Contrôle t-on le son par la nature des attaques ?

mécanique, commerces/achat, facteurs...
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Patrice Scanavini
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Re: Contrôle t-on le son par la nature des attaques ?

Message par Patrice Scanavini »

L'intention du pianiste lors de son jeu à une très forte influence sur la perception de l'auditeur dans le présent
j'ai été témoin de choses hallucinantes à ce sujet
je pense que d'autres pros confirmeront
:wink:
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Wandarnok
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Re: Contrôle t-on le son par la nature des attaques ?

Message par Wandarnok »

La question est "S'agissant d'une seule note à la fois, peut on agir, changer de timbre (donc de son), à nuance égale en opérant uniquement à partir du clavier".
Pour moi, la réponse est plutôt non, amha.
Avec de plus l'énorme difficulté pratique de définir et de spécifier cette notion de "nuance égale".
8)
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Okay
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Re: Contrôle t-on le son par la nature des attaques ?

Message par Okay »

Sympa de voir ce fil ressuscité.

Définir la nuance n'est pas un problème du tout, c'est juste le volume sonore, la quantité de décibels... on peut la définir et la comparer pour 2 sons quelconques, que ce soit un trompettiste et chanteur, ou bien un trousseau de clés et une cuillère dans une tasse.

Je n'ai toujours pas la réponse à ma question et depuis, je me suis plutôt réfugié dans une recherche de nature artisanale qui a été très fructueuse (ça ressemble bien plus à des trucs de grand-mère qu'une thèse en physique des matériaux), sans essayer de comprendre ce qui se passe au delà de l'illusion sonore créée par l'artiste.

Cette perception artisanale, en tant que pianiste qui oublie son envie de comprendre les choses à un degré plus fondamental, c'est qu'il est possible d'obtenir une considérable variété de timbre au sein de la même nuance. Maintenant, j'ignore toujours s'il se trouve qu'on peut le faire sur une unique note, ou bien si on créé une illusion liée à la manière dont plusieurs notes se succèdent, où d'ailleurs la vitesse de remontée de la touche via les étouffoirs aura un rôle clé dans la perception du timbre. Mon intuition via le travail note par note - peut-être archi fausse - est qu'il est bel et bien possible de le faire sur une seule note.
Ma réflexion s'oriente surtout sur la non-équivalence de couples (force, vitesse) dans la même nuance, que je crois ressentir fortement en tant que pianiste (peut-être auto-illusionné mais il y a tout de même un truc qui se passe). Ca fait tout à fait écho à l'exemple du bloc de plomb donné par alex2612, que j'ai envie de poursuivre. Je ne suis pas spécialiste de physique des matériaux, et le peu que je sais en physique je l'ai appris dans mon coin, mais il me semble que les approximations faites en raisonnant sur l'énergie cinétique ou la quantité de mouvement commencent par faire l'approximation de supposer que l'impact du marteau sur la corde est un point matériel, une très rude approximation du système. Revenons au bloc de plomb, selon cette approximation on peut obtenir la même énergie pour une infinité de couples (masse, vitesse). Corrigez moi, mais il n'y a pas besoin d'un modèle de la NASA mais juste d'un minimum de bon sens pour comprendre que la déformation du sol ne peut pas être exactement la même si le bloc pèse 10 kilos ou une tonne, à énergie équivalente. Ne serait-ce que parce que la surface d'impact ne sera pas du tout la même et surtout car la collision n'est a priori pas parfaitement élastique (voire très inélastique).

Je pense qu'il faudrait creuser cette notion de collision inélastique, puisque pour que l'énergie de la collision entre la marteau et la corde soit conservée, il faut intégrer à la fois l’énergie cinétique de la corde mise en vibration et l'énergie sonore qui est dégagée. Sans compter comme le rappelle Christof que cette énergie sonore ne se propage pas dans un gaz parfait mais dans un piano avec une table d'harmonie !
Pour le dire encore autrement, je pense qu'un morceau de bois recouvert d'un feutre ayant une forme particulière et qui frappe une corde tendue est une collision beaucoup trop complexe (et qui fait déjà l'énorme approximation de négliger le milieu de propagation de l'onde sonore) pour espérer conclure quoi que ce soit sur la nature du timbre en raisonnant juste sur la quantité de mouvement d'un point matériel. Je n'arrive pas à me résoudre que quoi que le pianiste fasse, le seul paramètre suivant l'impact de la touche est la vitesse dudit marteau...
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BM607
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Re: Contrôle t-on le son par la nature des attaques ?

