Hanon

Théorie, jeu, répertoire, enseignement, partitions
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natty_dread78
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Re: Hanon

Message par natty_dread78 »

Puisque ce sujet ne meurt pas et ne part pas en sucettes non plus (pour une fois), je donne mon opinion qui vaut ce qu'elle vaut.
Bien que pratiquer le Hanon ne soit pas une perte de temps et apporte quelque chose, pour le 3eme cahier en particulier, je pense aussi que ce temps est bien mieux utilisé à travailler directement les passages de morceaux. Je me borne la plupart du temps à l'utiliser (c'est aussi comme ca que faisait ma professeur au conservatoire) en temps qu'echauffement au début d'une séance, pendant une a deux minutes, de la meme manière que Glenn Gould se trempait les bras dans de l'eau chaude, en quelque sorte. Depuis quelque temps, ou je n'ai plus beaucoup de temps libre, je ne les pratique plus du tout.
Cela dit j'avoue que j'aime bien les pratiquer, en particulier le 3ème cahier, ca m'apporte un certain plaisir. Mais en réfléchissant, il est possible que ce plaisir soit uniquement lié au plaisir digital de jouer, et pas au Hanon en lui meme.
En résumé, je ne le conseillerais pas hormis pour s'échauffer 1 à 2 minutes.

Pour conclure, je mets une citation que j'ai trouvée dans wikipedia (on l'a peut etre deja mise, je n'ai pas lu tout le fil): source: http://fr.wikipedia.org/wiki/Charles-Louis_Hanon
"Serge Rachmaninoff et Josef Lhévinne ont clamé que l'explosion de virtuoses de piano à leur époque était due à l'obligation d'étudier les exercices de Hanon dans les conservatoires russes, où des tests spécifiques imposaient l'exécution de tous les exercices par cœur, à tous les tempi, et dans toutes les tonalités"
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Okay
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Re: Hanon

Message par Okay »

Bach_addict, tu ne m'en voudras pas si j'insinue que la citation de natty nous replonge dans LHLPSDNH.

Plus sérieusement, je suis assez en ligne quand on dit qu'il n'est pas forcément plus "agréable" de travailler dans les morceaux. A un certain niveau de granularité, le travail dans un morceau peut être vécu de manière assez rébarbative, surtout quand on bute sans avoir la clé du passage en question (ce qui est plus rarement le cas d'un exercice finalement).

Au risque de remettre de l'huile sur le feu (j'espère toutefois ne pas faire dérailler le fil), il y a quand même un argument qui me semble plier la question. C'est un argument de logique que je trouve impossible à faire tomber, du moins dans ma logique, mais je suis sûr que nox y trouvera un biais.
Je ne pouvais pas vraiment justifier pourquoi intuitivement je n'ai presque jamais fait de gammes ou d'exercices, pour moi c'était simplement pragmatique, je sentais que c’est ce que je devais faire sans savoir clairement pourquoi. Je dis presque car j'ai eu 2 courts passages où j'y ai touché. J’ai fait quelques temps un peu de Hanon enfant dans ma période autodidacte (très mal), dont une semaine de vacances scolaires où je me suis farci le volume entier tous les matins. Je me souviens, ça finissait sur un exercice de trémolos que j'attendais avec impatience. Puis l’école a repris et je n’ai plus jamais touché au Hanon. Ce bref passage dans le groupe Hanon ne fait pas de moi un survivant (dois-je en conclure que l’école m’a sauvé ?). Et puis à 14 ans au CNR, mon prof m’a donné quelques Czerny de l’Ecole de la Vélocité, puis après 3 ou 4 semaines et il m’a dit qu’on arrêtait là, que c’était bien d’avoir vu ce genre de choses au moins une fois dans ma formation

