@BluePhoenix
On apprend à reconnaître les modes en jazz en les travaillant, de la même manière qu'on le fait avec les accords : en les écoutant, mais comme pour toutes les musiques, cela ne suffit pas, il faut en passer par du solfège et par de la pratique.
Concernant les impressions que me laissent chaque mode, j'aurais du mal à poser des mots là-dessus. D'ailleurs si je le pouvais, je crois que la musique perdrait une partie de son intérêt. Sa force réside je trouve dans le fait de pouvoir exprimer des choses comme on ne le peut pas autrement. Si des mots peuvent dire la même chose, c'est loupé !
Maintenant, niveau couleurs, je ne peux pas dire que je ne perçois jamais rien, mais ce n'est pas quelque chose de constant. Je ne joue pas un mode de ré en ré en constant à chaque fois que ça fait du jaune citron (ou autre, peu importe). Ce qui m'évoquera le plus de la couleur seront souvent des aspects harmoniques, notamment des accords, mais je ne me focalise pas là-dessus. C'est vague, on emploie beaucoup le terme de "couleur" mais c'est dans le sens "couleur sonore". C'est pour mettre un mot sur une sensation, une image sur de l'auditif plus que sur une réelle perception de couleur. Je sais que si j'utilise tel accord dans telle situation, tel effet va se produire, c'est plus dans ce sens là. D'ailleurs on peut être parfois surpris (et heureusement), parce que tel accord par dessus une basse différente donnera autre chose. Enfin je parle pour moi, certains semblent réellement percevoir fortement des couleurs avec des sons.
Pour ce qui est d'apprendre les modes, ça vient petit à petit mais c'est vrai qu'au début c'est du boulot. Zebestovol a expliqué tout ça très bien.
En jazz, encore plus lorsqu'on fait du piano, on est très vite confronté à l'harmonie. Dès le début, en fait.
Très vite on s'attaque au blues parce que c'est une forme simple avec peu d'accords, puis des enchaînements typiques type II-V-I. On apprend du coup à les identifier, à les décortiquer, à savoir ce qu'on peut faire dessus, dans tous les tons, etc.
Petite parenthèse d'ailleurs : cela commence à poser problème car ce sont des formules qui sonnent vieux et que plus grand monde n'a envie de jouer. Ce sont malheureusement les bases de l'enseignement du jazz un peu partout. Il n'est pas aisé de faire autrement et j'avoue en passer encore par là avec mes élèves, mais je me creuse de plus en plus la cervelle afin de voir comment je pourrais faire autrement pour ne pas leur infliger l'apprentissage de quelque chose que je cherche moi-même à éviter.

Pour ceux qui ont déjà un peu avancé, j'arrive à les orienter sur d'autres choses, mais je ne sais pas encore comment faire pour les débutants.
Ce qui aide bien à prendre conscience des modes, c'est de jouer par exemple l'accord qui lui est associé à la main gauche et de jouer le mode à la main droite.
Par exemple pour le mode de ré en ré : ré-fa-la-do à la main gauche (avec la septième, parce qu'on met des septièmes partout, c'est comme ça

) et monter ré-mi-fa-sol-la-si-do à la main droite (et redescendre). On n'est pas forcément obligé de monter jusqu'à la fondamentale. Ce n'est pas interdit non plus, évidemment, c'est juste qu'on aura une sensation peut-être un peu différente en ne le faisant pas. Après tout, le mode ne se termine pas par une sensible. Bref, on peut alterner les deux manières de faire.
Lorsqu'on s'attaque à la reprise d'un morceau de jazz, on commence souvent par cette étape. On décortique la grille, on l'analyse, on joue chaque accord et le mode associé (puis ensuite l'arpège, puis l'arpège 3ce-5te-7eme-9eme, par exemple) qui n'est pas toujours ultra évident selon la grille. Selon les contextes, on peut aussi faire des choix qui permettront de faire un mode plutôt qu'un autre sur tel accord, car la couleur sera différente (et qu'elle nous plait plus, c'est ce critère qui fait choix). Si on reprend l'accord ré-fa-la-do et qu'à la main droite on fait un mode de mi en mi, on a une couleur différente (alors qu'on est sur les mêmes notes que lorsqu'on faisait un mode de ré, c'est juste que leur "hiérarchie" a changé). On peut aussi essayer de changer une note, par exemple transformer le si de la main droite en si b, et voir ce que cela donne. Bref, les possibilités sont infinies (ou pas loin

).
La différence entre un fou et moi, c'est que je ne suis pas fou. Salvador Dali.