Message par BM607 »

Okay a écrit :.... Corrigez moi, mais il n'y a pas besoin d'un modèle de la NASA mais juste d'un minimum de bon sens pour comprendre que la déformation du sol ne peut pas être exactement la même si le bloc pèse 10 kilos ou une tonne, à énergie équivalente. Ne serait-ce que parce que la surface d'impact ne sera pas du tout la même et surtout car la collision n'est a priori pas parfaitement élastique (voire très inélastique).
Si l'impact est le même, c'est à dire si le matériau qui entre en contact avec le sol est identique (forme, dureté, ...) dans les deux cas, les deux chocs seront équivalents, que tu prennes n'importe quel paire (vitesse, masse) telle que m x v² soit constante.
C'est vrai uniquement en cas de solides indéformables par contre (et en excluant le domaine relativiste, donc pour des vitesses faibles), et bien sûr sans considérer les cas particuliers tels que les solides dont l'énergie de collision occasionne une transformation chimique directe ou indirecte (je ne parle donc pas des marteaux explosifs à charge creuse ;-) ).
Okay a écrit :Je pense qu'il faudrait creuser cette notion de collision inélastique, puisque pour que l'énergie (essentiellement cinétique, je pense que l'énergie potentielle est pour le coup vraiment négligeable) de la collision entre la marteau et la corde soit conservée, il faut intégrer à la fois l’énergie cinétique de la corde mise en vibration et l'énergie sonore qui est dégagée...
En toute rigueur il faut chiffrer les perte. par exemple par échauffement (très faible), ou par frottements.
Si tu veux modéliser, il faut aussi bien évidement prendre en compte les déformations (du feutre, du manche de marteau) qui se traduisent à la fin par des pertes de rendement.

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Okay
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Re: Contrôle t-on le son par la nature des attaques ?

Message par Okay »

BM607 a écrit : C'est vrai uniquement en cas de solides indéformables par contre
Le bloc de plomb sur le trottoir c'est le pot de fer contre le pot de terre a priori... C'est tout l'objet de ma remarque sur le type de collision, qui se centre seulement sur ce cas (les solides déformables)... le fait que la corde vibre suffit pour rentrer dans ce cadre non ?
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BM607
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Re: Contrôle t-on le son par la nature des attaques ?

Message par BM607 »

Je ne vois pas trop où tu veux aller, je réponds donc peut-être à côté de la plaque ; mais la corde est "le sol", donc si un marteau était indéformable et avait une surface de frappe constante sur tous les marteaux, qu'il pèse 1 g et arrive à 10 m/s ou qu'il pèse 100 g et arrive à 1 m/s c'est pareil. Le "sol" (ou le "La" ou le "Si"... ;-) ) va se déformer de la même manière.

EDIT
Par contre le marteau est déformable, au point d'impact (feutre) et le manche se déforme, et là évidement la vitesse est importante pour le raisonnement. De même et encore plus pour la corde.
Car au niveau de la déformation du fait d'une corde qui vibre c'est plus compliqué en fait (et donc de fait pour le feutre), il faut faire intervenir la fréquence propre de la corde (fréquence de la note) car il y a des phénomènes de mise en phase et opposition qui peuvent jouer beaucoup selon les registre, le marteau "accompagne" la vibration ou au contraire va ensuite aller "à l'encontre" du mouvement de la corde quand celle-ci revient. C'est vrai surtout dans les graves il me semble, voire les mediums, dans les aigus ça me semble avoir peu d'effet (à vérifier).

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Re: Contrôle t-on le son par la nature des attaques ?