L’argument massue, c’est Martha qui l’exprime clairement dans la vidéo postée plus haut.
Je désamorce d’emblée ce qu’on pourrait m’opposer : je m’y réfère car cet argument est complètement indépendant des dons pianistiques inouïs de Martha. Et je poste car c’est pour cette raison exacte que j’ai naturellement esquivé toute forme d’exercice hors morceaux (à l’exception du presque ci-dessus), j’ai été heureux qu’une autre personne ait su mettre des mots sur ce qui m’a toujours semblé couler de source.
Elle explique simplement qu’on ne retrouve jamais dans les morceaux une difficulté technique sous la forme qu’elle prend dans un exercice. Il faudra appréhender la difficulté dans un nouveau contexte à chaque fois. De la même manière, on ne retrouve jamais une même difficulté exactement sous la même forme d’un morceau à l’autre. Donc que la difficulté soit travaillée dans un morceau ou un exercice, aucune des deux méthodes ne semble plus avantageuse que l’autre pour la prochaine fois où l’on rencontrera ce type de problème dans un autre morceau, puisqu’à ce moment là, la difficulté se présentera encore et encore sous un jour renouvelé. Vous voyez où je veux en venir. Quitte à ce qu’aucun travail ne puisse être décalqué strictement ailleurs (provenant d’un morceau, ou d’un exercice type gamme/Hanon non conçu spécifiquement pour un morceau), autant concentrer tout le travail dans ce qui est destiné à être joué. C’est juste pragmatique, simple question de gain de temps.
Modifié en dernier par Okay le jeu. 15 mai, 2014 15:34, modifié 1 fois.
nox
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Re: Hanon

Message par nox »

Okay a écrit :
Elle explique simplement qu’on ne retrouve jamais dans les morceaux une difficulté technique sous la forme qu’elle prend dans un exercice.
Mais le but d'un exercice n'est pas de vaincre une difficulté qu'on rencontre ensuite dans un morceau !
Evidemment qu'on ne retrouve jamais une gamme parfaitement égale dans un morceau. L'intérêt n'est pas là.

Comme je l'ai dit, les exercices sont là pour nous aider à améliorer notre contrôle et notre maîtrise d'une manière globale. Quand on fait une gamme, comme je l'ai dit, on se concentre pour avoir une égalité parfaite par exemple. C'est un exercice de contrôle du son et des doigts. C'est une manière de travailler le piano hors contexte justement.
Et comme je l'ai, encore une fois, déjà dit : je suis sûr (mais je ne peux pas le prouver évidemment) que le fait de faire ce travail quotidiennement depuis toujours fait que j'ai un meilleur contrôle du son, une meilleure sensation. Je peux faire plus de choses, j'ai moins de limites. Quand il m'est arrivé d'arrêter les exercices pendant quelques semaines/mois, j'avais vraiment la sensation d'avoir moins de contrôle dans mon jeu, et d'introduire une part d'aléas.
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Re: Hanon

Message par Gracou »

On pourrait opposer à cela que justement, par gain de temps, on peut faire des exercices mettant en lumière certaines difficultés particulières ou simplement parce que leur aspect systématique permet de se concentrer sur quelques points particuliers (égalité, posture, etc). Le fait d'avoir travaillé les arpèges pourra par exemple faciliter les choses lorsqu'ils commenceront à se présenter par packs de douze dans les morceaux (en plus de s'être familiarisé et s'être mis dans les doigts les accords mineurs, majeurs, les gammes correspondantes, etc).

