayon pour l'instant et que j'avais déjà mis ça et là sur le forum. C'est du contemporain "soft", dodécaféïné..
Olivier Greif "Tombeau de Mr de Clachaloze" : https://www.youtube.com/watch?v=N4eHNVo1J58
Lowell Liebermann Nocturne n°1 : https://www.youtube.com/watch?v=G6JmEjZwRlI
John Cage In A Landscape (sans doute trop lent) : https://www.youtube.com/watch?v=tipdeefAzQg
Leo Ornstein extraits sonate n°8 : https://www.youtube.com/watch?v=QWSBCNgaKEA
Leo Ornstein Water Colors n°1 et 5 : https://www.youtube.com/watch?v=SJm_fbeP7KY

[Naphta]

Merci Spianissimo !
Je ne connais pas ces compositeurs (à part Cage, que j'adore. In a landscape est très beau, mais je suis aussi assez fan des sonates et interludes pour piano préparé). La pièce de Olivier Greif est belle aussi ; j'aime assez comme elle part dans la dissonance.
Merci pour tes interprétations.

[Spianissimo]

Je viens de tenter une version piano solo du Spiegel Im Spiegel d'Arvo Pärt (composé en 1978) : https://www.youtube.com/watch?v=Ql7DAtrnTmE
La version avec violoncelle ou violon est bien entendu plus efficace, mais j'ai tenté...comme "In a Landscape", ceux qui aiment (comme moi) diront que c'est une oeuvre hypnotisante et/ou fascinante, et ceux qui n'aiment pas doivent trouver sa ch.... à mourir . Le minimalisme dans toute sa splendeur.
Ceux qui le souhaitent peuvent donner leur avis. Merci de vos écoutes éventuelles.

[Christof]

Superbement joué.
Envoûtant. Réconfortant. Nourrissant. Introspectivant. Emerveillant

[Spianissimo]

Merci Christof, je n'étais pas persuadé de l'intérêt de le jouer en piano solo, c'est rassur"ant" tous ces adjectifs en "ant"

[Oupsi]

envoûtant en effet, il faut trouver le moment ad hoc pour cette écoute là !

[Naphta]

Merci pour ce morceau que j'ai toujours trouvé très beau.
Arvo Pärt a souvent été dénigré car trop tonal, trop modal, trop minimal, trop sentimental, trop bigot, etc.
Il a composé des morceaux bien plus intéressants que ceux de nombre de compositeurs issus de la "nouvelle musique", du retour au tonal des années 80-90 en somme.
J'associe cette musique au film Gerry de Gus Van Sant. Un film magnifique. La musique y est à sa place.

https://www.youtube.com/watch?v=7qkx8eLfiOo

[Spianissimo]

Merci Oupsi.
Oui, écoute particulière, plutôt dans un moment très calme ou on a envie de tout arrêter, y compris le temps...

Et merci Naphta,

Sur le style de Pärt et l'utilisation de sa musique au cinéma, on peut lire ceci sur Wikipédia :

ce style se caractérise par l'écriture minimaliste de Pärt, une musique épurée qui donne une impression de simplicité.
Le premier élément est l'utilisation de rythmes simples tels que « noire, blanche, noire, blanche » ou « blanche, noire, blanche, noire ». Le second élément est le fameux style tintinnabuli. Chez Arvo Pärt, cette écriture s'inspire donc du son de la clochette, lorsqu'un instrument - quel qu'il soit - articule son jeu entre trois notes principales, celle de l'accord parfait d'une gamme. Cette simplicité se retrouve également dans l'utilisation de notes récurrentes et d'une certaine stabilité de la gamme. Pärt, contrairement à beaucoup de compositeurs des époques baroque, classique et romantique, n'utilise donc pratiquement jamais de modulations.

Bien que la musique d'Arvo Pärt à partir de 1976 soit composée spécifiquement pour les concerts, le succès des enregistrements discographiques pousse de nombreux réalisateurs à utiliser, à partir des années 1990, des extraits de ses œuvres en leurs assignant une fonction critique et narrative importante. L'estimation actuelle regroupe une vingtaine de pièces, présentes dans plus d'une centaine de longs métrages. Parmi ses œuvres, sont utilisées le plus fréquemment : Für Alina, Fratres, Cantus, et plus particulièrement Spiegel im Spiegel qui apparaît en surimposition d'une variété de thèmes, notamment la guerre, la maladie en phase terminale, le terrorisme, la compassion et le pardon.

D'une manière plus générale, y compris dans son utilisation au cinéma, l'œuvre d'Arvo Pärt peut être considérée comme l'agent esthétique de quelque chose qui est « inaccessible, oublié ou dépossédé ».

[Christof]

Pour moi, c'est le Edward Hopper de la musique

[pianojar]

2 petites contributions

DIDIER BORZEIX Le sautereau sans maître / Une courte pièce écrite pour clavecin
https://soundcloud.com/pianojar/borgeix ... ans-maitre

CHICK COREA
Extrait des children's songs : le n° 11 que j'ai réenregistré pour l'occasion
https://youtu.be/JGp5XeJjwC0

Par contre Naphta le fil n'a pas été ajouté dans la liste des fils et il n'y a pas de récap dans le 1er post

[Athos]

Super !

Je n'ai écouté que Borzeix (inconnu pour moi), pour l'instant.
Ça me fait penser à une horloge, avec les bruits du mécanisme, et ce rythme en balancier.

Bien interprété amha, avec ces traits fulgurants.

[pianojar]

A vrai dire je n'ai pas la moindre idée de comment "DOIT" se jouer ce morceau

[Spianissimo]

A vrai dire je n'ai pas la moindre idée de comment "DOIT" se jouer ce morceau

Amusante pièce en tout cas et inconnue pour moi aussi, le titre est un hommage à Boulez et son Marteau sans Maître ?

[pianojar]

A vrai dire je n'ai pas la moindre idée de comment "DOIT" se jouer ce morceau

Amusante pièce en tout cas et inconnue pour moi aussi, le titre est un hommage à Boulez et son Marteau sans Maître ?

Oui à la fin de la partition il est écrit "40 ans après P.B."
Du reste j'avais recherché ce qu'était un sautereau, l'ignorant à l'époque : un élément du mécanisme du clavecin