Message par Okay »

Je pense que tu n'es pas du tout à côté de la plaque (ou bien on l'est tous les deux !). Oui, la corde c'est le "sol", tout à fait.
En fait à y réfléchir, je crois que mon hypothèse implicite est très très simple et revient à poser la question de la déformation du marteau... mais pas au niveau du manche ou de la structure. En fait le bloc de plomb n'est pas un parallélépipède mais un conique ! je m'explique...

Et là peut-être qu'un accordeur rodé à l'harmonisation peut m'éclairer. Ce que je supposerais alors, c'est que la nature du toucher du pianiste (toujours en simplifiant ça à des considérations de force et vitesse...) peut avoir une incidence sur la portion de la surface de la tête marteau qui frappe la corde. Je veux mettre l'accent sur le fait que le feutre recouvre une surface courbe et non plane. Si bien qu'en frappant la corde de différentes manières, cette surface courbe ne fait pas que frapper la corde de manière homogène, mais en quelque sorte "rentre dans la corde" plus ou moins en profondeur.
Du coup, on pourrait frapper la corde très vite de la "pointe" de la tête du marteau, ou moins vite mais avec une surface plus importante. Plus de notion de point de contact constant. Mais potentiellement même nuance car même énergie, mais timbre différent car surface de contact différente et nature de collision différente... finalement, piquer les marteaux arrondit le son et offre une plus grande palette de timbre au pianiste. Pourquoi donc ? Un marteau moins "dur" pourrait justement permettre plus de finesse en rentrant plus ou moins dans la corde... (en rendant justement la collision moins élastique).
Encore autrement dit, la surface de contact marteau/corde dépendrait du toucher. C'est ce point précis que j'aimerais voir confirmé ou démenti par un technicien. Fantaisiste ou réaliste ?
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Oupsi
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Re: Contrôle t-on le son par la nature des attaques ?

Message par Oupsi »

@Okay Mais n'as-tu pas des sensations tactiles qui te font penser que c'est effectivement ce qui arrive? Et, si c'est le cas, doutes-tu de la réalité de ces sensations?
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Okay
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Re: Contrôle t-on le son par la nature des attaques ?

Message par Okay »

Tout ce que je dis ne découle que de mes sensations tactiles... dont je ne doute pas. J'ai presque l'impression de frapper la corde directement comme un percussionniste qui dispose de baguettes faites de différents matériaux.
Mais je n'ai l'information que d'entrée (les mains) et de sortie (les oreilles). Ce qui se passe au milieu m'intéresse et je le maîtrise très très mal. Et je suppose pouvoir souffrir d'une totale illusion psycho-acoustique, en cultivant justement dans mon travail l'idée que jouer du piano n'est qu'une grande illusion faite de trucs, exactement comme le prestidigitateur qui oriente l'attention du public sur un élément insignifiant pendant qu'il retire une carte du jeu ou cache une pièce de monnaie. Les analogies sont puissantes dès qu'il s'agit des sensations, et il est si confortant d'y céder.
Ou alors je doute de mes sensations comme le passager d'un train en route, qui voit passer un autre train plus rapide à côté, et qui (sur une portion de rails non courbes) a la sensation très légitime que son train roule en marche arrière... sensation remise en cause par une intervention raisonnée...
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Oupsi
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Re: Contrôle t-on le son par la nature des attaques ?

Message par Oupsi »

ok. Alors ce que je ne comprends pas (mais je ne suis pas du tout scientifique alors pas rire hein) c'est pourquoi il faudrait chercher à comprendre en isolant ce qui se passe avec UN son. Parce que, que ce soit à l'entrée ou à la sortie, les conditions réelles sont toujours un flux sonore en interaction dans le temps, jamais une note seule. Et les sensations tactiles, correspondent-elles vraiment à UNE note, ou au passage d'une note à l'autre (je ne sais pas comment le dire, quelque chose entre les notes).
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Patrice Scanavini
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Re: Contrôle t-on le son par la nature des attaques ?