Edit: ce message était supposé arriver après celui d'Okay.
Modifié en dernier par Gracou le jeu. 15 mai, 2014 15:36, modifié 1 fois.
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natty_dread78
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Re: Hanon

Message par natty_dread78 »

nox a écrit :Et comme je l'ai, encore une fois, déjà dit : je suis sûr (mais je ne peux pas le prouver évidemment) que le fait de faire ce travail quotidiennement depuis toujours fait que j'ai un meilleur contrôle du son, une meilleure sensation. Je peux faire plus de choses, j'ai moins de limites. Quand il m'est arrivé d'arrêter les exercices pendant quelques semaines/mois, j'avais vraiment la sensation d'avoir moins de contrôle dans mon jeu, et d'introduire une part d'aléas.
Oui, mais comme je l'ai deja dit (copyright Nox), si tu avais travaillé tous les jours le 3eme mvt de l'appassionata au lieu de faire ces exercices, tu serais encore plus fort, en plus de maitriser la sonate.
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Okay
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Re: Hanon

Message par Okay »

C'est ça l'idée ... si le but est de faire progresser sa technique, il n'y a pas de supériorité évidente du résultat.
Si on s'en tient à un résultat équivalent, ce n'est plus la même histoire si le temps utlisé à faire des exos permet d'acquérir du repertoire et qu'on fait d'une pierre deux coups.

Et encore que, dans la mesure où l'on ne devrait jamais séparer la technique de l'intention musicale, on fait des progrès artistiques permanants en travaillant sa technique de manière directement appliquée.
nox a écrit :les exercices sont là pour nous aider à améliorer notre contrôle et notre maîtrise d'une manière globale. Quand on fait une gamme, comme je l'ai dit, on se concentre pour avoir une égalité parfaite par exemple. C'est un exercice de contrôle du son et des doigts. C'est une manière de travailler le piano hors contexte justement.
Lorsqu'on se concentre sur ces choses dans le repertoire (car à moins de se satisfaire d'un jeu inabouti on n'a pas d'autre choix), l'amélioration de nos aptitudes globales n'est pas moindre. C'est ce point là qui m'échappe dans le bien-fondé des exercices hors contexte.
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Re: Hanon

Message par Gracou »

Je suis assez dubitatif sur l'aspect "il ne faudrait jamais séparer la technique de l'intention musicale". C'est assez séduisant sur le papier, mais cela ne correspond pas à la réalité quotidienne que je connais. Ne serait-ce que dans l'étude d'un passage difficile, le fait de décortiquer, jouer mains séparées, lentement, en articulant, en trouvant toute sorte d'exercice afin de surmonter les difficultés rencontrées fait qu'il y a bien souvent une phase pas franchement "musicale".

C'est un peu comme si on se mettait à dire qu'il faudrait arrêter de faire de la lecture de notes en solfège, des exercices de rythme ou des dictées sous prétexte que les choses ne se présentent jamais sous cette forme dénuée de musicalité lorsque l'on est à l'instrument. Le fait de s'attaquer aussi à certains aspects isolés de la pratique musicale permet de gagner un temps considérable, que ce soit pour le solfège, la technique, etc. C'est d'ailleurs le problème majeur de nombreux autodidactes que de perdre un temps colossal, faute de ne pas avoir eu les clés permettant d'aller au coeur des problèmes et d'avoir accès aux solutions adéquates.
La différence entre un fou et moi, c'est que je ne suis pas fou. Salvador Dali.
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Re: Hanon

Message par nox »

natty_dread78 a écrit : Oui, mais comme je l'ai deja dit (copyright Nox), si tu avais travaillé tous les jours le 3eme mvt de l'appassionata au lieu de faire ces exercices, tu serais encore plus fort, en plus de maitriser la sonate.
Pourquoi je serais encore plus fort ?
Et surtout : pour le premier versement des droits d'auteur, chèque ou espèce ?
Okay a écrit :C'est ça l'idée ... si le but est de faire progresser sa technique, il n'y a pas de supériorité évidente du résultat.
Si on s'en tient à un résultat équivalent, ce n'est plus la même histoire si le temps utlisé à faire des exos permet d'acquérir du repertoire et qu'on fait d'une pierre deux coups.
Oui tu acquiers du répertoire mais au détriment d'autre chose pour moi. Encore une fois on ne peut pas le prouver, ni le réfuter. Mais c'est l'idée.
Okay a écrit : Lorsqu'on se concentre sur ces choses dans le repertoire (car à moins de se satisfaire d'un jeu inabouti on n'a pas d'autre choix), l'amélioration de nos aptitudes globales n'est pas moindre. C'est ce point là qui m'échappe dans le bien-fondé des exercices hors contexte.
Tu ne peux pas te concentrer sur ces choses de la même manière, parce que la plupart des morceaux ne s'y prêtent pas. La gamme/le hanon est une formule simplissime, avec un unisson des deux mains. Cela permet d'entendre la moindre inégalité, en sachant que cette inégalité ne peut pas être liée à telle ou telle difficulté inhérente au morceau. Cela permet en gros de traiter le problème à la source.

C'est un peu comme s'il se passait la chose suivante : tu travailles toute ta vie sans faire d'exercice, tu arrives à un niveau permettant de jouer des choses comme les Réminiscences de Don Juan, et un jour en essayant de faire une bête gamme à l'unisson, ou un arpège, tu te rends compte que tu n'y arrives pas, que c'est moche et inégal.
Peut-être que tu te dirais "bof, je m'enfiche, on peut très bien jouer sans savoir faire une gamme propre", mais moi non.
Parce que cela me montre qu'il y a un problème de fond, et qu'en le résolvant je jouerais forcément encore mieux, car avec un meilleur contrôle.
C'est une question de caractère encore une fois.
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Okay
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Re: Hanon

Message par Okay »

Gracou a écrit :C'est assez séduisant sur le papier, mais cela ne correspond pas à la réalité quotidienne que je connais. Ne serait-ce que dans l'étude d'un passage difficile, le fait de décortiquer, jouer mains séparées, lentement, en articulant, en trouvant toute sorte d'exercice afin de surmonter les difficultés rencontrées fait qu'il y a bien souvent une phase pas franchement "musicale".
La beauté de la chose, c'est que lorsqu'on fait tout ça, qu'on dissèque comme pas possible pour trouver la clé, qu'on tourne en rond, la vrai clé qui fonctionne et rend les choses faciles (la bonne recette) a souvent une logique musicale.
C'est le sens musical qui nous suggère le doigté qui va fonctionner, c'est le phrasé naturel des triolets ou des doubles croches qui va imposer l'articulation à adopter, c'est le son adapté au passage qui va nous pousser à jouer de plus près, telle accentuation en bout de courbe va fournir la note pivot qui relance le poids et évite d'accrocher ...
Bon, c'est sûr que si on parle de l'opus 10 n°1 ou n°2 on va vite tomber dans des considérations strictement mécaniques, mais je me dis que ça doit concerner même pas 10% des problèmes.
nox a écrit :C'est un peu comme s'il se passait la chose suivante : tu travailles toute ta vie sans faire d'exercice, tu arrives à un niveau permettant de jouer des choses comme les Réminiscences de Don Juan, et un jour en essayant de faire une bête gamme à l'unisson, ou un arpège, tu te rends compte que tu n'y arrives pas, que c'est moche et inégal.
Peut-être que tu te dirais "bof, je m'enfiche, on peut très bien jouer sans savoir faire une gamme propre", mais moi non.
Parce que cela me montre qu'il y a un problème de fond, et qu'en le résolvant je jouerais forcément encore mieux, car avec un meilleur contrôle.
Ah mais je suis à 200% d'accord avec ça. Je suis le premier à le crier sur les toits. Si le problème ne se présente pas dans Don Juan ça m'est égal, mais je sais que si ça m'est égal tout court, je me ferme à une quantité de repertoire astronomique (tout Bach, Mozart, Beethoven, la moitié de Chopin, etc). Mais je vais dire mieux, je pense que je suis incapable de jouer égal peut-être la moitié des gammes des 24 tons aux deux mains dans les 2 sens. Je suis sûr que je ne suis pas à l'aise pour descendre si b majeur à gauche ou monter fa# mineur à droite par exemple. Mais ça ne me dérange pas, s'il faut que j'apprenne à le faire car un morceau l'exige, je le ferai à ce moment là. Pour moi, c'est une difficulté comme une autre, comme un trait en doubles notes qui est original, donc je ne vois pas pourquoi je m'y préparerais plus qu'à autre chose. De ce point de vue, c'est sûrement une question de caractère oui.
Modifié en dernier par Okay le jeu. 15 mai, 2014 16:53, modifié 1 fois.
nox
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Re: Hanon