Message par Patrice Scanavini »

L'harmonisation d'une simple note de piano est l'application pratique des techniques visant a optimiser la rencontre ou le choc de 2 éléments élastiques dans le but de produire la vibration sonore la plus riche possible par un des deux (la corde)
On imagine très bien que ce n'est pas avec un point de frappe ramolli qui va rester trop longtemps en contact avec la corde que cette richesse harmonique se fera entendre.
Bon nombre de techniciens pratiquent plutôt ce que j'appellerai une mutilation par un piquage inadapté et parfois abusif du seul élément sur lequel il peuvent agir (le marteau) pensant que plus un marteau est élastique plus le son sera apprécié. C'est en partie vrai pour le débutant (même avancé) qui ne maitrisant pas sa palette dynamique sera très content de voir brider artificiellement par piquage la puissance sonore d'un instrument qu'il n'arrive pas a utiliser sans se casser les oreilles.
Mais il se trouve que c'est très souvent en concevant l'inverse (harmonisation visant a dynamiser l'instrument plutôt que de le niveler par le bas) que le pianiste retrouvera la palette sonore et dynamique qui séduira son toucher et son oreille.
Plus on évolue dans ce métier moins on pique...
Ce qui est bon pour le coude :wink:

Un exemple de ce que j'avance plus haut ci-dessous
https://youtu.be/Jgs-RWppy2E

Le pianiste perd le contrôle env 2mm avant l'impact mais avant cela toutes les nuances restent possibles
et d'autres choses aussi.
:wink:

NB cette video a été enregistrée 3 semaines après sans retouches intermédiaires.
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Re: Contrôle t-on le son par la nature des attaques ?

Message par pianojar »

C'est effectivement du très beau travail ! =D>
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floyer
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Re: Contrôle t-on le son par la nature des attaques ?

Message par floyer »

Un paramètre essentiel qui créé la variation du timbre est la variation de la dureté du marteau.

Voir Physics of the Piano ou https://nanohub.org/resources/18884/dow ... no-REU.pdf. P15

Plus la nuance est forte, plus le marteau est sollicité dans des zones dures, plus le contact est abrégé ce qui impacte le son en favorisant les harmoniques élevées. (P17 du même document). Si l'on analyse le feutre du marteau comme un simple ressort (force proportionnelle à l'enfoncement), on risque de ne pas aller loin dans l'analyse.
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Christof
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Re: Contrôle t-on le son par la nature des attaques ?

Message par Christof »

Okay a écrit :Et là peut-être qu'un accordeur rodé à l'harmonisation peut m'éclairer. Ce que je supposerais alors, c'est que la nature du toucher du pianiste (toujours en simplifiant ça à des considérations de force et vitesse...) peut avoir une incidence sur la portion de la surface de la tête marteau qui frappe la corde. Je veux mettre l'accent sur le fait que le feutre recouvre une surface courbe et non plane. Si bien qu'en frappant la corde de différentes manières, cette surface courbe ne fait pas que frapper la corde de manière homogène, mais en quelque sorte "rentre dans la corde" plus ou moins en profondeur.
Le modèle retenu dans l'article de Xavier Bouillon s'appuie sur des pré-requis, qui ont l'air "d'aller de soi" mais qui pour moi, sont un raccourci sans nom. Dire par exemple qu'"on peut modéliser le feutre par un ressort sans masse", que "seule une petite partie du feutre est impliquée dans la compression" (et alors l'assimiler à un point dans les équations et donc finalement dire que chaque partie de la zone de contact bouge toujours de la même façon),.... je demande à voir.
Idem pour l'effet torsion du marteau, qui est complètement mis de côté (quels sont les calculs qui ont permis de dire que c'était négligeable ?). Et quid des étouffoirs ensuite (mais là, ce n'est pas dans le problème de base) ?

C'est pour cela que j'ai parlé précédemment du problème inverse en physique.
Okay a écrit :Du coup, on pourrait frapper la corde très vite de la "pointe" de la tête du marteau, ou moins vite mais avec une surface plus importante. Plus de notion de point de contact constant. Mais potentiellement même nuance car même énergie, mais timbre différent car surface de contact différente et nature de collision différente...
Encore autrement dit, la surface de contact marteau/corde dépendrait du toucher. C'est ce point précis que j'aimerais voir confirmé ou démenti par un technicien. Fantaisiste ou réaliste ?
Pas fantaisiste à mon avis...