Message par nox »

Okay a écrit :
nox a écrit :".
Dans ma grande mansuétude, je ne demanderai pas de droits d'auteur pour cette citation. Ne me remercie pas !

Blague à part, je suis content car dans ces derniers échanges, j'ai l'impression qu'on touche au fond du problème. Ca va devenir intéressant !
Gracou
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Re: Hanon

Message par Gracou »

C'est ça les grands penseurs, on cite même l'éloquence de leur silence. :mrgreen:
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Re: Hanon

Message par nox »

Oui mais il a édité, ma blagounette n'a plus de sens :)
Okay a écrit : Ah mais je suis à 200% d'accord avec ça. Je suis le premier à le crier sur les toits. Si le problème ne se présente pas dans Don Juan ça m'est égal, mais je sais que si ça m'est égal tout court, je me ferme à une quantité de repertoire astronomique (tout Bach, Mozart, Beethoven, la moitié de Chopin, etc). Mais je vais dire mieux, je pense que je suis incapable de jouer égal peut-être la moitié des gammes des 24 tons aux deux mains dans les 2 sens. Je suis sûr que je ne suis pas à l'aise pour descendre si b majeur à gauche ou monter fa# mineur à droite par exemple. Mais ça ne me dérange pas, s'il faut que j'apprenne à le faire car un morceau l'exige, je le ferai à ce moment là. Pour moi, c'est une difficulté comme une autre, comme un trait en doubles notes qui est original, donc je ne vois pas pourquoi je m'y préparerais plus qu'à autre chose. De ce point de vue, c'est sûrement une question de caractère oui.
Mais tu ne penses pas que tu seras meilleur pianiste en comprenant pourquoi tu n'arrives pas à jouer des simples gammes correctement, et en essayant de corriger le problème ?
Peut-être que de cette façon tu te rendras compte de choses auxquelles tu ne prêtes pas du tout attention dans une pièce, où il y a déjà tellement de choses à suivre : par exemple l'action du doigt, la position du 5ème ou du pouce, le déplacement de la main lors d'un passage du pouce etc...Ces choses là tu ne les vois pas dans un morceau parce que tu les compenses peut-être dans le contexte. Mais si cette compensation marche, elle a un prix. Elle signifie que tu n'as pas le contrôle total sur ce que tu fais.
Je ne peux pas dire que je maîtrise un gros arpège crescendo si je me sers du crescendo pour le jouer, en somme. Je dois pouvoir le jouer sans, et le crescendo doit être au service de la musique, pas un palliatif technique.
C'est peut être un peu confus, mais c'est globalement mon état d'esprit.
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Okay
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Re: Hanon

Message par Okay »

Désolé pour la citation vide, j'ai posté avant de finir par erreur, et j'ai édité au plus vite.

Ah mais je sais précisément pourquoi je n'y arrive pas, ce n'est pas un blocage. Je n'ai simplement pas fait ce qu'il fallait, car je me refuse de régler un problème par avance pour le simple plaisir de le régler sans en avoir le besoin. On ne peut pas savoir tout faire non plus. Je ne travaille pas telle ou telle gamme, car je ne considère par que c'est une brique élémentaire de ma technique, pas plus que tel ou tel passage tordu de doubles notes ou d'accords.
Le jour où je dois savoir jouer telle ou telle gamme qui est encore pleine d'inégalités à ce jour, je l'apprends telle qu'elle est dans le morceau où j'en ai besoin et je fais de mon mieux pour régler soigneusement les problèmes qui se posent à ce moment là. Et pour peu que le doigté dont j'ai besoin ne soit pas celui de la gamme, je n'aurais pas perdu mon temps à la travailler hors contexte et de devoir repartir à zéro dans le morceau.