Sauf que la modélisation de cette affaire ne va pas du tout de soi...

Cela me rappelle une belle histoire, qui n'est pas vraiment en relation ici, mais qui pourrait s'apparenter à un espèce de conte:
celle de Paul Tapponnier qui a été l'un de mes professeurs, et à ma connaissance est le seul être au monde à avoir demandé à repasser sa thèse (qu'il avait obtenue précédemment haut la main) et sur le même sujet : "La Tectonique Intracontinentale en Europe alpine et en Asie". Dans sa première thèse, il expliquait notamment la distribution de système de grandes failles dû à la collision des deux plaques Inde-Asie d'une certaine façon. Cela avait l'air de tenir la route. Tellement bien d'ailleurs que personne dans le jury n'avait mis quoi que ce soit en doute. Bien sûr, certaines petites choses n'allaient pas vraiment, mais on considérait cela comme négligeable, en tout cas, "n'ayant pas forcément à voir avec ce qu'on étudiait"...
Un peu plus tard, et comme il s'intéressait à tout, ce scientifique a pu voir (je ne sais plus comment, peut-être en consultant des revues de métallurgie) le résultat de la poussée d'un poinçon rigide dans une plaque de métal, et constater ici comment se distribuaient les torsions... Et là Eurêka. En regardant les images satellites Landsat, on voyait que le réseau de failles générées par la collision des plaques Inde-Asie (et là de toutes les failles), le dessin qui apparaissait pouvait exactement s'apparenter à l'effet "poinçon rigide". Il a alors proposé, avec Peter Molnar, que l'essentiel de la déformation actuelle de la moitié Est de l’Asie, où se trouvent les plus grands systèmes de failles actives continentales (qui ont produit 20 séismes de magnitude supérieure à huit depuis 1892), résulte de la pénétration dans ce continent, à une vitesse voisine de 5 cm/an, du sous-continent indien, porté par la plaque du même nom. L'Inde, modélisée comme un poinçon rigide, s'est enfoncée de plus de 2500 km vers le nord, transmettant jusqu'en Sibérie et Chine, à 3000 km de l'Himalaya, des contraintes normales de l'ordre de 40 mégapascals. Ces résultats s'appuyaient donc sur une cartographie complète (images Landsat) des failles quaternaires de la région (~ 10 millions de km), sur les mécanismes au foyer d'une cinquantaine de séismes de magnitude > 5.6, et sur la théorie des charges limites (ou lignes de glissement) utilisée par les mécaniciens pour comprendre la déformation plastique des métaux, voisine de celles des roches à haute température en profondeur.

Ce qui a poussé Paul Taponnier à dire qu'il s'était trompé dans sa première thèse (pour la partie Inde-Asie) et qu'il fallait l'invalider... Et alors, il a repassé sa thèse... avec la nouvelle modélisation, qui fait ici appel au problème inverse et qui s'accorde vraiment avec ce qu'on voit en finale : la distribution du réseau de failles.
Modifié en dernier par Christof le mar. 03 janv., 2017 20:15, modifié 6 fois.
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Okay
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Re: Contrôle t-on le son par la nature des attaques ?

Message par Okay »

@Oupsi. Mais il n'y absolument aucune raison, répondre oui ou non à cette question ne devrait pas changer grand chose et sans doute rien du tout dans notre façon de jouer. En revanche, cela repousse la frontières de nos connaissances et celles de notre curiosité, ce qui me semble être pour de nombreuses interrogations une raison plus que largement suffisante de vouloir savoir :mrgreen:

Merci beaucoup Patrice pour ces explications. Je regarderai la vidéo ce soir.
Donc on se rapproche peut-être du pot aux roses avec mon histoire de collision inélastique... et si la manière de piquer les marteaux peut offrir une plus grande dynamique et une plus grande richesse de timbre (ce qui n'est pas un scoop a priori), on a surement isolé l'élément du système qui permettrait au pianiste de contrôler le timbre d'une note.
D'ailleurs, je suis sensible à ce problème de surpiquer les marteaux (même si la plupart du temps on rencontre la problématique contraire...). J'ai l'impression que c'est ce qui a été fait lorsqu'on tombe sur un instrument qui semble d'emblée assez flatteur et dont le son est "tout fait", mais dont le potentiel est en fait limité. Pour moi ça caractérise souvent par une sonorité assez chaude mais ayant le symptôme d'un haut médium impossible à timbrer au delà d'un certain point (au delà de ce point le son durcit), comme trop "rembourré".
En revanche, ce qui est très intéressant c'est un piano qui semble a priori plus capricieux et difficile à contrôler, mais néanmoins capable de tout restituer (je ne parle pas du piano capricieux car imprécis ou direct ou autre chose). Et là je pense que les marteaux sont nécessairement plus durs à mon avis. La plus grande dureté des marteaux permettrait justement un bien meilleur contrôle du timbre (exactement comme avoir les doigts à plat ou bien la première phalange ramenée, pour faire écho au récent fil sur les mauvaises habitudes).

Edit : Christof a posté entre-temps, je vais lire.
Modifié en dernier par Okay le mar. 03 janv., 2017 16:26, modifié 1 fois.
Wandarnok
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Re: Contrôle t-on le son par la nature des attaques ?

Message par Wandarnok »

Okay a écrit :... Maintenant, j'ignore toujours s'il se trouve qu'on peut le faire sur une unique note, ou bien si on créé une illusion liée à la manière dont plusieurs notes se succèdent, où d'ailleurs la vitesse de remontée de la touche via les étouffoirs aura un rôle clé dans la perception du timbre. Mon intuition via le travail note par note - peut-être archi fausse - est qu'il est bel et bien possible de le faire sur une seule note.
Mon intuition est toujours plutot non. Je pense que l'artiste n'y peut rien, c'est du à la mécanique déterministe du piano.
Okay a écrit :...
Ma réflexion s'oriente surtout sur la non-équivalence de couples (force, vitesse) dans la même nuance, que je crois ressentir fortement en tant que pianiste (peut-être auto-illusionné mais il y a tout de même un truc qui se passe). Ca fait tout à fait écho à l'exemple du bloc de plomb donné par alex2612, que j'ai envie de poursuivre. Je ne suis pas spécialiste de physique des matériaux, et le peu que je sais en physique je l'ai appris dans mon coin, mais il me semble que les approximations faites en raisonnant sur l'énergie cinétique ou la quantité de mouvement commencent par faire l'approximation de supposer que l'impact du marteau sur la corde est un point matériel, une très rude approximation du système. Revenons au bloc de plomb, selon cette approximation on peut obtenir la même énergie pour une infinité de couples (masse, vitesse). Corrigez moi, mais il n'y a pas besoin d'un modèle de la NASA mais juste d'un minimum de bon sens pour comprendre que la déformation du sol ne peut pas être exactement la même si le bloc pèse 10 kilos ou une tonne, à énergie équivalente. Ne serait-ce que parce que la surface d'impact ne sera pas du tout la même et surtout car la collision n'est a priori pas parfaitement élastique (voire très inélastique).
Je pense qu'il faudrait creuser cette notion de collision inélastique, puisque pour que l'énergie de la collision entre la marteau et la corde soit conservée, il faut intégrer à la fois l’énergie cinétique de la corde mise en vibration et l'énergie sonore qui est dégagée. Sans compter comme le rappelle Christof que cette énergie sonore ne se propage pas dans un gaz parfait mais dans un piano avec une table d'harmonie !
Pour le dire encore autrement, je pense qu'un morceau de bois recouvert d'un feutre ayant une forme particulière et qui frappe une corde tendue est une collision beaucoup trop complexe (et qui fait déjà l'énorme approximation de négliger le milieu de propagation de l'onde sonore) pour espérer conclure quoi que ce soit sur la nature du timbre en raisonnant juste sur la quantité de mouvement d'un point matériel. Je n'arrive pas à me résoudre que quoi que le pianiste fasse, le seul paramètre suivant l'impact de la touche est la vitesse dudit marteau...
Le marteau, et toute la mécanique d'ailleurs, a une masse constante. Comme je l'ai dit plus haut, il ne reste que la vitesse de la touche, ou celle de l'impact du marteau (en un point ou en une surface, ça ne joue pas, c'est constant pour une vitesse d'arrivée donnée) comme variable.
D'autre part, quand on parle de table d'harmonie, etc, ça ne joue pas non plus, on a aucune prise là dessus car c'est après le départ du son (toujours en parlant d'une seule note).
Par contre, effectivement, il reste:
_le fait de jouer plusieurs notes, et là évidemment tout change, et la table joue son rôle
_les étouffoirs, le contrôle de leur descente via le relevé de la touche, modifie l'extinction du son.
Tout l'art du pianiste!
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Re: Contrôle t-on le son par la nature des attaques ?