Concernant ton analyse de l'arpège crescendo, je ne suis pas du même avis. Ce n'est pas un palliatif technique. Si le compositeur le demande crescendo et que ça m'aide car je sens sa direction et que mon passage du pouce est plus fluide, ce sera un autre geste que si le compositeur le demande par exemple léger et égal. Un geste très différent même. Ce n'est pas du tout la même technique. Il n'y a pas de qui peut le plus peut le moins, il ne s'agit pas de compenser avec la pédale ou du crescendo. Il s'agit de connaitre différents gestes qui produisent des effets très différents pour ce même ensemble de note, et il n'existe pas pour moi de version "neutre-hors-contexte" de cet arpège qui pourrait se prêter à son exercice a priori.
Modifié en dernier par Okay le jeu. 15 mai, 2014 17:28, modifié 2 fois.
BluePhoenix05
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Re: Hanon

Message par BluePhoenix05 »

Je trouve assez curieux vos conceptions de l'acquisition de la technique, qui semble consister en "l'acquisition de la capacité à pouvoir exécuter un trait donné", la question devenant "est-ce possible en n'ayant travaillé ques des morceaux ou également à l'aide d'exercices ?".
Okay a écrit :
nox a écrit :C'est un peu comme s'il se passait la chose suivante : tu travailles toute ta vie sans faire d'exercice, tu arrives à un niveau permettant de jouer des choses comme les Réminiscences de Don Juan, et un jour en essayant de faire une bête gamme à l'unisson, ou un arpège, tu te rends compte que tu n'y arrives pas, que c'est moche et inégal.
Peut-être que tu te dirais "bof, je m'enfiche, on peut très bien jouer sans savoir faire une gamme propre", mais moi non.
Parce que cela me montre qu'il y a un problème de fond, et qu'en le résolvant je jouerais forcément encore mieux, car avec un meilleur contrôle.
Ah mais je suis à 200% d'accord avec ça. Je suis le premier à le crier sur les toits. Si le problème ne se présente pas dans Don Juan ça m'est égal, mais je sais que si ça m'est égal tout court, je me ferme à une quantité de repertoire astronomique (tout Bach, Mozart, Beethoven, la moitié de Chopin, etc). Mais je vais dire mieux, je pense que je suis incapable de jouer égal peut-être la moitié des gammes des 24 tons aux deux mains dans les 2 sens. Je suis sûr que je ne suis pas à l'aise pour descendre si b majeur à gauche ou monter fa# mineur à droite par exemple.
Or je verrai plutôt l'acquisition de la technique comme "l'acquisition de la capacité à monter rapidement tel passage qu'on doit jouer".
En mettant l'accent sur la disposition à s'adapter et la résolution rapide des passages à jouer, car je ne crois pas qu'on puisse "sortir du sac" n'importe quoi (n'importe quel trait/exercice) de façon parfaite du premier coup, parce qu'on l'aurait travaillé (ou non) précédemment, parce qu'on l'aurait "acquis".

Dans la "définition" (tentative de cernement) que je propose (peut-être à affiner à l'avenir), je souligne "rapidement", dans le sens où plus on maîtrise le piano, plus on peut monter des pièces vite ("monter", c'est-à-dire aboutir à ce que l'on doit jouer).
Un peu comme un maître d'arts martiaux peut mettre plus rapidement hors d'état de nuire un attaquant.

C'est une conception qui se rapprocherait plus de ça :
Okay a écrit : Mais ça ne me dérange pas, s'il faut que j'apprenne à le faire car un morceau l'exige, je le ferai à ce moment là. Pour moi, c'est une difficulté comme une autre, comme un trait en doubles notes qui est original, donc je ne vois pas pourquoi je m'y préparerais plus qu'à autre chose. De ce point de vue, c'est sûrement une question de caractère oui.
Okay a écrit : Le jour où je dois savoir jouer telle ou telle gamme qui est encore pleine d'inégalités à ce jour, je l'apprends telle qu'elle est dans le morceau où j'en ai besoin et je fais de mon mieux pour régler soigneusement les problèmes qui se posent à ce moment là. Et pour peu que le doigté dont j'ai besoin ne soit pas celui de la gamme, je n'aurais pas perdu mon temps à la travailler hors contexte et de devoir repartir à zéro dans le morceau.
En tout cas c'est la conception que me suggère ma maigre expérience, peut être que ma progression démentira cette idée.
nox
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Re: Hanon

Message par nox »

Okay a écrit : Le jour où je dois savoir jouer telle ou telle gamme qui est encore pleine d'inégalités à ce jour, je l'apprends telle qu'elle est dans le morceau
Oui mais, once again, le but n'est pas de pouvoir jouer les gammes dans les morceaux. Le but est de repérer des problèmes techniques auxquels tu n'aurais pas prêté attention dans un morceau.
Peut-être qu'en faisant une gamme, tu vas découvrir (je dis n'importe quoi) que l'inégalité vient du fait que tu as une mauvaise position de la main. Et du coup une fois ce problème corrigé, tu joueras mieux tous tes morceaux. Tu avais un handicap dont tu n'avais en quelque sorte même pas conscience, et qui ne t'empêchait pas de jouer tes morceaux. Mais qui une fois résolu te permet de mieux jouer d'une manière générale.
nox
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Re: Hanon

Message par nox »

BluePhoenix05 a écrit :je ne crois pas qu'on puisse "sortir du sac" n'importe quoi (n'importe quel trait/exercice) de façon parfaite du premier coup, parce qu'on l'aurait travaillé (ou non) précédemment, parce qu'on l'aurait "acquis".
Il n'en est pas question, en effet.

J'ai du mal à vous donner ma façon de voir, mais c'est un bon exercice pour moi d'essayer de l'exprimer.

Je vous prends un exemple :
Ca veut dire quoi "avoir une bonne technique d'octaves" ?

Je pense qu'en bossant, je peux arriver à jouer le trait d'octaves du début de la sonate de Liszt. Proprement, et musicalement. Ca va être beaucoup de boulot, mais c'est normal : c'est la sonate de Liszt, c'est difficile.
MAIS
Si je joue une bête gamme en octaves au deux mains, à tempo faible, je n'ai plus l'excuse de la difficulté. Je vais me dire "c'est fou, même sur un truc aussi simple, je tape à côté. Donc ce n'est pas parce que c'était la sonate de Liszt que j'avais du mal. Il doit y avoir un soucis quelque part". Je vais chercher et me rendre compte que je place mal mon 5ème doigt, et ma main est déséquilibrée, ce qui fait que je tape souvent à côté.

Je vais corriger ça, et tous mes traits d'octaves vont devenir beaucoup plus simples, beaucoup plus fluides. J'améliore ma technique globale...Et mon trait d'octaves dans la sonate de Liszt sera meilleur.

Les gammes, c'est ce concept poussé à l'extrême en quelque sorte.
Modifié en dernier par nox le jeu. 15 mai, 2014 18:03, modifié 2 fois.
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Okay
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Re: Hanon

Message par Okay »