Message par Okay »

Wandarnok, tu oublies la variable que je tente de mettre à jour, et qui pourrait s'inscrire dans un cadre mécanique parfaitement déterministe (mais très complexe). Je suis d'accord qu'il ne faut pas minimiser le rôle des etouffoirs et de jouer plusieurs notes, et des pédales, c'est de là que viennent les illusions dont je parlais.
Mais quand même... comment différencier deux instruments (et deux techniciens !) et leur capacité relative à produire une grande richesse de timbre ? A mon avis, le degré d’élasticité de la collision entre le marteau et la corde est le facteur numéro 1 de la perception du timbre d'un piano. Je ne demande qu'à être contredit, à ce stade il s'agit surtout d'une intuition. Mais pour ça, il faudra sûrement aussi démontrer que l'harmonisation c'est de l'arnaque...
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Re: Contrôle t-on le son par la nature des attaques ?

Message par Wandarnok »

Okay a écrit :...Encore autrement dit, la surface de contact marteau/corde dépendrait du toucher....
C'est quoi le "toucher" pour la question que tu poses?
L'action de la touche? Un staccato fait intervenir la remontée ultra rapide par exemple.
Si on ne s'occupe que des sons possibles par la seule décente (la touche reste au fond), et bien pour une vitesse donnée de touche transmise à la pièce mécanique suivante, la vitesse, la forme, le point d'impact, tout ce qu'on voudra, du marteau sera la même. Y a bijection.
Sauf si la mécanique s'use ou change pendant ce laps de temps, ou entre deux comparaisons de la même action (usure du marteau, du feutre etc...).
Même action, même effets.
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Re: Contrôle t-on le son par la nature des attaques ?

Message par Wandarnok »

Okay a écrit :Wandarnok, tu oublies la variable que je tente de mettre à jour, et qui pourrait s'inscrire dans un cadre mécanique parfaitement déterministe (mais très complexe). Je suis d'accord qu'il ne faut pas minimiser le rôle des etouffoirs et de jouer plusieurs notes, et des pédales, c'est de là que viennent les illusions dont je parlais.
Mais quand même... comment différencier deux instruments (et deux techniciens !) et leur capacité relative à produire une grande richesse de timbre ? A mon avis, le degré d’élasticité de la collision entre le marteau et la corde est le facteur numéro 1 de la perception du timbre d'un piano. Je ne demande qu'à être contredit, à ce stade il s'agit surtout d'une intuition. Mais pour ça, il faudra sûrement aussi démontrer que l'harmonisation c'est de l'arnaque...
+1, bien sur.
Mais pour un piano donné, si personne n'y touche pendant quelques minutes, tes beaux timbres resteront les mêmes pour une même action sur le clavier.
Mais la physiologie du pianiste, ses perceptions, ses illusions, mêmes et surtout sonores, lui donneront l'impression qu'il peut modeler une infinité de sons et de timbres (pour les meilleurs pianistes :wink: ). Alors qu'il aura en fait modifier ses actions, parfois de façon quasi imperceptible au profane.
Et comme en plus, le cas "une seule" note n'a pratiquement aucune valeur pratique, dans la vraie vie du pianiste, il conserve je pense ce pouvoir de "modeler" le son au travers du toucher.
8)
Modifié en dernier par Wandarnok le mar. 03 janv., 2017 17:03, modifié 1 fois.
Wandarnok
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Re: Contrôle t-on le son par la nature des attaques ?

Message par Wandarnok »

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