@Bluephoenix.
Je trouve ta définition pas mauvaise en soi mais incomplète. C'est vrai que la technique est pour beaucoup une capacité de savoir rapidement mettre en oeuvres des solutions effectives face à un problème nouveau.
Mais attention. On ne peut pas non plus négliger qu'il existe un kit de recettes qui servent de manière récurrente. Pour donner un exemple caricatural, si je dois bosser un concerto de Mozart tout nouveau, je vais normalement le déchiffrer à vue d'une traite parce que j'en connais 7 ou 8 à côté dont 2 ou 3 sur lesquels j'ai passé beaucoup de temps (dont aucun en si bémol :mrgreen: ). Ensuite commencera un long travail en profondeur, mais je partirai de beaucoup moins loin. Ca se passera plus ou moins comme ça aussi pour une paraphrase de Liszt que je découvrirais, c'est juste un arsenal de recettes différent, plus ou moins prêt à l'emploi car j'ai déjà eu affaire à tout ce que Liszt a dans son chapeau. On ne peut pas négliger l'existence d'un tas de trucs plus ou moins assimilés qui accélèrent l'apprentissage de nouvelles oeuvres.
Ma définition de la technique est plus idéaliste, dépasse la musique et encore plus le piano. Du coup elle n'aide pas beaucoup.
"La technique est le pont entre art et artisanat." Il s'agit de posséder les moyens artisanaux nécessaires pour donner vie à une conception artistique.

@nox.
Quand tu dis "Le but est de repérer des problèmes techniques auxquels tu n'aurais pas prêté attention dans un morceau" je diverge aussi. Je pars du principe que c'est mon oreille qui tranche cette question. Tant que mon oreille se plaint il reste des problèmes, donc si j'ai loupé quelque chose, c'est mon oreille qui est à blamer en premier lieu. Je ne pense pas que régler un problème précis comme une gamme que je ne sais pas jouer égale aujourd'hui fera de moi un meilleur pianiste en général. Je jouerais mieux cette gamme précise et éventuellement ses occurences dans les morceaux si le doigté est identique. Je ne pourrai pas généraliser ce travail (peut-être que c'est possible, mais je ne vois pas comment faire ça). Par contre, je découvre souvent des principes généraux dans mon travail de passages que je peux utiliser ailleurs et me font progresser de manière globale. Par exemple, lorsque j'oriente mon travail sur l'économie de moyens.
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Re: Hanon

Message par nox »

Okay a écrit : Concernant ton analyse de l'arpège crescendo, je ne suis pas du même avis. Ce n'est pas un palliatif technique. Si le compositeur le demande crescendo et que ça m'aide car je sens sa direction et que mon passage du pouce est plus fluide, ce sera un autre geste que si le compositeur le demande par exemple léger et égal. Un geste très différent même. Ce n'est pas du tout la même technique. Il n'y a pas de qui peut le plus peut le moins, il ne s'agit pas de compenser avec la pédale ou du crescendo. Il s'agit de connaitre différents gestes qui produisent des effets très différents pour ce même ensemble de note, et il n'existe pas pour moi de version "neutre-hors-contexte" de cet arpège qui pourrait se prêter à son exercice a priori.
A la réflexion, tu as raison sur ce point. C'était un mauvais exemple.
Okay a écrit : Quand tu dis "Le but est de repérer des problèmes techniques auxquels tu n'aurais pas prêté attention dans un morceau" je diverge aussi. Je pars du principe que c'est mon oreille qui tranche cette question. Tant que mon oreille se plaint il reste des problèmes, donc si j'ai loupé quelque chose, c'est mon oreille qui est à blamer en premier lieu.
Pas seulement ton oreille, mais aussi ton attention. L'oreille te donne les défauts, mais encore faut-il savoir quoi écouter justement.
Et peut-être le problème n'est-il même pas lié à l'oreille (cf l'exemple des octaves).
Modifié en dernier par nox le jeu. 15 mai, 2014 17:51, modifié 1 fois.
Serge
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Re: Hanon

Message par Serge »

Ba en fait si vous bossez la sonate de listz et que vous n'avez pas compris auparavant que le 5ème doigts dirige les déplacements dans l'exécution des octaves, y a un problème..
nox
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Re: Hanon

Message par nox »

On s'enfout de la sonate de Liszt, c'est un exemple...Mais merci d'être passé...
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